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sur 1736 notes
Il y a quelques mois, un matin, j'ai croisé Emmanuel Carrère dans un café du 10ème sans oser le déranger pour banalement lui dire : « J'aime beaucoup ce que vous faites ». Pourtant après la lecture de ce livre, je voudrais l'assurer que si je suis une de ses fidèles lectrices, depuis plusieurs années, je viens de terminer son livre qui a sa place avec les « grands » livres, ceux qui nous font grandir, nous nourrissent, nous interpellent, nous apprennent, nous enrichissent.
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Un bien curieux récit qui mêle confession, fiction et exégèse, irritant et sincère, séduisant par sa finesse, que l'auteur aurait pu sous-titrer « Dieu, moi et Luc ». Carrère nous dit sans morgue ni modestie : « Au moins deux tiers des lettres de Paul, selon les critiques les plus sévères, sont bel et bien de lui. Elles expriment sa pensée aussi directement que ce livre exprime la mienne » (p 206). Son livre commence par un prologue où il nous prévient qu'il a échappé à l'église et à la psychanalyse (voir p 25 la relation pince-sans-rire de son échange avec Roustang sur le suicide). Suit un chapitre intitulé « Une crise », qui raconte un engagement religieux aussi brutal que celui de Claudel derrière le pilier de Notre-Dame, mais réversible : « Oui, bien sûr, on peut dire que je me suis converti parce que je désespérais, mais on peut dire aussi que Dieu pour me convertir m'a accordé la grâce du désespoir. C'est ce que je veux penser, de toutes mes forces : que l'illusion, ce n'est pas la foi, comme le croit Freud, mais ce qui fait douter d'elle, comme le savent les mystiques. Je veux penser cela, je veux le croire, mais j'ai peur de cesser de le croire. Je me demande si vouloir tellement le croire, ce n'est pas la preuve que, déjà, on n'y croit plus » (p 118-9).

Puis viennent les chapitres « Paul », « L'enquête » et « Luc », et malgré la première citation, c'est bien à Luc, « le seul goy de la bande des quatre », que Carrère s'identifie, même et surtout s'il ironise à son propos : « Luc monte en épingle quelques recrues de rang plus élevé, des Romains en particulier, mais Luc est un peu snob, enclin au name-dropping, et tout à fait du genre à souligner que Jésus n'était pas seulement fils de Dieu mais aussi, par sa mère, d'une excellente famille » (p 188-9). Nous entrons alors dans un roman psychologique qui met en scène Luc, le voyageur et le témoin omniprésent, qui oppose Pierre et Jacques, qui ont le goût du quotidien, des hommes et de leurs modestes espoirs, et Paul qui ne croit qu'aux idées (« vies minuscules contre théologie majuscule »), qui oppose aussi l'église de Jérusalem et la religion des gentils, les fondateurs des églises d'Asie et de celle de Rome, « l'église de la circoncision et celle du prépuce ». Il ne faut pas retenir seulement l'ironie de l'auteur, mais aussi sa pénétration autour de l'idée centrale et décevante de la résurrection, tributaire de la proximité attendue de la fin du monde et du jugement dernier, ou sur les paradoxes de la morale (l'intendant chassé, les talents, les ouvriers de la onzième heure, le fils prodigue) : « Les lois du royaume ne sont pas, ne sont jamais, des lois morales. Ce sont les lois de la vie, des lois karmiques » p 566.

Le livre est magnifiquement documenté, parfois sèchement pédagogique (« Voilà, vous savez ce qu'il faut savoir sur Q » p 403) ce qui fait accepter ses hypothèses, ses métaphores et ses symboles. L'auteur rappelle aussi souvent que nécessaire que c'est son récit, son scénario, acceptable comme fiction ou séquence plausible par certains lecteurs, inacceptable par d'autres, mais qui fait la dynamique et la séduction de son livre. Commencé dans la dépression, il s'achève dans un épilogue panoramique coquettement sous-titré « Rome, 90 - Paris, 2014 », qui mêle aux anecdotes des pages superbes sur Jean.

