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EAN : 9782738400697
173 pages
Editions L'Harmattan (01/01/1988)
5/5   2 notes
Résumé :
L'Occidentalite (Gharbzadegui) ou l'étincelle qui annonce le feu, la voix qui prélude au tumulte. Un texte qui dérange, où il est question d'un mal bien connu de nos jours. Dans un élan de passion contenue, l'auteur en décrit les causes et les effets dans son pays : l'Iran. On est sensible au choc d'une vérité dont les échos multipliés n'en finissent pas de susciter une mine réflexion. Dans sa version définitive, cet essai date de 1962. Il se situe en un point bien ... >Voir plus
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
C’est aussi au cours de ces trois siècles que l’Occident, avec la machine, est enfin parvenu à des progrès gigantesques qui réclamaient le marché politique du monde : pour acquérir des matières premières bon marché et pour vendre des produits manufacturés. C’est précisément au cours de cette période que nous nous sommes endormis derrière les boucliers que nous avions dressés par peur des Ottomans.

Ces derniers, l’Occident, non seulement les dévora, mais de chacun de leurs tibias fit une massue pour le jour où les peuples d’Irak, d’Égypte, de Syrie et du Liban s’insurgeraient. Très vite, c’est contre nous qu’il est venu à la charge. Pour ma part, c’est là que je décèle la source de l’occidentalite : dans l’expansionnisme de l’industrie occidentale d’une part, dans l’impotence du gouvernement national fondé sur une tradition d’écrasement des sunnites d’autre part. Depuis que nos chefs religieux ont oublié que les agents de l’oppression ont envahi le corps gouvernemental, depuis le temps où Mir Dâmâd et Majlessi ont servi (au moins par leur silence consentant) la cause des Safavides en cautionnant la propagande chi’ite, et ont falsifié les hadith, depuis ce temps-là, coursiers de l’entité islamique, nous sommes réduits au rôle de gardiens de tombeaux et de ramasse-miettes sur la nappe de l’innocence des martyrs. Depuis que nous n’envisageons plus pour nous ce destin, nous nous contentons de le vénérer en gardiens de cimetière. J’ai montré cela dans Noun valghalam.
(…)
N’allez pas penser que je prends la défense des Turcs ottomans. Certes non. Je veux dire que c’est à cause de ces affrontements locaux – sans gloire et sanglants –, et de l’anémie qui en a résulté, que nous, Moyen-Orientaux, sommes aujourd’hui dans une si mauvaise posture. Je me demande si nos doctes historiens ont ou non le droit de justifier cette politique de zizanie religieuse. Peut-être que si les Ottomans avaient triomphé, ou si les Safavides, sous la bannière du chi’isme, n’avaient pas entonné leur propre musique, nous serions actuellement une province du califat ottoman. Ma foi, ne sommes-nous pas, à présent, une des provinces du royaume d’Occident ? Depuis l’avènement de l’islam en Iran, six à sept siècles durant, nous sommes restés nous-mêmes, tandis que formellement nous étions une province du califat de Bagdad.
(…)
Si l’on a l’esprit un peu ouvert, on discernera combien de drames se sont abattus sur l’Orient et sur nous tous (qui, pour les Occidentaux, sommes du Moyen-Orient), drames dus à une politique de discorde, à ces provocations à la guerre et au sang – pour quelle gloire et quels résultats ? Drames auxquels poussaient sournoisement les cercles religieux d’alors, les ambassadeurs chrétiens d’Occident étant trop contents d’exciter les zizanies sunnites et chi’ites ! (pp. 53-54 & 60-61)
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Il fut un temps où un simple verset du Coran, ou l’évocation en arabe d’un fait relaté d’âge en âge, fermait la bouche de tout le monde et remettait à sa place tout opposant ; aujourd’hui, deux mots sur n’importe quoi, pourvu qu’ils soient repris de la bouche d’un Occidental, suffisent à nous clouer le bec. A cet égard, on voit les abîmes de ridicule où nous sommes tombés quand, à la moindre prédiction des mages et astrologues occidentaux, la terre entière est secouée et se rependent terreur et panique. Désormais, les révélations divines ne sont plus pêchées dans les Livres saints, mais dans les livres venus d’Occident, ou dans la bouche des journalistes des agences Reuter, United Press, etc., grosses fabriques d’informations vraies ou fausses ! Sans doute, les ouvrages occidentaux sont-ils les seuls à traiter des méthodes scientifiques, du principe de fabrication des machines, de technologie et des fondements de la philosophie occidentale. Avec celle-ci, l’homme de l’occidentalite n’a rien à avoir ; néanmoins, lorsqu’il prétend se soucier de l’Orient, il le fait à travers les sources occidentales.

C’est ainsi que les catégories intellectuelles de l’ « orientalisme » dominent les pays atteints par l’occidentalite (on pourrait pratiquement dire que l’orientalisme est un parasite poussé sur la racine du colonialisme). Et l’homme de l’occidentalite, loin d’assouvir une curiosité pour l’Occident, à travers la documentation fournie par celui-ci, s’y réfère, paradoxalement, pour ce qui n’est pas l’Occident. Ainsi de la philosophie islamique, de la magie hindoue, de la dynamique des superstitions en Indonésie, ou encore de l’idée nationale chez les Arabes, et de toute autre question orientale observée selon les seules données des textes occidentaux. Bref, l’homme de l’occidentalite ne se connaît lui-même qu’à travers les orientalistes ! Il s’offre lui-même en objet qu’il place sous le microscope de l’orientaliste, et se laisse exister tel que ce dernier le voit, plutôt que tel qu’il est, se sent, voit et vit. Cela est la manifestation la plus hideuse de l’occidentalite. (pp. 116-117)
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Le but de cet essai est de montrer que nous n’avons pas pu sauvegarder notre personnalité historico-culturelle face à la machine et à son inéluctable agression, et que nous avons été anéantis. Le fait est que nous avons était incapables d’une position réfléchie et calculée face à ce monstre des temps modernes. Tant que nous n’aurons pas saisi la nature, le fondement et la philosophie de la civilisation occidentale et que nous en singerons la forme extérieure, en consommant ses machines, nous serons effectivement comme l’âne qui a revêtu la peau du lion, et on sait comment ça se termine ! Aujourd’hui, ceux qui fabriquent les machines hurlent qu’elles les étouffent ; et nous, en revanche, qui somme ses servants, loin de gémir, nous sommes tout fiers ! Voilà maintenant deux cents ans que, pauvres dindons que nous sommes, nous faisons le paon ; encore faut-il prouver que nous sommes l’un plutôt que l’autre !

Bref, consommant sans fabriquer, c’est évident, nous resterons atteints d’occidentalite. Et le plus drôle, c’est que le jour où nous fabriquerons la machine, c’est elle-même qui nous frappera à notre tour, comme ces Occidentaux qui vitupèrent l’emprise de la technologie ! (p. 32)
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