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Critiques de Véronique Olmi (1498)
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Le Gosse

Joseph naît juste après la première guerre mondiale, dans le quartier Bastille : un vrai Titi parisien. Chez lui, tout le monde est né et vit à Paris.

Son père, seul survivant de sa fratrie, a juste le temps de rentrer des combats pour se marier et avoir un enfant. Ensuite, il se fait rattraper par le virus meurtrier de la grippe espagnole. Joseph est orphelin de père.

Le début du roman commence par quelques lambeaux de bonheur octroyés au garçonnet entre sa mère, plumassière, et sa grand-mère paternelle.

Très rapidement, il se retrouve orphelin, seul au monde et l'enfer commence. Il devient pupille de la nation.

Cette "nation" est tellement bien encadrée qu'elle veut protéger ces enfants mais elle les torture, elle leur enlève toute humanité, tout bien-être.

Pourquoi ? Car ils rencontrent des adultes qui ne sont pas dignes d'avoir la garde d'enfants même dans les institutions.

C'est l'horreur absolue. Il n'est pas mieux traité qu'un bagnard.

Joseph trouve la force de survivre parmi ses semblables avec la musique comme support.

Un roman très fort avec une écriture magistrale.

Le début était magnifique mais j'ai vite déchanté. L'horreur des faits était difficile à supporter. J'aurais aimé que l'auteure me ménage plus de moments où Joseph vivait un peu de répit.

Véronique Olmi s'appuie sur l'œuvre du journaliste Alexis Danan " Maisons supplices" qui a aidé à fermer les maisons de corrections pour les orphelins et à faire progresser les droits de l'enfant.

Un livre à ne pas lire si on désire un peu d'insouciance.

Un récit à lire si on est désireux de connaître le sort réservé aux orphelins de l'entre-deux guerres en France.



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Les Evasions particulières

Lu en audio (c’est bizarre d’écrire cela mais je n’arrive pas à le penser autrement) avec la voix de l’auteure. Cela donne forcément une teinte particulière à la critique rapide que je vais faire. Je crois néanmoins qu’il y a un petit supplément d’âme à cette version audio car j’ai emprunté le livre juste pour trouver une ou deux citations à insérer dans mes commentaires et en feuilletant j’avais du mal à retrouver l’ambiance d’écoute. V. Olmi a mis du cœur dans sa restitution sonore, elle vivait son livre, elle doit livrer là quelque-chose de son intimité.

C’est donc pour moi essentiellement un livre d’ambiance. Celle des années 60, 70, 80 : celles qu’on nomme abusivement peut être les « trente glorieuses ». Période décrite de manière languissante par des regards féminins se voulant féministes.

N’y cherchez pas un roman historique, même si l’on y croise quelques grandes figures de cette époque, des présidents successifs à Mme S. Veil en passant par Mme S. De Beauvoir et M. J.P Sartre, des évènements plutôt franco-français : Mort de M. Pompidou, le Larzac, l’attentat de la rue Copernic... Tout cela forme un arrière-plan très partiel, choisi pour calibrer certains états d’âme des héroïnes : avortement, droit des femmes, homosexualité, bisexualité...

On peut être d’ailleurs un peu surpris de l’absence quasi totale de références internationales (un peu le Vietnam, mais pour l’écologie de l’agent orange...), comme si ces femmes vivant originellement en province, n’étaient pas intéressée par la marche du Monde.

Ce qui manque pour moi à ce long roman, c’est une vraie intrigue : on brosse beaucoup de portraits, on rencontre pas mal de personnages mais finalement, il y a assez peu de relief chez chacun d’eux.

Ce sont ces femmes vivant les bouleversements que l’on sait concernant leurs droits qui sont mises en avant, à tel point qu’après la moitié du livre, je mélangeais les (petits)amis masculins rencontrés. Le seul à sortir un peu du lot est le père des trois filles, dont la description au fil des situations est douce-amère, à tel point que je soupçonne Mme Olmi d’y avoir mis beaucoup de sa relation personnelle avec le sien. Mais ceci, comme d’habitude, n’engage que moi.

C’est donc en résumé un roman intimiste axé sur les états d’âme de quelques femmes vivant l’évolution de la société française et de ses mœurs.

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Bakhita

Comment exprimer ce que l'on ressent à la lecture de ce livre, que j'ai longtemps hésité à découvrir?

Que dire et qu'écrire qui ne soit dérisoire aprés une telle somme d'émotions ? Comme si les mots manquaient devant ce récit chamboulant, palpitant, bouleversant, marquant, poignant , qui touche, qui révolte, qui horrifie , qui angoisse, surtout dans la première partie ?

La souffrance de Bakhita, son calvaire , ses tourments, les violences physiques immondes, les marches harassantes sur les pierres , la soif, la douleur intense , innommable , la peau scarifiée, l'enfermement , la soumission, l'exclusion, les ordres, les caprices et les fantasmes, " La beauté , cette malédiction " pour Bakhita , un si bel ornement ........".

Les caresses menaçantes, comment juste survivre à la journée? les crachats au visage, vivre seulement pour obéir et plaire, dans un monde clos, une prison sans barreaux, son enfance volée, massacrée, cette "non existence", cette identité niée, cette humanité dépouillée de tout ...

Une Déshumanisation totale !

Une vie hors du commun , l'histoire dramatique , lumineuse, de cette esclave devenue religieuse !

On ne peut que s'incliner devant tant de force et de courage et cette terrible volonté de survivre !



L'écriture sensible , puissante , restitue la force et la grandeur de cette femme d'exception aux combats incroyables, à la capacité d'adaptation ineffable , puis à la capacité d'amour immense devant la misère universelle !

Un telle puissance d'évocation pour retracer cette histoire poignante et exemplaire en fait un roman si profond que l'on n'est pas prêt de l'oublier!

Superbe .......

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La nuit en vérité



L’enfant Enzo est trop gentil, il essaie de se conformer à sa mère, un peu excentrique, vêtue de panthère moulante, faisant le ménage de façon répétitive, pratiquement hypnotique, chez de grands bourgeois qui partent en voyage pour leurs affaires, et rentrent brusquement, sans prévenir.

