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Critiques de Tiffany Tavernier (343)
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Roissy

Après la lecture du roman de Tiffany Tavernier, Roissy ne sera jamais plus pour moi seulement synonyme de voyages au long cours, d'aventures, de liberté...

C'est un tout autre endroit que nous fait découvrir l'auteure : un lieu étrange, déroutant, semblable à ceux qui hantent les mondes de la SF. Un dédale gigantesque, où chiffres et lettres, DGVAL, T2E, T2F... sont les seuls fils d'Ariane auxquels peuvent se raccrocher les quelque quatre-vingt dix millions de passagers annuels, un lieu anonyme où les "opérationnels", n'ont d'identité que badgée.

Un monstre énorme, dans le ventre duquel vivent aussi les "indécelables", celles et ceux qui pour échapper à la violence de la rue, sont venu(e)s y chercher un dernier refuge ou un tombeau... Pour tous ces naufragés de la vie, pas de destinations exotiques, paradisiaques, pas d'hôtels de luxe du style Sheraton, pas de grands oiseaux blancs mais les parkings souterrains -1 ou -2. C'est là qu'ils vivent avec leur "tribu", tissée au hasard des rencontres ou des appartenances ethniques.

C'est dans ce lieu qu'a échoué notre héroïne, Anna, c'est le prénom qu'elle s'est donné. Avant ? Elle ne sait plus et s'invente des vies multiples au gré des fugitives rencontres avec d'autres voyageurs. Tout comme ses compagnons d'infortune, Vlad, Josias, Liam, Joséphine, elle a appris toutes les techniques de survie: ne pas se balader avec des sacs plastiques, marcher toujours et encore pour ne pas se faire repérer par les caméras de surveillance ou les mille sept cents policiers chargés de la sécurité. Tous ces détails sont criants de vérité et m'ont fait découvrir un univers qui m'a laissée bouche bée. Univers très impressionnant tel qu'il est décrit par Anna, jeune femme à la mémoire en friche mais dotée en dépit de sa souffrance d'une capacité de survie à toute épreuve. Elle relate avec minutie et précision et aussi sans concessions tous les détails de sa nouvelle vie. Tout aussi crédibles sont les personnages qui gravitent autour d'elle.

J'ai vraiment senti à la lecture de nombreux passages combien Tiffany Tavernier s'était documentée et imprégnée des ambiances, des rencontres dans ce lieu où elle a passé de nombreux mois. Un vrai travail d'écrivain-reporter -ce qu'elle n'est pas- mais son empathie, son sens aigu de l'observation pourraient le laisser croire.

C'est d'ailleurs ce qui dans le roman m'a le plus accrochée. J'ai été moins convaincue par la part plus fictionnelle, notamment lorsqu'elle aborde l'idylle entre Anna et Luc, un homme désespéré par la disparition de sa compagne lors du crash du vol Paris-Rio.

Mais hormis ce bémol, ce roman m'a marquée par son originalité, la qualité et la variété de son écriture , tantôt précise , minutieuse, tantôt beaucoup plus débridée ou poétique. Dommage que la fin soit un peu trop précipitée et attendue.
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En vérité, Alice

C’était une bonne idée, ce choix de lecture avant le week-end pascal.

J’ai ainsi pu faire connaissance avec toute une équipe de saints sympathiques (dont saint Expédit !) . Mais j’ai surtout découvert l’extraordinaire complexité de la canonisation et donc l’existence du promotorat des causes des saints !

Mais commençons par Alice, qui tient cette histoire de bout en bout, Alice imaginée par Tiffany Tavernier, la fille de Bertrand.

Alice est née au Guatemala et a vécu une enfance sauvage et radieuse grâce à Ida, une sorte de nounou chamane. À l’âge de dix ans, Alice, sa petite soeur et ses parents rentrent en France. Alice est percutée de plein fouet par des exigences sociales et scolaires qui la poussent vers une introversion et une timidité sévère.

Malgré l’effarement total de son entourage, Alice va tout lâcher pour vivre sous l’emprise d’un compagnon pervers qu’elle veut sauver malgré lui. La situation financière du couple est rapidement désastreuse et elle est sommée de trouver du travail. Cela tombe finalement assez bien : elle est recrutée par le diocèse de Paris pour aider l’évêque à la section « canonisation ». Elle va être entourée de collègues d’une bienveillance radieuse dont une certaine Anne-So, mariée à un militaire parti six mois de l’année, mère de sept enfants dont deux ayant la maladie de Charcot…

Grâce à cette fine équipe et à la découverte de la vie des aspirants saints, Alice ira au bout de son destin. Le roman s’offre alors un petit décalage chronique pour une dernière partie tout à fait étonnante.



Il y a peut-être deux façons de lire ce livre étrange, d’une luminosité blafarde :

-Il s’agit d’un millefeuille narratif qui pour la énième fois remet sur le tapis la question de l’emprise. Beaucoup moins pédagogique que « La deuxième femme » de Louise Mey, il met l’accent sur le masochisme féminin dont la déconstruction passerait par la sororité et la spiritualité.

En parallèle on découvre donc tout le dispositif d’instruction des candidatures à la canonisation, d’une complexité sidérante. Morceau choisi:

«… ok, alors accrochez-vous parce que c'est loin d'être fini et je n'ai plus que cinq minutes. Une fois ces deux feux verts obtenus, l'archevêque publie, d'un côté, le décret d'ouverture de la cause, de l'autre, un édit dans le Journal officiel, soit, pour vous, à Paris, le journal Paris Notre-Dame, demandant au peuple d'apporter des témoignages en faveur de cette cause. Est-ce assez clair ?

Ça l'est.

Pendant ce temps, le postulateur ou la postulatrice se met en quête de trouver trois historiens prêts à enquêter de façon bénévole sur la vie de ce futur possible saint.

Une tâche bien difficile, sachant qu'aucun de ces historiens n'a le droit de publier le fruit de ses recherches.

