Du 7 octobre 1922 au 15 mars 1923, ce furent presque six mois de navigation en compagnie de sa seconde femme, Elsa, six mois de déplacements ininterrompus, de rencontres innombrables avec les autorités, les journalistes et de parfaits inconnus, de conversations privées avec le roi d’Espagne et l’impératrice du Japon (avec laquelle il échange en français), de banquets officiels, de célébrations, de conférences et d’entretiens sur mille sujets, et jusqu’à des jeux de société et plusieurs concerts de violon, où le savant paya sans compter au public le prix qui lui permettait d’échapper à l’atmosphère anxiogène de Berlin.
Japonais sans ostentation, honnêtes, dans l'ensemble très plaisants (...) des âmes pures comme nulle part ailleurs. Tout le monde ne peut qu'aimer et admirer ce pays.
Les besoins intellectuels de cette nation me semblent moins importants que leurs besoins artistiques - une disposition naturelle ?
Les Chinois ne s’assoient pas sur des bancs lorsqu’ils se nourrissent mais s’accroupissent comme les Européens font lorsqu’ils se soulagent dans une forêt. Tout cela en silence et calmement. Même les enfants sont sans âme et obtus.
Chez nous, toute l'éducation vise à rendre l'individu capable d'aborder et de mener à bien les combats de l'existence dans les meilleures conditions possibles. Particulièrement dans les villes, avec un individualisme sans limites, une concurrence sans merci qui exige la concentration de toutes les forces, une activité fébrile pour accumuler le maximum de luxe et de plaisirs. Les liens familiaux sont distendus, l'influence traditionnelle de l'art et de la morale sur la vie quotidienne, passablement affaiblie. L'isolement de l'individu apparaît comme la conséquence nécessaire de la lutte pour l'existence, il prive l'homme de cette insouciance joyeuse que seule permet l'appartenance à une communauté.
Ils vivent à même le sol dans une grande saleté et une puanteur extrême (…) Ils ne font pas grand-chose et ont besoin de peu. Le simple cycle économique de la vie.
( séjour à Colombo dans l'île de Ceylan)
Dans le cadre de la Semaine PhiloMonaco 2023
Présenté par Raphael Zagury-Orly
Avec
Mara Goyet, écrivaine
Cécile Ladjali, enseignante
Judith Revel, philosophe
«Apprendre est une expérience: tout le reste n'est qu'information», disait Albert Einstein. Expérience complexe, en vérité, au sens où elle met en jeu les facultés de chacun(e), les savoirs et la volonté, les besoins et les désirs, les émotions, tantôt propulsives (curiosité, satisfaction, joie de la découverte) tantôt répulsives (fatigue, ennui, désintérêt, sentiment d'échec), sinon la personnalité entière de ceux et celles qui sont là pour apprendre, et qui d'une manière ou d'une autre transmettront à d'autres les connaissances dont ils acquièrent la maîtrise, et ceux et celles qui sont là pour enseigner, et qui d'une manière certaine continuent, en le faisant, à apprendre. Ce qui est certain, c'est qu'apprendre ne s'accomplit jamais sous la contrainte, la peine ou la punition, et ne peut être que «philosophie», amour du savoir – car on n'apprend rien s'il n'est aucune appétence, aucun goût pour savoir, si l'on n'éprouve aucune joie à élargir le champ de ce qu'on sait. Arriverait-on à inculquer de force quelques connaissances chez l'enfant ou l'élève, qu'elles disparaitraient progressivement si elles n'étaient alimentées, ensuite, et toute la vie durant, par le goût, l'envie, le désir, le plaisir, la volonté de continuer à apprendre. Mais comment créer cette faste «prédisposition» si elle n'existe pas, si elle est enterrée sous l'ennui, la distraction, la démotivation, des sollicitations autres, sources d'inattention? de quels atouts disposent parents et éducateurs pour faire naître l'envie d'apprendre?
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