- "Votre œuvre est justement l'un des problèmes dont nous allons parler. Je pense que cela pourrait nous aider à découvrir la cause de vos difficultés. [...] J'ai lu quelques-uns des livres que vous avez écrits, et il y a un certain nombre de questions que..." [Docteur Connors]
- Très bien. Puisque vous voulez jouer aux devinettes, laissez-moi commencer. Ce livre que vous avez là, celui que vous venez de lire, c'est Psychose, n'est-ce pas ?"
- "Oui." [Docteur Connors]
- N'ayez pas l'air si surpris. Il semblerait que tout le monde commence par lire Psychose. Et à le lire entre les lignes, pour y trouver des intentions que je n'y ai pas mises. J'ai été si souvent soumis à ce genre d'inquisition que vous n'avez même pas besoin de me poser vos questions. Nous gagnerons tous deux un temps précieux si je me contente de vous donner les réponses."
- "Je vous écoute." [Docteur Connors]
- "Tout d'abord, je ne hais pas ma mère. Et elle ne m'a jamais dominé. Je viens d'un milieu familial parfaitement normal - je n'avais rien contre mes parents ni contre ma sœur. Ma mère était assistante sociale et professeur, c'était une femme très intelligente qui m'a encouragé à écrire. Je l'aimais beaucoup, mais sans qu'il y ait eu pour autant la moindre fixation œdipienne.
En second lieu, je n'ai jamais eu conscience d'avoir la moindre tendance homosexuelle, et je n'ai jamais eu le désir de me travestir. Ni de tâter à la taxidermie, d'ailleurs. Je ne connais rien au travail de gérant de motel, et je ne saurais pas comment m'y prendre pour cacher des voitures ou des cadavres dans un marécage.
Donc, comme vous le voyez, Norman Bates, ce n'est pas moi. Quant à m'identifier aux autres personnages du livre... je n'ai jamais détourné l'argent de mes employeurs, jamais fui la police, jamais entretenu de liaison clandestine à long terme. Et pour finir, j'ai toujours préféré les baignoires aux douches.
L'idée du livre m'est venue à la lecture d'un article sur une véritable affaire criminelle. Je n'ai utilisé aucun des participants réels comme personnages, et je n'ai pas repris la même situation. Ce qui m'a donné à réfléchir, c'est le fait qu'un homme, ayant passé toute sa vie dans une petite ville, sous la constante surveillance de ses voisins, avait réussi à dissimuler les assassinats qu'il avait commis. Ce que j'ai fait - appelez ça une fiche clinique si vous voulez - c'est construire le profil psychologique d'un tel homme, exactement comme vous le faites dans votre domaine. Une fois que j'eus le sentiment d'avoir compris le personnage et ses motivations, le reste fut assez simple."
~ Celui qui ferme la voie ~
- "Les acteurs qui jouaient des rôles de méchants à l'écran n'étaient pas des monstres dans la vie réelle ; Boris Karloff et Christopher Lee comptaient parmi les hommes les plus charmants que j'aie jamais connus. Mon propre mentor littéraire, H.P. Lovecraft, était un homme doux et bon."
~ Celui qui ferme la voie ~
- "Dieu, que nous sommes devenus hypocrites ! Plus la folie a pris de l'importance dans notre société, plus le mot lui-même est devenu tabou. Dans ce monde qui a perdu la raison, il n'est plus possible de parler librement des déséquilibrés ; en cette ère de démence, les déments sont censés avoir disparu ; l'aliénation gagne du terrain parce que nous refusons d'admettre qu'il existe des aliénés."
~ Celui qui ferme la voie ~
- "La folie est un long cauchemar dont certains ne se réveillent jamais. D'autres [...] finissent par ouvrir les yeux pour saluer l'aube d'un nouveau jour, dans l'euphorie de leur lucidité retrouvée. C'est une merveilleuse sensation de prendre conscience que le cauchemar est terminé. Cela donne envie de chanter : "Si j'avais un marteau...""
- "Trois souris aveugles, trois souris aveugles,
Voyez comme elles courent, voyez comme elles courent,
Elles courent toutes après la femme du fermer,
Qui leur coupe la tête avec un couteau à découper,
Avez-vous jamais vu un pareil spectacle ?"
~ Regarde comme elles courent ~
Chronique consacrée aux grands noms de la littérature policière, et animée, depuis octobre 2018, par Patrick Vast, dans le cadre de l'émission La Vie des Livres (Radio Plus - Douvrin).
Pour la 25ème chronique, le 07 novembre 2018, Patrick présente Robert Bloch.
Patrick Vast est aussi auteur, notamment de polars. N'hésitez pas à vous rendre sur son site : http://patricksvast.hautetfort.com/
Il a également une activité d'éditeur. À voir ici : https://lechatmoireeditions.wordpress.com/
La page Facebook de l'émission La Vie des Livres : https://www.facebook.com/laviedeslivres62/