Feuillets de cuivre, un must-read dans le genre Steampunk, paraît-il. Ce n'est pas mentir que d'affirmer cela, l'auteur maîtrise complètement son univers, son intrigue et ses personnages, mais encore faut-il prévenir le lecteur qu'il s'engouffre dans une ambiance sombre et macabre où la part belle est donnée à l'enquête policière. Un polar-dark-steampunk donc ? Peut-être.
Prévenons-le également que, même s'il sous-tend tout le roman et imprègne l'univers, le côté “punk” est très discret (une bonne entrée en matière pour les réfractaires à la
Science-Fiction).
Détails.
Le roman est clairement découpé en deux grandes parties, la première m'a foncièrement intéressé car elle présente plusieurs enquêtes (style "nouvelle") sur des thèmes glauques ou étranges, des vices pour le moins avouables, des pratiques déviantes et cachées (prostitution, corruption, hermaphrodisme, prêtres pervers, folie, remords, hentaï-ïa-ïa, etc.). Elle permet également de placer le personnage principal et son évolution, tant psychologique et physique que du point de vue de sa carrière policière. le crédo de ce policier hors normes est d'ailleurs forgé pour plaire à chaque lecteur : toute enquête criminelle digne d'intérêt trouve une réponse dans les livres, et les scènes de crimes sans bibliothèques ne méritent pas que l'on s'y attarde. D'où les
feuillets de cuivre, et une délicieuse atmosphère de reliure, d'embossage et de gaufrage, de signets de velour, de bureau-bibliothèque chaleureux, d'un bon fauteuil et d'eau qui frémit dans une bouilloire. L'ambiance y est, et elle est fantastiquement bien retranscrite, jetant à notre esprit des images d'un Paris de fin du XIXe que les amateurs de romans classiques ne pourront pas renier.
La seconde partie m'a moins enthousiasmé. La faute à un recentrage sur une
némésis de faible intérêt et une orientation mystique qui jure par rapport au contexte globale. Je ne vais rien spoiler, mais la tournure des événements m'a clairement déçu, j'aurais préféré que l'on reste dans ce polar-SF faisant la part belle aux livres et aux petites cellules grises de notre enquêteur, même si le recoupement des enquêtes est très bien orchestré, il n'empêche que la dérive mythologique est de trop, à mon avis.
Pour finir, je dirai une chose : j'en ai marre des préambules, exégèses et autres paratextes. Je me contrefous des analystes qui me disent quoi penser du bouquin que j'ai lu ou, pire !, que je m'apprête à lire. le seul truc que vous réussissez à faire, c'est me donner l'impression que le livre est tellement nul qu'il faut tenter d'en faire la réclame pour qu'il puisse être lu…
Feuillets de cuivre et
Fabien Clavel n'ont pas besoin de 15 pages sur le Steampunk et son caractère indéfinissables et fluctuant. Ils n'ont pas besoin d'une mise en contexte et d'une explication sur l'exposition universelle,
Conan Doyle et
Agatha Christie, Largonji Louchébem, Meillet, Chantraine, Bailly ou Gaffiot, et j'en passe. le lecteur sera assez grand pour comprendre les références, se renseigner si cela le titille, ou même, comme moi, amusé de voir que l'auteur diffuse des clins d'oeils d'étudiant en linguistique ou langues classiques.