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EAN : 9782864324447
215 pages
Verdier (05/05/2005)
3.33/5   3 notes
Résumé :
Originaire de la région de Vologda, Vladimir Guiliarovski (1853-1935) baguenaudera pendant dix ans à travers la Russie, s’improvisant successivement haleur sur la Volga, bouvier, pompier, ouvrier, acteur de province… Insatiable touche-à-tout, il s’ancrera enfin à Moscou en 1881, où il embrassera la carrière de journaliste. Moscovite non pas de souche mais de conviction, Guiliarovski devient, selon l’expression de Tchékhov, « le roi des reporters » de sa ville d’adop... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Guiliarovski est ce type truculent, haut en couleur, une force de la nature, qu'on aurait aimé rencontrer à l'époque où il était à Moscou quand on aime ce Moscou envoûtant et mystérieux et ces vieux quartiers qui ont ou disparu ou ont été reconfigurés, parce qu'il côtoyait les grands artistes comme Tchekhov, Bounine, Brioussov, Chaliapine, Répine, Lévitan.. mais aussi les pauvres comme dans le quartier pourri et glauque de Khitroska : quel touriste aurait pu se targuer d'y pénétrer et d'en sortir indemne sans lui. qui aurait pu se targuer aussi d'avoir aidé Gorki pour étayer " Les Bas-fonds" sinon lui. Oui routard avant Le Routard était ce Guiliarovski qui arrivé à Moscou dans les années 80, tête brûlée, s'est fait d'abord journaliste les bons tuyaux, les bons plans, les bonnes adresses, puis écrivain.

A propos de ce Moscou envoûtant et mystérieux, que ne peut comprendre un occidental s'il n'y a pas vécu. Je me souviens d'un documentaire passé à la tv où l'on voyait un homme fort et impétueux, français, charcutier de son état, parti à Moscou pour faire son trou, et puis comme il arrive souvent à un déraciné libre, il lui prit au bout d'une décade de tenter un retour au pays natal, fort de quelques bagages en plus, ce fut une catastrophe, il lui manquait cet air russe indéfinissable nécessaire à sa vie, qui faisait qu'il se sentait quelqu'un, peut-être fait de cette altérité propre à l' étranger, peut-être aussi fait de secrets d'alcôve que le film ne dit pas, mais sûrement fait de cette mysticité orientale .. Il n'y résista pas, il revint à Moscou et on le vit à nouveau comme un poisson dans l'eau.

Bon, il faut concevoir que Moscou comptait dix fois moins d'habitants qu'aujourd'hui. La Place "Rouge" était déjà, enclavée dans le Kremlin, premier cercle de Moscou, déjà moins plate qu'on peut le penser en la voyant à la télé aujourd'hui.

Bon, certes Moscou n'était pas trop drôle à l'époque - ça dépendait pour qui disons -mais forcément plus drôle -tout est relatif - que ce qui allait suivre, ce socialisme scientifique abominable qui donna des espoirs à ce peuple misérable et qui précisément parce qu'il lui en donna ce peuple fut exploité comme jamais. Quel gage d'humanité peut donner un homme aveuglé par sa foi ? Même ce Gorki aux allures sincères, y crut et c'est bien tout le problème pour un artiste, écrivain notoire, s'il n'est pas visionnaire et se faire berner comme un bleu au point de raconter des conneries monstrueuses : l'artiste est déchu, plus qu'un "clown" !..

Extrait de Moscou et les moscovites.
Les bains publics (1)
"Les bains publics étaient le seul endroit qu'aucun moscovite aurait ignoré pour rien au monde : ni l'artisan, ni le haut dignitaire, ni le pauvre, ni le riche ne pouvaient se passer des "bains de commerce".
Dans les années 1880, le tout-puissant "maître de la capitale", le gouverneur militaire Dolgoroukov, fréquentai les Bains Sandounov où, dans une suite luxueuse de la section familiale, il avait à sa disposition des cuvettes et des bassines d'argent. Pourtant, il possédait dans son palais des baignoires en marbre qui, en ce temps-là, étaient encore une rareté à Moscou. C'est que les moscovites ne s'y habituèrent pas du jour au lendemain, à cette innovation , eux qui, de père en fils, aimaient tâter du "balai", se détendre au vestiaire et tailler une bavette en bonne compagnie !
Chaque couche sociale avait ses bains de prédilection. Les riches, et plus généralement les gens aisés, allaient à la section "noble" ; les ouvriers et la frange déshéritée, pour cinq kopecks, à la section "populaire". Dans les deux cas, l'eau, la vapeur, et la température ne variaient point, seul différait le cadre. Mais bon, c'était toujours des bains ! le savon coûtait un kopeck, le gant de tille treize..."

(1) (Parfois le plus important est dans le renvoi annexé en bas de page !)
Les bains publics, bains de vapeur très chaude qui se disent en russe "bania" ou, affectueusement, "banka, baniouchka", restent profondément ancrés dans la tradition et le quotidien russes. Jusqu'à une époque très récente, ils furent le seul moyen pour les russes de se délasser, se laver entièrement et soigner leur corps, ayant à disposition des manucures, des masseurs, des rebouteuses, etc. Les bains employaient un personnel très important : des préposés au vestiaire, des "baigneurs" et des " baigneuses" qui recevaient la clientèle, des "étuveurs" qui, dans "étuve" (le compartiment le plus chaud des bains) étaient chargés de "faire chauffer la pierre" pour augmenter la vapeur et la température, ainsi que de fouetter les clients à coups de "balai" : rameau de tranches de bouleau très feuillu, particulièrement recommandé pour la circulation sanguine, dont la forme rappelle un balai.

on peut lire aussi sur les peintres quelques pages plus haut qu'il avaient la barbe dans la palette ! ..

