Observer ceux qui regardent ou regarder ceux qui observent ?
That is the question ?
D'ailleurs au sein du
musée d'Orsay tout au long de ce magnifique album, on finit par ce demander qui observe qui ?
Et au fil des pages nous sommes les spectateurs de ce jeu sans fin....
Les Éditions stock ont lancé un collection qui s'intitule "Ma nuit au
musée"
et bien le sous-titre de ce roman graphique pourrait être "Leurs nuits au
musée"
Loin des tableaux colorés,
Loin des teintes chamarrées,
l'auteur a pris le parti du Noir et Blanc, et quelle réussite !!! Des dessins qui ont l' instantanéité d'une photo
Un
musée est le notre propre reflet, cet album est de prime abord le reflet de nos attitudes dans un
musée.
Avec une certitude chacun se retrouvera au moins dans une vignette, comme une mise en abyme graphique.
Il y a ceux qui s'approchent pour mieux détailler une oeuvre, ceux qui s'éloignent pour
Il a ceux qui contemplent une oeuvre seuls, assis, et qui au fil des minutes ou des voient défiler plus de personnes devant l'oeuvre que l'oeuvre elle-même, et qui au final découragés s'en vont ;
Il y a ceux dont on sait, qu'elle oeuvre ils regardent, juste avec un regard ou une attitude ;
Il y celui qui faisant partie d'un groupe qui visite le
musée au pas de course, ne peut prendre son temps devant les tableaux, et cours après le groupe qui court ;
Celui là même qui passe son temps à courir, et qui fini par s'échapper du groupe pour mieux revenir sur ses pas ;
Ma préférée : le couple qui visite le
musée Monsieur qui détaille le tableau, s'extasie devant celui-ci et Madame qui lui dit : " dépêche toi.... de toute façon, je l'ai pris en photo.... Tu pourras le regarder à l'hôtel ce soir..." ;
Et puis une fois le
musée fermé.... Que se passe-t-il....
Ce sont les oeuvres qui nous observent par l'horloge emblématique du
Musée d'Orsay.
Surtout quatre, fidèles au poste tous les soirs : La Pensée d'
Auguste Rodin, le Narcisse de Paul Dubois, le Buste de
Charles Garnier de Jean Baptiste Carpeaux et enfin le Persée de Laurent-Honoré Marqueste. Ces statues devenues vivantes observent notre vie, dans nos boîtes qui se déplacent, et nos travers l'oreille collée ou les yeux rivés sur une autre boîte plus petite.... Petite boîte que nous leur montrons à longueur de journée, c'est La Méditerranée de Maillol qui le dit à un des Gladiateurs de Jean-Léon Gérôme.....
Il y a les commérages des parlementaires d'
Honoré Daumier, rien ne change vraiment....
Il y a ceux qui "s'évadent" le temps de la nuit, les Raboteurs de parquet partis je ne sais où ? , l'Olympia de Manet qui allongée toute la journée n'a-t-elle pas le droit de se dégourdir les jambes ? , et l'ours blanc de
François Pompon, lui c'est l'inverse, n'a-t-il pas la possibilité de quitter sa pose pour trouver un recoin où se reposer ?
L'Héraklès d'
Antoine Bourdelle qui se découvre une passion dévorante et intrigante pour les toilettes du
musée.....
Un
musée est le notre propre reflet, un
musée c'est donc la vie, avec ses histoires :
Anacréon d'
Eugène Guillaume et La liseuse et
Henri Fantin-latour qui se retrouvent après une journée de manque loin l'un de l'autre ;
La Jeune femme à la rose d'
Amédeo Modigliani et le Mercure d'Henri Chapu jouant au jeu du "Je t'aime moi non plus" ;
L'Oedipe à Colone par Jean Hugues qui accueille la Venus Victrix d'Auguste Renoir et lui fait la visite, les présentations.... Et répond à ses questions :
"Mais pourquoi il nous arrive tout ça ?
Arrive quoi ?
Ben bouger, marcher, parler....
On en sait strictement rien. Et on ne se pose même pas la question. En fait, on s'en fiche.... royalement.
Est-ce si important de savoir pourquoi ?
On profite.... On savoure. On vit" ;
Berthe Morisot au bouquet de violettes qui tous les soirs a rendez-vous avec l'homme au chien....
Une BD singulière pour des regards pluriels....
Qui donne envie de pousser la porte du
musée, quel qu'il soit, et d'y prendre son temps, d'y perdre son temps, de regarder, d'observer, d'en profiter, de le savourer et de le vivre...