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EAN : 9782021233230
160 pages
Seuil (15/05/2015)
3.56/5   8 notes
Résumé :
Avec l’irruption inattendue des combattants de Daech (ou État islamique) dans le Nord de l’Irak, la chute de Mossoul et le long siège de Kobané, en Syrie, la question kurde est revenue sous les feux de l’actualité internationale depuis l’été 2014. Les Kurdes, sunnites à 80 %, sont alors apparus comme une des rares forces régionales déterminée à combattre le djihadisme. Mais, divisés entre mouvements concurrents (PDK, UPK, PKK, etc.) et entre l’Irak, la Syrie, la Tur... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
A 80 ans passés, Gérard Chaliand continue de nous faire visiter le monde avec ce mélange unique d'encyclopédisme fascinant et de partis pris militants. Son engagement en faveur de la cause kurde est ancien. Il remonte aux années 70. Dans un court essai qu'il co-signe avec Sophie Mousset, il brosse à grand traits l'histoire du peuple kurde tiraillé entre plusieurs Etats : la Turquie, la Syrie, l'Irak et l'Iran.
Comme le titre l'annonce, la question kurde se pose aujourd'hui en des termes renouvelés. La deuxième guerre du Golfe avait déjà créé au nord de l'Irak une zone autonome kurde en 1991. Grâce à elle le Kurdistan irakien a été épargné par la troisième guerre du Golfe. Son autonomie s'est accrue avec la chute de Saddam Hussein. Une république quasi-autonome existe désormais au nord-est de l'Irak, peuplée de près de 8 millions d'habitants avec Erbil pour capitale. C'est un ilot de tranquillité au coeur d'une région bouleversée par l'écroulement du régime baassiste, l'incapacité des forces d'occupation américaine à reconstruire un pacte national en Irak, la prise de pouvoir par le Chiites majoritaires, la marginalisation et la radicalisation des Sunnites.
Mais cette quiétude relative est remise en cause par l'irruption de Daech. le mouvement, qui plonge ses racines dans la résistance sunnite à l'occupation américaine de l'Irak et au nouveau pouvoir chiite, passe à l'attaque en Syrie et dans le nord de l'Irak à l'été 2014, prend Mossoul à une armée régulière irakienne que dix années d'entraînement par des instructeurs américains n'auront pas réussi à aguerrir et annonce l'instauration du califat sur les territoires qu'il occupe. Cette débandade fait un temps le jeu du Kurdistan irakien qui occupe sans coup férir Kirkouk et les territoires qu'il revendiquait sans succès jusqu'alors. Mais les forces de Daech poursuivant leur progression avancent jusqu'aux portes d'Erbil. La jeune république ne doit sa survie qu'à l'intervention de l'aviation américaine le 8 août 2014.
Aujourd'hui prévaut une guerre d'usure. Les Kurdes d'Irak tiennent un front de plus de 1000 km. le djihadisme salafiste qui anime Daech est loin d'avoir épuisé sa capacité de mobilisation. Mais la configuration du terrain et le soutien des Occidentaux l'empêchent de progresser. Il peut reporter ses efforts sur le front syrien où quelques poches kurdes résistent héroïquement dans la plaine de la Jezirah (Kobané, Qamishli, Afrin). La situation en Syrie est diabolique pour la communauté internationale : si l'objectif à long terme reste le renversement du régime criminel de Bachar al-Assad, la lutte contre Daech l'en distrait tandis que l'absence d'une opposition crédible l'en décourage.
L'attitude de la Turquie complique encore un peu plus l'affaire. Elle compte sur son territoire une communauté kurde nombreuse. Gérard Chaliand, qui la surévalue sans doute, la chiffre à 18 millions soit le cinquième de la population turque. Une répression armée féroce s'est abattue sur le PKK à partir de 1984. Elle s'est achevée par l'arrestation de son chef Abdullah Öcalan en 1984. La ré-islamisation de la Turquie sous Erdoğan la conduit à une certaine complaisance à l'égard de Daech avec lequel elle partage une hostilité commune aux Kurdes. Sa frontière avec la Syrie laisse transiter les djihadistes mais reste fermée aux peshmergas qui souhaitent apporter armes et munitions aux Kurdes de Kobané. Mais le score sans précédent du parti kurde HDP aux législatives du 7 juin 2015 change la donne, qui pourrait forcer Erdoğan, en mal de majorité absolue, à composer avec lui.
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Il me l'avait dit: je n'apprendrai rien dans cet essai. Et il avait bien raison puisque ce livre ne m'a rien apporté. Gérard Chaliand ne fait qu'y résumer l'histoire du Kurdistan; ce qui n'a d'intérêt qu'à l'égard de celles et ceux qui ne la connaissent pas. Moi, la sachant déjà, je me suis amusée à noter les incohérences de l'auteur; ses "petites" contradictions qui m'ont quelque peu agacée. Et elles concernent le PKK pour qui, vraisemblablement, Gérard Chaliand n'a pas trop de sympathie. L'auteur juge l'organisation kurde violente, prompt à la coercition sinon l'assassinat (p.84). Il la définit comme sectaire et autoritaire, la considère comme potentiellement tyrannique, l'expérience montrant que les mouvements "qui produisent une radicalisation idéologique extrême impliquant le sacrifice de machines de guerres humaines d'une très redoutable efficacité tendent, lorsqu'ils ont la chance d'accéder au pouvoir à se comporter comme des tyrannies" (p.86). Je n'aurais pas contesté le propos si Gérard Chaliand ne se contredisait pas dans son essai. Allons-y:

