Il y a des poèmes qui touchent
aux fibres les plus intimes de la vie
Et c'est Artaud qui les a écrit
Gouttelettes de sang ses phrases qui tombent
pour dire
je n'ai pas su naître
je n'ai pas su être
par conséquent comment disparêtre ?
un coeur en feu pour ciseler la foudre violette
pas fou, pas folle la guêpe,
vous ne n'encerclerez pas ma langue
tu as traversé à vif et comme nu
la salive noire de l'homme
qu'il disent Histoire
je n'ai pas les mots pour te suivre Antonin
Je n'ai que ma souffrance qui teinte
les brasiers
je n'ai qu'une main brisée et un souffle
de colère
pour sentir les tempes de ta pensée
Sur la feuille blanche
d'un autre versant d'univers
la mort est moins que ton rire
que ton regard qui étrangle le temps
Tu as franchis ta propre nuit
entre tes souliers et le pieds de ton lit
un pauvre homme étais tu sommes nous
mais qui ne finira jamais de parler
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Ca va mal
parce que la conscience a été marronnée et que nous ne sommes pas où nous croyons être.
Et en réalité nous ne sommes pas là.
Non, personne n'est ce corps qu'il est exactement,
il y a autre chose,
un ailleurs
qui n'est pas dans l'au-delà mais sur la terre,
en certains points connus et catalogués de la terre,
non par nous, certes,
mais par les manœuvriers ordinaires de certains accaparements.
La conscience n'est pas seulement le corps qu'elle occupe,
elle le déborde,
et quand elle déborde
ça se voit.
P 91
Des ennemis, j'en ai dans toutes les sectes et dans toutes les religions.
Et nos corps à tous ne sont pas fait parce qu'ils sont nés d'une mère et d'un père, ce ne fut au plus qu'un accident des plus passagers, ils sont, ces corps en train de se faire et c'est nous-mêmes qui les faisons avec la force de nos volontés.
Ce sont des lianes suspendues, lianes en suspension de la fibre verticale de l'être,
l'être en preter-omission,
de poter-anatialisation,
potentialisation,
perdu démis,
porte délmise,
protée inimixe,
de l'inimixtion en porte portée,
ombre à motion,
ces lianes peuvent être des clous aussi,
mais pas encore,
pas à ce moment-là,
non de l'être puisqu'il n'y en a pas encore, mais de ce qui aurait envie de l'être et qui jamais ne le sera.
On est pas être,
on n'existe pas,
c'est ce que je pense,
drôle de philosophie peut-être, drôle de manière de voir les choses, mais c'est la mienne.
Je pense qu'on est homme et pas être
et que l'homme n'est pas un être et ne peut pas en être un sans déchoir et sans trahir,
l'homme de la chute fut un être, l'homme devint un être en tombant,
et avant,
avant la question de l'être ou du néant ne se posait pas,
et nul n'aurait pu dire, vouloir dire qu'il était ou n'était pas avant d'être ceci ou cela.
Être suppose une ration, un arrêt, une sorte d'arrêt de mort qui définisse la nature, range dans nature et qualité, distingue la qualité, la valeur,
entre valeur et qualité range l'homme afin de l'en imprégner assez
pour le décourager de la groume,
de râler, de gueuler et de protester,
pour le décourager d'un quelque chose, mais qui n'est pas un état ou une chose mais qui est le fait qu'il n'est pas une chose mais un corps,
qu'il est avant tout et uniquement un corps,
un corps qui ne supporte pas d'être, sans éructer et sans tonner,
sans baver et sans exploser.
L'homme c'est moi,
les autres ne sont pas moi.
Je ne peux pas être sans tonner.
Or tout ceci n'est pas de la philosophie mais de la guerre.
Je ne cois pas qu'un seul parmi philosophe qui ont écrit sur l'être, ou le néant, l'âme, l'esprit, la vie, la mort, se soit rendu compte à quelle point l'esprit est une bataille de corps,
qu'une idée est une armée personnelle qu'on ne peut en aveugle avancer sans risquer une petite mort.
p 81
Ce qui est dangereux chez les gens ce n'est pas leur conscience, elle est là, on peut lui tordre le coup comme à un poulet
c'est ce qu'ils en expulsent, réprouvent et refoulent, où donc? dans ce très haut fond d'eux-mêmes qui rejoint l'espace de tout et où tout le monde se rejoint-or chaque pensée réprimée est un double, un double acrimonieux
animé
de l'animosité
des sentiments évincés.
Et ce double n'est pas un esprit, et qui pourrait encore supporter une idée sans opacité aucune, fût-ce celle du plein d'une surface vitrée,- un être d'une pure essence?
Cela n'a plus cours aujourd'hui.
C'est ainsi que l'espace est plein de corps agités, les corpuscules indifférents du soleil ne sont rien auprès de l'épouvantable densité corporelle de tous les corps.
P 119
L'homme ne naît pas enfant, il naît homme, de courte taille peut-être, mais homme, et ce n'est pas un regard d'enfant mais d'homme qu'il jette d'abord sur la vie.
Car on ne devient pas homme,, on naît homme, mais après avoir été forcé à redevenir, devenir, à devenir petit enfant.
Et c'est au prix d'un état de mort affreuse que l'homme né homme, et bien homme, se voit ressusciter petit enfant, après être apparu en homme devant le sexe de sa maman.
P89
Ce sont les concepts et notions qui ont fondé la science et fait perdre la vérité. Enfoncer un clou sans se dire : Tu es notion ; il sera solide et beau car la notion c'est moi et je ne peux pas sortir de moi.
P85
Antonin ARTAUD – Témoignages (DOCUMENTAIRE with english subtitles, 1993)
Les deux parties du documentaire "La Véritable Histoire d'Artaud le Mômo", par Gérard Mordillat et Jérôme Prieur, réalisées en 1993. Présences : Luciane Abiet, Jacqueline Adamov, André Berne-Joffroy, Annie Besnard-Faure, Gustav Bolin, Denise Colomb, Pierre Courtens, Alain Gheerbrant, Alfred Kern, Gervais Marchal, Domnine Milliex, Minouche Pastier, Henri Pichette, Marcel Piffret, Rolande Prevel, Marthe Robert, Jany Seiden de Ruy, Paule Thévenin et Henri Thomas.