La relation entre la mère, qui apprend pas-à-pas par amour ce que c’est que d’élever un enfant depuis 12 ans sans toujours y arriver (ses actes et ses convictions ne sont pas toujours associées : elle lui achète du Nutella et lui interdit de le manger) et Enzo, qui la regarde, qui essaie de ne jamais la contrarier, nous enchante par tous les sentiments « en vérité » qui sont exposés.

« Elle aussi devait avoir un chagrin en sommeil, une peine en cage qui lui donnait parfois l’air méchant, et, tout de suite après, un peu effrayé d’elle-même, et alors elle demandait pardon. »

Enzo est un souffre-douleur au lycée du quartier chic : il est différent, il est trop gros, et il ne se rebelle jamais, il souffre, c’est tout, « victime idéale, sensible et stupide au point de se faire envoyer chez le directeur » quand les autres enfants lui crachent dans le dos.

Avec une écriture émotionnelle qui fait monter les pleurs, Véronique Olmi réussit à nous faire attendre le pire, puisque le harcèlement existe dans le monde des adolescents, «  cette petite société pleine de bruit et de rancœur, d’envie et de désœuvrement ».

Ils ne savent pas bien pourquoi ils s’acharnent, c’est comme ça, ils ne peuvent pas voir Enzo en peinture, et, en même temps, il leur appartient.

Et puis le pire arrive, et ce qui est particulièrement touchant jusqu’au pathétique, ce sont les phrases de l’auteur :

« Ce moment de torture, ils le partagent bien plus qu’ils ne le croient, chacun d’eux en souffrira, et pour toujours… Ils auront des reflux gastriques, des migraines et des phobies, ils auront des tics et des angoisses soudaines, ils aimeront des femmes dont ils se détourneront sans comprendre pourquoi et ils fuiront la beauté de leurs fils, ils craindront la sensualité et la délicatesse, ce seront des ricaneurs, des sournois, des pervers narcissiques, des patrons colériques, des amis inconstants et des mendiants. »



Bouleversant, angoissant, attendrissant, épouvantable, ce qui reste du roman en vérité, c’est l’amour en équilibre mais profond entre une mère et son fils.

Très beau roman, par l’écriture soignée, les sentiments fondants bien que retenus entre les deux personnages principaux, et l’analyse des conséquences des actes haineux d’adolescents trop sûrs de la force de leur pouvoir.

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Le Gosse

Voici un roman marquant, poignant , poétique , puissant et dérangeant , un pavé déchirant jusqu’à la dernière page même si on assiste tout doucement à la renaissance d’un être ,à un changement de vie , grâce à la musique , un texte incroyablement beau à propos de l’enfance à l’aube du siècle dernier……



Je n’ai pas apprécié tous les livres de cette auteure ,mais celui - là comme Bakhita m’a impressionnée !

Il nous met dès la première phrase dans les pas de Joseph Vasseur, né le 8 juillet 1919 à Paris juste après la grande guerre , une date dont il est fier, car Paris ce n’est pas seulement la ville , c’est la plus grande des villes , «  belle de jour comme de nuit » , enviée dans le monde entier .



Lui , est un titi, sept ans , maigrelet mais robuste , très attaché à sa grand - mère Florentine , sa mère Colette , son instituteur qui lui a appris à lire , écrire et compter ,il aimait l’école ! .





Sa mère et sa grand - mère le surnomment «  Le roseau » , il siffle souvent , sa mère aux mains de plumassière , rouges et bleues , habiles et rugueuses ne se posent jamais, la vapeur de l’atelier où elle travaille décolle ses petites mèches entortillées .

Joseph n’a jamais connu son père, revenu de la guerre en «  Gueule Cassée «  , sans visage , et , comme s’il était allé au bout des ses forces est décédé, de la grippe espagnole dans une chambre d’hôpital.



Colette , sa mère , gaie comme un pinson rencontre Augustin , lors d’un bal , tous les dimanches rue de Lappes ——- un peu plus jeune qu’elle ——- elle meurt brutalement lors d’un avortement clandestin, considéré comme un crime monstrueux à cette époque.

La vie de Joseph bascule le jour où elle disparaît .

Il devient pupille de l’Etat , un État qui a soi- disant mis en place tout un système de «  protection » des enfants pauvres , dont les bonnes intentions n’ont d’égale que l’extrême cruauté , l’inhumanité criante , l’absurdité , la monstruosité au fil des jours au sein de cachots puants, grêlés , gluants , une seconde peau de malheur pour Joseph , qui ,dans sa nudité , aux jours sombres et sans repères , met la cagoule pour ne pas voir le gardien qui apporte la gamelle ….

Une cellule de cachot sous La Chapelle de Mettray , là où repose le cœur du fondateur de la colonie ….

On suit Joseph , orphelin de père puis de mère, de famille d’accueil en colonie pénitentiaire de Mettray , de sinistre mémoire , maison de redressement agricole privée , au cœur de La Touraine ,que je viens d’évoquer, en passant par la prison de la Petite Roquette ( Paris ) et autres étapes …..

Joseph veut sa mère , qu’elle le touche et il n’a pas dix ans , ça hurle parfois dans les autres cachots .

Le voici arrivé parmi les «  vicieux » de la République , le vivier de cette racaille , et il y a pris place , sous les coups de sifflet , sans montrer sa fatigue , faussement absent sous les coups , les crachats , les insultes , les railleries obscènes sur la longueur et la vigueur de son sexe , les viols répétés , la trique, le sang qui coule de sa bouche : garder le silence , rester debout ou le tenter, le regard fixe , le crâne rasé , les yeux éteints ….



Il traverse la nuit mais bientôt la musique , cette omniprésence invisible et le cornet à piston , celle qui vit dans ce qui est beau ,il jouera bientôt , un jour lointain , pour Aimé son ami mais je n’en dirai pas plus…..



Il a fait partie des Colons , qui obéissent au clairon , aux sifflets et à la trique , aux ordres militaires : de la race des obligés , des redressés , des rééduqués, des surveillés , des contrôlés , encadrés par des frères aînés , les surveillants , «  les gaffes » alcooliques , violents, violeurs , incultes et inhumains ….