Pourquoi trois historiens, pourquoi pas juste un seul ?

Parce qu'ainsi le veut la procédure : trois historiens, trois axes de recherche différents. Le premier sur tout ce qui a trait à la vie familiale de notre serviteur, le deuxième, sur tout ce qui a trait à sa vie sociale, le troisième, sur tout ce qui touche à sa vie spirituelle. En parallèle, l'archevêque ou son représentant, le délégué épiscopal, aura nommé dans le plus grand secret deux censeurs théologiens. Ces deux-là devront vérifier si notre serviteur a bel et bien respecté, dans ses dires et dans ses ouvrages, le dogme catholique romain… »etc.

Enfin l’histoire d’Alice se déploie, émaillée de monologues numérotés et insérés dans le texte avec des bouts de haïkus, plus ou moins sibyllins, plus ou moins mystiques.



-Il s’agit d’un livre sur l’avénement de sainte Alice.

Et c’est une toute autre grille de lecture ! Ce qui nous est proposé n’est ni plus ni moins qu’un manuel de sainteté car Alice finira par cocher toutes les cases. On vous propose donc une lecture chrétienne, voir orthodoxe dont le titre, EN VÉRITÉ ALICE, annonce la couleur !



À vous de voir, bien sûr…

Allez, je vais conclure sur deux histoires de saints , relatées par Tiffany Tavernier:



VIE DU SERVITEUR DE DIEU TAÏSSIR TATIOS - 1943-1956

Dès son plus jeune âge, Taïssir, dit « Toussi », atteint de myopathie, endure de grandes souffrances. Incapable de marcher, il passe le plus clair de ses journées en chaise roulante sur son balcon, au Caire, en profite pour discuter avec les enfants pauvres du quartier et leur venir en aide. Aux nombreuses personnes de toute religion avec lesquelles il aimait parler de sa foi, il disait : « La meilleure preuve de l'existence de Dieu, c'est ma joie. » Il meurt à l'âge de treize ans.



VIE ET MIRACLE DE SAINT DOMINIQUE SALVIO - 1842-1857

Dès l’âge de cinq ans, il sert la messe et, tout au long de sa courte vie, il confiera souvent que Dieu le veut saint.

À l'âge de quinze ans, il meurt d'un mal de poitrine en prononçant ces mots : « Oh ! comme c'est beau, ce que je vois ! » Il est le patron des adolescents.



Avant Pâques, avouez que c’était le livre idéal.





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L'ami

Mon voisin est un violeur et un assassin



Tiffany Tavernier a imaginé la déflagration au sein d’un couple quand il apprend que son voisin est un tueur en série. De la sidération à la colère, le choc va avoir de lourdes conséquences.



C'est un quartier résidentiel comme tant d'autres, des villas avec jardin dans un coin tranquille. Tellement tranquille qu'on imagine sans peine la stupéfaction de Thierry lorsqu'il voit débarquer une ambulance, une escouade de gendarmes et le GIGN. Les troupes vont encercler la maison de son voisin et le prier de s'allonger chez lui sur le tapis avec Élisabeth, son épouse, «le temps qu'il faudra». Et alors qu’ils se perdent en conjectures sur le péril qui menace Guy et Chantal, ces derniers sont emmenés manu militari. Mais pour l’heure, on ne leur donnera aucune explication, le temps de fouiller le périmètre autour de la maison et le cabanon où Guy entrepose ses outils. Outils qu'il lui arrive de prêter à son voisin et que la police scientifique va étudier.

C'est n'est que le lendemain, avec l'arrivée d'une journaliste, qu'ils vont apprendre la terrible nouvelle. Guy et Chantal Delric sont des criminels, recherchés pour des viols et des assassinats. La télévision va en donner la liste:

REINE, 20 ANS, DISPARUE IL Y A SEPT ANS.

VIRGINIE, 14 ANS, DISPARUE IL Y A SIX ANS.

ZOÉ, 22 ANS, DISPARUE IL Y A QUATRE ANS.

MARGARITA, 19 ANS, DISPARUE IL Y A TROIS ANS.

SELIMA, 13 ANS, DISPARUE IL Y A DEUX ANS.

MARIE-ANNE, 13 ANS, DISPARUE IL Y A DIX-NEUF MOIS.

VIOLINE, 15 ANS, DISPARUE IL Y A DEUX MOIS.

ANNE-CÉCILE, 14 ANS, DISPARUE DEPUIS QUATRE JOURS, SAUVÉE IN EXTREMIS, AUJOURD'HUI DANS LE COMA.

C'est par hasard qu'un couple de randonneurs perdus en pleine forêt est tombé sur Guy au moment où il s'apprêtait à poignarder Anne-Cécile et a pu donner l’alerte. Après identification, la police a pu procéder à son arrestation ainsi qu’à celle de Chantal.

Commence alors pour Thierry et Lisa une terrible épreuve, dont il ne mesurent pas encore les conséquences. Ils étaient les amis de ce couple infernal, partageaient régulièrement avec eux un apéro, s'invitaient pour un barbecue ou un dîner et se prêtaient des outils. Jamais, ils ne se sont doutés de ce qui se déroulait à quelques mètres de là. Ils n'ont rien vu, mais doivent détailler leur emploi pour tenter d’éclairer les enquêteurs. Ils doivent aussi résister à la meute des journalistes qui, faute de collaboration, vont se faire de plus en plus insistants.

Lisa va craquer la première et part chez sa sœur pour prendre du recul.

Thierry s'accroche à son quotidien, même s'il remarque qu'au travail on le regarde différemment. Les séances chez le psy ne vont pas vraiment l'aider, sinon à constater que dorénavant tout le monde le fuit. Il est seul avec sa colère, avec sa peine.

