AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782207115718
480 pages
Denoël (19/04/2013)
3.59/5   112 notes
Résumé :
Futur proche. Un attentat à Islamabad a provoqué une pandémie terrifiante. Les trois quarts de la population mondiale ont disparu. L'arme utilisée : la bombe iconique. Les coupables ont été retrouvés, jugés et exécutés. Mais certains se sont échappés. Parmi eux, une femme, leur inspiratrice, leur muse. Sa simple existence est un risque : tant qu'elle vit, la connaissance menant à la bombe reste accessible.
Elle a disparu, n'a laissé aucune trace, pas l'ombre ... >Voir plus
Que lire après Anamnèse de Lady StarVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (30) Voir plus Ajouter une critique
3,59

sur 112 notes
5
11 avis
4
5 avis
3
11 avis
2
3 avis
1
0 avis
Inattendue apocalypse, fascinante enquête historico-policière, invention d'un avenir. Éblouissant.

Après CLEER, magistrale première collaboration entre Laurent et Laure Kloetzer, en 2010, le couple nous revient en ce mois d'avril 2013 avec 480 pages qui devraient – je pèse mes mots – faire date. « Anamnèse de Lady Star » est certainement l'un des meilleurs romans étiquetés « science-fiction » que j'aie lu ces dernières années, et l'un des meilleurs romans – tout court –, traitant avec ambition et exigence d'un agencement du devenir collectif et des devenirs individuels, que je connaisse.

Une difficulté pour en rendre compte reste d'éviter tout dévoilement dommageable, car si le suspense n'est pas, du tout, le moteur principal du roman, la joie des découvertes et des connexions inattendues y est bien présente, jusqu'au bout… Je vais m'y efforcer, en ne présentant « clairement » que les éléments factuels établis dès les premières dizaines de pages.

Dans un futur plutôt proche a lieu le Satori. L'espèce humaine titube quelques mois, quelques années, au bord de l'anéantissement, après qu'une bombe terroriste d'un genre tout à fait particulier – s'attaquant, visuellement, à la structure psychique et cognitive de l'esprit humain – a été utilisée à Islamabad, et ait rapidement contaminé des centaines de millions d'individus, bien au-delà des visées des apprentis sorciers ayant commis l'attentat.

Autour de ce point zéro du Satori, qui domine la chronologie des 70 années qui seront évoquées dans le roman (15 avant, 55 après), il s'agit bien de « refermer la boîte de Pandore » (que représente l'existence de cette bombe), boîte de malédiction ouverte par une poignée d'universitaires avant-gardistes « illuminés », avec le soutien de militaires dépassés par leur création et d'idéologues dévoyés à même de kidnapper le produit de leurs recherches conjointes… de la commission d'enquête internationale chargée d'établir les responsabilités du désastre et de traquer les coupables aux organisations plus secrètes s'auto-mandatant pour éradiquer le risque de récidive au plus profond possible, de base militaire japonaise en hôtel de luxe abandonné en Suisse, L.L. Kloetzer a su, comme dans le roman précédent, mais à la puissance 10, éviter le piège de l'essai futuriste bavard déguisé en récit.

Le roman suit au plus près quelques personnages, dont les puissances, les fragilités ou les faiblesses, à l'instar des deux consultants employés par CLEER, constituent les véritables moteurs du roman. Personnages d'enquêteurs dévoués, scrupuleux, voire doués, qui doivent toutefois s'inventer un destin individuel au-delà de la traque à laquelle ils se consacrent… Personnages, surtout, qui se réorganisent en permanence, qu'ils le veuillent ou non, autour de la figure centrale du récit, toute en beauté, en absence et en dissimulation, présence fantômatique mais pourtant bien réelle qui, créature fantastique nécessitant des trésors d'attention pour pouvoir exister, cherche elle-même une voie possible, une existence, en précédant les enquêtes pour mieux s'y fondre…

Car parallèlement à l'enquête devant clore le passé, l'espèce humaine décimée doit absolument s'inventer un futur, s'abstraire si possible d'une planète devenue trop dangereuse, tant que rôderont victimes en sursis et pièges symboliques à retardement. Dans cette quête d'univers nouveau où les plus pointus savoirs-faire en matière d'environnements informatiques ludo-poétiques ne peuvent que jouer un rôle essentiel, c'est peut-être de la fusion pourtant a priori impossible de ces désirs individuels contradictoires qu'une synthèse victorieuse pourra naître.