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D'Emmanuel Carrère, je n'ai lu qu'un seul livre, « D'autres vies que la mienne ». Livre que j'avais adoré et où j'avais pleuré du début jusqu'à la fin je pense. Je n'avais pas retenté l'expérience.


En regardant un peu les livres attendus de cette rentrée littéraire 2014, je suis rapidement tombée sur le royaume (facile, je crois bien avoir vu le visage de Carrère sur à peu près tous les magazines littéraires de France) et le thème m'a vraiment séduit. J'aime beaucoup lire et me documenter sur le christianisme. le résumé ne pouvait donc que me plaire.


Quand on l'a donc reçu à la bibliothèque, je me suis empressée de mettre la main dessus.


Depuis son roman La moustache, Emmanuel Carrère n'écrit plus vraiment de fiction. Ces ouvrages sont plutôt des documentaires/ essais biographiques. L'écriture est agréable, il a du talent sans aucun doute.


C'est pour le moment le livre de la rentrée littéraire qui m'a le plus marqué. J'ai vraiment beaucoup aimé la lecture de ce livre et je ne peux que le conseiller.


Je n'ai que deux bémols :


Le premier n'en est pas réellement un en fait, je veux juste mettre les lecteurs en garde. Oui, c'est un roman très important de la rentrée littéraire, oui, on en parle partout. Mais si jamais vous ne vous sentez aucunement attiré par le christianisme et par l'histoire de comment il a été créé, je vous déconseille ce livre. Surtout qu'il fait plus de 600 pages.


C'est un ouvrage sur le christianisme est vraiment pas autre chose. Je pense qu'il est abordable par tous ceux qui ont envie de tenter le coup, même si j'avoue avoir eu certainement des facilités à comprendre et à me plonger dedans puisque j'ai l'arrière-plan culturel qui va avec. Cela aide grandement.
Vous voilà prévenu.




L'autre bémol, c'est que le début est un peu long à lire. On n'entre dans le « vif du sujet » qu'à partir des pages 150 ans, c'est à dire aux travaux de l'auteur sur le début du christianisme. Avant, Emmanuel Carrère nous parle de son « expérience catho » : comment elle est arrivée, a vécue et est reparti.


Il faut avouer, j'ai trouvé cela un peu long et l'auteur m'a parfois un peu agacé.
Emmanuel Carrère nous dit qu'il est devenu croyant. Franchement, après lecture de ce roman, je ne trouve pas qu'il l'ait jamais vraiment été. Il a une juste l'impression de l'être.


J'ai eu l'impression d'une personne très très malheureuse et mal dans sa peau, qui s'est plongé dans la religion pour trouver de belles solutions toutes faites à sa déprime. Bien évidemment, il s'agit de mon avis et uniquement de mon avis, mais pour moi, ce n'est pas être chrétien de faire ce qu'il a fait.


Il est devenu plus catho que le pape en gros, comme on voit les nouveaux convertis être bien plus extrémistes que ceux qui suivent cette religion depuis l'enfance.
Il a eu besoin de (se?) montrer qu'il l'était vraiment, chrétien et qu'il en a fait beaucoup trop. Et forcément, il s'est lassé, puisqu'il n'y a pas trouvé ce qu'il souhaitait, une réponse magique à tous ses ennuis.


Mais une fois passée ses 150 premières pages, j'ai vraiment beaucoup apprécié ce livre. Emmanuel Carrère a accompli un travail de titan, il n'est pas étonnant qu'il a mis 7 ans à l'écrire.


On pense souvent que le début du christianisme, c'est le Christ. Or pas du tout. Jésus était juif et n'a jamais parlé du christianisme. le début, ce sont les apôtres et tout particulièrement Saint Paul. Tout cela s'est passé quelques années déjà après la mort de Jésus.


