La préface d'
Aurélien Molas nous signalait que si le thriller n'a jamais acquis ses lettres de noblesse comparé à la littérature noire, certains thrillers possèdent des formes et du fond tout en étant efficaces et sont assez sombres pour nous prouver que certains auteurs peuvent exceller dans le thriller noir. Il ne me restait plus qu'à découvrir tout cela.
On m'avait prévenu que ce livre était glauque, malsain à souhait, avec des scènes parfois insoutenables et il a fait honneur à sa sulfureuse réputation. Un qualificatif pour ce thriller pourrait être "dérageant & glaçant". Deux qualificatif pour le prix d'un, oui (offert par la maison).
En effet, ce thriller respecte les codes habituels : des chapitres courts qui pulsent et qui sont alternés pour faire monter le suspense et la frustration, des cliffhangers en-veux-tu-en-voilà, une intrigue bien menée (bien que l'on comprenne à un moment donné QUI est le coupable) sur un scénario original, de l'hémoglobine et quelques scènes de violences que
Jack The Ripper aurait aimé...
Bref, l'auteur connait les codes du thriller et joue avec. Au passage, il joue aussi avec nos nerfs en stoppant ses chapitres sur du suspense et en nous reportant la suite quelques chapitres plus tard. Sadique.
Niveau des personnages, on en a assez bien mais on s'y retrouve facilement dans tout ce petit monde. Par contre, le flic doit-il toujours être torturé, alcoolo, dépressif, sans vie sociale ou de famille ? Là, c'est un peu le cliché habituel ces derniers temps.
Certains policiers manquent aussi un peu de profondeur, on ne s'attache pas vraiment à eux, hormis Camille. À certains moments, je les ai même trouvé un peu lourd et patauds dans leur enquête et si un certain Jack n'avait pas été aussi sympa, ils pataugeraient encore dans la gadoue.
Par contre, pour le Méchant, il est bon, intelligent, sadique, pervers, manipulateur et aussi grand stratège qu'un Napoléon. Et je dois absolument me renseigner afin de vérifier qu'il est bien possible de retrouver les véritables adresses IP des utilisateurs ainsi que leurs adresses (on n'est jamais trop prudente)... Brrrr !
Ce qui m'a plu, dans cette intrigue, c'est la tension que l'auteur fait monter assez vite et qu'il entretient tout au long de la lecture, ainsi que l'incursion de l'enquête dans l'univers virtuel : Second Life, un métavers (univers virtuel), existe bel et bien.
La violence est présente et je déconseille ce livre aux lectrices sensibles et aux amateurs de "Oui Oui & Tchoupi en vacances chez les Bisounours". Parce que dans ce livre, ça tue et ça ne tue pas "propre", si vous voyez ce que je veux dire. Ça joue aussi avec les victimes et ce n'est pas beau à voir.
Moi, les scènes plus "gore" ne m'ont pas dérangée, j'ai fait quelques "beurk, c'est dégueulasse" mais ça ne m'a pas empêché de manger ou de bien dormir.
Bémol : les dialogues et la ponctuation. Les dialogues sont parfois trop nombreux au détriment de la profondeur des personnages, de leur psychologie et certains sont même en déséquilibre avec le reste, suite à l'utilisation d'un langage peu étoffé.
Pour la ponctuation, des fins de dialogue avec des "!!" ou des "!?" à profusion qui ont tendance à alourdir le récit... Si c'est passable dans des commentaires sur le Net, j'ai beaucoup de mal à les voir dans un livre de qualité.
Bon, ces quelques défauts ne m'ont pas empêché de passer un bon moment de lecture et de faire tourner mon adrénaline plein gaz, mais je me devais de le souligner.
Un thriller noir qui respecte les codes tout en les chamboulant un peu, qui a de la forme et du fond, même si la forme aurait pu être encore plus approfondie.
En tout cas, la fin vaut son pesant de cacahuètes. Quel sadisme. J'en redemande, moi, du sadisme pareil.