Un roman passionnant de bout en bout, dont l'écriture d'une rare précision technique reste nimbée, comme dans CLEER, d'une poésie diaphane, et dont la résonance, comme une ultime note de basse distordue mais porteuse, dure bien longtemps après la fin de la lecture.
Commenter  J’apprécie          142
Paru en 2013, « Anamnèse de Lady Star » est le fruit de la collaboration entre Laure et Laurent Kloetzer, (déjà co-auteurs de « Cleer » quelques années plus tôt) et a soulevé énormément d'enthousiasme lors de sa parution, ce qui lui a d'ailleurs valu d'être récompensé par plusieurs prix littéraires. Laurent Kloetzer est ensuite revenu à plusieurs reprises dans le même univers, que ce soit dans le roman « Vostok », qui se déroule quelque temps après les événements relatés ici, ou, plus récemment, dans la novella « Issa Elohim » parue dans la collection Une Heure Lumière du Bélial. Pour ma part, si j'avais énormément apprécié ma lecture des deux oeuvres précédemment cités, je dois avouer que celle-ci m'a laissée un sentiment bien plus mitigé. Posons un peu le décor : le roman est composé de plusieurs chapitres qui se déroulent à différentes époques classées de manière non chronologique. La première partie prend place dans une société qui pourrait tout à fait être la notre (à quelques petites exceptions près), dans laquelle des scientifiques et des militaires penchent sur une nouvelle arme capable de cibler les individus en fonction de leurs origines (on devine bien vite que les Blancs n'ont rien à craindre, et que ce sont les populations noires et arabes qui sont directement et volontairement visées). Seulement l'expérience tourne mal et aboutit à l'extinction d'une grande partie de l'humanité, toute origine confondue. La société qui émerge ensuite n'a toutefois pas grand-chose à voir avec celles mises en scène dans les romans de post-apo classiques, puisqu'il n'y est nullement question de course poursuite avec des zombies ou de rescapés en mode survie dans une nature redevenue sauvage. Les nouvelles technologies se sont, au contraire, encore un peu plus développées, et le mode de vie des survivants n'a finalement pas été si altéré que cela. Parmi eux, une jeune chercheuse en archéologie numérique se lance dans des recherches ambitieuses visant à prouver la présence d'une Elohim, une créature mi-extraterrestre mi-humaine, tout au long du processus de fabrication de la « bombe », et son influence sur plusieurs des événements majeurs qui ont suivi.

Si vous trouvez ce résumé complexe, dites-vous bien qu'il ne s'agit pourtant que d'une version extrêmement simplifiée de celle élaborée par L. L. Kloetzer dans ce roman qui n'est pas sans rappeler, par sa construction et sa volonté de faire perdre ses repères au lecteur, les ouvrages de Philip K. Dick ou de Christopher Priest (j'ai personnellement beaucoup pensé à « L'adjacent »). La lecture n'est en effet pas de tout repos et, si on prend dans un premier temps plaisir à suivre la trace de cette mystérieuse Elohim et à tenter de comprendre les enjeux dont il est question, j'avoue pour ma part avoir eu davantage de mal dans la deuxième partie, qui se fait encore plus sibylline et décousue. A cela s'ajoute que, changement d'époque oblige, l'ambiance et le style évoluent radicalement en fonction des chapitres qu'on pourrait parfois prendre pour des nouvelles à part, assemblées ici dans une sorte de fix-up (l'un d'eux a d'ailleurs déjà été publié sous la forme de nouvelle sous le titre « Trois singes » dans l'anthologie « Retour sur l'horizon » en 2009). Certes, tous sont liés par un même fil rouge qui prend de plus en plus d'ampleur au fil des chapitres, mais la lecture se fait néanmoins plus ou moins aisée, plus ou moins passionnante, en fonction des époques. Les deux premiers chapitres m'ont ainsi beaucoup enthousiasmée : le premier met en scène un attaché parlementaire français qui orbite dans l'entourage de scientifiques et d'artistes responsables de la création de la bombe, tandis que le second dévoile le témoignage du soldat à l'origine de son déclenchement. le décor est alors globalement posé, et l'intérêt du lecteur agréablement titillé. Et puis arrive le drame, désigné sous le nom de Satori, et on découvre alors un monde dont on ne comprend plus les codes, sans que l'auteur ne vienne jamais à notre secours pour contextualiser. Certains chapitres laissent échapper quelques indices, d'autres semblent totalement déconnectés du reste (et sont, par conséquent, encore plus difficilement compréhensibles), et la plupart vient de toute façon remettre en cause ce qui vient d'être énoncé dans le précédent. le concept d'Elohim, qui se trouve ici au coeur du récit, est quant à lui explicité trop rarement, et trop partiellement, si bien qu'on peine à cerner les enjeux pour les protagonistes.