Tiffany Tavernier réussit avec beaucoup de finesse à analyser la psychologie de ces victimes collatérales pour lesquelles plus rien ne sera comme avant. Elle pousse aussi fort habilement le lecteur à se mettre à la place de ce couple sans histoires, à le laisser imaginer comment il aurait réagi, en lui livrant des clés troublantes. Car, on a beau se dire que «cela ne nous regarde pas», les autres vous entraînent dans une spirale infernale qu’il est difficile d’arrêter. Comme le disait Voltaire «Mon Dieu, gardez-moi de mes amis!»




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L'ami

Trouver la maison de ses voisins entourée de rubalise et encerclée par le GIGN est sans aucun doute traumatisant. C'est ce qui arrive à Thierry et sa femme Élisabeth. Il s'avère que ce voisin est un pédophile et tueur. Le fait en lui-même est évidemment terrible mais que ce soit son voisin ami est insupportable.

Tiffany Tavernier nous fait vivre dans la tête de Thierry qui n'arrive pas à faire face à ce drame, qu'il vit comme une véritable trahison. On revit alors des faits, qui paraissent être des anecdotes ce qui perturbe, dans un premier temps.

Sentiment de trahison mais aussi colère de n'avoir rien vu, de s'être fait duper. Nous sommes, nous, lecteurs conviés à poursuivre avec Thierry son cheminement intérieur. Nous entrons alors dans les méandres de l'âme humaine.

C'est un roman bien écrit, l'angle par lequel l'auteur choisit d'aborder l'histoire est intéressant,mais je ne suis pas enthousiaste. Cela provient sans doute de la personnalité de Thierry qui m'a agacée à plusieurs reprises même s'il se rattrape à la fin ...
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Roissy

Que dire après tant de critiques?



Simplement c’est l’histoire d’une femme amnésique , à la recherche de son passé :

Qui , là- bas, pour y croire à sa mémoire perdue , qui pour la protéger dans ce lieu grouillant de monde?

Synonyme d’aventures , de voyage,,d’évasion, d’exotisme , d’attente et d’émotions ——cet Aéroport de Roissy —-lieu fascinant dont elle arpente les vastes couloirs en traînant sa valise, où elle marche, n’arrête pas de marcher pour donner le change , allant d’un terminal à l’autre, là où des milliers de personnes inconnues s’envolent vers des destinations lointaines : panneaux, comptoirs, banquettes, escalators, tapis roulants, jusqu’au monde d’en bas , les entrailles de Roissy, à la pénombre oppressante, sous - sols et galeries souterraines .....

Qui est - elle ?

Où va t- elle ?

Elle rencontre , côtoie d’autres personnes, aux vies bousculées , s’invente au hasard , c’est selon, des destinations et des identités différentes, engage des conversations, s’attache à ces êtres croisés au hasard , fait semblant de s’envoler , traverse des rampes, sous la voûte du Terminal 2E, remonte, repart , cherche des ascenseurs, faisant attention de ne pas se faire prendre par les vigiles . ...



Une femme sans nom : émouvante , éternelle voyageuse sans voyage , une narratrice nous embarque au cœur de cette balade incessante pour passer du temps, inlassablement , échapper un temps à son désarroi , survivre comme elle le peut ,..

Une «  invisible » , «  indécelable » se fondant dans la masse des clandestins et des laissés - pour compte au sein de l’immense aérogare , qui nous laisse voir l’envers du décor.

Les descriptions minutieuses ressemblent à des prises de vues , des clichés cinématographiques qui font découvrir au lecteur ce trou béant , synonyme de l’immensité du monde —- de la tour de contrôle aux combles.—-

Un lieu hors du temps et de l’espace rythmé par des horaires vers des destinations lointaines .

C’est à la fois un superbe portrait de femme blessée , fourbue, déguisée en passagère,—-à la fois immobile et en mouvement—-rendue à elle même par la foule des émotions qui la traversent, et les bribes de souvenirs qui la tirent en arrière, l’épouvantent et l’assaillent ...

Un ouvrage captivant, déroutant, pétri d’émotions , profond , qui ne nous laisse pas à la porte d’embarquement , qui interroge sur la capacité d’un être à revenir à soi et au monde .

«  Sous le ciel éclatant , elle y enfonce ses pas .Laissant advenir le monde. L’engendrant .

JE. L’immensité du Monde ... »

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L'ami

Ce n'est pas forcément une bonne idée de commencer la lecture d'un bouquin à 23h "juste pour voir", et surtout quand on ne peut plus le lâcher: réveil difficile!

Voilà un couple qui habite la campagne avec une seule maison pour voisins.

Ces deux couples se lient d'amitié, on partage les outils, les femmes échangent des confidences.

Jusqu'à ce qu'un petit matin le GIGN vienne arrêter le couple voisin . Pas sympa d'en dire plus.

Sauf qu'une bonne moitié du roman est un vrai thriller. La seconde partie est plutôt celle du questionnement, du pourquoi , du comment et obligatoirement une propre mise en cause, "je n'ai rien vu venir, rien entendu, j'ai oublié de regarder ma femme, je vis comme un robot". D'où remise en question.

Ce n'est certes pas le livre de l'année, mais c'est une belle trouvaille des Edts S.Wespieser.
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L'ami

Thierry, homme ordinaire de niveau social modeste (un ouvrier qui répare des machines dysfonctionnelles) vit sans trop se poser de questions avec sa femme Élisabeth dans une maison isolée en pleine forêt où seul un couple de voisins, Guy et Chantal leur tiennent compagnie.



Un samedi matin, a priori normal, il voit la maison de ses voisins , personnes a priori sans histoire encerclée par des bataillons de policiers armés qui ne sont visiblement pas là pour rigoler...



Thierry essaie d'interroger le commissaire chargé de cette intervention, mais se heurte très vite à un mur..



Le lendemain, c'est une armée de journalistes qui veulent avoir l'avis de voisin de Thierrysur ce qui s'est passé dans la maison d'â coté ..