L’auteure fait parler son personnage , son intériorité à l’aide d’un choix narratif essentiel, lui donne un souffle , les enfants n’anticipant pas, toujours dans le présent , découvrant, en alerte permanente .

Elle adapte son histoire selon la condition sociale , l’âge et l’époque …semblable à un roman d’action, lui donnant de l’amplitude grâce à l’utilisation de la troisième personne et du présent .



On sent qu’elle a beaucoup travaillé et visité Mettray, lieu maudit fréquenté par Jean Genet , qu’elle a épousé le regard de ce gamin ….

Une radiographie dérangeante, somme toute , réalisée avec un art consommé ….

Joseph jouera du cornet à piston dans la France du Front Populaire ….

Peut - être retrouvera t- il sa vie et sa joie? …..

Ce livre est aussi un miroir aux débats récurrents et récents sur les violences en famille d’accueil ou dans les foyers d’Aide sociale à l’enfance …

Le lecteur indigné , pétri d’émotions multiples, se fait violence, se jette dans ce livre révolté, révoltant à l’écriture intense , présente , résonnant dans nos cœurs comme un vertige ou une implosion , une langue littéraire entre retenue , amplitude , réalisme effrayant .



IL en ressort comme éreinté, abîmé, anesthésié, essoré , usé par tant de souffrances mais transporté par l’énergie de ce gamin courageux et tendre , fort et faible à la fois , ce qui lui permettra de traverser le pire ….

Un pavé déchirant , une radiographie sans complaisance , prenant aux tripes sur les bagnes pour enfants de l’entre - d’eux - guerres ..

Un très bel ouvrage qui peut rebuter ….

Mon libraire m’avait prévenue , vous allez souffrir ,mais je ne regrette ma lecture …..



Aujourd’hui Mettray abrite un institut thérapeutique, éducatif et pédagogique .

Début novembre 1937 ,les derniers enfants quittent la Colonie Pénitentiaire.

En1974 , La Prison de La Petite Roquette ferme puis est démolie .

Sur son emplacement est aménagé le square de La Roquette .
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Bakhita

Le récit de la vie d’une femme. Enlevée dans son village à l’âge de sept ans quelques années après sa soeur aînée. Violée, enfermée, battue, enchaînée, vendue, torturée.



Elle a tellement traversé de pays, tellement appris à décrypter des langues différentes, qu’elle ne connait plus son prénom, ni d’où elle vient.



À l’âge de l’innocence, Bakhita ne connaît que la survie.



Alors, à un moment dans cette histoire effroyable, j’y ai cru à sa liberté, à sa renaissance. Mais non ce n’était qu’une courte trêve en Italie. Allez rebelote, on repart au Soudan, puis on revient en Italie et là, tu te dis ça y est, c’est fini, hein, je ne peux pas en lire plus.



Non, non, non Bakhita n’a que ses sentiments, ses cauchemars, ses chagrins qui lui appartiennent. Même en étant déclarée libre dans un procès italien grandiloquent, Bakhita ne l’est pas. Elle ne sera plus battue, ni violée, mais elle est enfermée et c’est elle qui l’a choisi.



On pourrait croire alors qu’elle passerait sa vie dans cet institut catholique où elle a trouvé sa place, entourée, choyée. Que nenni, déplacée régulièrement d’un couvent à un autre, d’une région à une autre. Et Bakhita gardera ce sentiment d’insécurité toute sa vie, jusqu’à sa mort. On l’obligera à raconter, on en fera des feuilletons, un livre.



Cette femme est morte à l’âge de soixante-dix-huit ans. Tu te rends compte ou pas ? Soixante-dix-huit ans d’un calvaire sans fin.



Elle est béatifiée, déclarée patronne du Soudan, puis sainte.



Peut être, je dis bien peut être qu’on aurait pu la laisser vivre tranquille. C’est bien cette reconnaissance après la mort mais personne ne pouvait lui donner ce qu’elle voulait le plus au monde. Retrouver sa mère, sauver sa soeur et connaître son nom.



Et je devrais aimer un tel récit ?




Lien : http://pyrouette.canalblog.c..
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Le Gosse

Après Virginie Grimaldi, j'ai eu envie d'une lecture un peu plus profonde et en fouillant dans mon sac à livres de vacances j'ai pêché ce Gosse dont la petite bouille m'a dit : "C'est mon tour, ça fait trop longtemps que j'attends dans ta Pal !

- Ca roule, allez emmène-moi visiter le Paris d'entre-deux -guerres, et faire connaissance avec tes potos titis.

- Ben oui, mais je te préviens, ce sera pas marrant tous les jours, même si ma vie a été plutôt sympa au début, avec ma p'tite maman qui m'appelait son roseau, et ma grand-mère qui perdait un peu la boule mais on s'aimait bien quand même.

- Allez, tant pis, raconte-moi tes malheurs aussi !"



Et c'est comme ça que j'ai suivi Joseph de ses sept ans en 1926 jusqu'à l'aube de ses dix-huit ans, alors que l'Europe entame une nouvelle période sombre.

Mais pour le petit Joseph, le bonheur prendra fin bien avant, lorsque sa maman, qui aime la vie et l'amour, tombe malencontreusement enceinte et meurt des suites d'un avortement clandestin (considéré comme un crime majeur à cette période où la France a besoin de se repeupler). Et un terrible engrenage se met en branle, qui conduira la grand-mère à l'hospice et le gamin à l'assistance publique. Une institution censée protéger les orphelins qui lui sont confiés, mais qui dans les faits les exploite et les maltraite, parfois jusqu'à la torture. Certains passages sont particulièrement difficiles, avis aux âmes sensibles, surtout quand on sait que les faits relatés dans le roman, ainsi que les lieux cités ont réellement existé, et les bagnes d'enfants ne sont pas si loin de notre époque d'enfants-rois.



