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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Avec l'arrivée des beaux jours, j'ai trouvé un moyen agréable de combler mes lacunes littéraires : l'audio-livre !
Mes écouteurs dans les oreilles, j'enchaine les kilomètres.
Bon, il est vrai que ça me demande un effort de concentration parce que je pense être plus visuelle qu'auditive... mais c'est tout de même bien agréable.
J'ai ainsi écouté la douce voix de Camus me conter son oeuvre L'étranger.

Au début, j'ai été un peu agacée par cet être froid, insensible, lisse... Et puis je me suis laissée prendre dans les filets de l'auteur, et j'ai ressenti beaucoup de compassion pour cet homme qui s'était construit sans père, et qui comprenait plein de choses à sa vie, plein de choses de la vie lorsqu'il était trop tard...
J'aurais aimé qu'on puisse, comme il le désirait lui aussi, lui donner une autre chance, non pas pour qu'il assiste à toutes les exécutions capitales qui se seraient présentée à lui, c'est absurde, mais pour qu'il puisse vivre, enfin ! Pour qu'il puisse construire quelque chose, et transmettre ce que la vie lui avait enseigné.

L'étranger m'a donné envie de lire le mythe de Sisyphe, qui attend depuis longtemps dans ma bibliothèque.


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« L'étranger », deuxième volume - publié en 1942 - de la trilogie de l'absurde, comme l'a dénommée l'auteur lui-même (« le mythe de Sisyphe », « l'Etranger » et « le malentendu ») est le roman par lequel je suis entré dans l'univers de Camus, à quinze ans… pour y découvrir, entre autres que « tout homme naît pour mourir »…Vaste programme !
En fait, ce petit roman (par le nombre de pages) retrace une partie de la vie de cet employé de bureau, Meursault, qui se verra condamné à mort : un enchaînement de circonstances l'ayant amené à tuer un arabe, sur une plage inondée de soleil…
Mais qui est Meursault ?
Inconsciemment, sans doute, il est « l'étranger », étranger à lui même et à la société dont il ne joue pas le jeu et semble ignorer ou rejeter les règles. Ainsi, il ne pleurera pas à l'enterrement de sa propre mère, il ne se défendra pas vraiment à son procès et repoussera l'aide du prêtre au moment de partir au châtiment suprême…
Pour Meursault, l'existence ici-bas n'a pas de sens : les événements s'enchaînent fatalement les uns aux autres sans autre vecteur que le hasard.
Mais attention : « les braves gens n'aiment pas que l'on suive une autre route qu'eux .» disait si joliment Brassens ; donnant ainsi une dimension universelle au « résumé » le « L'étranger » par Camus lui même : « Dans notre société tout homme qui ne pleure pas à l'enterrement de sa mère risque d'être condamné à mort »…
C'est fort…C'est très fort … et pour moi, sans aucun doute, un des chef-d'oeuvre de la littérature française.