« Anamnèse de Lady Star » est un roman extrêmement déroutant qui possède un charme certain mais donne trop peu de clés de compréhension au lecteur pour lui permettre de s'immerger dans ce monde futuriste dont on peine à cerner les contours et les spécificités. L'accueil unanimement enthousiaste qu'a rencontré le roman lors de sa sortie m'incite à penser que je suis complètement passée à côté de l'oeuvre, aussi vous encourage-je malgré tout à tenter l'aventure, d'autant que le reste de la bibliographie de l'auteur est d'un excellent niveau.
Lien : https://lebibliocosme.fr/202..
Commenter  J’apprécie          90
Il est des auteurs qui génèrent automatiquement l'enthousiasme à chacune de leurs publications. Laurent KLOETZER est de ceux-là depuis ses débuts, notamment avec sa fantasy très personnelle et, depuis 2010, sous la signature L. L. KLOETZER, qui s'avère être une entité à quatre mains composée de lui-même et de son épouse, Laure KLOETZER. En 2010 ils avaient produit un roman d'anticipation économique original et percutant ; en 2013 ils nous proposent un roman qui « fera date dans l'histoire de la science-fiction française », pour reprendre l'accroche de l'éditeur.

Anamnèse de Lady Star est un roman apocalyptique. Dans un futur indéterminé, mais que l'on sent proche, un attentat d'un genre nouveau a provoqué depuis Islamabad une pandémie sur la totalité de la planète. La plupart des responsables ont été arrêtés, mais une femme, l'inspiratrice de la secte à l'origine de l'attentat, est demeurée insaisissable. Or, sa seule existence est un risque puisqu'elle détient le secret de la fameuse bombe iconique qui décime l'humanité depuis plus d'un demi-siècle...

A partir de ce pitch L. L. KLOETZER fait de son roman une véritable traque. Autour de la date clé de l'attentat d'Islamabad (nommé Satori, qui désigne l'éveil spirituel dans le bouddhisme zen), l'auteur rend compte de différents témoignages de personnages qui ont croisé (ou cru croiser) la route de la muse de la secte, soit quelques années avant, soit quelques années après le Satori. Chaque témoignage donne lieu à un chapitre particulier, et chacun est doté de son propre style. Il y a ainsi des allers et retours dans la trame historique qui font du roman un récit éminemment non linéaire, jusqu'à l'objet même de la traque (« Que cherchons-nous ? Une femme, peut-être, une idée, sûrement »).

Si cette non linéarité rend le suivi du roman complexe, ce n'est rien par rapport à la narration. Car quel que soit le personnage mis en scène cette narration est toujours dense, pleine de références à des faits que le lecteur ne peut guère appréhender, chaque témoignage étant relié aux autres d'une façon ou d'une autre. C'est aussi en cela que L. L. KLOETZER est l'auteur d'une véritable prouesse littéraire, puisqu'il parvient à relier la multitude d'éléments épars de son récit pour aboutir à une trame complète et cohérente qui tient en éveil le lecteur jusqu'à la conclusion.

Bien sûr cette lecture nécessite une attention de tous les instants. Bien sûr l'auteur maintient dans l'ombre bon nombre d'éléments de l'intrigue. Mais c'est aussi cela qui nous fait bénéficier de quelques fulgurances sur l'état de nos sociétés contemporaines (« Personne ne meurt. Quelque chose s'efface. Quelque chose n'a jamais existé »). C'est surtout cela qui fait travailler l'imaginaire du lecteur et donne tout son sel à un roman qui, de fait, est bel et bien anachronique dans un genre littéraire bien trop souvent standardisé.
Commenter  J’apprécie          80
La dernière page s'est refermée et je n'avais pourtant guère envie que le voyage s'achève.

Il s'agit bien d'une quête. La quête de la vérité. Retrouver celle qui sait, qui a besoin de vivre, sans pouvoir réellement exister par elle-même et pouvant prendre tous les visages et noms possibles dont ceux que vous voudrez bien lui donner. Instrumentalisée, idéalisée, sublimée. Evanescente, fragile, mystérieuse, manipulatrice, ingénieuse… Divine mais attachante.

