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EAN : 9782363711670
Pierre-Guillaume de Roux Editions (25/08/2016)
4.75/5   2 notes
Résumé :
Ce récit évoque le destin d'un livre, sans jamais le nommer. Multipliant les narrateurs (l'écrivain, le Christ, un vagabond, un malade mental), le texte est en permanente construction et reconstruction. Dans cette expérimentation littéraire, l'auteur multiplie les références, à Rimbaud, Dominique de Roux, ou encore à Jack Kerouac.
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
« Ce roman ouvre à une exégèse vide, il est sans commentaire, toute critique est impossible, ou poudreuse, sauf celle d'un enfant trépané. » Nous voilà avertis : impossible de rendre compte de ce roman. Impossible même de le lire, sauf à être un « lecteur merdeux », un « lecteur mystique », un « lecteur amateur de beaujolais nouveau »… et quelques autres amabilités dignes du meilleur Baudelaire. Alors pourquoi relever le défi ? D'abord parce que nous n'avons pas le choix. Happés par le livre, nous sommes qu'on le veuille ou non partie prenante à son existence : « Lecteur cru, le miroir entre nous est brisé ; nous sommes corédacteurs de ce texte. »
Ensuite, parce qu'un jour viendra où Christian Ganachaud sera reconnu comme un des écrivains majeurs du XXIe siècle, j'en suis convaincu. Mais ce jour n'est pas venu : nous nous retrouvons face à cet objet comme un lecteur des Lettres de mon moulin devant les Chants de Maldoror. Incapables d'en comprendre la portée, d'en deviner même le projet. Mais on sent, à certaines formules, que le génie a soufflé ici.
[...]
Alors, oui, il est plus simple d'invoquer la folie, et l'auteur même nous y engage. Il parle complaisamment de sa folie, de son traitement. Il a décidé d'écrire jour après jour toute la durée de son internement, seule la fin de celui-ci mettra un point final à cette longue logorrhée, « sans mon consentement ». Mais c'est sa maladie mentale, revendiquée, qui le met « dans un état christique ». Et la frontière est mince entre génie est folie. Celle-ci n'est peut-être que l'émergence d'une autre conscience, une « électrochristolyse ». Christian Ganachaud se sent alors le « nègre d'une puissance inférieure », un « écrivain fissile : c'est-à-dire écrivant dans une fissure de la lumière ».
Et nous avons parfois envie de la franchir, cette frontière, avouons-le. « Pour moi ne comptent que ceux qui sont fous de quelque chose, fous de vivre, fous de parler, fous d'être sauvés, ceux qui veulent tout en même temps, ceux qui ne bâillent jamais, qui ne disent pas de banalités, mais brûlent, brûlent, brûlent comme un feu d'artifice. » Colloquer tous ceux qui n'entrent pas dans les normes mentales est un réflexe de survie de la part de la sancta mediocritas qui cimente les civilisations. « Les psychiatres sont des réducteurs de têtes, de la famille des Pygmées », affirme Christian Ganachaud, car « les structures psychiatriques font d'un oiseau un ver de terre ». En fin de compte, c'est la société qui différencie le chamane du schizophrène. « L'un devient un héros, alors que l'autre est bon pour l'asile. »
[...]
Mais si l'on se souvient que la sagesse de l'homme est la folie de Dieu, et vice versa, on tâche de pénétrer dans cette pensée blessée à vif. Non sans effroi, car « après l'absolu vient une pensée crue » et l'auteur nous avertit qu'il « extirpe le sacré hors de la merde ». Pour le lecteur comme pour l'écrivain, la seule façon de s'ouvrir à l'inconnu est le silence, qui tient un rôle primordial dans cette écriture totale. « le silence fait partie de ma langue, comme le souffle sur la mer, le vent entre les cités. Je prends le silence comme construction du discours. Tout ce qui n'est pas dit revient. le silence coud mon corps. » Mais ce silence n'est pas le refus de la parole, il s'écrit « par effraction du soleil », pour laisser la place à tout ce qui dépasse les mots, tout ce qui, un jour, les remplacera. « Quand le langage aura disparu, le silence parlera. » En attendant, avec les mots limités de la langue, on ne peut que mettre en valeur, comme par défaut, cet absolu qui ne se laisse pas saisir. « Mes écrits sont un exosquelette du Verbe. »
le silence n'est que le premier pas vers l'abîme. C'est un appel d'air à tous les mots, tous les livres, toutes les langues. Dans un premier temps, l'auteur garde encore un semblant de maîtrise. On voit passer du Ronsard, du Villon, du Rutebeuf, du Joyce, on croit à des réminiscences littéraires. On bute sur une formule en latin, en italien, en grec, en anglais, en hindi, on croit à une coquetterie d'auteur. Aux allusions christiques répondent les dieux hindous ou égyptiens, les Walkyries ou les Tuatha Dé Danann, on songe à une mystique oecuménique. Mais peu à peu ces citations, ces allusions s'amplifient, deviennent la matière même du récit, dans un cadre dont l'auteur entend malgré tout conserver la maîtrise. « Je leur laisse la place de mes personnages, les écrits étrangers ; volontairement. La seule chose qui me reste : la maîtrise de l'espace de mon livre ; les auteurs se rencontrent, s'affrontent, se répondent ; parlent tous, finalement, la même langue ; mais uniquement dans mon désert de lumière voulu, posé, installé. » La disparition du personnage est une des réflexions capitales du roman contemporain, en réaction au « roman psychologique petit-bourgeois » du XXe siècle. L'audace ici est de faire des textes recopiés en toutes les langues les personnages même d'un récit évanescent. Surgissent tout à coup les trente-neuf stations du soufi, suivies de celles du chemin de croix. Ce ne sont pas des citations, mais des personnages qui se croisent.