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Passionnant, captivant. L'auteur à la plume acérée et précise emmène son lecteur dans la capitale de la sainte Russie de la fin du XIX° et du début du XX°. On le suit avec intérêt et curiosité chez les truands, les bourges, les étudiants, dans les cours des miracles... C'est avec bonheur que l'on parcourt les rues avec leurs noms si évocateurs, une occasion de parfaire l'étymologie citadine haute en saveurs, dont certaines résistaient aux interrogations répétées des Moscovites ! Pour ceux qui connaissent la ville, ce retour en arrière se déguste comme un vieil alcool que l'on sirote avec lenteur pour en saisir tous les effluves. Comme regarder un vieux film muet avec ses cartons. La population de la capitale, décrite avec une vraie tendresse, laisse deviner les événements à venir, mais ceci est une autre Histoire…
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Voilà ce qu'on retient parfois dans notre mémoire, comme quoi les excès d'une situation qui révulse peuvent être le terreau de bien des choses à ne pas regretter : Guiliarovski ce russe truculent routard avant l'heure devenu écrivain qui a connu le Moscou sous Nicolas 2 comme personne, y compris les quartiers les plus pourris dont le fameux Khitrowka dont les effluves n'épargnent toujours pas nos narines tellement l'auteur nous le fait partager comme avec nostalgie. On dit qu'un touriste n'en serait pas sorti sans lui !

Une amie m'a fait cadeau de ce livre sachant que j'aime Moscou. Et voyant que deux ans après je ne l'avais toujours pas lu s'est demandée si dans le fond j'aimais Moscou. Vu son insistance et ne doutant pas une seconde de sa part qu'il s'agissait là d'un bon livre, je me suis mis à le dévorer subitement . Ne pas le lire eût été comme ne pas connaître à Moscou Vladimir Guiliarovski dans les années Nicolas 2. Deux choses quand même, je ne m'étais pas emballé d'emblée pour la lecture de ce livre que je l'imaginais je ne sais pourquoi, intello, professoral, et deuze, ce quartier abject n'existe plus, rasé, très bien, mais à côté de ça, il y a d'autres quartiers anciens aujourd'hui ou des sites qui sont menacés et qui ont fait la joie de plusieurs générations condamnés parce qu'ils ne correspondent plus aux normes, - il y a toujours une connerie pour faire un prétexte qui m'exaspère et qui me désarme- quand ce n'est pas un beau site qu'on déclasse, ou un oligarque qui convoite tel espace au mépris du bon sens, alors perdu pour perdu, je me demande si je ne vais pas chercher dans l'excès ce qui va flatter ce qui me reste, mon âme qui s'émerveille de Guiliarioski qui a aidé Tchékhov dans ses écrits moscovites, ou de Tolstoï qui a fait son recensement national dans ce quartier pourri et qui en est sorti avec de radicales intentions. Visiblement, ce n'était peut-être l'endroit qu'il eût fallu proposer en visite aux comtesses et autres duchesses ..

Si ce n'étaient encore ces bains publics qui demeurent qui me guérissent à peine de ce temps perdu que je découvre et que je n'ai pas connu avec une forme d'empathie par procuration, voici (laissons parler le maître de ces lieux) :
"J'ignore pourquoi mais mon esprit, le marché Khitrov s'est toujours apparenté à Londres que je n'ai, pourtant , jamais vue. A mes yeux, Londres est l'endroit le plus ténébreux d'Europe et le marché Khitrov était, sans nul doute, le plus obscur de Moscou.

Imaginez une immense place au coeur de la capitale, à proximité de la Iaouza, entourée de maisons de pierre décrépites et située dans une cuvette où se rejoignaient plusieurs ruelles, tels des ruisseaux dans un marécage. Des fumées en émanaient constamment, surtout à la tombée de la nuit. Il suffisait d'une averse, voire d'une légère brume, pour qu'un étranger, si l'envie le prenait d'y jeter un coup d'oeil du haut de la rue, fût saisi d'effroi : il ne voyait qu'un gigantesque nuage noir ! En bas, l'attendait un trou grouillant et pourri.

Des foules de gueux erraient dans le brouillard et se dessinaient furtivement dans le halo terne de lueurs embrumées comme dans les bains publics. Elles indiquaient la présence de marchandes de comestibles, assises en rangées sur d'énormes marmites en fer eu des cuves de "ragoût". Sur des réchauds reposaient de grandes boîtes de métal où cuisait de la saucisse avariée, nageant dans son bouillon maigre qu'on appelait communément le " bonheur des chiens" ..
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On pense bien que s'il y avait un quartier qu'il ne fallait pas voir, entouré d'interdits et de dangers en plein Moscou au début du siècle avant la révolution , ça donne toujours l'envie à certains de braver ces interdits ; c'est peut-être d'ailleurs le seul intérêt. C'est comme le Norilsk de Caryl Ferey !

En plus dans une cuvette, comme ça on n'a pas à creuser pour aller dans le trou !
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Guiliarovski n'est pas, à proprement parler, un intellectuel. C'est un autodidacte qui s'est formé au gré de ses multiples pérégrinations et qui se distingue surtout par une très grande intuition des choses et un amour immodéré de la vie. La Moscou qu'il découvre dans les années 1880 devient l'objet exclusif de cet amour. Aussi son ouvrage est-il empreint de nostalgie : la nostalgie d'un monde perdu, qu'en France, nous retrouvons dans la prose d'un poète tel que Nerval (Mémoires d'un Parisien).
(Introduction de Julie Bouvard.)
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Du peuple qu'il y avait autrefois à Moscou, il ne reste plus, aujourd'hui, qu'un public.
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