C'est justement un des aspects que j'ai apprécié dans le roman, il est très bien documenté, et l'histoire de Joseph ressemble sans doute hélas à celles de bien des orphelins des années 20 à 40. L'écriture peut paraître un peu froide, à cause de l'emploi du mode impersonnel, mais d'un autre côté j'ai préféré qu'il y ait cette distance, le "je" aurait rendu la lecture encore plus difficile à certains moments. N'empêche qu'il m'a touchée ce petit bonhomme obligé de grandir trop vite pour s'en sortir dans ce monde où la vie d'un gosse de l'assistance vaut moins que celle d'un cheval. Au fil des placements et des séjours en prison ou en colonie pénitentiaire, il y aura quelques moments de répit, quand Joseph rencontrera Aimé qui lui apportera un certain réconfort, ou grâce à la découverte de la musique par le biais d'une fanfare. Heureusement, parce que sans ces quelques respirations, j'avoue que j'aurais eu du mal à poursuivre ma lecture.



Quelques détails m'ont un peu surprise, notamment concernant le vocabulaire employé dans un contexte bien particulier (je ne peux pas trop en dire), qui m'a paru inadapté. Et j'ai également un petit bémol sur la dernière partie du livre, où l'on assiste à la montée du Front populaire et à la naissance d'une certaine culture parisienne( la musique jazz, les clubs...), et où Joseph me semble évoluer un peu trop vite. Cependant je garde un souvenir ému des instants partagés avec Joseph et tous ses compagnons d'infortune, et je reste sur la note d'espoir donnée par la fin du roman.

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Bakhita

C'est un déchirement de tenter de rédiger une critique, sinon un billet sur un livre qui me fut offert à mon dernier anniversaire par mon fils. Sur ce geste, ce cadeau n'est pas anodin, j'y reviendrai plus tard, à la fin de mon billet. Bakhita, biographie romancée, écrite par Véronique Olmi, fait partie de ces livres qui témoignent de choses très fortes, qui ne peuvent nous laisser indifférents.

Ici, le parcours de ce personnage de Bakhita est totalement sidérant. Dans cette lecture, j'ai été confronté à une attitude paradoxale : l'écriture est indéniablement très belle et elle vient se poser sur un thème d'une tonalité incroyablement tragique, sur des événements vécus. L'itinéraire de Bakhita, dès son enlèvement à l'enfance au bord de son village, parce qu'elle a eu l'imprudence de s'en éloigner durant quelques instants, force le respect. Elle va se relever malgré les chaînes aux pieds, malgré les souffrances, malgré les humiliations...

C'est peut-être cette juxtaposition d'une écriture belle et d'une histoire douloureuse qui m'a déstabilisé.

Aussi, c'est une lecture ici en demi-teinte.

Avec une citation de Primo Levi en préambule, il est vrai que je m'attendais à quelque chose de différent...

Le chemin de Bakhita est un chemin qui côtoie l'effroi et l'insurmontable. Son corps s'en souviendra à jamais, sa mémoire effacera l'enfance qui fut la sienne, une enfance qui s'arrêta vers l'âge de sept ans.

J'aurais voulu autre chose, attendre de ce livre de vrais personnages, entiers, douloureux, attendre que cela se passe peut-être différemment.

Les personnages sont au rendez-vous. Mais moi lecteur, je n'ai pas été au rendez-vous auquel j'étais invité, ne serait-ce que par mon fils.

J'aurais voulu saisir les oscillations du personnage de Bakhita, autant dans sa vie d'esclave que dans son parcours religieux, savoir et comprendre cette brutale conversion à un tournant de sa vie. Pourquoi ?

J'aurais voulu lire ce livre avec mon corps, avec mon ventre, j'aurais voulu ressentir autre chose que la beauté d'une écriture, faisant écran, un peu comme un mur presque infranchissable entre moi et les personnages, entre moi et l'histoire.

Ce fut pour moi une sorte de rendez-vous manqué.

Pourtant l'histoire de Bakhita est belle, elle dit de ne jamais faire naufrage. Résister. Se réparer à travers les autres. C'est aussi cela la résilience, celle de Bakhita, comme tant d'autres comme elle...

Elle ne se souvient plus de son nom, de son village, des siens. Ballotée de douleurs en humiliations, comme une barque sans attache, elle a perdu l'histoire et la géographie de sa vie. Elle n'est plus qu'un corps, son corps martyrisé, mutilé, survivant, qui ne peut plus enfanter, elle qui aima toute sa vie les enfants, peut-être un peu pour cela d'ailleurs, son corps broyé est le seul territoire auquel elle appartient désormais, marqué de l'intérieur et de l'extérieur par la barbarie humaine.

En effet cette écriture m'est apparue trop belle, trop lisse, je ne sais pas s'il faut le dire ainsi, je pense que cette écriture m'a éloigné de toute émotion possible, a gommé les aspérités qui auraient pu visiter et saisir les personnages - à commencer par le personnage principal de Bakhita – je pense que la puissance d'un récit s'écrit aussi dans ses zones d'ombre, les zones d'ombre des personnages qui y sont convoqués.

L'esclavage et les camps de concentration font partie de ce que l'humanité a été capable de produire de pire... L'esclavage continue en Afrique, quasiment sur le même territoire qu'évoque le livre, cent cinquante ans plus tard... Ce livre nous permet de nous le rappeler...

Plus tard, je reviendrai parler de ce livre avec mon fils et aussi avec ma fille, l'Afrique est leur berceau qui les a vu naître tous deux, l'un au Burkina Faso, l'autre en Éthiopie. Je voudrais qu'ils le lisent à leur tour, ce ne sont pas des lecteurs, ma fille m'a cependant promis de le lire... Je sais pour cela que ce cadeau d'anniversaire n'est pas anodin. Je sais que ce livre aura cette vertu : parler, dire, partager.
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La nuit en vérité

Il nous est dit dans la 4ème de couverture que Véronique Olmi renoue avec la tension narrative de « Bord de mer ». Ayant été bouleversée par ce roman, j’ai eu envie de poursuivre un peu avec cet auteur. Il s’avère toutefois moins noir, des petites touches de couleurs, des petites lumières viennent apporter un sourire ici ou là et surtout un espoir, une ouverture.

