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3,82

sur 1050 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Comme quoi il n'est pas besoin d'un livre fleuve ni de multitudes de discours pour parler de l'horreur absolue que fut la guerre des tranchées, et que sont toutes les guerres. Tout est dans la façon de traiter le sujet, l'écriture précise, crue, violente, qui va droit au but, et ce style dont Jean Echenoz a le secret.
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Ce roman de J. Echenoz ne déroge pas à la règle de ses précédents ouvrages : à l'image du titre, le récit est laconique et pourtant d'une richesse incroyable. L'auteur parvient avec peu de mots mais avec une précision chirurgicale à décrire des gestes, des objets qui vous plongent littéralement dans l'ambiance de la « Grande » guerre et de l'histoire des personnages choisis. C'est très visuel, olfactif, tactile… tous nos sens sont mis en éveil… On pourrait croire qu'avec si peu de pages, les ellipses soient nombreuses et qu'Echenoz choisisse de s'attarder sur un aspect particulier de la guerre… Au contraire, il n'élude rien et peut parfois même aller dans les moindres détails. Il évoque aussi bien la violence effroyable de la guerre que les moments de répit, d'attente dans les tranchées. D'ailleurs, l'histoire démarre avec un des personnages centraux, Anthime, dans une campagne vendéenne paisible, douce, juste avant que le tocsin n'annonce le temps de se mobiliser sur le front… et cette histoire se finira avec le retour des soldats… peut-être…
C'est donc le récit de 5 hommes venant de la même commune qui partent dans les Ardennes et d'une femme, Blanche, qui symbolise l'attente de leur retour.
On reconnait également le style d'Echenoz dans ce mélange de mélancolie, de pudeur, de banalité, mais aussi de vivacité, d'ironie et même d'une forme de désinvolture.
Le style à lui seul donc, rend ce récit passionnant et il est d'autant plus remarquable qu'il réussit à rendre orignal un moment de notre histoire qui a été mille fois raconté.
Mais le style ne fait pas oublier l'histoire, simple, de ces personnages, il la sert très justement.
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e crains pour une fois de n'être pas original et de me fondre dans une majorité écrasante tellement les critiques de 14 sont bonnes (voir par exemple chez Babelio). Et oui, j'ai aimé ce roman, court, dense, fin et excellemment écrit. C'est évidemment le premier point que tout le monde aborde, l'écriture de Jean Echenoz. Y abondent les mots un peu tombés en désuétude, les imparfaits du subjonctifs, des tournures de phrases inhabituelles qui font mouche. Tout pour me plaire. Et tout me plaît. J'ai découvert cet auteur avec l'admirable Ravel et j'ai ensuite succombé au charme Des éclairs (et d'autres en passant, comme Je m'en vais). 14 est tout aussi formidable que les précédents même s'il peut parfois manquer d'une toute petite étincelle, celle Des éclairs par exemple : désolé, je n'ai pas pu m'auto-censurer, j'avais cette blague en moi depuis le début du bouquin, car il me manquait un tout petit truc pour adorer. Petit truc ou étincelle qui jaillit vers la moitié du bouquin pour faire de ce qui ressemblait à un très bon roman un excellent livre.
Jean Echenoz ne s'attarde pas trop sur la guerre, n'en fait pas 400 pages (le roman est court, seulement 124 pages) et c'est parfois ce que lui reprochent certains lecteurs. Moi non. Je lui sais gré de ne pas en rajouter : il sait en quelques lignes décrire la puanteur des tranchées, la peur des soldats, les obus qui tombent tranchant têtes et bras, sans pathos, sans hémoglobine
Effectivement quoi dire qui n'ait déjà été dit sur cette guerre ? Echenoz ne peut rien inventer, collant à la réalité. Alors, il le dit différemment, avec ses mots et ses si jolies phrases.
Il use parfois d'un style léger pour raconter une mort, pour faire un inventaire de tous les animaux que l'on découvre mangeables alors qu'en temps de paix, il ne serait venu à l'esprit de personne de les avaler. Des paragraphes qui allègent le propos, lourd forcément mais jamais insupportable ni lourdingue.
Un dernier extrait pour finir qui dit simplement ce qu'a été ce début de guerre que tout le monde croyait facile et gagnée en quinze jours. Comment des jeunes hommes, ruraux pour la plupart, avec peu d'instruction, ont pu à un moment se faire violence pour aller au combat et tuer un ennemi guère plus enclin à tuer que lui ni plus guilleret au moment d'attaquer