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Mon premier coup de coeur littéraire lu à 14 ans sur le conseil de mon père et relu aujourd'hui. Tout a été dit sur cette oeuvre prodigieuse. Et ces propos entendus sur France Culture résume très bien ce que je ressens aujourd'hui et ce que j'ai ressenti il y a des années :"L'Étranger" raconte la méchanceté du quotidien, l'ambivalence du soleil, la tendre indifférence du monde et la folie des hommes, sacrifiant sur l'étal de leurs certitudes celui qui, parce qu'il ne sait pas mentir ni pleurer, ne leur ressemble pas". À lire régulièrement.
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Que ça fait du bien de relire ce roman. Je lisais juste avant de l'entamer, un autre auteur qui disait que si l'on devait n'en lire qu'un seul de Camus, ce serait celui-là. Beaucoup a déjà été dit sur ce livre, sur ce héros un brin pénible avec son caractère taciturne et nonchalant. Tout lui passe au dessus de la tête, le mariage, l'ambition, même le décès de sa mère. Alors pourquoi pas tuer quand il fait trop chaud ? Et, en même temps, son bonheur tient à cela, son éloignement. Son malheur vient des autres. On voudrait que la hargne qu'il a sur les dernières pages, il l'ait utilisée avant, à son procès par exemple. Et puis non, il ne serait plus un anti-heros parfait. Que lui reproche-t-on au final ? Pas seulement un meurtre : plutôt de manquer d'empathie, d'être différent, insensible, néfaste à la société à force de rester à côté. Un incontournable.
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"Aujourd'hui maman est morte. Ou peut-être hier, je ne sais pas."
Sans doute l'un des incipit les plus célèbre de la littérature française. Vous avez entre les mains un chef d'oeuvre de la littérature française contemporaine et ce ne sont pas les 20675 lecteurs de Babelio qui vont me contredire. Ce court roman ne peut laisser insensible le lecteur et il en restera forcément une trace dans sa mémoire.
Un bref moment de la vie d'un homme en Algérie. Tout commence froidement par le décès de sa mère, placée en institut. Il ne semble rien ressentir, assister à son enterrement comme à une obligation. Très rapidement il rencontre une jeune femme et il semble que là ce soient ses instincts de mâle qui reprennent le dessus. Puis, au cours d'une journée au bord de la mer qui aurait eu tout pour être belle, il va tuer un homme de sang froid. S'en suis la prison, le procès d'où là encore il se sent absent. Cet homme semble assister passivement à sa vie, sans émotion, avec une froideur qui tranche avec la chaleur et le soleil omniprésents tout au long du récit. Un court roman fait de phrases brèves, sèches, et dont on ressort entre le malaise et le questionnement.
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C'est un philosophe qui m'a éveillé à ce titre et à cet auteur, par ses mots il m'a titillé l'oreille.
Centenaire oblige, j'avais souvent un de ses titres sous les yeux, chez mon "dealer"habituel....Par principe, lequel je ne sais pas , je n'aime pas lorsque l'on me dit " il faut", alors depuis le collège et "sa peste" obligatoire, je m'étais abstenue.
Surprise au début, du "style rédaction de collège", par le "Je", plat et malgré tout impersonnel, puis emportée par le crescendo des mots, se chargeant de sens et du poids du récit.
Ce spectateur étranger à lui même et aux autres, moribond de sa vie, devenant vivant et mesurant enfin la valeur d'une vie, parce qu'elle va lui être prise, par ses mots devient frère de toute l'humanité.
Ces mots universels, déjà écrits par Villon, puis par Frédéric Dard dans "la crève, ceux de l'homme qu'il soit salaud ou misérable, lorsqu'il sait que la mort arrive, ces mots qui font vibrer l'humanité enfouie en chaque homme, sont un réquisitoire magnifique contre la peine de mort.
L'angoisse du croyant devant la logique implacable du non croyant, les arguments du "coeur "et de l'espérance, contre la pensée "claire" et non polluée, plaidoyer impitoyable pour la libre pensée, certainement libérateur au moment de leur parution.
Camus nous fait "avaler" à notre insu la pensée libre, la pensée vivante, la pensée éternelle, l'humanité en somme...Cogito, ergo sum
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Ce n'est pas sans appréhension que j'ai débuté la lecture de L'étranger ; je craignais le style. Eh bien, non, ce n'est pas du tout comme je le craignais ; le style n'est pas morne, ne laissant pénétrer aucune émotion. Bien au contraire. Avec ces élans lyriques, sa manière simple d'énoncer le vrai, combien brutal fut-il, c'est un style qui renvoie énormément d'émotion, que nous donne Camus.
Et une histoire, tout, sauf innocente… Mersault, en apparence, est un homme des plus simples. Son style même ( car le style de Camus est aussi le style du narrateur ), simple, refusant l'interprétation des faits, n'est pas une simple façon de raconter et de donner un ton au récit ; non, c'est bien plus que cela ; ce style montre que Mersault refuse une quelconque interprétation. Mersault, c'est l'Homme des Faits, et c'est pour ça qu'il est en décalage avec la Societé. Il dira qu'il a tué quelqu'un, il dira comment est-ce qu'il l'a tué ; il ne dira pas, cependant : j'ai tué, mais il y a ceci, cela pour m'excuser. Car il veut simplement donner un fait. Sa mère est morte ? Il l'accepte comme un fait, mais il refuse d'en donner une interprétation, d'y attacher un sentiment. C'est son combat. Son combat pour la vérité, la simple vérité. Mais pourquoi combat-t-il pour cette cause ? La réalité, c'est que Mersault se révolte contre toutes les petitesses d'interprétation, contre tous les arrangements, qui permettent de se justifier. A la fin, Mersault se révolte contre le fait même d'avoir un espoir qui, il le sait, est illusoire. Il choisit d'accepter la mort, refusant les illusions et du même coup, acceptant les faits.
Et même dans ses élans, peut-être même plus que jamais dans ses élans, l'écriture se fait farouche et indomptable, comme son héros. Car elle exprime toujours la pensée de Mersault. Et c'est pour ça qu'elle n'est pas morne, et c'est pour ça qu'elle n'est pas sans vie : parce qu'elle est l'expression d'un cheminement, d'une vie. C'est pour ça qu'elle est farouche, indomptable, dans son calme, comme dans ses élans, comme dans ses passions. Elle est comme Mersault, car elle est Mersault. C'est rare, les narrateurs qui sont aussi proches de leur énoncé, tellement, tellement proches qu'ils se confondent avec leur façon d'énoncer, jusqu'à donner à un récit une force, une puissance, une humanité qui n'appartient qu'à lui.
Mais, aussi rares que ce soit, on peut sans nul doute trouver des écrivains, des auteurs exceptionnels qui l'ont faits. Des auteurs comme Camus.
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Meursault, dont on ne connaît pas le prénom, se rend à l'enterrement de sa mère. Épuisé et souffrant de la chaleur, son comportement indifférent pendant la cérémonie lui coûtera cher.