« La nuit en vérité » est un livre sur la différence, la différence de classes sociales, la différence de nationalités, la différence d’apparence physique. On s’aperçoit que quelle que soit la différence, elle dérange, elle est l’objet de moquerie, d’ignorance donc d’une certaine peur, de harcèlement. Accepter l'autre, reste dans notre société, au 21ème siècle, encore bien difficile. Le chacun chez soi, bien uniformisé semble de rigueur !!!

Liouba, jeune maman de « pas encore trente ans » élève seule son fils Enzo de 12 ans. Tous deux vont vivre dans une petite chambre chez de riches marchands d’art, lieu où elle va être femme de ménage. Enzo va pouvoir suivre ses cours dans un collège de ce quartier aisé mais il n’arrivera pas à se faire accepter et sera victime de rejet. Il va aussi être obsédé par son père, ses origines qu’il ne connait pas et que sa mère Liouba refuse d’évoquer.

L’amour qui existe entre Liouba et Enzo est souvent maladroit , dans la retenue, mais il est fort, et touchant. Enzo fait preuve de beaucoup de tendresse, de délicatesse et d’amour envers sa mère tout comme dans « bord de mer » et fait fondre la lectrice que je suis.

Véronique Olmi est maître dans l’art de l’intime, elle nous offre ici un roman intense et d’une grande finesse psychologique.

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Bakhita

Si l'on m'avait dit que lire une histoire de sainte me mettrait dans un tel état, je n'y aurais pas cru. Eh bien, c'est chose faite avec Bakhita qui a littéralement épuisé ma réserve de mouchoirs en papier. Attention, il n'y a aucune ironie dans mes propos et je ne veux pas dire que c'est un livre à l'eau de rose, mélo à souhait, non, pas du tout, Bakhita est tout simplement un texte magnifique, d'une pure beauté, à l'image de la femme dont il peint la destinée. C'est un roman qui m'a complètement transportée, profondément bouleversée grâce à la langue de Véronique Olmi qui a su exprimer à la fois avec beaucoup de puissance et beaucoup de pudeur toutes les souffrances de Bakhita et la terrible et semble-t-il infinie violence des hommes.

Il est d'ailleurs difficile d'imaginer toute la violence que peut subir une jeune esclave enlevée enfant à sa famille habitant un petit village du Darfour, vendue par les uns, achetée par les autres, violée, battue, mal nourrie, assoiffée, obligée de marcher enchaînée sur des kilomètres en plein désert, de dormir au sol piétinée par des bêtes, contrainte d'assister à des scènes insoutenables de torture ou de meurtre et de se séparer toujours des êtres auxquels elle parvient à s'attacher.

Une vie en forme de chemin de croix...

La mort à côté est presque un soulagement, mais de la mort, Bakhita (« la chanceuse » surnommée ainsi par ses ravisseurs musulmans - quelle ironie !) n'en veut pas et toujours, elle s'accroche à la moindre petite étincelle qui la retient à la vie, aussi ténue soit elle.

Ces moments fugaces où elle regarde le ciel, la lune, les étoiles, contemple la beauté du monde, repense à sa famille, celle qui lui a donné un nom maintenant oublié, sont magnifiques et très émouvants. Purs moments de grâce, petites fenêtres qui lui permettent d'échapper par l'esprit, très ponctuellement, à l'enfer de sa vie, à l'inhumanité qui fait son quotidien. Quelle fascinante force mentale...

C'est en visitant l'église Saint-Jean-Baptiste à Langeais, ville près de laquelle Véronique Olmi possède une maison, que cette dernière découvre, à travers quelques photos, Bakhita. Elle est littéralement happée par ces portraits au point qu'elle abandonne le livre qu'elle était en train d'écrire et se lance dans des recherches qui vont la conduire à la rédaction de ce très beau roman.

Bakhita née et enlevée au Darfour en 1876 finira par échapper à ses nombreux tortionnaires en étant achetée par le consul italien de Khartoum, Calisto Legnani, qui va l'emmener en Italie où, après moult péripéties (car être noire en Italie, à cette époque, c'est être le diable), elle deviendra religieuse. Elle sera canonisée le 1er octobre 2000 par Jean-Paul II.

Ce roman fait ainsi le portrait d'une femme inoubliable, pleine d'humanité, dévouée corps et âme aux autres, se donnant sans compter jusqu'à la fin de son existence. C'est aussi une femme immensément amoureuse de la vie, ce qui lui a donné cette force extraordinaire, cette capacité de supporter la douleur, la souffrance.

Bakhita est aussi un livre qui nous rappelle que l'esclavage existe encore, que ce qu'a vécu cette femme, certains (es) - et ils/elles sont nombreux(ses) : quarante-six millions de personnes dans le monde ! - le vivent aujourd'hui, ne l'oublions surtout pas.

Enfin, Bakhita est aussi l'histoire d'une époque terrible - finalement, toutes les époques ne le sont-elles pas ?- où se mêlent esclavage, colonialisme, racisme, nazisme, fascisme et la pauvre Bakhita, à peine sortie de l'horreur la plus complète, replonge dans la Seconde Guerre Mondiale et ses conséquences désastreuses. Elle a à peine le temps de respirer un peu que le pire, de nouveau, est là. Quel destin terrible...

Pour moi, tout ça vaut bien un prix Goncourt, non ?
Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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Les Evasions particulières

La fratrie Sabine, Hélène et Mariette n'a été engendrée par Mme Olmi que pour raconter à travers leurs vécus l'histoire de celles et ceux qui sont nés entre 50 et 60.

Des trente glorieuses, tout y est ou presque. Un inventaire dressé comme une prédication, glacé comme un catalogue où les madeleines de Proust y sont vendues en paquets géants à 3 pour le prix de 2.

J'y ai rebondi comme un caillou en mode ricochet sur une mer d'huile mazouté par l'Amoco Cadiz. En clair, j'ai eu du mal à pénétrer leurs vies tant la mienne me sautait au visage.

Ci-git la nostalgie : La colo, le caté, les copains, le premier joint, l'amour, le conjoint, la famille, la France déjà loin du Maréchal Pète-joint.

Avec des parents super-cathos, raides de leurs convenances et de leurs secrets cachés sous le tapis deux des filles vont « monter » à Paris avec leurs envies et leurs lubies, prêtes à s'émanciper du poids de la province des années 70, faire du théâtre et la révolution sexuelle pendant que « Bolino » à la télé, révolutionne les pâtes.

