Le blé en herbe, un roman court.
Tu assistes à la rencontre entre deux ados, Phil et Vinca.
Tu observes leurs discussions leurs conflits sous jacents puis jaillissants, tu constates l'éveil de leurs sens et l'éveil de leurs sentiments qu'ils éprouvent l'un pour l'autre.
Tu vois la fin de leurs enfances et le début des hésitations permanentes et des attentes interminables.
C'est le début de l'âge où l'on pense que l'on est à l'âge de tous les possibles alors que l'on est à l'âge où l'on fait ce qui est possible.
Phil et Vinca s'aiment à cet âge frontière.
Ils s'attirent puis se détachent, se méprisent puis se recollent.
Phil et Vinca déploient toute leurs puissantes voluptés avec toute leur insolente innocence.
Cette jeunesse ils n'en savent que faire et par endroit du récit ils en sont fatigué.
Dingue non ?
Je suis plus âgé, forcément, j'envie leurs jeunesses, leurs élans amoureux.
Je suis jaloux de cette époque révolue pour moi.
Cette attirance entre eux, c'est touchant.
Et soudain, une dame fait irruption au milieu de leur histoire, comme une intriguante.
Elle est l'intruse.
Phil se laisse prendre dans les quelques filets de la dame expérimenté.
Vinca le sait, elle doit réagir elle ne veut ni ne peut le perdre.
Lui son tendre amour de Phil.
Leur histoire est trop pure et belle.
Leur histoire ne peut se laisser faire elle ne peut disparaître.
Vinca fera en sorte de la faire renaître et vivre à nouveau.
Je l'affirme c'est charmant,
ce style de Colette avec son vocabulaire dense et ses constructions phrasuelles parfois désuètes.
Constates le toi même avec cette phrase :
"Monsieur, interrogea-t-elle gravement, est-ce par voeu, ou par inclination, que vous ne portez pas de vêtements, ou si peu ? "
Page 43 du roman.
Ou avec cette autre phrase :
"Il attendit avec la sagacité de ses seize ans, le jour où Vinca, fatiguée, un peu malade, languissante et hérissée, une marge mauve sous ses yeux bleus, s'étendit à l'ombre, refusa le bain et la promenade."
Page 49 du roman.
Tu constates alors la construction des phrases passant par le chemin de la plaisante complication.
Tu constates les pensées de Colette et comment elle est devenue la maîtresse d'une littérature pleine de sens, élaborée, inimitable.
En deux mots : dense et riche.
Et ce langage que l'on peut juger dépassé, je lui trouve un charme fou, je le
chéri.
Bien qu'il ne me vienne pas à l'idée de m'exprimer ni d'écrire ainsi dans ma vie courante.
Ce langage, j'aime le lire, j'aime le voir mis en scène, j'aime sa sa musique et sa sonorité.
J'aime savoir qu'il pre existe à nos façon d'écrire et de parler.
Je souhaite qu'il continue à vivre en parallèle du langage plus courant.
J'aime ton style, Colette.
Chaque nouveau mot ou chaque expression inhabituelle je les conçois comme des cadeaux surprenant.
D'où les interrogations suivante :
Ce langage typiquement français appartement aux
romans et au théâtre va t-il disparaître ?
Va t-il perdurer uniquement dans les fictions théâtrales et romanesques ?
Cette façon de rendre la réalité et de discuter subsistera t-elle au langage moins riche en vocabulaire ?
Sommes sur la mauvaise pente qui appauvrit inexorablement notre savoir en vocabulaire ?
Un autre extrait à la page 99 du roman :
"Ils éprouvèrent un amer et identique contentement à distancer, dès les premiers mots de leur entretien, le lieu commun de la dispute et du mensonge.
C'est le fait des héros, des comédiens et des enfants, de se sentir à l'aise sur un plan élevé. Ces enfants espèrent follement que d'une douleur noble peut naître l'amour."
J'apprécierais encore plus et mieux La vagabonde ou l'envers du music hall de Madame
Sidonie Gabrielle Colette, plus loin dans ma vie.