La quête de la vérité et, en quelque sorte, un parcours initiatique. Rien n'est hasard. Tout n'est que point de vue, souvenirs, recherche de preuves. Existe t-elle vraiment ?

Au-delà des destinées individuelles et du monde qui sombre, le thème central est la foi quelle que soit sa forme à mes yeux. Les références y sont nombreuses et c'est bien tous les visages – et de ce qu'en font les humains - de la Foi et des Religions que peut refléter Celle-qui-sait à l'image d'Hypatie d'Alexandrie (peut-être ?). L'attentat à islamabad (la ville de l'Islam) avec « la bombe iconique », les elohims (Dieux en hébreu, pluriel d'eloha : la secte m'a d'ailleurs fait spontanément penser au mouvement Raelien), le satori (l'éveil spirituel bouddhiste), et les symptômes du mal qui ronge l'humanité. L'aveuglement, mains levées vers les cieux. Elle-qui-est-trois, la trinité étant un symbole connu, initialement païen mais repris par le christianisme si je ne m'abuse, faisant également écho à Hécate dont l'avatar se fond sur quelques pages. Et peut-être bien, la technologie et les nouveaux mondes pouvant en découler…

Bref, n'en-ai-je pas déjà trop dit ?

Ce roman a su me réconcilier avec le genre or ce n'était pas gagné. J'ai pourtant été agréablement surprise notamment par la bombe iconique et comment les fils se lient et se délient jusqu'à former une toile arachnéenne dans laquelle tout s'imbrique. Exit le nucléaire, le virus échappé d'un laboratoire secret semant des zombis cannibales surexploités jusqu'à l'indigestion… ! Ne riez pas, je n'en peux plus… ;)