Si la philosophie existentialiste postule que la vie n'a aucun sens, aucun but intrinsèque, elle suppose par conséquent que c'est à chaque individu, par ses décisions et ses actes de déterminer le sens de sa vie. Meursault reste indifférent à ce qui l'entoure et accepte volontiers de venir en aide à un homme qui a frappé sa maîtresse ou de se marier avec Marie, une ravissante jeune fille. Chaque fois, il précise que tout ça lui est indifférent, mais il approuve, sans pour autant donner un sens à ses actes.

Tout est absurde.

Indifférent, étranger à ce qui se passe autour de lui, Meursault ne témoigne ni empathie ni compréhension des émotions. Sa conversation avec un vieil homme antipathique qui vient de perdre son chien qu'il battait montre qu'il n'est capable ni de désavouer quelqu'un ni de lui manifester la moindre sympathie.
En retour, le procès de Meursault prouve à quel point il est rejeté pour son manque d'acceptation des normes sociales.

Lien : https://dequoilire.com/letra..
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Ce n'est pas sans une certaine indignation que j'ai lu un jour une critique dans laquelle l'auteur traitait Meursault de "paltoquet". Meursault que j'admirais pour son absence complète d'hypocrisie, Meursault qui prêtait l'oreille à ses amis et voisins, toujours aimable et prêt à rendre service. Je trouvais ça honteux, voire criminel, d'autant plus que je l'avais fait découvrir à mon conjoint avec lequel il partageait une grande ressemblance, disons, la noblesse de l'indifférence. You see, I was married to Meursault II...! La mort de sa mère ne lui arracha aucune larme et mes angoisses glissaient sur lui : aucune osmose, c'était divin.
Cependant, une petite phrase avait laissé sa marque dans mon esprit. L'auteur de l'article expliquait très savamment que Meursault n'accédait à "l'existence" qu'au moment de sa mort, après avoir vécu l'épreuve du feu : il désirait vivre, il ressentait, il haïssait enfin.
Force me fut de reconnaître qu'il y avait du vrai dans cette affirmation.
Les années passèrent, mon conjoint, toujours indifférent ressemblait de plus en plus à une huître fermée à triple tour. Affreux n'est-ce pas?
Je ne souhaite naturellement pas qu'il fasse quoi que ce soit d'excessif, néanmoins..
A propos de Meursault, je vous livre pour ce qu'elle vaut ma théorie des noms propres en matière de littérature : Madame de Mortsauf (hélas justement non, pauvre Lys), Lady Chatterley, bavarde et, hum! "lay" (terrain brûlant), et enfin Meurt Sot, mais non justement.
Vous trouvez ma théorie stupide? Je suis quant à moi convaincue que ces auteurs ont choisi ces noms pour ce qu'ils évoquent. Vous me direz que tout cela est stérile, en regard de ce texte grandiose. Soit. Je n'ai d'ailleurs pas poussé assez loin mon étude et ne saurais vous dire ce qu'il y a derrière Grégoire Samsa.
Alors donc, plus un mot, si ce n'est ceci : j'ai lu et relu L'Étranger et ne m'en suis jamais lassée. C'est un joyau.
Ah, j'oubliais : un jour une jeune anglaise me dit qu'elle devait faire une dissertation sur L'Étranger et l'Absurde. Moi : comment ça l'absurde? Il est jugé pour avoir bu du café au lait devant le lit de mort de sa propre mère. Café au LAIT, pas l'expresso qui vous garderait éveillé puisqu'il le faut bien. Finalement après de longues recherches, je suis tombée sur le film de Visconti. Malgré l'accent douteux de Mastroianni en anglais (un sacrilège, NOTRE Étranger) j'ai bien compris qu'il n'était question ni de lait, ni de cappuccino.