Mais quelles atrocités ont bien pu faire Chantal et Guy et surtout comment Thierry et sa copine, qui partageaient pas mal de complicité avec eux, n'ont ils rien vu venir?



Comme on n'est dans un roman de Tiffany Tavernier et pas dans un polar de bas étage, la réponse à la première question n'est finalement pas si essentielle et sera donné assez rapidement dans l'intrigue ..



Sans quand même trop spoiler, disons que Guy a bien été coupables de crimes horribles (si on vous parle des Fourniret ca vous dit quelque chose?) , mais que "L'ami "s'attarde beaucoup plus aux impacts que cette révélation peut avoir pour Thierry, personnalité lamba en apparence mais incroyablement tourmentée à l'intérieur, que cette découverte va perturber à un point inimaginable.



Thierry va assister au délitement de tous ses repères affectifs et le lecteur y assiste, impuissant et compassionnel.



Tiffany Tavernier, qu'on connait un petit peu depuis quelques années , spécialiste des âmes tourmentées comme elle l'avait démontré avec le très beau Roissy continue de creuser sous le vernis des apparences et cette solitude qui étreint chacun de nous.



Dans l'ami , elle nous dévoile avec énormément de brio le cheminement intérieur d'un homme qui s'effondre et va s'efforcer de renaitre à la vie, même si cette reconstruction ne se fera pas sans heurts ..



Avec son roman composé de deux parties bien distinctes ( la première autour de l'incompréhension et la seconde autour de l'introspection de Thierry) , Tiffany Tavernier déjoue les attentes du début de son roman et dresse le portrait fin et sensible d'un homme pas si ordinaire que cela..



.Si on excepte les dernières pages où des personnages un peu bigger than life ( un ermite, une prostituée blessée par la vie) font une apparition superflue, l'Ami est une lecture étonnante , touchante *et fascinante, plongée dans les abymes d'un homme qui tombe et qui va remonter devant nos yeux admiratifs...
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Roissy

Elle tourne dans Roissy. Dissimulant son absence de billet d’avion, de revenu, de logement, et de mémoire, dans un parcours sinueux entre terminaux et hall d’accueil, se mêlant aux passagers arrivant de Barcelone, ou suivant l’embarquement pour Dublin. Elle discute avec les uns et les autres, passagers ou personnel des bars, des boutiques et des restos de Roissy. Elle s’invente des vies et finit par dormir dans les sous-sols avec Vlad. Elle n’est qu’une de ces SDF qui ont trouvé dans l’aéroport parisien un lieu favorable : un lieu chauffé, avec possibilité de trouver de quoi manger, de quoi survivre… tant que la sécurité ne les déloge pas. Alors il faut jouer profil bas. Elle, c’est Anna, enfin c’est ce qu’elle dit. Elle n’en sait plus rien, son passé ne lui revient que par bribes. Des lambeaux de souvenirs anxiogènes.

Anna, c’est le nom qu’elle a inventé lorsqu’elle a rencontré Luc. Un veuf éploré, dont la femme est morte dans le crash du vol Rio-Paris, et qui revient chaque jour à la porte d’arrivée du vol, guettant un fantôme, espérant toujours, incapable de tourner la page. Deux désespoirs, deux incompris.



Le livre commence avec une série de scénettes d’aéroport. Des contacts inattendus, des discussions, des confidences, entre des passagers, qui dans un tout autre contexte s’ignoreraient. Un départ prometteur.

C’est vrai, les aéroports brassent les populations. Ils sont comme des portes ouvertes sur le monde. Des croisements de cultures.

Rapidement, le lecteur se demande où Tiffany Tavernier veut en venir en nous rejouant The terminal, ce film de Spielberg, où un homme a vécu des années coincé en zone internationale. La présence des SDF à Roissy est un fait et elle nous en montre en partie l’univers.

Mais le livre bascule dans la quête d’un amour qui se cherche entre la SDF amnésique et le veuf inconsolable. Avec beaucoup de complications, d’hésitations chez une Anna très perturbée.



Ce récit biscornu plaît par moments, puis déroute deux pages plus loin. Tout cela part dans une introspection lourde, difficile à suivre. A l’atterrissage, reste une interrogation : que penser de cet ovni littéraire ? A compter les plus et les moins, je finirais par : moyen, très moyen.
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Roissy

Roissy comme je ne l’avais jamais imaginé et où je ne m’étais jamais vu en pauvre « maillot » barbotant, au milieu des autres, dans une « baignoire ».

Ca va être difficile, la prochaine fois, de ne pas scruter la foule à la recherche d’une Anna, toujours en partance mais jamais partante. Je le ferai à mon prochain départ, ça m’aidera à patienter, c’est certain. A l’arrivée, vous savez bien, on n’a jamais le temps, une correspondance, une voiture à louer, un taxi à prendre, il faut partir le plus vite possible. Mais au départ, le temps on l’a, surtout quand notre vol est un peu retardé. A l’arrivée, après les contrôles, en face de vous, sur votre chemin parfois, il y a ceux qui attendent comme Luc. Luc il patiente à l’arrivée du Paris-Rio. Je me souviens une fois, un peu avant Noël à Montréal, j’attendais ma femme. Il y avait beaucoup de monde, du bruit, de l’agitation et puis quand ils sont enfin arrivés (c’est toujours trop long l’attente quand on attend quelqu’un qu’on aime) il y a eu une petite bousculade, quelques uns avaient des appareils photos (ça date un peu, aucun smartphone, désolé) et essayaient de passer au premier rang. Elle est arrivée, m’a souri et, juste derrière elle, les flashes ont crépité pour un autre passager. Il parait que c’était Garou, le chanteur mais moi je n’attendais qu’elle. Pourquoi je vous dis ça ? Parce que, comme la femme de Luc, aujourd’hui elle n’est plus là, disparue non pas dans un avion au-dessus de l’Atlantique, mais beaucoup plus banalement dans une chambre d’hôpital.