J'ai joué, je me suis amusée des références, des noms, des lieux… J'ai aussi fouillé les archives pour écouter toutes les références musicales disséminées jusqu'à une chanson indienne et même « Elle-qui-est-trois », (D'ailleurs, le trio vocal concerné saurait-il tous les éloges se trouvant dans l'ouvrage ?), pour m'immerger d'autant plus sans jamais réellement me perdre dans ce récit labyrinthique. J'ai pris mon temps jusqu'à ressentir les changements de style entre les deux auteurs, mêlant brutalité et subtilité. L'alchimie a pris.
Commenter  J’apprécie          83
Difficile de décrire ce roman, pourtant excellent. je vais essayer d'en tracer les grandes lignes ...Ce roman raconte comment vivent ce qui ne vivent que par le regard des autres.Ce roman raconte, d'une certaine façon, comment chasser les terroristes.Ce roman raconte notre époque dans ce qu'elle a de si déprimant.Ce roman est peut-être le meilleur roman de zombies ayant existé.Ce roman remet au goût du jour l'urban fantasy.Bon, je vais quand même essayer de détailler.De nos jours, un groupe de recherche s'interroge sur l'existence des signes de pouvoir permettant de commander d'autres humains simplement en leur montrant ce signe.Un autre groupe en tire une arme, qui sera utilisée de façon parfaitement dramatique (génocide mental compris).Dans le monde qui se reconstruira après le génocide, les criminels seront tous condamnés à mort sauf une : la muse qui les a inspiré ... Si tant est qu'elle ait existé.Longtemps après le premier proçès, des historiens mènent l'enquête pour vérifier si elle a bien existé, et, si c'est le cas, tenter de la retrouver pour l'arrêter.Encore une fois, cette description est fausse.Parce que la première chose que réussit ce roman, c'est à toujours se placer juste au-delà du seuil de la compréhension. Par sa construction, d'abord : les différentes étapes de l'enquête sont racontées sous la forme d'un fix-up, avec des narrateurs différents, des modes de narration différents, des points de vue différents, et donc des conclusions pas forcément cohérentes auxquels le lecteur doit rendre sa cohérence, bien aidé par l'auteur.Par sa cible ensuite : la Lady Star du titre ne laisse sa trace que par l'absence de traces, et il faut donc, comme l'enquêtrice, voir où les récits sont fragmentaires, combler les trous et faire un vrai travail d'enquête, ce qui évidement améliore notoirement l'implication du lecteur.Par son décor enfin : il y a dans cette histoire une fuite vers les étoiles, qui est à peine décrite. Il y a aussi la catastrophe de la bombe iconique, qui est surtout un élément historique. Il y a de la même manière la création d'univers virtuels, qui sont eux aussi à peine présentés. Tout cela change terriblement, et en bien, de tous ces romans d'anticipation remplis d'infodumps qui expliquent chaque élément d'histoire, de décor ad nauseam. Là, l'utilisation de l'ellipse m'a permis de me concentrer sur les aspects clé du récit, et je dois dire que c'était vraiment mieux sans les 300 pages qui auraient dû découler de toutes ces explications.Clairement, tout cela m'a fasciné.Et cette fascination tient aussi à la façon dont le premier récit ancre ce roman, de façon quasi-prophétique, dans l'actualité : qui peut prétendre aujourd'hui qu'il n'existe pas, dans les organes stratégiques, de militaires qui réfléchissent à l'utilisation de la mémétique en tant qu'arme ? Qui peut prétendre, au vu de l'actualité toujours, qu'il n'y a pas de volonté politique de détruire certains groupes de personnes plus ou moins bien identifiés ? Utiliser cette peur comme ferment d'un roman, mais ne pas se laisser emporter par cette peur, c'est quand même assez balaise.Comme l'est aussi, d'ailleurs, l'utilisation de la Suisse comme paysage. Evidement, les Kloetzer habitent la Suisse, et le paysage montagneux peut nourrir durablement l'imaginaire, et c'est tant mieux.Finalement, et c'est peut-être le plus incroyable, il y a quand même là-dedans une réflexion forte sur ce qu'est la personnalité : vivons-nous par nous-même ou au-travers des autres ? le fait que la cible de la poursuite n'existe que par les traces qu'elle laisse chez les autres m'a donné, plusieurs fois, l'impression qu'elle n'était qu'un fantôme, une obsession n'existant que dans les yeux de ses poursuivants. Ou plutôt un souvenir qu'il faut expurger. D'ailleurs, le fait que cette enquête passe avant tout par des souvenirs, qu'ils soient humains ou enregistrés, en dit beaucoup : si personne d'autre que les enquêteurs ne voit la cible de l'enquête, existe-t-elle réellement ? Et les enquêteurs eux-mêmes, si leur seul travail est d'enquêter sur une ombre, sont-ils fous ? En un sens, ce roman m'a fait penser aux [b:Menhirs de glace|1960500|Menhirs de Glace|Kim Stanley Robinson|https://d.gr-assets.com/books/1190913779s/1960500.jpg|1963545] de [b:KS Robinson]. En effet, dans les deux cas, tout repose sur la mémoire, mais la mémoire ne peut plus être considérée comme fiable. Alors ? Cette quête peut-elle s'arrêter un jour ? Ou autrement que par la mort des enquêteurs ?Comme vous le voyez, cette oeuvre est riche d'aspects parfaitement passionants, et présente l'avantage de n'offrir que bien peu de réponses. du coup, pour être honnête, c'est une oeuvre à lire absolument ... et pas seulement pour les fans de SF.
9782266239721"
Commenter  J’apprécie          10

