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EAN : 9781839760471
176 pages
Verso Books (02/11/2021)
4/5   1 notes
Résumé :
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
La curiosité acérée du grand Mark Bould pour entrechoquer culture mainstream, pop culture, science-fiction et analyse scientifique afin de dépasser le simple constat culturel du « grand dérangement » climatique.

Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2024/04/07/note-de-lecture-the-anthropocene-unconscious-climate-catastrophe-culture-mark-bould/

Professeur de cinéma et de littérature à l'Université de Bristol, critique littéraire spécialisé en science-fiction et en roman noir, contributeur régulier de revues telles que Comparative Literature and Culture, Historical Materialism ou Science Fiction Studies, Mark Bould m'avait conquis à travers l'anthologie critique « Red Planets: Marxism and Science Fiction » (2009), qu'il avait dirigée à l'époque avec son ami China Miéville. Dans « The Anthropocene Unconscious », robuste essai publié chez Verso Books en 2021, il entreprend d'étudier le point aveugle flagrant relevé par Amitav Ghosh dans son « Grand dérangement » de 2016, à savoir l'incapacité presque complète de la littérature de fiction dite « générale » à intégrer les phénomènes humains et politiques liés au réchauffement climatique – et tout particulièrement le rôle du capital fossile en la matière -, en une approche assez voisine de celle d'Andreas Malm dans son « L'Anthropocène contre l'Histoire » de 2016, comme le corollaire qui en découle naturellement – et sur lequel l'auteur indien ne s'étend guère, en revanche – à savoir l'absence de la science-fiction, contre toute évidence, au sein de la littérature prise au sérieux par les décideurs du monde culturel et politique, alors même qu'elle représente certainement actuellement l'une des formes les plus performantes de prise en compte intellectuelle et émotionnelle de la catastrophe en cours – bizarrerie qu'il entreprend de comprendre au moyen d'une dérivation inventive du concept d‘inconscient politique forgé par Fredric Jameson en 1981.

Pour procéder à son analyse, à sa démonstration et à son exploration, Mark Bould procède en navigateur expérimenté et foncièrement rusé (et doté d'un humour que l'on sait par ailleurs fort bien dimensionné). Son premier détour est largement inattendu et particulièrement jouissif : il emprunte les sentiers obscurs du film super-parodique de requins (lancé par « Sharknado » en 2013), du simple plagiat des « Dents de la mer » au (de plus en plus) franchement délirant, pour extraire de cette bouillie extraordinaire tout le non-dit de l'avidité capitaliste déchaînée et négationniste (du réchauffement climatique, bien entendu). Dans la franchise « Sharknado », mais aussi dans « 28 jours plus tard », dans « Pacific Rim », ou encore dans « World War Z », Mark Bould traque la répugnance à prononcer les mots « changement climatique », même lorsque la métaphore anthropocène ou l'analogie migratoire (du mouvement provoqué par les bouleversements de la météorologie globale) sont les plus marquées ou évidentes. Identifier ce qui est dit comme ce que l'on se refuse, consciemment et inconsciemment, à dire : il sait mieux que beaucoup identifier ces points aveugles de la narration chers à Javier Cercas.

Là où Amitav Ghosh constatait les limitations manifestes de la littérature mainstream (qu'elle s'affirme directement bourgeoise ou non), mais ne parvenait guère à les expliquer, et encore moins à les combattre réellement (ce n'est évidemment pas facile depuis l'intérieur d'un référentiel auquel on appartient, fût-ce à son esprit défendant), Mark Bould, versé dans l'art des mauvais genres, s'efforce d'aller plus loin (en pourfendant au passage et à raison la vision si étriquée de la littérature que porte par exemple un John Updike). Se livrant à un véritable exercice d'admiration de ce que le roman ordinaire contemporain peut produire (à travers le « 4 3 2 1 » de Paul Auster, le « Les lionnes » de Lucy Ellmann et l'autobiographie en six volumes de Karl Ove Knausgaard) nous aide finement à saisir là où le bât, éventuellement, blesse – et se sert de cette analyse pour saisir le point aveugle d'Amitav Ghosh lui-même, à propos de science-fiction précisément (et des préjugés tenaces à son égard qui environnement même un esprit de ce calibre). En reprenant l'analyse que conduit l'auteur indien à propos de Paul Kingsnorth et d'Arundhati Roy, puis en se penchant sur les romans même d'Amitav Ghosh, les frontières caricaturales et les manquements évidents de ce que devrait être une fiction climatique d'après la littérature mainstream apparaissent au grand jour – et au premier chef, le manque criant de politisation qui est là à l'oeuvre, fort logiquement.