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14, de Jean Echenoz, est un fulgurant retour sur l'année 1914, sur la mobilisation. En 120 pages, à travers le destin de six personnages, cinq jeunes hommes, et une femme, il montre les atrocités de la guerre. La force du livre se loge principalement dans la beauté de l'écriture de Jean Echenoz. Chaque chapitre a la puissance, la concision, d'une nouvelle, mais ils sont liés entre eux par la dramaturgie grandissante du roman. A travers ce texte, le lecteur, imagine parfaitement le décalage qu'il y a eu cette année là, entre l'idée que les mobilisés se faisaient de la guerre et sa réalité. Ils partaient pour une formalité, les deux sur cinq qui reviendront seront l'un aveugle et l'autre amputé. En 1914, l'aviation militaire était balbutiante, son existence, sa réalité a été occultée par les tranchées, le chapitre sur le combat aérien la réhabilite avec force. Celui sur la terreur des bombardements massifs, celui sur les désertions, celui sur les animaux et les insectes, sont parmi les plus poignants. A chaque page, le lecteur est interpellé par les événements, mais également par les mots que Jean Echenoz emploie pour les décrire.
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Court récit, sec et précis, sur le destin de 5 jeunes hommes happés par la guerre et sur la femme laissée derrière eux. Pas de sentiment, l'enchaînement des faits dans toute leur absurdité , tout est subi, rien n'est contrôlable à l'image de ce bras disparu qui continue de faire croire à son existence.
Magie de l'écriture, cela se lit d'une traite, et laisse une marque indélébile, la guerre au ras des pâquerettes, sans rien y comprendre.
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Première scène décrivant l’annonce de la réquisition sonnée par les cloches du tocsin, première astuce de l’auteur – toujours plein d’un humour très élégant – Anthime (quelle trouvaille ce prénom ! ) ne les entend pas, il les voit : le cycliste est sur une colline de Vendée, le vent souffle et son bruit est tel qu’il empêche notre héros d’entendre le son du carillon. Qu’importe : l’histoire est lancée, nous sommes au début du mois d’août 1914 et la grande tragédie guerrière du siècle est en marche

Comme dans de nombreux récits, Jean Echenoz raconte la petite histoire dans la grande. La petite histoire, c’est celle de tous ses personnages qui convergent vers la grande place du village : il y a là Charles, le frère admiré et détesté "Charles porte beau… ", il y a les trois autres vendéens avec qui il partira – Padolieau, Bossis et Arcel – et il y a une femme bien sûr, comme dans toute forme romanesque qui se respecte – et Jean Echenoz respecte la forme romanesque comme il se doit.

Blanche, qui salue d’abord Charles "d’un sourire fier de son maintien martial" mais aussi Anthime "qui a reçu d’elle une autre variété de sourire, plus grave et même, lui a-t-il semblé, un peu plus ému, soutenu, prononcé, va savoir au juste."

Charles, qui sait tout mieux que les autres, est convaincu que cette guerre, "c’est l’affaire de quinze jours, tout au plus". A quoi répond invariablement Anthime "je n’en suis pas si sûr." Évidemment nous donnons raison à Anthime, nous qui connaissons notre histoire de France, on a tous lu quelque part le récit des ces hommes qui partent la fleur au fusil, en chantant la marseillaise, les officiers au pantalon beaucoup trop voyant et qui vont être des cibles idéales, les femmes qui acclament les soldats et les trains qui s’ébranlent vers les Ardennes. On va suivre les quatre vendéens aux côtés d’Anthime, et ceux-là vont tenter de ne pas se quitter malgré les opérations militaires. On songe à Liliane Beauquel et son très beau Avant le silence des forêts d’une même solidarité entre hommes – de l’autre côté des tranchées.

Pendant ce temps Blanche a rendez-vous chez le médecin de famille. Mais avant, toujours ce style inimitable de Jean Echenoz pour nous décrire des intérieurs que ce soit l’atmosphère dandy de Ravel, l’Amérique du début du siècle dernier Des éclairs ou celle d’une maison vendéenne :

"Il règne une drôle d’ambiance inharmonieuse dans cette chambre, pourtant si calme et bien rangée (…) les meubles témoignent d’un effort de diversité forestière tel un arboretum : bonnetière à miroir en noyer, bureau en chêne, commode en acajou et placages de bois fruitier, le lit est en merisier et l’armoire en pitchpin (…) on se demande d’abord comment des essences si diverses peuvent s’entendre entre elles."

Pas de doute, selon le Docteur Monteil, Blanche est bien enceinte. De Charles sans doute. Lequel Charles a deux passions dans la vie : la photographie et l’aviation. Grâce à l’appui du Docteur Monteil (qui a des « relations ») il va réussir à allier les deux sur le front militaire : Echenoz nous le décrit avec le pilote Alfred Noblès, survolant les troupes à l’aide d’un biplan biplace Farman pour une mission de reconnaissance. Oui mais voilà nous sommes pendant l’été 1914 et les Français n’ont pas encore imaginé que la guerre pouvait se transporter dans les airs, pour l’instant Charles ne fait que de la photographie, mais ils croisent bientôt un biplace Aviatik ennemi "dont la trajectoire vers le Farman laisse peu de doutes quant à ses intentions."
Résultat : une balle allemande traverse l’œil gauche de Noblès et Charles "voit s’approcher le sol sur lequel il va s’écraser, à toute allure et sans alternative que sa mort immédiate, irréversible, sans l’ombre d’un espoir – sol présentement occupé par l’agglomération de Jonchery-sur-Vesle, joli village de la région de Champagne-Ardenne et dont les habitants s’appellent les Joncaviduliens." Le lecteur appréciera cette précision.