[...]
« Mon livre est une fracture sur le sol littéraire. » Une fracture : il s'agit en effet de briser toutes les habitudes d'écriture, comme on brise les jambes du crucifié. « J'écris dans un style saccadé, haletant, comme les ultimes paroles d'un crucifié », « Je trouve une écriture stigmatisée ; un texte scarifié par des phrases ouvertes au rasoir ». Mais cette « ouverture » du Verbe est libératrice. « Je veux que le mot fendu “prière” se remplisse de crépuscules inouïs et d'aurores sacrées. » Pour cela, il faut briser jusqu'au conseil de Malherbe de remettre vingt fois son ouvrage sur le métier : l'auteur entend écrire sans brouillon ni rature.
La dislocation, en tout cas, est menée à son terme. On passe subitement à un journal écrit « comme une pédale suceuse d'héroïne divinatoire », journal de l'auteur, d'Antonin Artaud, d'identités aléatoires, qui se balade en 1884, en 1955, puis dans des jours impossibles, Lundi 31 février… 1er vendémiaire an I… Samedi 36 juillet…
[...]
Cette annihilation qui parfois tourne au massacre permet-elle à autre chose d'éclore ? Il n'est pas temps de le dire. Il a fallu un siècle pour entendre Lautréamont. Peut-être est-ce l'espoir que l'on peut laisser à Christian Ganachaud, qui termine par cette exclamation attribuée à Boccace devant le dépiautage des livres du Mont-Cassin : Nunc ergo frange tibi caput pro faciendo libro ! Maintenant, casse-toi la tête à écrire des livres !
(critique complète sur www.jean-claude-bologne.com/lectures19.html#ganachaud
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Je n'ai pas pu décrocher du dernier livre de Christian Ganachaud, le chant de la merveille du monde, tellement cette lecture était prenante. C'est un roman-poésie écrit par un auteur maudit, à mi chemin entre Rimbaud et Christian Bobin. Là où Bobin contemple avec bonheur la transfiguration du monde, Ganachaud se coiffe gaillardement avec la couronne d'épines, et l'arbore fièrement comme un trophée. Il n'en est pas moins lumineux, mais d'une lumière sombre et âpre qui transperce et qui noie dans une eau croupie grouillante de vie. Ganachaud n'est pas masochiste, il traduit une force de vie qui veut se relever du caniveau pour déployer des ailes embrasées et s'envoler vers le ciel.
Il est beaucoup question du ciel, ou du soleil, d'anges ou de diverses formes d'un souverain bien. Ceux ci sont mêlés aux affres et aux vicissitudes évoquées par le narrateur. le texte explore ainsi le mythe de l'échelle de Jacob, cette vision relatée dans la bible d'une échelle entre la terre et le ciel, parcourue par les anges, un rêve prophétique sur une future alliance entre Dieu et les hommes. Lire ce roman me fait l'impression de découvrir l'échelle de Jacob sous de différents angles, une échelle qui ne relierait pas que le ciel et la terre, mais aussi les enfers sous toutes leurs formes. La lie évoquée par Ganachaud se sublime par le procédé littéraire certes, mais aussi par la passion et l'aspiration aussi dévoyée soit-elle au sublime et à la redemption.
Le narrateur se confond avec son roman, il se prétend libre et pourtant se défend sans cesse vis à vis d'un lecteur dont il tente incessamment de se distancier. Il est littéralement crucifié sur cette échelle de Jacob, cloué à une hauteur suffisante pour voir la boue d'ici bas avec recul, mais ses pieds de géant traînent encore dans la charogne, stoppé dans son élan vers le salut, tel un albatros baudelairien, il tente de déployer ses immenses ailes chargées de boue.
C'est une expérience sublime que de tourner ces pages, et de découvrir chapitre après chapitre cet hymne, ce chant général d'un monde contemporain à l'agonie, étouffé dans son vomi, gorgé d'overdose et assoiffé de néant.
Merci, merci!
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Au fin fond de l’asile, nous les souffrants, les gisants, les orants, de notre mal personne ne se rit. La vie est belle. Je n’ai aucun message à passer, je ne suis témoin de rien.
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Je suis à chaque mot une falaise qui tombe dans la mer.
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Christian Ganachaud : Les Aventures des frères Ganache à la recherche de Dieu
Installé au Rostand, devant les grilles du jardin du Luxembourg, Olivier BARROT reçoit Chritian GANACHAUD pour parler de son livre "Les Aventures des frères Ganache à la recherche de Dieu" publié aux Editions le Rocher. Olivier BARROT lit les premières lignes du roman puis donne la parole à son invité.
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