Dieu sait si la Première Guerre mondiale a connu son lot de drames et de destinées incroyables, ce qui est arrivé à Anthelme Mangin (puisque c'est sous ce nom qu'il vivra de nombreuses années) fait partie de ces sordides histoires.
Combien de familles ont connu le deuil.
Combien de mutilés, de gueules cassées.
Combien de poilus ont sombré dans la folie.
Combien ont disparu sans laisser de trace, enfouis à jamais sous des tonnes de terre, ou dispersés en milliers d'éclats.
Combien de mères, de femmes, de soeurs, de familles éplorées.
Mais aussi, combien d'espoirs. À défaut d'avoir un corps à enterrer, comment ne pas espérer encore.
Jean-Michel Cosson retrace ici l'incroyable énigme de ce soldat trouvé errant sur un quai de gare.
Sans souvenirs, ou en tout cas refusant de les évoquer. Un nom, sorti de sa bouche, peut-être même mal compris et le voici nommé Mangin Anthelme.
À la suite d'un diagnostic on l'enferme. Il va se retrouver bientôt à l'asile de Rodez. le directeur de l'établissement va s'évertuer à lui retrouver une famille, sa vraie famille.
On publie son portrait et là.... toutes ces familles qui espèrent, le reconnaissent. Elles sont des milliers. Il va falloir trier. Il y aura des déçus, c'est sûr. Il y aura aussi et surtout ceux qui sont persuadés, prêt à tout pour qu'on leur rende leur soldat disparu. Devant bien des éléments contradictoires, indiscutables, tellement évidents parfois, rien n'y fait, le combat continuera, jusque devant les tribunaux.
Si ce bon Dr Fenayrou, avait disposé des moyens scientifiques d'aujourd'hui (Ah ! L'ADN) il se serait évité bien des nuits blanches, lui qui, entêté, ne céda jamais face à des familles obstinées, luttant contre vents et marées, procès et diffamations de toutes sortes.
Une autre bataille s'engage, à coup d'articles de presse, de démentis, de pressions politiciennes ou populaires, d'interventions et d'analyses d'experts de tous genres.
Vingt ans.
Il faudra vingt ans pour qu'enfin la lumière soit faite, pour que
L'amnésique des tranchées retrouve son vrai nom et sa vraie famille (Pourtant, plus de cent ans après, une autre, reste convaincue qu'il y a eu erreur).
La justice a tranché. (vous trouverez d'ailleurs, en annexe, à la fin de ce livre, l'arrêté définitif de la Cour d'appel de Montpellier).
Enfin un peu de bonheur me direz-vous ? Même pas... terrible destin.
Cette histoire est vraie, vous pouvez vérifier ? (Anthelme a même eu droit à un documentaire sur la chaîne Arte).
Jean-Michel Cosson a dû ressortir toutes les archives pour nous faire revivre les jours, semaines, mois, années de cette incroyable quête d'identité à laquelle le principal intéressé semble bien étranger. de ce récit, ressortent les sentiments d'impuissance, de révolte ou d'abandon des familles, d'intransigeance et de fermeté des autorités, de compassion et d'émotion aussi. le doute plane en permanence. Les larmes de la joie des retrouvailles se mêlent aux larmes de déception. Et nous, aurions-nous baissé les bras ?
L'auteur sait, parfaitement décrire la souffrance et à ceux qui trouveraient que le principal protagoniste est bien discret, n'oubliez pas qu'il s'est muré dans le silence.
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