Elles iront défendre la cause animale et les paysans du Larzac pendant que Roger Lanzac fait tourner des gros éléphants dans sa petite piste aux étoiles. Lutteront pour le féminisme naissant, la contraception et l'avortement avec Simone Veil et Gisèle Halimi comme alibis.

Une des filles sera blessée à l'attentat antisémite de la rue Copernic, ta mère déjà déboussolée aura été rattrapée par la fracture des générations, un vrai raz de marée à cette époque où pour exemple mon père avait encore sa gabardine à martingale en tergal et écoutait Tino Rossi alors que je ne portais que des franges et des jeans pattes d'ephs et que je m'excitais sur « My generation » des Who. Des qui ?



Et c'est Mitterand qui achèvera ce roman en 1981, bras levés sur la terrasse bourguignonne de son succès pendant qu'il pleut sur les sourires de milliers de gens venus fêter l'événement à la Bastille alors que le monde s'effondre sur ceux qui pleurent chez eux.



Tout ça pour dire que ce roman a des relents d'avant qui peuvent faire tripper des types comme moi mais si vous êtes nés après 80, passez votre chemin, vous ne serez pas dans le mouv' et vous risquez de vous y ennuyer.



« Julien Clerc chantait « Ma préférence » en sourdine, c'est toujours un peu cafardant, ces mots d'amour adressés à d'autres »



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Bakhita

Grand Prix des Blogueurs littéraires 2017



De la liberté à la sainteté *



Voici un livre qui a toutes les raisons de faire parler de lui en cette rentrée littéraire: le destin hors norme d'une africaine en biographie romanesque, un contexte historique documenté, une thématique humanitaire particulièrement éprouvante et une réflexion sur l'éducation et la spiritualité.



En s'inspirant de l'authentique parcours d'une religieuse soudanaise canonisée en 2000 par Jean-Paul II, Véronique Olmi donne un éclairage particulier à l'esclavage du XIXème siècle, le situant dans une géographie plus insolite que celui communément relaté par le commerce triangulaire avec les Amériques.



Dans les pas de cette enfant du Darfour subissant une razzia vers 1875, à l'âge de sept ans, c'est un véritable chemin de croix que le lecteur vit par procuration. le récit de l'enfance de Bakhita est d'une violence terrible et assumée par la romancière, et sans doute d'une réelle crédibilité. On respire un peu mieux en l'accompagnant dans ce qui sera la chance de sa vie: être vendue au consul italien de Khartoum, l'accompagner en Italie où elle recouvre sa liberté et découvre la foi, ou plus exactement sa propre et magnifique humanité.



Je n'ai pas décroché de cette lecture, entre noirceur et fulgurances de beauté et de poésie.

Cohabitent au fil des pages une grande brutalité et une douceur, une sérénité instinctive dans la simplicité de coeur de Bakhita. L'écriture est comme un flux ininterrompu, la narration vient par vagues, riches, descriptives, foisonnantes. On est bercé, emporté par ce lyrisme qui sait se faire léger et poétique.



Terrible et impressionnant destin et très beau travail d'écriture.



(* un des chapitres du livre)

Rentrée littéraire 2017

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Nous étions faits pour être heureux

Bien dans sa tête, dans sa vie, dans son couple, Suzanne est une accordeuse de piano d’une quarantaine d’années. Elle vit dans une douce quiétude avec Antoine, son mari.

Serge, quant à lui, dirige une agence immobilière. Il a 60 ans, une belle carrière, une grande maison, une épouse somptueuse ,de 30 ans sa cadette, et deux enfants.

Quand ces deux-là se croisent pour la première fois, ils ne savent pas encore qu’ils se reverront, s’aimeront, s’ouvriront leurs cœurs et que leurs vies en seront bouleversées





A priori cette histoire pourrait être l’histoire banale d’un adultère. Mais il n’en est rien. D’abord parce que cette liaison est totalement inattendue pour Suzanne et Serge, ensuite parce qu’elle s’éloigne des stéréotypes du genre. Serge ne trompe pas sa femme avec une jeunette plus belle qu’elle. Non, curieusement il est attiré par Suzanne qui n’est ni jeune, ni belle, ni même son type de femmes. C’est pourtant dans les bras de cette femme entière et vivante, loin de sa vie trop parfaite, dont il semble toujours être plus spectateur qu’acteur, qu’il va enfin sortir de son silence, livrer ses secrets, raconter ses blessures. C’est grâce à ses questions, à son insistance et, sans doute, à la compréhension qu’il sait pouvoir espèrer d’elle, que Serge va s’ouvrir et raconter les drames de son enfance, tout ce qu’il a toujours caché, pour oublier un peu et par peur d’être rejeté surtout.

Alors non, Nous étions faits pour être heureux n’est pas une histoire banale, c’est une romance tendre et douce-amère entre une femme qui sait donner et se donner et un homme qui révèle ses failles et apprendra à les surmonter.

On ressort bouleversé de cette lecture sans vraiment savoir pourquoi, peut-être tout simplement à cause du talent de Véronique OLMI à nous décrire les êtres et les sentiments dans toute leur complexité
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Le Gosse

Il ne fait pas bon être un Gosse pauvre et sans famille dans le Paris d'après la grande boucherie de 14-18. Le sort de Gavroche, livré à lui-même et libre comme un titi parisien, est presque enviable à côté de celui de Joseph. Le Gosse.



Victime de la sollicitude de l'Etat...



Joseph a d'abord perdu son père, ô ironie, dans l'épidémie de grippe espagnole qui a éliminé cette "gueule cassée" après que la guerre l'eut défigurée.



Mais il lui reste sa mère. Elle meurt bientôt. Demeure sa grand mère, fidèle au poste. Mais elle perd un peu la tête. Les services sociaux de l'époque, soucieux de ne pas laisser un Gosse sans tutelle responsable, placent Joseph...à La Roquette ! Au cachot, l'orphelin pauvre! C'est pour son bien...Victor Hugo doit se retourner dans sa tombe ! Qu'on se rassure: on va s'occuper de lui.



