Page 160, lassé, irrité, franchement pas content de lire un tel navet, j'ai abandonné. Cela faisait très longtemps (vraiment très longtemps) que je n'avais pas jeté l'éponge de cette manière. C'est que, voyez-vous, je suis un type consciencieux, têtu, opiniâtre, qui se bat d'ordinaire jusqu'au bout, et que l'idée même d'abandonner révulse. Mais là, entre une intrigue absurde, des dialogues imbéciles, des personnages inconsistants, une très pénible sensation de perdre mon temps doub
lé du déplaisant sentiment de s'immerger dans la médiocrité, ce fut trop. Et par égard pour ma santé cardio-vasculaire, l'arrêt immédiat de cette lecture devenait presque une prescription médicale.
De la très mauvaise littérature pour adolescent, voilà ce que c'est, ni plus ni moins. Je veux bien avoir l'esprit jeune, je l'ai (si, si, ne riez pas), mais il y a cependant des limites à ma tolérance (que je croyais pourtant sans limite, quel
le déception…).
Ce qui m'irrite aussi c'est que mon libraire, du moins le jeune homme qui s'occupe du rayon policier/thriller, qui jusque-là m'avait toujours bien conseillé (pensez donc ! C'est lui qui m'a fait découvrir
Caryl Férey, et qui apprécie
Franz Bartelt), a failli. Gravement failli. le bougre avait collé une étiquette sur ce livre où j'ai déchiffré l'oracle suivant, généralement heureux : « coup de coeur du libraire ».
Me serais-je trompé sur son compte ? Je ne sais plus quoi penser. Je nage depuis dans un océan de désespoir. Car si je ne puis plus faire confiance à mon jeune libraire, que vais-je devenir ? Oserais-je encore l'aborder, alors que ma rancune est à son acmé ?
Oui, c'est cela, vous avez raison, je vais d'abord laisser refroidir le vieux fourneau, éviter de fréquenter ce lieu qui ne mérite plus à mes yeux le nom de librairie, me tenir coi, à l'écart un certain temps, et revenir plus tard, quand je serai revenu à de meilleurs dispositions à l'égard du coupable. Cela prendra le temps qu'il faudra, mais j'y arriverai. « I promise » comme on dit outre-Channel et outre-Atlantique.