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4,05

sur 636 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Alors qu'il mène une vie paisible dans un monastère taoïste, Dao-sheng décide de reprendre la route dans l'espoir de retrouver celle qui a envoûté son coeur d'un regard, trente ans auparavant. Son errance le conduit aux abords de Bai-he, là où vit la famille Zhao. Il apprend alors que Lan-ying, son amour de jeunesse, vit encore, mise à l'écart dans une résidence secondaire par son mari. Seulement, la maladie la ronge et Dao-sheng décide de mettre à son service ses compétences de médecin. Commence alors entre eux une relation pleine de confiance et de douceur, qui aide l'épouse délaissée à se rétablir et à retrouver ses émois de jeunesse. Mais la suspicion d'un mari jaloux va venir perturber l'amour naissant entre les deux âmes soeurs…
François Cheng nous offre un récit digne des plus grands textes de la tradition orale avec ce Tristan et Iseult chinois, tout en finesse et en retenue. Les protagonistes ont beau ne plus être de première jeunesse, la beauté de leur histoire d'amour contrariée et semée d'embûches émeut le lecteur au plus haut point. Il y a une terrible fatalité dans la mésaventure de ces deux êtres prédestinés mais séparés malgré eux par les caprices du destin. L'auteur nous fait partager une magnifique réflexion sur l'amour et sur l'âme dans ce texte tout en émotion et en poésie, où le désir est palpable mais toujours contenu, dans le respect de l'autre et des traditions. Une histoire d'amour d'autant plus intense qu'elle reste platonique, s'affranchissant des besoins du corps pour satisfaire ceux de l'âme. Un bijou de lecture !
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Les faits se déroulent au XVIIe siècle, à la fin de la dynastie Ming. Dao-Sheng vit dans la montagne auprès de moines taoïstes qui lui ont enseigné les arts de la médecine et de la divination. Il n'a pas prononcé ses voeux et décide de quitter ce lieu de paix pour retrouver la seule femme qu'il ait aimée, trente ans plus tôt, alors qu'il était un jeune violoniste, membre d'un cirque itinérant.
Ce roman est une merveille, l'auteur décrit avec justesse les sentiments et l'amour qu'éprouvent Dao-Sheng et Lan-ying, l'amante retrouvée, un amour qui demeurera platonique et qui trouvera sa plénitude dans la fusion de ces deux âmes qui enfin se sont découvertes.
L'éternité n'est pas de trop, un très grand roman.
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Dans la croyance taoïste, l'âme ne périt pas. À l'heure de la mort, elle réintègre la Voie. Cet infini de l'espace et du temps où règne la pensée pure et porte ses adeptes à l'espérance d'un prolongement de la vie. Un glissement vers l'infini.

Dao-sheng et Lan-ying brûlent d'un amour inassouvi. Les codes sociaux et moraux qui prévalaient dans la Chine de l'époque Ming ont placé entre eux des barrières infranchissables. L'un et l'autre sont réduits à vivre l'accomplissement de leur désir dans le désir lui-même. Dans la charnelle certitude de leur complémentarité ils subissent la loi des astres qui selon l'équilibre des forces contraires s'attirent et se repoussent en même temps, et restent ainsi à jamais à distance.

La rencontre charnelle de Dao-sheng et Lan-Ying, enracinés dans leur époque, soumis à leur condition, ne dépassera pas le frôlement des doigts dans de trop rares occasions. Dao-sheng est alors gagné par la passion mystique qui germe en lui. Il intériorise le mystère du féminin, avec la conviction qu'envers et contre tout l'amour relie le visible et l'invisible, le fini et l'infini. L'amour est quintessence de la pensée pure.

Cette attirance mystérieuse peut-elle se concevoir dans une immense attente, sans prolongement charnel ? L'amour peut-il être idéalisé au point de faire oublier l'appel du corps sous l'emprise tyrannique de l'instinct ? Dao-sheng doit-il son exaltation de l'amour aux seules entraves que la vie terrestre a opposées à sa rencontre avec Lan-ying ?

Toute manifestation de son aimée, aussi timide soit-elle, est prétexte à Dao-sheng pour entrer en communion de pensée avec elle. En désespoir du secours des religions qui se concurrencent à cette époque en Chine, dont celle enseignée par les nouveaux prédicateurs venus de l'occident, Dao-sheng se forge à la conviction, peut-être en résignation ou en consolation, que la force de l'amour trouvera sa consécration au-delà de la mort.

L'intimité n'est pas dans la nudité des corps. L'intimité est dans les tréfonds de l'âme. Cette part de la pensée qui ne se manifeste ni par des actes ni par des mots. L'essence de l'être. Dao-sheng sublime la femme dans sa féminité. Elle « est chair certes, mais combien cette chair se transmue sans cesse en murmures, en parfums, en radiance, en ondes infinies dont il importe de ne pas étouffer la musique". Voilà une vision de la féminité, de l'amour que n'aurait pas reniée Romain Gary, grand promoteur de la femme idéalisée.