Alors forcément, la lecture de ce roman qui raconte la rencontre improbable de cette SDF amnésique et de ce Luc qui vient attendre sa femme, tous les jours à l’arrivée du Rio-Paris, ça m’interpelle. Elle a perdu la mémoire et tente d’en retrouver des fragments alors qu’il voudrait tant pouvoir oublier que le vol dans lequel son amour avait pris place n’arrivera jamais.

Le malheur de l’un réussira-t-il à apprivoiser la mémoire de l’autre ? Qui sait ce que l’amour peut provoquer ?

C’est fort et percutant car écrit sobrement. Les phrases aussi courtes que les chapitres s’enchainent comme les écrans se mettent à jour dans l’aéroport. On apprend sidéré, au fil du récit on comprend pourquoi, que c’est un bon endroit pour un sans domicile fixe. Les anecdotes et les commentaires des professionnels enrichissent la narration à l’exemple de la première phrase de mon compte-rendu dont je vous laisse découvrir la signification.

Une bonne histoire d’amour dans un bon documentaire pour le prix d’un vol « low cost », que demander de plus ? Prenez un aller simple et si vous voulez apercevoir Anna, laissez trainer votre valise, pas trop longtemps quand même, car la sécurité veille.

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En vérité, Alice

Alice vit depuis 5 ans sous l'emprise d'un compagnon exigeant, peu compréhensif et manipulateur. Elle perd peu à peu sa confiance en elle et n'a de cesse que de lui obéir, s'oubliant totalement. Après avoir essayé de répondre à ses injonctions parfois contradictoires en ce qui concerne un travail, elle finit par trouver par hasard un emploi dans une association diocésaine à Paris : l’étude des candidatures à la canonisation. Je me suis pris d'empathie face à cette jeune femme attachante qui fait toujours de son mieux dans sa vie quitte à se perdre. Un très bon roman.
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Roissy

La première fois que j'ai entendu parler de Tiffany Tavernier, la fille d'un des plus grands réalisateurs français c'était en 2012 lorsque j'ai été membre d'un jury de cinéma en sa compagnie.



J'ai eu notamment l'occasion de faire deux trajet en voiture en sa compagnie, et j'ai donc eu l'occasion d'en savoir plus sur celle qui est scénariste de deux des films de son père (Holly Lola et Ca commence aujourd'hui, tous deux vus et approuvés, ouf!!), et également romancière ayant publié plusieurs romans et qu'elle présente aussi des ateliers d'écriture.



La rencontre fut très enrichissante elle m'avait gentiment dédicacé à la fin de ces quatre mémorables jours un de ses excellents romans "l'homme Blanc", que je garde précieusement dans ma bibliothèque, et depuis, je n'avais plus eu trop de ses nouvelles avant de voir qu'elle refaisait l'actualité de la rentrée littéraire de cette année avec son nouveau roman Roissy., du nom du très célèbre aéroport parisien Charles-de-Gaulle



Dans ce huis clos très cinématographique ( le roman de Tiffany fait penser à de nombreux films tels que Tombés du ciel de Philippe Lioret ou Le terminal de Steven Spielberg), l'auteur s'interesse à une femme qui a perdu la mémoire et qui déambule sans cesse dans les entrailles de l’aéroport, bulle dépersonnalisée, qui ne mène nulle part et partout à la fois. et qui va rencontrer d’autres destins brisés par la vie et tenter de trouver un semblant de réconfort auprès d'eux.







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Ce monde en vase clos, qui obéit à ses propres règles, raconté par une narratrice dont le lecteur ne sait pas grand chose et apprendra à connaitre au fil des pages, Tiffany tavernier l'a longuement étudié avant d'écrire son roman.. Elle a pendant de nombreux mois observé ce qu'on appelle les " indecelables", ces gens sans attaches dont l'aéroport est le lieu de vie, qui se promènent dans les entrailles de ce monde aussi gigantesque qu'anonyme.



Un aéroport comme une promesse d’évasion, mais en même temps comme y repoussoir : ce beau et fort portrait d'une femme en perdition, à la recherche ( vaine? ) de sa mémoire, donne lieu à de belles scènes (séquences?) de rencontres ( notamment une belle histoire d'amour avec un homme dont la femme est décédée dans le Paris Rio de 2003)



Tiffany Tavernier, avec ses phrases courtes, coupantes, sans fioritures, parvient à insufler un vrai souffle romanesque à ce lieu pourtant aussi neutre que standardisé à l’extrême.
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L'ami

Pas facile de parler d'un texte aussi fort, aussi fascinant…

Je vous préviens, cet article va être le plus grand teasing de l'histoire de la chronique : je veux AB-SO-LU-MENT vous donner envie de lire cet incroyable roman mais sans en divulgâcher l'intrigue (même s'il est vrai que l'essentiel n'est pas non plus dans ce « terrible » événement déclencheur)…

Pas facile mais je vais m'y tenir, promis (surtout n'allez rien lire ailleurs non plus, évidemment...)

Bon, on va faire court, moins de risque de laisser filer le moindre indice...

Imaginez un couple, Thierry et sa femme Élisabeth. Lui s'occupe de la maintenance des machines dans une usine, elle est infirmière. Leur fils unique, Marc, est parti vivre au Vietnam. C'est un peu dur pour eux, ce fils si éloigné… Ce matin, Thierry, le narrateur, s'est levé tôt. Il prend tranquillement son petit-déjeuner en admirant le paysage autour de sa maison qu'il aime tant. Il faut dire qu'il a quasiment tout fait avec ses mains... Chez les voisins tout le monde dort encore. Quand je parle de « voisins », le mot exact serait plutôt « amis ». Oui, Guy et Chantal, sont des amis, des vrais : ce sont des gens sur qui l'on peut compter : gentils, serviables, à l'écoute, toujours là pour dépanner… C'est rare les gens comme ça ! Et puis, si on y réfléchit bien, Guy est le seul ami de Thierry. Ils ont plusieurs passions communes : les insectes, les plantes, le bricolage, la bonne bouffe… Ils se donnent des coups de main, se prêtent les outils…. Il manque de la farine, des œufs ? On sonne à côté, c'est simple, et puis ça donne l'occasion de papoter un peu. Heureusement qu'ils sont là, les voisins, parce qu'il n'y a pas âme qui vive à moins de cinq kilomètres... D'ailleurs, ce matin, Thierry va devoir encore sonner chez Guy et Chantal, il a besoin d'une longue échelle, il y a certainement une fuite dans le toit…

Alors, pourquoi ce texte m'a-t-il tant plu ? 