La deuxième série de détours fructueux conduite par Mark Bould nous entraîne dans une forme d'histoire récente de la littérature mainstream et de celle de science-fiction (et de leurs marges frontalières chaque fois que possible, naturellement – puisque c'est sans doute là qu'il se produit le plus de choses intéressantes). James Graham Ballard en mauvaise conscience affûtée de la littérature des années 1970-1980 (en détaillant son « Monde englouti »), le fabuleux documentaire « Dead Slow Ahead » (2015) de Mauro Herce, et son cargo emblématique de tant de dérives, le film « Still Life » (2006) de Jia Zhangke et sa ville engloutie par la mise en service du barrage des Trois Gorges, le film « Lost River » (2014) de Ryan Gosling (on s'aperçoit au passage qu'une partie des judicieuses remarques de l'auteur à propos de ce film pourraient aussi s'appliquer, toutes proportions gardées, au magnifique roman « En aveugle » d'Eugene Marten), le documentaire « Two Years at Sea » (2011) de Ben Rivers, le film « Évolution » (2015) de Lucille Hadzihalilovic : autant de leçons détaillées, surprenantes dans leur diversité comme dans leur superbe caractère oblique, proposées par Mark Bould autour de notre monde liquide – et de ce qu'il implique à la jonction de la fiction et de la politique.

En extrapolant ce détour pour nous emmener, avec Sigmund Freud et son « Inquiétante étrangeté » (1919), et avant celle du roboticien Masahiro Mori en 1970, en pleine Vallée de l'Etrange (« uncanny valley »), en parcourant aussi les films « le bannissement » (2007), « Elena » (2011) et « Faute d'amour » (2017) d'Andreï Zviaguintsev, joliment adossés à la série de comics « Swamp Thing » créée par Len Wein et Berni Wrightson dans les années 70, et relancée dans les années 80 par Alan Moore, puis aux « Trees » (2016) de Warren Ellis et Jason Howard, et au film « Premier contact » (2016) de Denis Villeneuve, comme à celui de Doug Liman (« Edge of Tomorrow », 2014), Mark Bould parvient à réintégrer pleinement cette étrangeté dans sa visée première, celle d'un inconscient anthropocène multi-directionnel, taiseux et néanmoins extraordinairement actif.

La conclusion de Mark Bould, lorsqu'il fusionne certaines frontières propices de la fiction mainstream et de la science-fiction, zone demeurant trop mal connue des deux publics dans leur ensemble, le plus souvent, avec le sel des essais les plus lucides sur ce qui se produit aujourd'hui, emprunte d'ultimes chemins de traverse particulièrement intenses lorsqu'il découpe en beauté, le meilleur d'un futur possible (« L'Arbre-Monde » de Richard Powers) et l'un de ses pires éventuels (la franchise « Fast and Furious ») : « In almost every Fast and Furious film, characters talk about walking away from the life, but they never manage to get out or settle down. They are trapped in a juggernaut over which they have no direct control. Just like us. Just like the world we have made.
The market and other forces arrayed against the humans and nonhumans who share this planet are overwhelming. But down here in the Fast-and-Furiocene, our choice is clear. Ecosocialism or barbarism. Ride or die. » Et c'est ainsi que Mark Bould est grand.