Magnifique ouvrage sur la quête de cette part manquante à tout homme. À toute femme aussi, Dao-sheng en a l'ardent désir, tant les manifestations de son aimée sont rares et timides. Il conçoit cette épreuve comme la promesse, la preuve même d'un avenir à son amour pour Lan-Ying. La vie sur terre n'est qu'opportunité de rencontre. Deux êtres qui s'aiment rentreront en connivence à jamais quand les contraintes de la vie auront été effacées.
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J'ai lu ce livre après une lecture plombante (‘'Orphelins 88'' de Sarah Cohen-Scali, excellent roman historique) dans lequel j'avais été confrontée à la violence de l'Histoire. J'ajoute que cette lecture se télescope avec une difficulté croissante à vivre dans une société où prévalent de plus en plus individualisme, exhibitionnisme (télé réalité, étalage de vie intime via les portables dans les lieux publics ou via Facebook et autres réseaux sociaux), matérialisme et instantanéité.
Dans ''L'éternité n'est pas de trop'', j'ai trouvé sérénité, poésie, subtilité, altruisme, don de soi, pudeur, spiritualité et lenteur… je ne pouvais qu'apprécier.

Pour donner un aperçu de ce roman j'emprunterai deux phrases d'un autre livre de François Cheng : «Bien nombreux, se tapissant partout, sont les obstacles extérieurs. Mais les êtres à l'âme élevée ne se rendent pas : ils sont aptes à transmuer l'absence en présence.» (in ‘'Quand reviennent les âmes errantes'').

Il n'y a pas d'histoire, ou plutôt, celle-ci n'est qu'une toile de fond lointaine pour cette quête spirituelle : le dépassement d'un amour charnel impossible dans une société ligotée par les traditions et les séparations de castes ; c'est la sublimation d'un immense amour intériorisé.
Mais, si poétique soit-elle, cette quête n'est pas dénuée de sensualité ni d'une lutte pour les amants contre le désir charnel : «Sans doute, avant la rencontre, leur pensée a-t-elle été frôlée par l'informulé ou l'inavoué. Sans doute Dao-Cheng a-t-il vaguement espéré, audace inouïe, une forme inouïe d'intimité. Mais toutes les velléités se sont évanouies devant cette évidence. Dans l'état présent de leurs sentiments, marqués par la pudeur millénaire et la lointaine aspiration, rapprocher leurs corps n'est pas une perspective possible encore. Pour eux, plus urgent, plus intense qu'une étreinte qui les mettrait dans la gêne, est le regard qui s'offre comme le cadeau le plus précieux.» Les fêtes religieuses qui se succèdent sont l'occasion de brèves mais intenses retrouvailles ; comme cette fête de la Lune qui inspire cette prière à Dao-cheng : « Laisse-moi pénétrer ton jardin, tel un rayon de lune. Il éclairera tout sans rien bousculer. (…) Je comprends ta nostalgie. Tu es allée bien loin. Peut-être trop loin pour moi. Mais, crois-moi, je saurai te suivre. J'aurai toute la patience exigée. L'éternité n'est pas de trop pour que je te rejoigne.»
Cet amour, sublimé par le temps, s'inscrit dans la durée de cette vie et des suivantes : «L'essentiel est que nous sommes déjà ensemble, aussi ensemble que si nous nous voyions. En cette vie et en une autre vie, âmes liées à jamais inséparables.».

François Cheng évoque l'arrivée des premiers jésuites en Chine. Les rencontres entre Dao-cheng, moine taoïste, et l'un d'entre eux donnent lieu à d'intéressants échanges sur divers sujets dont l'amour, qui l'aideront dans sa quête.

Un conte magnifié par la plume fine et délicate de François Cheng.



PS : Membre de l'Académie Française, François Cheng a été élu au siège de Jacques de Bourbon Busset ; je ne sais pas s'il s'agit d'un hasard ou si c'est un choix délibéré. La langue française sous ces deux plumes est un pur régal ; je vous recommande ‘'Lettre à Laurence'' de J. de Bourbon Busset.
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C'est bouleversée que je referme ce roman.

Émue par cette histoire magnifique.
Éblouie par l'écriture de François Cheng.
Touchée en plein coeur par sa finesse et sa sensibilité.
Admirative de cet auteur qui n'a appris le français qu'à l'âge adulte.

Ai-je besoin d'en dire plus pour vous donner envie de vous précipiter sur ce livre si vous ne l'avez pas déjà lu ?

Si pour vous, lire, c'est voyager dans l'espace et dans le temps, foncez : François Cheng vous transporte en Chine au XVIIè siècle.
Si pour vous, lire, c'est éprouver des émotions, foncez !
Si pour vous, lire, c'est vous attacher à des personnages, foncez !
Si pour vous, lire, c'est goûter le plaisir d'un style unique, foncez !