Après la prison, déportation campagnarde de notre moineau de Paris dans une ferme du nord, en famille d'accueil. L'école est loin , et les champs réclament des bras, fussent-ils ceux, malingres, d'un Gosse de huit ans ! Joseph voudrait revoir son quartier, retrouver sa grand mère, obligeamment placée à Sainte-Anne par les mêmes services sociaux... Il prend la route. Pour une petite balade, une velléité de fugue qui se transforme vite, la faim aidant, en retour tardif à la ferme, je veux dire au foyer d'accueil, c'est la maison de redressement.



Le centre de Mettray, fondé par Alexis Danan, avec ses ateliers ouverts, sa formation professionnelle modèle. Un exemple de prise en charge pédagogique...sur le papier.



Dans les faits, aucun doute, c'est une colonie pénitentiaire, un bagne, comme ceux dont nous parle Marie Rouanet dans son livre document, Les Enfants du Bagne.



Véronique Olmi, sans pathos, sans effets de manche, en veillant à maintenir l'importance des instants de joie donnés par la musique, par l'amitié, et bientôt par l'amour, fait traverser à son Gosse toutes ces épreuves. On dirait que l'écrivain a pour son personnage la sollicitude maternelle qu'il faut pour le maintenir en vie, sinon en confiance et en joie.



Un joli livre, émouvant, tendre, mais aussi très documenté et qui dresse, entre les lignes, un réquisitoire cinglant contre ces institutions pavées de bonnes intentions qui se révèlent des enfers...



La Colonie de Mettray ne fermera ses portes qu'en 1937..juste après le Front Populaire. Ce n'est sans doute pas une coïncidence.
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Bakhita

Il y a peu de temps, j'ai découvert l'écriture lumineuse de Véronique Olmi avec Les évasions particulières. Je récidive avec Bakhita et ça ne loupe pas, j'aime décidément bien le style de Véronique Olmi.



Pourtant, le ton très introspectif et poétique de l'auteure ne se prêtait pas forcément à cette histoire vraie. C'est une véritable gageure de se mettre à la place de cette petite fille soudanaise devenue esclave puis de la religieuse qu'elle est devenue adulte. Mais Véronique Olmi y est parvenue avec justesse, délicatesse et passion.



Oui, on peut vraiment dire que Véronique Olmi s'est prise de passion pour Bakhita et on la comprend. Quel destin terrible et exceptionnel fut le sien !



Bakhita est un très beau roman. Non seulement, il est bien écrit mais il donne également une belle leçon de vie. Cette femme, à qui les hommes ont fait subir les pires humiliations, nous émerveille par sa simplicité mais surtout par sa gentillesse, son amour des enfants et son abnégation.
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Le premier amour

En découvrant ce titre, je m'attendais à une certaine légèreté. Des retrouvailles romantiques de deux anciens adolescents amoureux, à l'âge mûr. Il n'en est rien, ou tout au moins le ton du roman est très différent et rempli de sujets graves et sérieux. Ce roman est plein de surprises. Le dénouement est assez inattendu. Un bon livre qui se lit facilement, avec gourmandise. Je ne connaissais pas Véronique Olmi et cette première rencontre avec l'auteur m'a séduite.
Lien : http://araucaria20six.fr/
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Bord de mer

Fuir....

Fuir la misère, fuir ses démons, fuir le monde.

Fermer les yeux, le jour, la nuit, à la recherche d'un hypothétique sommeil, refuge improbable aux angoisses, à la douleur.

Ne plus voir la souffrance, l'incompréhension, le reproche dans les yeux innocents de deux gamins perdus dont vous êtes le seul horizon.

Deux gosses pleins de vie, de cette vie que vous n'arrivez plus à appréhender, à vivre..

La mer comme dernier espoir, comme ultime cadeau qui refuse de s'offrir et avale les dernières illusions sous un ciel larmoyant.

Mère indigne...mer furie.

Mère douleur...mer hurlante.

Plus de place pour rien, le vide aspire tout.

L'amour pourtant se débat, cherche une place qui se dérobe, alors ne reste que l'abandon, terrible.



Un récit déchirant, lu en apnée, le souffle court, la poitrine serrée jusqu'à l'ultime effondrement.

Un cri, de la première à la dernière page, qui vous laisse épuisé.e et sans voix.
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Bakhita

J'abandonne lâchement Bakhita à son sort .

Pendant plus de cent pages , j'ai fait l'effort de la comprendre , de la soutenir et de continuer avec elle la route de son infortune .

Je suis triste de renoncer à cette histoire aussi sordide , aussi grave et surtout aussi minable que l'esclavage .

Je ne connais pas les autres romans de Véronique Olmi , mais j'espère qu'elle utilise un autre style que celui affiché dans ce récit .

Non seulement , je me suis ennuyée mais je me suis arrêtée plusieurs fois tant j'étais énervée par ces phrases répétitives brèves et saccadées , qui parfois n'avaient pas de verbe ou même pas beaucoup de sens .

J'appelle cela du tape à l'oeil ces mots utilisés et qui ne veulent rien dire .

Jamais un moment , je n'ai su avoir pitié de cette enfant à cause de la forme de ce roman .

Ce n'est certainement pas à la misère humaine que je suis allergique , car j'ai oeuvré toute une vie à rendre service , mais bien à ceux qui l 'exploitent .
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Bakhita

Cela commence dans un petit village au coeur de l'Afrique, au Darfour. Elle était belle. Sa mère avait onze enfants. Elle a dû naître en 1869, à peu près. Elle a cinq ans, une soeur jumelle qui n'est plus là et Kishmet, sa grande soeur de 14 ans, mariée, un enfant. Soudain, le feu, les fusils ! Ils ont pris Kishmet et les jeunes surtout : « Les garçons pour les armées, les filles pour le plaisir et la domesticité. » Cette vie qui commence, sombre dans le drame et la douleur, ce que raconte superbement Véronique Olmi, dans Bakhita.