Franchement, j'ai trouvé cela passionnant : voir les différentes églises qui se forment, comment Saint Paul est allé à l'encontre des autres apôtres en s'intéressant particulièrement aux non-juifs, la construction de ses églises, ses textes…


Voir comment petit à petit, le christianisme (sous multiples formes) à commencer à prendre racines dans l'Empire romain, c'était vraiment bien. J'ai beaucoup aimé le fait aussi qu'Emmanuel Carrère cite toujours ses sources. C'est vraiment très bien ça. Tout comme il prévient le lecteur quand il se met à inventer.


C'est évidemment un regard assez critique que l'auteur a sur la religion, puisqu'il n'y adhère plus. Mais cela ne m'a pas dérangé plus que ça. Il y a sans aucun doute des hauts et des bas dans ce livre (et certains passages assez étranges, on se demande un peu ce qu'ils viennent faire là), mais j'ai toujours réussi à y retrouver de l'intérêt.



—————————————————–

Un roman très intéressant, certainement Un des romans de cette rentrée littéraire 2014, mais – je me répète – il faut avoir une certaine prédisposition (en bien ou en mal) au christianisme et être intéressé par son commencement, sinon, il y a un risque de désintérêt.

Si moi, j'ai beaucoup aimé le lire et que je ne me suis pas ennuyée, si vous ne vous sentez aucune affinité avec ces thèmes, passez votre chemin.
Lien : http://writeifyouplease.word..
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Voici un roman d'un style un peu particulier. Un roman en forme d'enquête sur l'histoire de l'évangélisation avec en incrustation des pans de la propre vie d'ex-chrétien d'Emmanuel Carrère. Issu d'une famille russe et croyante (Ah la foi orthodoxe !), il va, à une époque de sa vie, essayer – car c'est bien le terme, il fait ça comme on enfile un vêtement – de croire. En bon intellectuel, il n'y va pas de main morte. Il lit tout, originaux, traductions, il s'imprègne du nouveau testament, prend des notes ( 15 cahiers quand même), va à l'église tous les jours, prie avec ferveur lors de messes célébrées dans une remise à foin « par un homme épuisée pour une poignée de montagnards valaisans et un mongolien ( qui tenait le rôle d'enfant de choeur) dont chaque geste disait qu'il était à sa place et qu'il ne l'aurait échangé pour aucune autre » Bref ! il endosse l'habit du catho. presque parfait mais au bout de 3 ans cette ferveur semble le quitter.

Plus d'une décennie plus tard, il revient sur cet épisode, non pour le remettre en question mais pour – avec la distance d'un historien– explorer, avec les écrits de référence et son imagination de romancier, le nouveau testament et plus particulièrement les épitres de Paul et l'évangile selon Luc. Avec des séquences vraiment hilarantes notamment le passage du recrutement de la nounou de ses enfants, il nous conduit sur les traces des apôtres.

La force de l'ouvrage c'est d'essayer de restituer l'état d'esprit de ces hommes qui partirent dans tous les sens pour livrer une parole, de nous faire voir une époque, une façon de vivre, d'évoluer entre hommes de culture et de religions différentes. Enracinée dans la culture juive, les chrétiens vont s'affranchir progressivement des dogmes du Temple, c'est un va et vient permanent de « on le fait, non on le fait pas ». Les premières communautés chrétiennes - qui ne savent encore qu'ils sont chrétiens – sont estomaquées par le discours sur l'amour du plus faible, sur l'égalité entre les hommes. Autant de concepts qui sont totalement inexistants dans les sociétés grecques et romaines de l'époque. Sociétés dont les religions ont pour avantage d'être permissives là ou la religion juive (la seule à dieu unique à cette époque) est pleine d'interdits.
Carrère nous présente ces pêcheurs modestes et illettrés qui vont changer la face du monde alors que Néron, Sénèque, Flavius Josèphe … qui font aussi partie du paysage, sont aujourd'hui à peine connus. Pour autant, le texte reste à distance de la foi. Carrère n'est surement pas un évangéliste, il s'applique à raconter une époque à remettre les hommes à leur place d'homme. D'ailleurs, ils ne sont pas toujours glorieux ces premiers chrétiens qui se bouffent le foie pour prendre le dessus des uns sur les autres.