Ai-je besoin d'en dire plus ?
Je ne pense pas. Et ne comptez pas sur moi pour vous dévoiler l'histoire : partez à sa découverte !
À la découverte d'un ouvrage que je place très haut dans mon panthéon littéraire. Un de ceux qui me font dire : "Quelle merveille que la littérature !"

Ce livre est un bijou, François Cheng est un orfèvre !
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Il y a quelque temps j'ai vu le livre sur l'étagère d'une amie, elle me l'a prêté et, après la lecture, devant mon émotion... le livré est devenu mien.
Je connais l'écriture de François Cheng, et "connaître" c'est osé pour une pensée aussi profonde et subtile, pour un style aussi raffiné, pour cette musicalité des mots et des phrases qui s'enchaînent pour former une harmonie qui touche l'esthète, le mélomane, le philosophe, l'être sensible.
C'est l'histoire d'un amour sublimé par l'interdit. Il naît d'un regard et d'un sourire car il a la chaleur, la lumière et encore quelque chose au delà des mots, essentiel et indescriptible.
Amour refusé par les codes trop stricts d'une société conventionnelle du XVIIème siècle, il se nourrit de sa vérité et grandit à travers les années. Comme le vide et le plein, l'un ne pouvant pas exister sans l'autre, Dao-Sheng et Lan-Ying sont liés pour l'éternité en dépit de tous les vents contraires. Leur amour est lumière et souffle de vie, il les aide à avancer, c'est leur force, c'est le sens de leur vie.
La douceur extrême des phrases, dont la naissance advient comme après une longue méditation, leur rythme lent comme celui d'un fleuve séculaire, les émotions intenses, durement éprouvées, la force inaltérable des sentiments et la tendresse inouïe font de L'Éternité n'est pas de trop un roman exquis.
Le style littéraire de François Cheng atteint le sublime, dépouillé jusqu'à l'essence, recherché jusqu'à l'absolu, musical jusqu'à l'enchantement, il se pare de la philosophie la plus simple qui soit : saisir le miraculeux dans l'ordinaire.
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Sublime et bouleversant! Je n'aurai pas les mots pour rendre compte de la beauté de ce texte : un hymne à l'amour et à la féminité. Quelle profondeur, quelle sensibilité.
Merci Monsieur Cheng. Je n'arrive pas à modifier le nombre d'étoiles mais sans conteste C'est 5 étoiles !
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Lu sur le conseil d'une amie et je l'en remercie.
Magnifique!
L'histoire, en soi un peu banale: une histoire d'amour impossible à l'époque Ming en Chine, mais magnifiée par la langue, les réflexions philosophiques, les personnages....
Les personnages sont conçus dans un réseau d'oppositions: celui qui aide/ celui qui maltraite, pauvre mais libre / riche mais enfermé(e) dans un monde d'interdits et de conventions, amour véritable/ pure pulsion, finesse et droiture / vulgarité et manipulation.....
N'hésitez pas un instant si vous ne l'avez pas encore lu!
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Puisqu'on ne vivra jamais tous les deux
Puisqu'on est fou, puisqu'on est seul
Puisqu'ils sont si nombreux
Même la morale parle pour eux
J'aimerais quand même te dire
Tout ce que j'ai pu écrire
Je l'ai puisé à l'encre de tes yeux

Francis Cabrel. L'encre de tes yeux.

Magnifique roman d'un amour empêché. Dao-Sheng est un moine taoiste et Lang-Ying, la femme du seigneur dans la Chine du XVII° siècle. Autant dire que les choses ne vont pas être simples, d'autant que ledit seigneur a déjà envoyé au bagne Dao-Sheng trente ans plus tôt pour avoir adressé un sourire à sa promise.
Éloge de la femme, de la beauté, de la poésie, de l'amour évidemment, ce roman est absolument magnifique et la plume de François Cheng, tout simplement magique pour capter l'instant d'une rencontre éphémère entre nos deux amoureux par-delà les conventions d'un pays et d'une époque.

Elle n'aimait pas mon deux pièces séjour
Mais toi qui voyages si tu la croises un jour
Reviens me dire
Reviens me dire
Dis-lui que pour elle je donnerais
Mon dernier souffle et même celui d'après
Celui d'après même
Celui d'après.

Francis Cabrel. Si tu la croises un jour.
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J'aime. Purs et scintillants comme des joyaux, les mots courent et coulent comme les eaux tempétueux d'un torrent de montagne. Lecture rafraichissante et une histoire où l'Amour cherche sa voie dans un dédale de codes anciens. La poésie toujours présente, rappelle les contes d'autrefois. Un petit trésor à conserver précieusement.
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