Deux années plus tard, elle est prise par deux hommes. Sa vie a basculé définitivement : obligée de marcher, enchaînée, battue, privée de tout. « Elle ne savait pas que l'on pouvait marcher enchaîné et fouetté. »

Esclaves, ils traversent des villages dans l'indifférence jusqu'à un premier tri. Puis c'est l'évasion, une nouvelle capture, 300 km de marche au centre du Soudan jusqu'à El Obeid où on les soigne pour être vendus. On l'a appelée Bakhita (la Chanceuse !) mais ce n'est pas son vrai nom qu'elle a complètement oublié.

Ainsi, plongé dans cette lecture hallucinante, passionnante, douloureuse, j'ai suivi Bakhita achetée et devenue servante : « La vie était un carnaval aux masques trompeurs, à la joie factice, une fête susceptible de si vite s'interrompre. » Entre intranquillité et soumission, Bakhita a neuf ans quand elle est violée par Samir, le fils du maître. Battue, humiliée, cantonnée aux tâches les plus dégradantes, jusqu'à cette horrible scarification aux 114 entailles sur le ventre, la poitrine et les bras, supplice ordonné et perpétré par des femmes.

Achetée par un consul italien, à Khartoum, elle trouve enfin un peu de dignité et décide son maître à l'emmener avec lui en Italie au moment où les Européens fuient le Soudan. Rien n'effacera jamais tout ce qu'elle a subi jusque-là mais Bakhita a 16 ans et, en Italie, elle est le diable noir, la noiraude, la brunette… Les réactions des gens, dans la rue, sont horribles car ils découvrent pour la première fois, une personne à la peau noire.

La vie italienne de Bakhita n'est pas de tout repos. Celle qu'on appelle la Moretta n'est pas libre. Maria Michieli l'affirme : « Tu es à moi. C'est à moi qu'on t'a donnée. Où as-tu vu une esclave dire non à son maître ? » C'est grâce aux religieuses Canossiennes de Venise qu'elle trouve enfin sa liberté. Aussi, il n'est pas étonnant qu'elle choisisse de rester dans cette congrégation où elle s'épanouit alors qu'elle a vu tant de misère en Italie.

La vie de Bakhita se poursuit à Schio. La Première guerre mondiale, la montée du fascisme, tout cela est bien décrit alors que l'Église décide d'utiliser Bakhita en lui faisant raconter son esclavage dans toute l'Italie pour récolter de l'argent pour les missions : « le discours officiel. C'est ce qui se faisait de mieux en Italie, la rassurance et l'espérance passaient par des voix simplistes qui s'adressaient directement aux peurs des peuples, la peur des autres. Ces barbares. »



Elle qui a vu à nouveau des razzias avec les Juifs emmenés à Auschwitz, est morte le 8 février 1947, à 78 ans, et on en a fait une sainte… Mais c'est sa vie qu'il faut connaître car ce qu'elle a vécu, d'autres le vivent encore dans ce monde qui n'a pas son pareil pour oublier les leçons du passé. Bakhita est un livre qui marque. À lire !




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Les Evasions particulières

Bruno et Agnès sont pauvres, catholiques modérés mais convaincus, habitent dans une cité d'Aix en Provence où les murs sont en carton. L'appartement est petit, un trois pièces. Ils ont trois filles, Sabine, Hélène et Mariette. Bienvenue dans les années 1970, les appartements petits, fonctionnels et sans charme, le papier peint à grosses fleurs ou à losanges qui donne la migraine, le petit électroménager orange et les bouteilles de verre consignées, les écoles de filles et de garçons séparées, les cours de cuisine et de coutures pour les unes, le bricolage pour les autres.



Bruno est enseignant dans un établissement privé et religieux. Agnès est évidemment femme au foyer. Sabine amorce son adolescence, s'ennuie et ne supporte plus l'autorité de ses parents. Elle attend avec impatience sa majorité, 21 ans à l'époque. Pour Bruno, elle sera femme au foyer, Sabine a d'autres rêves dont celui de devenir actrice.



Hélène a une vie un peu à part dans la famille. Elle part toutes les vacances scolaires à Paris, chez sa tante, la soeur d'Agnès et son oncle. Ils ont une belle vie aisée, chez eux les enfants vouvoient leurs parents. Un petit arrangement familial contre un chèque tous les mois qui permet à Bruno de régler les dettes laissées par son père. Hélène doit s'adapter aux deux familles, peinant à retrouver sa place quand elle rentre chez ses parents, profitant de cette vie aisée quand elle est à Paris. Elle prendra conscience de la souffrance des animaux lorsque son chien, celui de la famille riche, va mourir de chagrin. Lutter contre la souffrance animale deviendra son combat.



Mariette est toute petite au début du roman et dort dans la chambre de ses parents. Elle a de l'asthme sévère et passe des moments compliqués. Elle va grandir sans ses soeurs et se retrouve avec des parents mal assortis, une mère qui construit son indépendance comme un combat et non comme une émancipation.



Le décor est posé, la famille en place pour le départ dans un grand huit émotionnel et libertaire que représente cette décennie jusqu'à l'élection de François Mitterrand. Chaque membre de la famille va devoir grandir, évoluer et s'adapter et si j'ai un souvenir heureux de cette époque car effectivement comme Sabine j'aspirais à une liberté totale et sans le joug familial, cette famille va rencontrer bien des problèmes et devoir constamment se remettre en question. le roman est rythmé par les événements politiques, culturels et féministes.



Si les trois filles se cherchent, trébuchent, se relèvent et continuent leur avancée dans leur vie de jeunes adultes avec cette toute nouvelle liberté pour les femmes, les parents font une descente aux enfers assez impressionnante. Il est très intéressant de suivre l'évolution d'Agnès qui pourra apprendre un métier et travailler après le départ des deux grandes à Paris. Elle osera avoir des rêves et des projets mais fera un volte-face sidérant, mettant Mariette, la petite dernière dans la confidence d'un secret assez bouleversant.



Ce livre avait, pour moi, un goût de nostalgie. Les personnages sont travaillés à l'extrême dans leurs sentiments et cela donne un ressenti d'insécurité plus que de liberté. Effectivement les évasions sont particulières.




Lien : http://pyrouette.canalblog.c..
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Véronique Olmi

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