Si on n'est pas familier de l'ancien testament et pas passionné (ce qui est mon cas) par les pérégrinations des apôtres la lecture est par moment semée d'embuches. Faut prendre des notes comme Carrère il y a 20 ans ! Comprendre qui faisait quoi et qui allait où aux environs de 60 après JC. est peu motivant même quand c'est Carrère et son style limpide qui écrit. Cependant, oui, Emmanuel Carrère est capable de vous faire avaler 630 pages sur les épitres de Paul et sur l'évangile de Luc sans que vous soyez – comme moi – ni chrétien, ni croyant.

Et puis par moment, pour bien nous montrer qu'il reste un libre penseur iconoclaste, Emmanuel Carrère digresse sur son goût du porno sur Internet. Là, je me demande s'il ne s'amuse pas un peu avec les chrétiens qui vont lire cet ouvrage. Paf ! En plein milieu du livre, on a de belles pages bien claires, de masturbation féminine et sur les modèles qui ont inspiré la peinture sacrée du Caravage. La vierge et la putain, Sacré Emmanuel ! Un peu plus loin, il va faire dans le gore pour expliquer les tortures infligées au premier chrétien. J'avoue que ça réveille son homme surtout après des passages un peu longuets. Certains ont qualifié l'ouvrage de « livre complet », histoire, récit, roman, autobiographie… c'est vrai que chacun pourra y trouver ce qu'il cherche un peu comme dans les écrits religieux.
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Élevé dans la religion catholique dans les sages années 60, l'enfant que j'étais fut séduit par la belle histoire inculquée au catéchisme, toutefois sans illumination, mais attiré tout de même par la prêtrise.
Attiré par les excès de la vie dissolue qu'offraient les années 70, l'adolescent s'est sensiblement écarté de la pratique du catholicisme, tout en conservant une foi tapie au plus profond de lui.
Devenu adulte, l'homme que je suis a perdu la foi, et la belle histoire, après moultes réflexions, a perdu tout son sens. Comme une impression d'avoir été abusé...
Aujourd'hui, le passage dans "Le Royaume" approchant, pourquoi ne pas s'y raccrocher, peut-être par peur de l'inconnu, ou parce qu'il n'y aurait rien à y perdre ?

La foi d'Emmanuel Carrère ayant suivi une évolution semblable, "Le Royaume" allait-il m'aider à trouver des réponses à mes questions ?

Après une introduction prometteuse d'une centaine de pages, exposant sa crédulité, son attirance, son immersion et le début de ses doutes liés à sa foi dans le catholicisme, l'auteur nous embarque dans une interminable biographie de saint Paul, puis dans celle de Saint Luc, dignes d'un wikipédia pour enfant.
Le tout narré dans un vocabulaire parlé d'aujourd'hui (engueuler, baiser, péquenot, cinglé, prendre un savon...) totalement inapproprié à cette époque, avec des digressions (Ulysse, Staline, le yoga, l'île de Patmos...) totalement hors sujet. Je me suis souvent cru dans une bande dessinée...