Jean Echenoz décrit donc la vie au front pendant ses premières semaines de bataille d’une année 1914 qui n’en finit pas. Mouvements de troupe désordonnés et sans expérience, tranchées et galeries interminables, premiers gaz aveuglants, liste de tous les animaux peuplant la vie des soldats, dont deux particulièrement désagréables comme le pou et le rat.

'Canon tonnant en basse continue, obus fusants et percutants de tous calibres, balles qui sifflent, claquent, soupirent ou miaulent selon leur trajectoire, mitrailleuses, grenades et lance-flammes, la menace est partout."

Pendant ce temps en janvier 1915 Blanche met au monde une petite Juliette, une enfant avec un père qui a hérité de la croix de guerre posthume, mais personne ne s’en émeut, parce qu’il n’y a plus que les femmes et les vieillards restés au village.

Anthime, lui, est la cible d’un éclat d’obus retardataire et voit son bras droit sectionné. Tous le félicitent : quelle chance il a ! C’est la blessure idéale qui vous ramène illico au bercail. Anthime aura ainsi évité Verdun, comme le précisera Blanche un peu plus tard.

La fin de l’histoire sera plus réjouissante pour Anthime et Blanche. L’usine Borne-Sèze de chaussures a prospéré pendant la guerre et Anthime a remplacé Charles au conseil d’administration. Ils se retrouveront pour quelques jours à Paris et dans son style inimitable Jean Echenoz nous livrera le fin mot de l’histoire : "Il s’est couché près d’elle et l’a prise dans son bras, puis il l’a pénétrée avant de l’inséminer. Et à l’automne suivant, précisément au cours de la bataille de Mons qui a été la dernière, un enfant mâle est né qu’on a prénommé Charles.

Fin du récit et fin de l’histoire, Jean Echenoz a réussi à nous faire revivre ces semaines éprouvantes de la Grande Guerre et une fois encore c’est comme si on y était.
Lien : https://www.biblioblog.fr/po..
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Tout commence en août 1914.

Cinq jeunes hommes coulent des jours paisibles en plein coeur de la Vendée. Ils sont bouchers, comptables ou tout autre chose et cette année, ils vont devenir soldats. le front les appelle. Là-bas, ils vont connaître la guerre, les tranchées, la peur, la mort...

Et puis, il y a aussi l'espoir d'une fin de guerre imminente ou d'une " bonne blessure " qui signifierait le retour définitif à la maison.

Enfin, n'oublions pas la jeune Blanche qui attend le retour de son homme, essayant de combler l'absence avec de longues lettres.

Mon avis :
C'était donc une première rencontre avec Jean ECHENOZ et le fait est que je suis sans voix.

Je suis vraiment épatée par cette qualité d'écriture à la fois épurée et si profondément recherchée. La perfection ne doit pas être bien loin.

Le revers de la médaille, c'est que, tout à la contemplation de son écriture, j'en ai un peu zappé l'histoire. Je suis restée assez hermétique au fond alors que j'étais totalement sous le charme de la forme.

Peut-être que cela mériterait une deuxième lecture ???

Une chose est sûre je ne compte pas m'arrêter là dans ma découverte de cet auteur.
Lien : http://www.livr-esse.com/art..
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Ce court roman est un petit bijou. Déjà, il est admirablement écrit mais dans un style à la fois magnifique et abordable. Ensuite, il réussi l'exploit de condenser quatre années de guerre en nous livrant l'essentiel de ce qu'il y a à savoir sur la période et ce, malgré sa taille modeste. Car le roman part précisément du jour de la mobilisation et se termine par l'évocation de la dernière bataille. Il nous y est narré la liesse du départ, quand, dans l'esprit de la plupart, la guerre ne devait durer que quinze jours. Les premiers combats, les tranchées. La vétusté du matériel et son côté inadapté. Les balbutiements de l'aviation. Les premiers morts, blessés, estropiés. L'arrogance des officiers et l'intransigeance des gendarmes face aux déserteurs ou prétendus tels. J'en oublie, forcément, mais tout est là. Tout. Ce 14 ressemble à un petit livre d'histoire écrit avec infiniment de talent.
À lire. Absolument.
Lien : http://aruthablog.blogspot.f..
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Ecrire la Grande guerre avec raffinement, c'est l'exploit qu'a réussi M. Echenoz. Je ne parviens pas à m'expliquer comment il a pu écrire tant et si parfaitement en si peu de pages. Voilà un texte au thème difficile à traiter, au rendu du plus bel effet. Grande classe, M. Echenoz !
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Jamais tu n'aurais cru que tu lirais avec plaisir un texte sur la guerre. La première qui plus est. Et pourtant cet après-midi, tu as lu cette guerre-là avec bonheur.
Tout ça pour un type. Un type que tu ne connais même pas, mais qui te caresse de sa plume depuis plusieurs années déjà.
Cette histoire n'augurait rien de bon, puisque ses premiers mots pour toi avaient été Je m'en vais, mais tu l'as suivi, telle une ombre avide. Il a traîné avec Des grandes blondes, t'a fait Courir et Un an plus tard t'a présenté Ravel, entre autres pages.
Lien : http://ausautdulivre.blogspo..
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