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Quel talent !

l'Étranger d'Albert Camus, est un livre déroutant, déconcertant, un roman inclassable qui par la singularité de sa construction et par son écriture si simple, est une œuvre hors norme, qui se dévoile peu à peu.
Camus lui-même nous demande de le lire avec attention. Meursault le personnage principal est devenu un mythe, d'autant plus fort que Camus se revendique de Meursault.

Et si Hugo et Voltaire étaient appelés à lire L'Étranger ! Et déroulant le procès, je les imagine passant du rire aux larmes, de la colère à la consternation, parcourant trois scènes sublimes, points décisifs du récit notamment dans ce dialogue final avec le curé où il s'emporte, "la mort c'est vous" moi je vis.

Je suis comme avec un tricot mal ajusté à vouloir faire coïncider, avec des maladresses, des bouts de vie, l'envers et l'endroit qui ne s'ajustent plus, tout semble incohérent, à commencer par le titre, publié en 1942 l'étranger, car quel est-il l'étranger sinon l'armée allemande.
Alors faute de mieux, comme un musicologue, je vais creuser chaque morceau de cette partition, mais je sais où finit le bal, sur l'échafaud.


ÉTRANGER


Étrange l'Étranger de Camus, car on sait pas grand-chose des deux personnages principaux, de l'arabe comme de Meursault qui a perdu sa mère. Il est difficile d'être plus étranger, à soi et à tous les autres, cette étrangeté en fait, un personnage totalement à part de notre littérature. Ce presque rien, réalise, à lui seul le mythe de l'Étranger auquel Kamel Daoud a lui-même voulu répondre.
Étrange de voir comment, peut-on d'un presque inconnu, établir un portrait, comment un juge brandissant un crucifix affirme qu'il n'a jamais vu âme si endurcie, d'un homme qualifié par le procureur plus abominable qu'un parricide.
La communication est absente ou fragile, dans tous les sens, ni Meursault, ni le juge, ni Marie, ni le prêtre, ne sont capables d'un réel dialogue, affirmant une fois de plus la réalité de l'Algérie, et la réalité de l'homme. L'absurde rattrape le récit dans la tendre indifférence du monde...
La tragédie émerge par le quotidien et l'absurde par la logique. Kafka n'est plus si loin.


ÉCRITURE BLANCHE


J'ai au cours des premiers chapitres été fasciné par cette écriture blanche, une écriture scientifique où l'on pèse le poids et la signification de chaque mot, pour lequel il convient de puiser un mot plus juste encore, moins affectif, plus neutre et y ajouter pour chaque question, au mieux un, " je ne sais pas", ou plutôt un, "ça m'est égal."
Les procédés narratifs, bousculent ou assèchent le désert intérieur.
Cette froideur dans le récit heurte et plus encore trouble le lecteur et le personnel de l'asile, jusqu'à ce constat ; " il n'a pas pleuré devant sa mère morte. "

Est-on sûr d'ailleurs qu'un enfant qui perd sa mère pleure ! Je sais que non, il n'en est plus capable, on lui dira alors qu'il est sans cœur, l'enfant sait bien qu'il n'en a plus.
" Un attachement si puissant qu'aucun silence ne peut l'entamer".
Cette écriture blanche vient se fracasser sur la suite du récit et libère un langage acre et de plus en plus noir pour aboutir à la dernière scène d'apocalypse, et s'effacer sur ce point d'orgue.


ROMAN PHILOSOPHIQUE.


C'est l'approche Nietzschéenne du livre qui s'invite et s'impose, c'est vouloir le monde tel qu'il est, la sagesse naît de tout ce qui est, a été, et restera à l'identique, et personne n'y peut rien.
Cette sagesse peut se résumer aussi à vouloir vivre totalement le monde, un monde à aimer, se contenter de lui et ne jamais récriminer contre lui. Je découvre un Camus hédoniste et libertaire qui affirme jouir du monde et s'y trouver comme un poisson dans l'eau.

De ses lectures il abreuve ses réflexions, du taoïsme il partage une obligation fondamentale, la vie ici bas, dégagée de tout, au delà énigmatique.