D'abord, il y a cet effet de surprise inouï qui nous saisit, nous laisse sans voix et complètement ahuri. Vous savez… Thierry qui doit aller chercher l'échelle chez les voisins… Hé, hé… Si vous saviez... Il faut vivre ce qui va se passer ensuite, ce choc, cette incompréhension face à cette « chose » innommable et que personne n'a vue venir... (Je vous tiens un peu, là, non? Pas encore, ah bon, continuons alors...)

Et puis, comme le titre ne nous laissait pas présager un tel événement, finalement, on ne sait plus ce qu'on lit et l'on poursuit pour le moins éberlué comme le sont les personnages de la fiction et sans trop savoir dans quelle direction l'autrice va nous mener maintenant que le pire est arrivé. Attention, je vous le dis tout de suite, la balance penchera du côté de l'intime, de l'introspection, bien loin du voyeurisme et du sensationnel...

Là, on le sent très vite : on est ferré, impossible de lâcher, la nuit (la vôtre) sera courte… Quant à la journée du lendemain, n'y pensons même pas !

(Ça y est, vous avez chaussé vos baskets pour courir chez votre libraire ? Soyez polis, je n'ai pas fini… Encore deux mots, hein!)

Il y a aussi tous ces petits détails dont fourmille le texte et qui font toute sa richesse : ils nous laissent entrevoir l'immense imagination de l'écrivaine, ainsi que son incroyable travail de documentation. L'effet de réel est saisissant. Où que l'on soit : dans une usine, accroupi dans l'herbe à observer les petites bêtes ou devant un paysage du Massif Central : on y est, on y croit, les scènes se déroulent devant nous… (Bon, d'accord, quand on s'appelle Tavernier, on a été à bonne école - je pense au père, bien sûr, mais aussi à la mère scénariste!) Impossible de faire un pas de côté : on vit ce que vit le personnage principal, Thierry, sa « tempête sous un crâne » : on est embarqué comme lui dans la tourmente. Que de finesse dans ce portrait d'un homme accablé, détruit, que de subtilités, de nuances dans la description de son évolution psychologique...

Encore deux mots… (si vous êtes encore là - j'en doute!)

Il a aussi cette écriture si juste, si sensible, si poétique...

Ces fins de chapitres remarquables…

Cette grande maîtrise de la construction…

Et enfin, cette fin si belle qui nous éclate à la figure, nous transfigure et nous emporte malgré nos réticences, nos résistances, nos refus… On touche là à l'humanité dans ce qu'elle a de plus absolu, de plus sublime...

Allez, je n'ai pas de mots, c'est magnifique et Tiffany Tavernier est la plus grande.
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L'ami

Un roman puissant sur la solitude, la perte de repère et l'amitié. Thierry voit son voisin et seul ami, Guy, arrêté par la police. La maison est perquisitionnée, la police scientifique rejoint le pavillon.

Mais qu'à bien pu faire le voisin ? Et puis quand l'indicible est dévoilé, Thierry et sa femme vacillent. Ils n'ont rien vu, auraient-ils pu ? le couple s'écroule et chacun à sa manière fera face à ce drame.

Un beau portrait d'homme, un fait divers qui pourrait toucher tout le monde, traité ici assez finement.

Très beau roman. Juste un bémol sur la fin, très belle mais je m'attendais à autre chose.
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L'ami

♪♫ « Beaucoup de mes amis sont venus des nuages

Avec soleil et pluie comme simples bagages... » ♪♫

Depuis que j'ai commencé ce livre hier, j'ai en tête la douceur de ces paroles et de la voix de Françoise Hardy - celle des 60's. Ça tranche avec la noirceur de cet ouvrage !

D'où venaient Guy & Chantal, quand ils se sont installés dans la maison voisine de celle de Thierry & Elisabeth ? Seuls au monde dans ce coin de campagne, les deux couples sont rapidement devenus amis... puis "le soleil et la pluie" du quotidien ont brutalement fait place à une tornade dévastatrice.

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Ce roman est l'histoire d'une amitié irrémédiablement brisée, entre deux hommes en particulier. Suite au drame, l'un se demande si la relation a jamais pu être sincère. Est-ce que "ces gens-là" peuvent aimer ? Comment fonctionnent-ils ?



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Le bandeau sur l'édition poche annonce 'Troublant autant qu'addictif'.

Addictif, oui : je l'ai commencé hier soir et en ai lu plus de la moitié cette nuit.

Troublant, également, comme tous les faits divers sordides qui nous mettent profondément mal à l'aise.

En reprenant la lecture aujourd'hui, mon intérêt s'est dilué. J'ai commencé à m'ennuyer avec l'épisode du retour aux sources, et à trouver Thierry pénible, geignard et immature. Qu'est-ce qui le perturbe autant, au juste ? de ne plus avoir d'ami ? ou alors il ressasse cela pour moins penser au reste ?

J'aime bien le billet d'Ollivier sur Babelio qui met des mots sur le flottement et l'agacement que j'ai ressentis. L'intrigue est-elle mal construite ? la présentation du personnage serait bordélique/incomplète ? Ou alors les rebondissements, qui peuvent apparaître comme autant d'incohérences, seraient liés aux changements de points de vue, quand d'autres formulent des reproches à Thierry ?