Bref aucune réponse à mes questions pendant les 300 premières pages. le Royaume annoncé dans le titre existe-t-il ?
Peut-être la réponse se trouve-t-elle dans les 300 pages suivantes ! Si quelqu'un pouvait me résumer la suite...
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"C'est une chose étrange, quand on y pense, que des gens normaux, intelligents, puissent croire à un truc aussi insensé que la religion chrétienne, un truc exactement du même genre que la mythologie grecque ou les contes de fées."
Cette réflexion d'un ami d'Emmanuel Carrère pourrait au final concerner n'importe quelle religion mais, au vu du contexte socio-culturel, c'est sur le christianisme que l'auteur va se pencher.
Comment donc en est-on arrivé là, de Jésus que suivent quelques disciples à une religion à laquelle croient des millions de personnes dans le monde?
Emmanuel Carrère va tenter de répondre à cette question en se basant sur sa propre expérience. En effet, il y a presque trente ans, pendant quelques temps, il a été lui-même croyant. Ca lui est ensuite passé mais il a conservé les cahiers sur lesquelles il prenait des notes en lisant l'Evangile selon Saint Jean. Il se replonge dans ses propres écrits, dans ses livres, et se lance dans l'écriture du Royaume.

Avouons-le, quand mon ex-belle-mère m'avait offert ce livre en 2015, je l'avais rangé dans un coin de ma bibliothèque en me disant que ça allait être ennuyeux au possible. Son fils, dans sa énième crise de conscience, était convaincu d'avoir trouvé la foi ; était-ce une raison pour m'imposer des lectures traitant de la religion. J'avais jugé que non, et hop ! aux oubliettes le Royaume !
Et puis... Nous sommes en 2021, six ans plus tard, et je suis déterminée à vider ma PAL avant de m'autoriser de nouveaux achats car sinon, on sait tous comment ça finit, on craque, on craque, et certains livres restent en plan au fond des étagères.
Eh bien, mes amis, étant donné que j'attribue quatre étoiles à ce livre, vous aurez compris que j'ai eu bien tort de différer autant cette lecture. Ce n'était pas du tout le truc rasoir auquel je m'attendais. D'abord, Emmanuel Carrère a un style très agréable. Ensuite, la construction de l'ouvrage fait qu'on s'y laisse emporter. Pour finir, on y apprend énormément de choses : on y revoit certes des choses évoquées au temps lointain du catéchisme mais on reçoit également beaucoup d'informations sur l'histoire et la civilisation.
Il y a quelques années, on m'avait conseillé de lire Limonov, du même auteur, et après cette première expérience positive, je n'y manquerai pas !