D'autres nuances aussi apparaissent, la suspension de tous avis, l'indifférence à tout, la maîtrise de l'affectif, ces quelques traits, dérangent autant le lecteur que les personnes qui l'entourent.
Est-il si totalement incapable de vivre en communauté, certes non, mais sa philosophie fait de lui un sceptique un homme qui cherche la vérité sans relâche et qui se garde de tout jugement superficiel ou préalable.
Il a tout appris de sa mère silencieuse, les mots ne sont jamais galvaudés.
C'est sans doute pour moi une grande découverte. Ce livre jette les bases, d'un courant anarchiste, Libertaire et hédoniste, le récit est délié par des personnages et une histoire, mais surtout dédié à enrichir une pensée.


L'AFFIRMATION DE SON ATHÉISME.


Dans deux scènes magnifiques, on lui suggère de solliciter le pardon, mais le pardon de Dieu. De telles suppliques lui sont non seulement indifférentes, mais déclenchent chez lui de la colère.
Il me vient un texte de Brel ;
"ils s'en vont à l'église déverser leurs saletés, au curé qui dans la lumière grise, baisse les yeux, pour mieux leur pardonner ».
Albert Camus ne demande pas le pardon, il exige la justice, Meursault est effaré qu'on lui présente le Christ en croix, explique qu'il ne sait pas ce que veut dire le péché, professe qu'il ne croit pas en Dieu, et affirme clairement son athéisme.

L'effondrement du juge qui vient de brandir la croix du Christ, comme un inquisiteur, aurait fait frémir un homme comme Voltaire. le procès est une caricature qui ne manque pas d'humour, "enterrer sa mère avec un cœur de criminel" !



Dans la prison, il doit s'exprimer avec une violence redoublée, " il est vivant et il n'a pas le temps de parler d'un Dieu Mort". Il dit "que l'enjeu c'est la vie et non la mort" , alors que le prêtre vient lui parler de la mort, la vie n'est elle pas trop importante pour être souillée par des discours inutiles.


LA PASSION DE LA VÉRITÉ.


Camus, ne fait aucune entorse à la recherche de la vérité. Meursault affirme que c'est le soleil qui l'a troublé, qu'il n'avait pas prémédité son acte, " dire le soleil , cela déclenchera les rires dans le tribunal ".
Et Meursault a raison. La scène du crime est un bijou littéraire, d'une radicale simplicité. Elle se joue avec une économie de mots, et le soleil se joue de sa lucidité, l'accable de sa force, troublant de réalisme.
Est-ce que le jugement reçu est juste, est-ce que la vérité a été recherchée ?
Villiers de L'Isle-Adam dans les Demoiselles de Bien filâtre, le premier des contes cruels souligne avec ironie que le bien et le mal devient une question de latitude, et ainsi de passer des Indiens aux Lapons de Sparte à Kaboul, et de décrire certains supplices en vogue dans ces climats.
L'expérience du jeune écrivain qui suivit comme chroniqueur sur plusieurs procès affleure ici : avoir poussé les dialogues jusqu'à l'absurde.
Il y a dans l'étranger, cette profonde réflexion sur la recherche des faits, sans mélanger les rumeurs, sans assommer le jury avec des plaidoiries bâties sur des préjugés. Hugo aurait sans doute apprécié.


MAMAN EST MORTE....


Ce livre aux multiples facettes, commence avec la mort de sa mère il s'achève sur le crime qu'il a commis, la réalité vécue lui vaudra l'échafaud.
Serait-il vrai qu'il n'a pas de conscience, pas d'âme, comme souhaite le présenter le président du tribunal, puis l'appeler Monsieur l'Antéchrist, pour avoir refusé le repentir du prêtre ?

On condamne Meursault pour son apparente indifférence, indifférence apprise de sa mère et sur laquelle ils fondent leurs rapports, les juges et le prêtre peuvent lui reprocher son attitude, ils ne la comprennent pas.
Meursault rejoindra sa mère,
"si près de la mort, maman devait s'y sentir libérée et prête à tout revivre. Personne, personne n'avait le droit de pleurer sur elle. Et moi aussi, je me suis senti prêt à tout revivre."

Je suis encore sous le charme de ce livre, car il finit ainsi;
il crie sa colère, sa révolte contre cette mort prématurée, contre la condition humaine, contre toute idée de vie future. Prêt à tout revivre purifié vide d'espoir vain,
il s'ouvre alors pour la première fois, à " la tendre indifférence du monde, j'ai senti que j'avais été heureux et que je l'étais encore".
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