La fin rattrape cette déception intermédiaire, avec les confidences du frère et d'une ancienne camarade.

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Le "détail" glauquissime que je n'oublierai pas de sitôt : le gâteau au chocolat...

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De cette auteure, j'avais apprécié 'Roissy'.

Je remercie la libraire de Quimperlé qui m'a révélé qu'elle glissait des ouvrages de Tiffany Tavernier dans ses romans surprises.

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♪♫ taper sur YT : Françoise Hardy Amitié INA
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En vérité, Alice

Une sainte femme, ou presque



Dans son nouveau roman Tiffany Tavernier imagine une femme sous emprise être embauchée comme assistante auprès d'un évêque pour trier des dossiers de canonisation. Um emploi qui va lui permettre de s'ouvrir à la spiritualité et s'émanciper.



Alice Fogère, vingt-neuf ans. Elle vit en couple depuis cinq ans auprès d'un homme qui a très vite trouvé le moyen de la contraindre à ses désirs en jouant avec elle un jeu particulièrement pervers. Après chaque accès de colère et de violence, il vient demander pardon, expliquant qu'il est victime de son lourd passé, ayant lui-même été maltraité. Il promet alors de s'amender avant de recommencer de plus belle. Alice continue à espérer et à prendre des coups. C'est alors qu'il lui explique qu'il ne peut plus assumer seul la charge du ménage et qu'elle doit trouver un plus vite un emploi.

La chance va lui sourire lorsqu'elle découvre dans un bulletin paroissial un annonce pour un poste d'assistante auprès de l'évêque.

Malgré son inexpérience, elle est engagée afin de mettre de l'ordre dans une pile de dossiers de canonisation.

Alors qu'elle tâtonne et subit les premiers quolibets de son mari, elle va découvrir auprès de ses collègues l'envie de l'aider et de la soutenir. En se plongeant dans la vie des saints, elle va voir son horizon s'éclaircir.

Tiffany Tavernier a construit son roman comme un cheminement intérieur. Outre la vie d'Alice dans son quotidien fait de violences psychologiques et physiques, elle nous dévoile – sans prosélytisme – la vie des saints et des candidats à la canonisation. Ces deux récits sont entrecoupés de monologues intérieurs qui nous permettent de mieux cerner l'état d'esprit d'Alice, au fur et à mesure que le doute s'installe dans son esprit. Car après sa prise de fonction, elle va chercher les signes propres à la conforter dans sa position. Et les trouver, car elle se dévoue à son homme et pourrait même s'identifier à ces femmes qui donnent tout. Mais au fil des jours, à la fois en creusant ses dossiers et en donnant du crédit aux réflexions de ses collègues et notamment de son amie Anne-So, elle va voir ses certitudes s'ébranler. Au fur et à mesure que ses dossiers se structurent, qu’elle comprend la différence entre les différentes catégories, du serviteur de Dieu au vénérable, du bienheureux au saint, elle avance vers la lumière. Avec elle, on se nourrit des témoignages recueillis.

Solidement documenté, ce roman nous offre aussi de découvrir la complexité des enquêtes menées pour le promotorat de la cause des saints et de comprendre qu'elles sont toujours en cours. Il y a toujours un saint auquel on peut se vouer...

NB. Tout d'abord, un grand merci pour m'avoir lu jusqu’ici! Sur mon blog vous pourrez, outre cette chronique, découvrir les premières pages du livre. Vous découvrirez aussi mon «Grand Guide de la rentrée littéraire 2024». Enfin, en vous y abonnant, vous serez informé de la parution de toutes mes chroniques.


Lien : https://collectiondelivres.w..
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Roissy

Ils y passent ; elle y vit.

Ils y décollent et s’évadent ; elle ne s’en éloigne jamais et s’y enferme.

Ils y atterrissent et se remémorent leurs séjours ; elle y erre désespérément, prisonnière de son amnésie.



Comme 130 autres abîmés de la vie, Anna vit à Roissy. Enfin vit…, survit plutôt, en tentant de remettre en place les morceaux de son ancienne vie, qui ne lui revient plus que par flashs : une petite fille, un mari, un accident de voiture et rien d’autre.



Elle n’a pas mis longtemps à intégrer les codes de ceux qui vivent dans l’aéroport : toujours marcher, ne jamais se poser, se fondre dans la masse, prendre sans état d’âme ce qui traîne et dérober subtilement ce qui peut l’être sans risque, se laver dans les toilettes et dormir dans les souterrains infinis du plus monstrueux garage à avions d’Europe. Et s’inventer des personnages à longueur de journée, pour oublier qu’elle ne sait plus rien du sien…



Incitation au voyage refoulé et plongée délicate dans l’angoisse d’une femme en perdition, Roissy de Tiffany Tavernier vaut surtout pour la galerie de personnages qui traversent l’errance d’Anna : Vlad l’énigmatique yougoslave reclus, Luc le veuf rédempteur, Josias l’amoureux au grand cœur, et tous ces salariés badgés qui dans ce lieu aseptisé réussissent à conserver ces fulgurances d’humanité qui permettent de tenir un jour de plus.



L’écriture de Tiffany Tavernier est élégante, poétique et suit un rythme lent, assez plaisant au début du livre. La deuxième partie, plus rythmée et scénarisée, m’a moins convaincu. Mais ce livre reste original et attachant, ouvrant l’esprit comme les envies d’évasion…
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En vérité, Alice



Sommée de trouver un travail pour échapper à la toxicité de son compagnon Alice va se retrouver assistante au Promotorat des causes des saints.

Avec en vérité Alice, son dernier roman, Tiffany Tavernier nous plonge dans un monde méconnu, celui des bureaux chargés d’instruire les candidatures à la canonisation et sonde aussi l’emprise que subit une femme dans son couple et sa difficulté à s’extirper des griffes de son bourreau,.