Challenge ABC 2021/2022
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Je ne fais pas partie ni de ceux qui adorent Carrère, ni de ceux qui le détestent. Je reconnais la documentation poussée de son ouvrage, encore qu'il arrange à sa manière ce qu'il pas souhaité approfondir. Comme d'habitude, il parle souvent de lui en faisant semblant de parler des autres et même de Dieu. Donc, j'ai trouvé son livre long et lassant jusqu'au dix dernières pages qui rattrapent tout le reste et auxquelles je donnerais volontiers cinq étoiles.
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Emmanuel Carrère touché par la grâce durant trois ans, venait de réaliser que le Credo était « une insulte au bon sens ». Il précise, au début de ce superbe livre qui ne doit pas rebuter par sa longueur : « Je suis un écrivain agnostique qui essaie de savoir ce que croient, au juste, des chrétiens aujourd'hui. »
Il faut attendre une centaine de pages pour entrer enfin dans le vif du sujet, l'histoire de Shaoul, devenu Paul. Cette première partie, intitulée "Une crise (Paris 1990 – 1993)" est pourtant indispensable pour comprendre la suite car l'auteur détaille toutes les étapes de son cheminement religieux, ses amitiés, sa foi déjà mise à l'épreuve et parle de cet écrivain, Philippe K. Dick, qui lui a inspiré un livre et auquel il fait référence à plusieurs reprises.
Nous voici enfin sur les traces de Paul, dans le port de Troas, en 50. Pour aller bien au-delà de ce que nous savons communément, l'auteur relit les Actes des apôtres de Luc. Il était médecin, lettré et macédonien, un grec attiré par la religion des Juifs qui « prêchaient par l'exemple. Ils étaient graves, industrieux, totalement exempts de frivolité. » Au fil des pages, l'auteur précise les choses. Jusqu'au bout, il aura à coeur de recadrer le vocabulaire, ce qui révèle quelques surprises.
Paul est un rabbin de Tarse, en Turquie aujourd'hui. Il est petit, râblé, chauve et voilà qu'il annonce la venue du Sauveur… Certains croient, d'autres s'offusquent mais d'autres encore posent des questions. Paul, malade, est soigné par Luc et ce dernier va le suivre, se comportant un peu comme un journaliste. Tout au long du livre, Emmanuel Carrère s'évertue à « distinguer le certain du probable, le probable du possible, le possible du douteux. »
Tout cela donne un récit passionnant, plein de rebondissements avec un auteur très présent, ne cachant rien de ses doutes, de ses interrogations et des aléas de sa vie personnelle. Il passe les textes au peigne fin, note tous les noms, recoupe, compare. Exemples à l'appui, il prouve que, soit Luc recopie l'Évangile de Marc, soit il écrit ce qu'on lui a raconté, soit il invente et donne sa vision des choses. D'ailleurs, la quatrième partie lui est consacrée alors que Paul va être jugé à Rome. Luc est tout le contraire d'un sectaire. Il aime et admire Paul mais tient compte de ce que lui disent les autres personnes ayant connu Jésus.
Emmanuel Carrère ne donne pas de solution. Il bute : « Mais dès qu'il faut en venir à l'Évangile, je reste coi. Parce qu'il y a trop d'imaginaire, trop de piété, trop de visages sans modèles dans la réalité. » Qu'importe. Il va au bout de son enquête, constate que les lois du Royaume ne sont jamais conformes à la morale comme dans le fils prodigue ou les ouvriers de la onzième heure. L'épilogue permet de refaire le point sur ces textes et ceux qui sont censés les avoir écrits. Enfin, avec Constantin, en 312, la secte est devenue Église… mais il est bon de lire tout cela pour remettre en cause ces belles images inculquées sans aucun fondement historique.
Lien : http://notre-jardin-des-livr..
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Ce n'est pas ma première lecture d'Emmanuel Carrère, ce ne sera sans doute pas la dernière, mais je n'ai pas été séduite outre mesure par cette enquête sur les débuts du Christianisme. le style est là, accompagné de l'érudition, d'une pointe d'humour, j'ai beaucoup appris sur Jésus, sa vie, ceux qui l'ont accompagné, ceux qui se sont les premiers revendiqués de lui ; cela m'a amenée à réfléchir à la question de la Religion, de la croyance, des conflits qui en résultent, des interprétations qui en sont faites, de la Foi...
J'ai trouvé intéressantes les anecdotes personnelles de l'auteur , qui font ressortir la sincérité de sa démarche, même si il m'a semblé à certains moments gentiment pédant. Comme une autre lectrice, la surprise m'a gagnée, de lire ses nombreuses comparaisons entre l'Histoire Russe (régime soviétique, Tchétchénie,...) et l'époque tellement lointaine de l'origine de la Chrétienté.
J'ai apprécié par ailleurs la franchise, déniée de tout angélisme, que l'on décèle au fil des épisodes entre fiction et fait historique. Tout le monde en prend pour son grade, c'est osé, mais peut-être salutaire.
Pour conclure, une lecture source de réflexion, mais pas de nuits blanches exaltées ! (pour moi, du moins... ;) )
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En bon scénariste, Carrere lit, s'informe puis imagine et raconte, l'histoire de l'évangéliste Luc, de Paul...Trotsky.. Ulysse et Calypso... ou plus pitoyable, la fille qu'il a regardé vingt fois sur internet en train de se branler!

Et le résultat? un peu amusant, un peu instructif, un peu ennuyeux...
Une multitude de références parfois intéressantes (et qu'il semble aimer étaler), un énorme travail mais il lui manque peut-être une âme?

Je me consolerai avec la relecture prochaine de l'évangile selon Pilate de Eric Emmanuel Schmitt.
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