Les liens entre la médecine et le pouvoir sont multiples et complexes: nous risquons d'abord d'accorder trop au médecin et à son arsenal pharmacologique. De son côté, le médecin pourrait être tenté par des attitudes autoritaires et trop peu coopérantes, alors que nous le voulons l'instigateur d'une rencontre humaine. Enfin, l'administration, pour des raisons de facilité et d'efficacité, ne songe qu'à annexer les médecine à ses desseins hygiéniques et panoptiques.
Au total, nous craignons que les succès sans égal (transplantation, structure de génome, invasion des psychotropes) n'entraînent avec eux une vision de la corporéité humaine qui la déforme ou la simplifie.
Il fut facile aux philosophes du XVIIIe siècle de battre en brèche la théorie de l'animal machine ou d'une physiologie mécaniste - liée à des observations ou même des expériences limitées. Aujourd'hui, il n'en va plus de même, c'est la fulgurance de la science qui suggère, dans le feu de ses réalisations et de ses prouesses, la conception d'un corps qu'elle manipulerait à sa guise.
Elle changerait en lui ce qui est usé; elle accèderait à son centre de fabrication ; elle modifierait l'affectivité.
Nous pensons que, sans diminuer en rien les avancées techniques actuelles, nous ne sommes pas tenus à souscrire aux extrapolations qui ne les accompagnent que trop souvent.
L'image peut-elle tout maîtriser?,
Rencontre avec François DAGOGNET