- il fustige le PKK, lui colle une étiquette négative mais ne dit mot s'agissant de l'UPK et du PDK qui ne sont pourtant pas mieux. Si le PKK doit être considéré comme un parti sectaire, autoritaire parce qu'il élimine ses opposants, que doit-on dire de l'UPK et du PDK? Gérard Chaliand écrit la lutte qui les oppose, la guerre qu'ils se sont menés mais ne pense pas leur définition. Il ne les qualifie pas, ne les dénonce pas. Pourtant, l'élimination des opposants et des rivaux parmi les Kurdes est une pratique antérieure au PKK, le PDK le pratiquant dès le début de sa création. La cohérence et l'honnêteté intellectuelle voudrait qu'ils soient tous logés à la même enseigne, tous considérés comme des partis autoritaires prompts à la "coercition sinon l'assassinat". Dans le cas contraire, il y a un deux poids deux mesures qui ne peut qu'interroger.

- l'esprit de sacrifice imposé par le PKK participe à la définition négative de l'organisation kurde (p.84). Pourtant - je note l'incohérence - Gérard Chaliand écrit, p.129, que "Ce qui compte, dans une armée, est moins son armement que sa volonté de combattre", l'auteur se désolant de l'attitude des Peshmergas (nom attribué aux combattants kurdes du PDK et de l'UPK, il désigne littéralement ceux "qui vont au devant de la mort") qui ont fuit devant Daech. Le PKK ne disposant pas d'armement de qualité, il souffle à ses combattant(e)s une énergie, une volonté qui va, en effet, jusqu'au sacrifice; ce dont était aussi armé les Peshmergas par le passé et que voudrait aujourd'hui retrouver Gérard Chaliand. Si le sens du sacrifice fait de l'organisation qui la nourrit un mouvement autoritaire, sectaire, à potentiel tyrannique etc... pourquoi la souhaiter et l'appeler de ses voeux? Pourquoi applaudir et citer en exemple les forces armées kurdes (le YPG, bras droit du PKK en Syrie) qui ont combattu Daech à Kobané? Ils n'avaient, pour arme efficace contre Daech, que le sens du sacrifice imposé par le PKK.

- il s'inquiète du potentiel tyrannique du PKK qui pourrait, une fois au pouvoir, exercer son autorité sans considération aucune pour la démocratie. L'inquiétude, signe de prudence, est tout à fait légitime mais elle perd en efficacité lorsqu'elle est contredite par les faits qu'il énonce. A propos du Rojava (Kurdistan dit syrien), Gérard Chaliand écrit: "De toute évidence, il s'agit bien d'un mouvement kurde qui cherche à se constituer des ouvertures avec certaines composantes non kurdes des cantons, qu'il s'agisse des chrétiens, notamment syriaques, ou d'autres minorités religieuses et/ou ethniques: l'un des vice-présidents du canton de Qamishli est un Shammar, l'une des plus puissantes tribus arabes du Proche-Orient. Dans la pratique, en l'espace de deux années a été instituée l'armature étatique d'une entité qui fonctionne de façon disciplinée. Il y a dans le canton de Qamishli, une Chambre des députés, un Parlement, des ministères, etc. Il s'agit de gens indéniablement compétents et motivés. (...) Un gros travail est mené pour que la participation des jeunes femmes, et des moins jeunes, soit aussi effective que possible." (p. 144-145). Autrement dit, il vante la gestion du Rojava par le PYD, extension du PKK en Syrie. C'est le programme du PKK qui y est appliqué. Où est donc la tyrannie?

