Anna Langfus, née le 2 janvier 1920, comme Anna Regina Szternfinkiel, à Lublin, à 175 kilomètres au sud-est de la capitale polonaise, a connu une courte existence de souffrances dans sa Pologne natale et une brève vie de succès littéraires en Français, couronnée par le Prix
Charles Veillon, en 1961 pour son ouvrage autobiographique "
Le sel et le soufre" et l'année suivante le Prix Goncourt pour "
Les bagages de sable".
Une crise cardiaque a mis fin, en mai 1966, à une carrière littéraire plus que prometteuse. Au moment de sa mort, à 46 ans seulement, Anna était en train d'écrire son quatrième roman. Son troisième roman "
Saute, Barbara" de 1965, a bénéficié d'une adaptation cinématographique par François Dupont-Midi, sous le titre "Pour un sourire" en 1970, avec dans les rôles principaux
Bruno Cremer, Marina Vlady,
Philippe Clay et Isabelle Missud.
Outre des romans, elle a produit 4 pièces de théâtre et une pièce radiophonique, et a collaboré à d'autres textes, entre autres une biographie du compositeur
Frédéric Chopin.
La petite narratrice de 14 ans est gravement perturbée par la guerre, pendant laquelle elle a perdu ses parents et son frère Jacques.
Elle commence ses journées par dire "merde" et les passe en traînant dans les rues, en espérant un miracle, et en se reposant sur un banc de parc.
C'est ainsi, assise sur un banc de parc qu'elle fait la connaissance d'un vieux monsieur qui propose de s'occuper d'elle et de protéger celle qu'il baptise gentiment Maria.
Michel Caron est un médecin à la retraite qui a coutume de promener son grand chien Lomax.
Peu après l'ancien toubib invite notre jeune orpheline à le joindre dans le Midi, où il peut s'installer dans la maison au bord de la mer d'un pote en voyage.
Maria accepte, sans grande conviction, mais comme elle s'ennuie...
Là-bas, elle rencontre un petit groupe de jeunes avec qui elle descend à la plage et apprend à nager.
C'est cependant les rapports compliqués entre Michel et Maria qui forment l'essentiel du récit ensemble avec les réactions souvent imprévisibles d'une gamine fortement traumatisée par les horreurs de la seconde guerre.
Dans quelle mesure le roman est autobiographique est difficile à déterminer, mais il est évident que l'auteure a pu décrire la psyché de Maria avec une exceptionnelle précision du fait de sa propre expérience dramatique pendant cette guerre.
Comme Juive Anna Langfus a vécu les abominables ghettos de Lublin et Varsovie. Comme résistante, elle a été arrêtée par la Gestapo, violemment torturée et emprisonnée jusqu'à sa libération par l'armée soviétique. Son jeune mari, Jakub Rajs, a été fusillé par les Boches.
Après la guerre elle a émigré en France, s'est mariée avec Aron Langfus (1910-1995), un rescapé juif polonais des camps, avec qui elle a eu, en 1948, une fille qu'elle a nommée... Maria.
En 1938, avec son premier mari, la très jeune Anna a suivi des cours d'ingénieur à l'École des textiles à Verviers, en Belgique, jusqu'à l'invasion de son pays natal par la peste brune.
Bien que le ton du roman soit naturellement sombre,
Anna Langfus n'a pas oublié par ci par là une pointe ironique, comme à la page 49 : "Parfois ses yeux se plissent, son nez s'élargit et je comprends qu'il me sourit".