L'esprit de Lewis vacille. La perte tragique de sa mère, et l'héritage disproportionné qu'il en reçoit, le poussent à la fois à se retrancher et à se secouer : il va devenir l'écrivain qu'il a toujours voulu être.
Bertrand Santini parle-t-il du deuil ? Fait-il une caricature grotesque de l'écrivain (page blanche, muse, comportement de diva) ?
Un peu de tout ça, sûrement. Il faudra lire le 2ème (et dernier) acte pour bien saisir toute la portée de l'intrigue.
En attendant, ce 1er tome offre le portrait d'un jeune homme perdu, entouré de femmes avec qui il ne parvient pas à communiquer clairement (à l'exception de sa chienne, avec qui il communique non-verbalement, ce qui permet une relation entière et sans faille...).
Face à un livre qui refuse de s'écrire, une vie qui semble sans réponse, Lewis se tourne vers la mort, vers un fantôme, un esprit qu'il est le seul à voir. L'esprit de Lewis cherche aussi des réponses.
Deux âmes perdues peuvent-elles s'entre-aider ? Ou sont-elles destinées à se plonger l'une-l'autre encore plus profondément dans les ténèbres ?
Avec
Hugo de la Nuit déjà, Santini mettait en place une conversation avec les morts, pour voir ce que les fantômes pouvaient apprendre aux vivants, et inversement.
Augmenté ici des thèmes fantastiques du XIX° siècle, l'auteur explore les connivences spirite-esprit, la solitude, l'art, et le besoin de réponses exactes face aux horreurs de la vie et de la mort.
Le style reste pourtant très fluide, plein de facéties, d'intelligence et de passion.
Ce sont les dessins qui apportent le sérieux de l'époque, entre gothique lugubre, romantisme noir, et émerveillement spectral.
Les planches sont empreintes de poésies élégantes, d'un soucis extrême du détail fiorituresque et de couleurs étudiées avec soin, tout en conservant une lisibilité exemplaire.
Une BD à la fois légère et dense, qui plaira forcément aux Santinelles (les fans de Santini, je viens de l'inventer, c'est cool non ?) et aux amoureux du XIX° fantastique.
Si comme moi, vous faites partie des deux groupes, vous savez ce qu'il vous reste à faire.