Tiffany Tavernier, avec ses phrases courtes, coupantes, sans fioritures, dresse la touchant quête de vérité d'une femme qui va trouver dans son travail la force de se libérer.



Cependant, comparé à ses précédents romans, le puissant Roissy ou le très troublant L'ami, la fille de l'immense Bertrand Tavernier ne nous convainc pas tout à fait.



La faute sans doute à ces monologues intérieurs qui appuient un peu sur ce qu'on avait déjà compris et qui ont tendance à mettre un peu trop de pathos sur un sujet casse gueule.



Et la dernière partie qui se perd dans des détails trop techniques sur le procédé de canonisation oublie de captiver le lecteur.. Un roman qu'on aurait adoré aimer sans réserve, mais qui nous laisse un peu sur notre faim.
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En vérité, Alice

« En vérité Alice » est le troisième roman de Tiffany Tavernier, publié en janvier 2024, aux éditions Sabine Wespieser.



Il raconte l'histoire d'Alice, une jeune femme qui vit sous l'emprise de son mari, un homme violent, manipulateur et jaloux. Arrachée à son enfance heureuse au Guatemala, Alice se retrouve isolée et malheureuse en France. Son mari la contrôle, la surveille et la dévalorise. Il la force à trouver un travail, qu'elle obtient au Promotorat des causes des saints, un bureau chargé d'instruire les candidatures à la canonisation. Ce travail va lui ouvrir des perspectives inattendues, notamment grâce à sa rencontre avec des ecclésiastiques qui l'initie à la vie des saints et à la foi.



Alice va alors se questionner sur sa relation, sur sa liberté et sur sa quête de sens.



Mon sentiment sur le roman est plus que mitigé. Je reconnais qu'il est bien écrit et original. Mais, au fond, j'ai davantage apprécié de découvrir le monde des saints et de la procédure de canonisation !!



En effet, il n'y a strictement rien d'original dans ce roman – trop d'auteurs,  guidés par des soucis de plaire et d'édition, abordent aujourd'hui le sujet de « l'emprise féminin  », sans aucune originalité, profondeur et analyse sérieuse.



Ainsi, le personnage est trop caricatural. L'on ne comprend pas pourquoi Alice reste avec son époux, malgré les violences et les humiliations. Les tentatives implicites d'explications « parce que je suis amoureuse «  constitue un raccourci pauvre et, en définitive, navrant.



Quant à la dimension religieuse du roman, le rapport des choses entre elles (emprise et religion chrétienne) est incompréhensible. C'est simpliste et naïf . J'aurais, certainement, mieux envisagé ce rapport - religion et soumission de la femme - à la lumière de la religion de l'islam.



En définitive, le roman ne pose aucune question pertinente, par conséquent,  aucune tentative de réponses sur les questions, pourtant intéressantes, de « l'emprise », la foi et le sens philosophique et sociétal du bien et du mal.



Quant à la fin du roman, celle-ci est frustrante et laisse très perplexe.



Michel.



 




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L'ami

Un samedi matin comme un autre, alors qu'il s'apprête à sortir, Thierry se retrouve face à la Police venue arrêter leurs voisins, Guy et Chantal. La Police demande à Thierry de rentrer chez lui. Avec sa femme Elizabeth, ils apprennent que leur voisin et ami est accusé de plusieurs crimes de fillettes ou jeunes femmes. Thierry et Elizabeth sont choqués car pour eux, c'est inconcevable, ils n'ont jamais rien vu d'étrange. Chacun va réagir à sa manière, sa femme a besoin de s'éloigner de tout ça, elle ne peut plus vivre ici tandis que Thierry est mis en congé brutalement par son employeur. Il ne comprend pas la réaction de son épouse, tout s'effondre autour de lui, il est sous le choc.



J'étais curieuse de découvrir ce roman dont j'avais lu le résumé sur Internet. En effet, on peut se demander comment on réagirait si quelqu'un de proche était arrêté autour de nous pour des faits aussi horribles que ceux racontés ici.

Ce roman se lit très rapidement, les chapitres courts s'enchaînent sans mal et on se laisse vite prendre par l'intrigue qui sonne vrai et donne froid dans le dos.

En même temps, on assiste à l'effondrement d'un homme innocent, voisin et ami du tueur, qui n'a rien vu, est sous le choc, refuse d'y croire aussi, ce qui est humain. Le lecteur assiste à la rupture de tout ce qui constituait sa vie, son rejet de l'entreprise où il travaillait, son couple en grandes difficultés, sa maison qu'il fuit car elle lui devient hostile. Cela réactive aussi des souvenirs de son enfance, les étés à la campagne avec son grand-père, ses années au lycée...

J'ai moins aimé les derniers chapitres plus éloignés de l'histoire et plus symboliques peut-être, néanmoins j'ai eu beaucoup de plaisir à lire ce roman qui a quelque chose de très vraisemblable.
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Roissy

Une jeune femme déambule depuis des jours et des mois dans l'aéroport de Roissy, feignant d'être une voyageuse ordinaire.

En fait elle est amnésique.

Des bribes de vie lui reviennent parfois mais sans la renseigner vraiment.

Elle noue des amitiés avec des SDF.

Elle n'a pas spécialement envie de retrouver qui elle est.

Une pleine immersion dans les coulisses d'un aéroport.

L'errance d'une femme perdue.

Voilà un texte original, bien écrit qui nous mène avec la narratrice dans un monde parallèle.

Ils sont presque invisibles ceux qui ont élu domicile dans un de ces lieux.

Anna, elle, fait semblant d'être une voyageuse ordinaire le jour avant de s'évaporer dans tous les endroits possibles la nuit.

Des rencontres improbables.

Des moments de panique, de fatigue.

En refermant le livre, on a l'impression de quitter l'aéroport où l'on vient de vivre quelques heures.
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