Ces incohérences m'ont agacées parce qu'elles sont toujours les mêmes; parce qu'il s'agit toujours, pour certains, de poser l'étiquette "autoritaire, sectaire, à potentiel tyrannique" quand il s'agit du PKK et de les oublier quand il est question d'autres partis kurdes tels que le PDK et l'UPK qui utilisent pourtant les mêmes méthodes; parce que les mêmes n'ont pas de mal à considérer le PKK comme une organisation à potentielle anti-démocratique tout en vantant les mérites du PYD, au Kurdistan de Syrie, et du HDP (parti politique légal) au Kurdistan de Turquie; tous deux étant fortement liés au PKK et qui ne sont pas, à ma connaissance, connus pour être tyranniques. Enfin et pour finir, ils craignent l'exercice du pouvoir par une organisation politico-militaire mais applaudissent le PDK et l'UPK qui ne peuvent être définis autrement. Il faudra qu'on m'explique pourquoi ils craignent davantage le PKK.

Au delà de ces quelques incohérences, je dois dire un mot sur la conclusion de l'auteur qui me semble quelque peu superficiel et inefficace. Gérard Chaliand rejette l'idée d'une modification des frontières au Moyen-Orient parce qu'il a une préférence pour le vivre-ensemble (p. 151). C'est un idéal que beaucoup aimerait voir arriver (dont le PKK qui fait pourtant l'objet de la raillerie de l'auteur) mais toute la question est de savoir comment organiser ce "vivre-ensemble" dans une région aussi ethnicisée, confessionnalisée où les uns ne veulent pas des autres. Si Gérard Chaliand a des solutions, il aurait dû les expliquer. Son essai aurait été moins bâclé.
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Régulièrement sous les feux de l'actualité, le Kurdistan est pourtant mal connu. Son histoire est d'autant plus complexe qu'il est partagé entre quatre pays. Avec cet exposé Gérard Chaliand nous donne des clefs pour mieux saisir les tenants et les aboutissants de cette partie du Moyen-Orient.
(...)
Ouvrage majeur, clair et synthétique sur l'histoire de cette partie du Moyen-Orient, que l'on ne peut que trop conseiller à ceux que ces questions intéressent.

Article complet en suivant le lien.
Lien : https://bibliothequefahrenhe..
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
À l’heure où la Chine cherche à s’affranchir de la tutelle du dollar, Daech en est encore à couper des têtes en prétendant restaurer un califat.
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Echange entre Gérard Chaliand, géostratège, aventurier, écrivain et Xavier Fos, président de stratégies françaises. Le spécialiste des relations géopolitiques répond à de nombreuses questions, dans un grand entretien. Gérard Chaliand, dont Hubert Védrine estime que c’est l’un des meilleurs géostratèges contemporains, évoque la Russie de Vladimir Poutine et la situation en Ukraine. Gérard Chaliand a accepté de répondre à nos questions. Quelle va être la conclusion du conflit en Ukraine ? Quelles conséquences a ce conflit sur l’OTAN ? Pourquoi le reflux de l’Occident est inéluctable ? Xavier Fos interroge l’auteur de plus de 60 ouvrages de stratégie militaire, de géostratégie. Gérard Chaliand revient sur la situation politique aux Etats-Unis (Biden vs Trump). Xavier Fos, président de stratégies françaises fait l’interview de Gérard Chaliand. L’écrivain décrit les spécificités de l’Afghanistan et les raisons pour lesquelles ce petit pays a réussi à repousser l’URSS et les Etats-Unis . Gérard Chaliand parle du conflit entre Israël et le Hamas. Le poète rencontre le club stratégies françaises. Gérard Chaliand explique son expérience au Moyen Orient, et notamment auprès des kurdes. Il évoque l’amour à travers les continents. Le spécialiste du monde nous explique le cheminement de la passion amoureuse. Il raconte comment la poésie a éclairé sa route. Gérard Chaliand explique ses origines arméniennes et le rapport qu’il a à ce pays natal.
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