Citations et extraits (47) Voir plus Ajouter une citation
Nous l’avons crue. Nous avons bien voulu accepter la mort de Legorre. À l’époque de cette lecture, nous n’avions pas encore navigué, nous ignorions qu’il est très dangereux de projeter la carte sur le paysage, car dans ce cas on trouve toujours ce qu’on veut chercher. Alors qu’il faut plisser longtemps les yeux à regarder les rochers noirs affleurant dans l’écume, chercher tout autour, sans préjugés ni idées préconçues, comme si on apercevait cette côte pour la toute première fois. Et enfin, les yeux piquetés de sel, redescendre à la table à cartes.
Qu’avons-nous appris depuis ? Que le contenu de la confession Legorre a été diffusé à l’ensemble des services de renseignements coalisés deux jours seulement après le Satori. Que Rastogi savait donc parfaitement ce qu’il pouvait s’attendre à trouver. Il était très tentant pour lui de retrouver le corps du terroriste qui avait posé et armé la bombe… Nous ne pensons même pas à l’avantage personnel que l’homme aurait pu en retirer, plutôt à l’impact idéologique d’une telle découverte, d’une telle preuve. Madame Pradesh n’avait aucune raison de mettre en doute le témoignage du capitaine. Les choses ont changé.
Commenter  J’apprécie          30
Que cherchons-nous ? Une femme, peut-être, une idée, sûrement.
Comment la nommer ? Vous m’avez posé la question, au début. Puis elle s’est installée là, entre nous, un objet de travail, une quête partagée. Je vous entends parler d’elle. Vous dites "Le dossier fantôme", vous dites "Marguerite", vous dites "Nomen Rosae". Je n’ose rien poser. Nous voulons capturer de la fumée à l’aide d’un filet impalpable, elle se tient là, devant nous et si je la nomme, elle, celle à laquelle vous voulez me faire croire, je crains de la précipiter, de la projeter dans un référentiel où elle n’apparaîtra plus. Je ne suis ni un poète ni un rêveur. Je ne poursuis pas un idéal féminin. Je me moque de savoir si elle existe, si elle nous manipule, si elle nous ment. Je me moque de lui donner un nom. Nous avons de bonnes raisons de penser qu’elle était dans l’entourage d’Aberlour. De bonnes raisons, cela me suffit. Le témoignage de Herriman, les corps de Giessbach, le témoignage de Longtun que vous ne connaissez pas encore. C’est assez. Elle est plastique, elle s’est coulée dans leurs volontés, et même si ses intentions ne sont pas mauvaises, quelqu’un pourrait la manipuler, tenter de retrouver les gestes de leur foutue calligraphie, les signes de la bombe. Rappelez-vous : elle se tient en haut d’une montagne de milliards de cadavres.
Commenter  J’apprécie          20
Un des chefs de gang lâche une rafale vers le ciel gris et noir, vous prenant tous au dépourvu, les chevaux paniquent et s'élancent, quelques cavaliers tombent, pas toi, ton cheval cauchemar se lance, roule des yeux fous, tu t'accroches debout sur tes étriers de fer, tu accompagnes le galop, tu jouis de la vitesse, de la puissance, tu le ménages, tu prendras une meilleure position dans quelques centaines de mètres, quand les plus jeunes se seront épuisés.
Commenter  J’apprécie          60
La maison est une coquille fragile contre la pluie et la nuit. Dehors, le vent courbe les roseaux, agite les branches des arbres qui flottent contre les murs comme des mains aux doigts raides. L'eau gémit, les animaux gémissent, la maison craque. Magda se recroqueville sous le vieux sac de couchage, la tête dans les bras, elle rêve des sauvages qui errent sur la route, dans son rêve ils ont la peau rouge, une démarche puissante et légère, des yeux verts de chats ; ils portent dans chaque main un léger poignard effilé sous la pointe duquel la chair n'offre aucune résistance et ils passent et repassent sur la digue, ils trouvent son vélo, ils comprennent que le vieux n'est pas seul, ils descendent dans la nuit, osent s'approcher de la maison, le vieux n'est pas seul mais personne ne les entendra. Magda s'endort.
Commenter  J’apprécie          20
Arrive un moment où les faits ne coïncident plus, où l'on échafaude les hypothèses les plus folles sur les détails les plus ténus. Où l'on sait, sciemment, que l'on se base sur de fausses prémisses. Et où, pourtant, la vérité se laisse atteindre. Par l'imagination. Par le coeur. Par notre intime conviction. Par tout ce que nous pouvons dire et que nous ne savons pas expliquer.
Commenter  J’apprécie          40

Videos de L.L. Kloetzer (2) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de L.L. Kloetzer
Si, au Bélial', on aime la science-fiction, cela ne nous empêche guère de faire des détours par la fantasy, comme en témoignent les deux séries “Noon” de L.L. Kloetzer et “Mille Saisons” de Léo Henry. Le deuxième tome de “Noon”, intitulé “La première ou dernière”, est sorti fin mars tandis que “La Géante et le Naufrageur”, inaugurant “Mille Saisons”, est sorti début juin. Cela vaut bien une discussion avec les auteurs, pour aborder les origines de leurs projets respectifs, la question des cartes et des illustrations, leur rapport à la fantasy, entre autres choses ! Animation : Erwann Perchoc Illustration : Philippe Gady https://www.belial.fr/legacy/a/leo-henry/la-geante-et-le-naufrageur https://www.belial.fr/legacy/a/l-l-kloetzer/la-premiere-ou-derniere
+ Lire la suite
autres livres classés : science-fictionVoir plus
Les plus populaires : Imaginaire Voir plus


Lecteurs (296) Voir plus



Quiz Voir plus

Les plus grands classiques de la science-fiction

Qui a écrit 1984

George Orwell
Aldous Huxley
H.G. Wells
Pierre Boulle

10 questions
4889 lecteurs ont répondu
Thèmes : science-fictionCréer un quiz sur ce livre

{* *}