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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Imagine the world to come.
Imagine we carry on doing too little too late. Imagine we continue to set inadequate emissions targets with no real intention of meeting them, and then keep right on missing them. The parts per million of atmospheric CO2 relentlessly increase. Temperatures rise, releasing the methane naturally sequestered in permafrost and ocean bed clathrates.
The last of the glaciers melt. We lose the polar icecaps, first in the north and then, inexorably, the south. The oceans rise and, since water expands as it warms, rise still more. Low-lying islands disappear. So do the densely populated river deltas. Coastlines retreat. Hundreds of millions flee the inundation. Hundreds of millions more stay behind and die.
Elsewhere deserts form, and agriculture collapses. Daytime temperatures kill. Those who can, take flight.
More refugees. Endless border violence to keep them out.
Skirmishes, then wars, over food and fresh water.
Large-scale geoengineering projects distribute climate amelioration here and foreseen-but-ignored consequences there. Unforeseen consequences fall where they may.
More corpses. Not just human. The sixth great extinction accelerates. As each species diminishes, its environment collapses a little more.
Death cascades.
The planet persists.
But we are gone.
Imagine a world haunted not just by the dead, but by the spectre of death. Drawn ever closer by the already locked-in consequences of our actions and inaction. Its domain extended by endless escalating catastrophe.
Imagine a future of foreclosed possibilities.
Haunted by all the worlds that were, and all the worlds that could have been.
Then imagine – as Amitav Ghosh suggests in The Great Derangement (2016), the most widely read and highly regarded book on literature and climate change – that somewhere in the middle of all this, in a future in which ‘sea-level rise has swallowed the Sunderbans and made cities like Kolkata, New York, and Bangkok uninhabitable’, there are still museums and libraries and bookstores. Picture its inhabitants, urgently examining ‘the art and literature of our time … for traces and portents’ of the upheavals that made their ‘substantially altered’ world.
And ‘when they fail to find them’, Ghosh asks, ‘what should they – what can they – do other than to conclude that ours was a time when most forms of art and literature were drawn into the modes of concealment that prevented people from recognizing the realities of their plight?’
This is, of course, nonsense.
It requires us to imagine tidal surges discriminating enough to sweep away significant portions of the ‘science’, ‘politics’ and ‘science fiction’ shelves, not to mention all that gussied-up ‘climate fiction’ too fancypants to consider itself sf.
And it requires us to believe future humans will have really poor reading skills. Because the truth is: auguries abound. The art and literature of our time is pregnant with catastrophe, with weather and water, wildness and weirdness.
But the truth is also that mundane fiction – what Ghosh calls ‘serious literary fiction’ – has mostly failed to engage with climate change. And, as we will see in chapters two and three, this is because the mainstream bourgeois novel mistook exclusion for insight, a glitch for a feature. Muteness is its unique selling proposition.
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Ghosh’s account of the built-in shortcomings of mundane fiction is pretty persuasive, but where he sees near-universal failure, The Anthropocene Unconscious often finds negotiations with the limitations of the form. Not silence but expressive aphasia, teeming with tongue-tied questions. Must a text show tides rising in a world that is elsewhere parched, must it mash up Waterworld (1995) and Mad Max: Fury Road (2015), to be ‘about’ climate change? Must it – like Kim Stanley Robinson’s Science in the Capital trilogy (2004–7) and New York 2140 (2017) – map the progress of the storm? Must it depict smart people in white coats telling each other things they all already know, but the reader might not, about greenhouse gases, hockey-stick curves, retreating glaciers, shrinking ice sheets, Gulf Stream deceleration, clathrate outgassings and so on? Must the observation of environmental shifts be explicitly connected to climate destabilisation, as is the radically altered migration of monarch butterflies in Barbara Kingsolver’s Flight Behaviour (2012)? Must fiction be immediately and explicitly about climate change for it to be fiction about climate change? Is there no room for the symbolic? The oblique? The estranged? No room to think about the capitalist, imperialist patriarchal histories, systems and structures that are historically and foreseeably responsible for climate destabilisation, and through which it has, is and will be experienced? No room to consider texts that do not say ‘climate change’ aloud? To discover what happens if we stop assuming a text is not about climate change?
And what of the kinds of fiction that lie beyond Ghosh’s self-imposed restrictions? What of the ‘serious’ fictions of the arthouse cinema and the graphic novel? And of not-so-serious and not-so-literary? Of blockbusters and genre fictions? Cable movies and comics? The popular, the trashy and the disreputable? The sort of things the ‘serious’ and the ‘literary’ might wish the seas would swallow?
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These arthouse tales of our liquid world are lessons in duration and endurance. With slowness they re-embody us, confront us with the passage of time.
The worlds they depict remind us how very small we are, and how disproportionately large our consequences. That we are so precarious, individually and as a species, but together we can upset the world.
In them, we see that our culture builds nothing to last, and yet some of what we build endures: as rubble and pollution, and in the persistence of the petrocapitalist infrastructure that constrains our future as surely as does the power congealed within it.
They pit the mobility of capital, carbon and cargo against the stuckness of people: not progressing or developing as promised, but stuck in place, left behind; or coming unstuck as the indignities of labour subordinates social relations to capital’s whims, or severs them through disjunctures of time and space.
But enough about water. Let us come ashore and widen our scope.
For all around us, our uncanny neighbours, the trees, are ‘making significance, making meaning, as easily as they make sugar and wood from nothing, from air, and sun, and rain’. Let us attend to them.
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Regardless of the global systems and processes underpinning it, this example of capitalist development is local and particular. Compare it with an sf text which imagines a future world constructed around climate change – like Elysium (2013), which contrasts a dry and dusty planet of slums, represented by satellite images of desertified Africa and Asia and by a favela-ised Los Angeles, with the eponymous O’Neill-inspired space station, a vast gated community of vaguely Mediterranean villas and rich (mostly) white people in orbit around the Earth.
Roy often refers to the national and international contexts that frame events. But by denying itself the affordances of sf – its global visions that localise and its temporal shifts that historicise contemporary conditions, as well as its tolerance for and techniques of worldbuilding exposition – any novel juxtaposing filthy immiseration and spotless wealth would struggle to establish their global and historical causes. Nonetheless, these extremes derive from the key drivers of climate change, and Roy shows, albeit obliquely, how its consequences already fall, and will continue to fall, on different parts of the population.
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The Sharknado movies are salvage artefacts, composed of the flotsam and jetsam of American TV. News footage of floods, disasters and accidents – sometimes dressed with shoddy CGI storms, airborne sharks and other meteorological phenomena – collides with hastily shot, green-screen-heavy location and studio scenes, similarly subjected to deliberately unconvincing digital enhancement.
Through this visual patchwork flows a torrent of allusions to TV series – Baywatch, Taxi, The Twilight Zone – and movies – Airplane!, Back to the Future, Evil Dead 2, Invasion of the Body Snatchers, Jaws, The Lady and the Tramp, Mission: Impossible, Network, Raiders of the Lost Ark, Roman Holiday, Scarface, The Sound of Music, Space Cowboys, Star Wars, The Texas Chain Saw Massacre, Toy Story, The Wizard of Oz and that bit from Independence Day pastiching Laurence Olivier’s Henry V. Some of these riffs, nods, plagiarisms and petty larcenies become recurring in-jokes. Others – April’s reworking of the Action Comics #1 cover, the reference to The Adventures of Buckaroo Banzai Across the Eighth Dimension – are unexpected, possibly even obscure. But none of them are subtle.
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