A propos de la genèse d'Anna Karénine
(Puisqu'il en est question sur Babelio ce jour)
La comtesse note dans son journal du 24 février 1870 ceci :
"hier soir, Léon m'a dit qu'il avait entrevu un type de femme mariée, du grand monde, et qui se serait perdue. Il m'a expliqué que sa tâche consistait à la peindre uniquement digne de pitié et non coupable, et que, dès que ce type de femme s'était présenté à lui, tous les personnages qu'il avait envisagés auparavant , avaient trouvé leur place et s'étaient groupés autour de cette femme. "Maintenant, tout s'est éclairé", m'a-t-il dit .
Pour l'épisode du suicide d'Anna, tolstoï s'inspira d'un fait réel qui eut lieu à côté d'Iasnaïa et dont il alla s'enquérir promptement sur place ..
tolstoï a donc conçu son intrigue plutôt intuitivement. Rien à voir avec les plans abracadabrants de
Soljenitsyne par exemple. D'un côté un animal qui concevait son affaire, de
l'autre un greffier .. Chacun jugera !
Que dire de cette femme :
Marie-Thérèse Bodart, l'auteur, étonnante, improbable ! Bon elle est belge née en 1909, de bon sang, elle a traversé le siècle "with the most innocent expression on this face" : "faking innocence", j'ai envie de dire, mais ce n'est qu'un point de vue subjectif. Elle n'est arrivée à moi qu'incidemment, je m'étais intéressé à son travail : une biographie de tolstoï remarquée de source universitaire dans les années 1970.
De son état, écrivain, romancière, prof d'histoire, essayiste, née dans une famille qui a donné des généraux, de confession catholique : elle publie en 1938 dans le Liège puritain, un roman :
les Roseaux noirs qui sent le souffre, il y est question d'inceste et d'amour passionnel. C'en est trop : elle sera congédiée et s'installera avec sa famille à Bruxelles.
Autre chose qui m'a frappé dans son parcours "étrange", ce sont ses carnets qu'elle réalise de sa jeunesse jusqu'à la fin de sa vie qui sont inédits. Elle y raconte toutes les particularités de sa vie, à la fois son histoire et l'histoire, les faits marquants de son époque. La belle jeune fille qu'elle fut s'y livre sans fard, elle deviendra ensuite une épouse et une mère accomplie .. Sa vie de romancière s'inscrit un peu dans la tradition anglaise, comme celle que je traitais hier celle de
Cynthia Asquith ..