STEFAN GEORGE (1868-1933)
Que s’est-il donc passé ? Je me connais à peine :
Je suis le même encore et plus que je n’étais.
voici comme autrefois l’amour et les hommages,
l’on me cherche toujours et bellement s’apeure.
Rien ne manque : voici les jours de mes étés,
le rêve hardi, la molle lèvre et son baiser,
mais je sais, au sursaut plus fier de tout mon sang,
que j’étais pauvre encore au temps de ma défense
et qu’on ne s’appartient qu’après s’être donné.
Richard Dehmel
Der Arbeitsmann
Wir haben ein Bett, wir haben ein Kind,
mein Weib!
Wir haben auch Arbeit, und gar zu zweit,
und haben die Sonne und Regen und Wind,
und uns fehlt nur eine Kleinigkeit,
um so frei zu sein, wie die Vögel sind:
Nur Zeit.
Wenn wir Sonntags durch die Felder gehn,
mein Kind,
und über den Ähren weit und breit
das blaue Schwalbenvolk blitzen sehn,
oh, dann fehlt uns nicht das bißchen Kleid,
um so schön zu sein wie die Vögel sind:
Nur Zeit.
Nur Zeit! wir wittern Gewitterwind,
wir Volk.
Nur eine kleine Ewigkeit;
uns fehlt ja nichts, mein Weib, mein Kind,
als all das, was durch uns gedeiht,
um so kühn zu sein, wie die Vögel sind.
Nur Zeit!
832 - [Université n°138, p. 119]
CET APPEL EN MOI... (Ricarda Huch)
Pour être près de toi
j’accepterais la détresse, le danger,
Je laisserais les amis, la maison
et l’abondance de la terre.
Il me tarde vers toi
comme au flot vers la plage,
comme à l’hirondelle d’automne
vers les pays du Sud,
comme au fils de l’Aipe vers le pays,
quand dans la solitude
il songe aux montagnes, la nuit,
à leur neige sous la lune...
REVERDIE (Hugo von Hofmannsthal)
L’aimée a dit : « Tu peux aller,
tu ne m’as juré nul serment.
Les hommes, il faut bien qu’ils soient libres ;
ils ne sont pas nés pour être fidèles.
Va-t’en tes routes, mon ami !
Ouvre tes yeux de pays en pays,
oublie ta fatigue en chaque lit,
prends par la main plus d’une femme.
Où le vin est amer à ton goût,
bois de la malvoisie,
— et si ma bouche t’est plus douce,
à ton aise, reviens ici ! »
Heinrich Heine
Quand je regarde dans tes yeux,
S'apaisent ma peine et ma fièvre,
Mais quand je puis baiser tes lèvres
Je recouvre force et santé.
Quand je te presse sur mon cœur
Je sens un céleste bonheur,
Mais lorsque tu me dis: Je t'aime.
C'est alors qu'il me faut pleurer.