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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Fille et petite fille de ceux qu'on a appelé « pieds noirs », Olivia Elkaim remonte l'histoire de sa famille et de celle de l'Algérie française. Son texte, qui mêle biographie et fiction, est d'une sincérité qui bouleverse. Ce roman m'a rappelé par certains côtés « l'art de perdre » d'Alice Zeniter qui, comme Olivia Elkaim, cherche à comprendre l'histoire familiale et se rendra aussi en Algérie dans le village de ses ancêtres.
L'indépendance de l'Algérie est restée un souvenir douloureux, un arrachement à la terre de leurs ancêtres pour nombre de pieds noirs. Ces gens simples et sans fortune ont tout perdu, il leur a fallu du courage pour tout recommencer en métropole où ils ont dû affronter le mépris, voire le rejet.
Le témoignage de l'autrice est émouvant parce que dénué de pathos et puisé à la source même.
L'histoire débute ce jour d'octobre 1958, ou plutôt cette nuit, où Marcel Elkaim, grand-père d'Olivia, est enlevé par des hommes du FLN. Tailleur de son métier, Marcel est un homme simple, marié à Viviane et père de deux garçons. Cette nuit-là, il croit qu'il va être abattu comme tant d'autres avant lui. Il aura la vie sauve car le lieutenant Lazreg a besoin de ses talents de couturier pour lui faire des costumes. de retour chez lui, à Relizane, les langues vont se délier, pourquoi lui est revenu vivant de son enlèvement ?
Marcel continuera à coudre des costumes pour les chefs du FLN contre une protection tacite et lointaine. En 1962, il devra pourtant envoyer sa famille en France avec des milliers de français natifs chassés de leur pays. Lui les rejoindra plus tard, après avoir tenté de sauver quelques meubles et la voiture.
Les débuts en France seront difficiles, Marcel ne veut rien demander à sa famille et son épouse Viviane a toujours du mal à gérer les enfants.
En reliant les souvenirs de son père Pierre aux faits historiques, Olivia Elkaim dépasse le folklore lié à l'Algérie pour restituer au plus près la vie de sa famille écartelée entre deux pays, deux cultures. Chez les Elkaim, on parle français depuis toujours et on se revendique comme tel, mais le regard des français de métropole est tout autre. L'autrice plonge aussi dans ses propres sentiments par rapport à ses origines, cet éloignement et ce désir de devenir une vraie parisienne. Pourtant, elle porte en elle cette nostalgie et ce besoin de mettre par écrit cette histoire douloureuse qui lui a été transmise.
Ce roman, c'est un témoignage émouvant et une réconciliation avec ses origines.
L‘écriture d'Olivia Elkaim est fluide, son roman sonne juste et c'est une lecture que j'ai vraiment appréciée.

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Le sixième roman d'Olivia Elkaim, parvient à nous raconter une histoire familiale hors normes sur trois générations, le rêve d'une terre jamais oubliée, l'Algérie, depuis les années 1950 jusqu'à maintenant. Elle n'est jamais allée au cimetière des Semboules à Antibes sur la tombe de ses grands-parents, Viviane et Marcel, depuis leur mort en 2010. Qu'à cela ne tienne, elle va leur dresser une stèle littéraire comme elle l'écrit à la fin de ce récit.

En 1958, Marcel, tailleur à Relizane, une ville entre Alger et Oran, est enlevé par un commando du FNL et ne réapparaît que trois jours plus tard. Il a dû tailler des costumes pour un chef des maquisards et s'engager à prendre comme apprenti le neveu de ce chef, Reda, en échange d'une relative protection. Sa femme Viviane, et tout son entourage, l'interroge afin de savoir ce qui s'est passé mais il garde le silence par crainte des conséquences pour lui et sa famille. A partir de ce moment, la peur s'installe dans le couple jusqu'à l'inévitable fuite vers la France, « la métropole », en 1962. Il fera partie du million de « pieds noirs » débarqués en France entre 1962 et 1965. J'ai appris ici que se trouvaient parmi eux 100 000 juifs sur les 130 000 que comptait le pays natal des grands-parents de l'autrice.

Réflexion sur le passé, la transmission, à travers une histoire bien trop grande pour des personnages modestes qui ne souhaitaient pas, ne pouvaient pas être dans un camp ou dans un autre. Olivia révèle les traumatismes de l'errance sur plusieurs générations, les incitations à s'assimiler, la tentation de nier leur origine. Les enfants de Viviane et Marcel s'appellent Jean et Pierre. Olivia, elle-même, demandera à orthographier le nom El Kaim en rattachant la particule.

J'ai aimé lire cette saga familiale dans la tourmente de la guerre d'Algérie car elle est riche d'amour et fournit matière à réflexion sur la façon dont on peut un jour ou l'autre, pour une raison d'origine, de religion, d'opinion, être rejeté de toute part. Difficile de s'assimiler, quand on est « pied noir » et juif.
Je me suis posé la question de la religion qui idéalement devrait relier les hommes, tous les hommes alors qu'elle divise et renferme trop souvent sur un groupe. Il est question ici des rites particuliers aux enterrements, avec le rabbin qui déchire la chemise au niveau du coeur et de la terre jetée dans la tombe. Je me suis dit que la religion soude une communauté grâce à ces rites mais au prix du rejet, quasi inévitable, des autres religions qui n'ont pas les mêmes pratiques.

Olivia Elkaim entremêle les souvenirs familiaux, des éléments du contexte historique et des éléments romancés quand les traces du passé sont absentes. L'écriture est vive et fluide, les pages se tournent rapidement.

J'ai vécu avec elle le désarroi des familles avant l'embarquement en juillet 1962, l'attente et les conditions sanitaires épouvantables. le moins que l'on puisse dire, c'est qu'ils n'ont pas vraiment été accueillis à bras ouverts alors qu'ils ont dû tout reconstruire dans ce pays inconnu.
Le personnage de Marcel est particulièrement attachant dans ce qu'on appellerait aujourd'hui sa résilience aux malheurs qui frappent sa famille : petits boulots, vie misérable pendant des années dans une sorte de cave à côté d'Angers, les déménagements, les démarches administratives entre 1974 et 1992 afin d'obtenir une indemnisation.

C'est un roman intime original et très réussi. Il est utile pour comprendre le destin individuel et familial de ceux, ils sont nombreux dans notre monde actuel, obligés de tout quitter et de réinventer une nouvelle vie dans un ailleurs où ils ne sont souvent pas les bienvenus. Et pourtant ils n'ont pas le choix !

On a là une vérité partielle mais précieuse, un récit parmi d'autres mais unique, pour raconter enfin cette guerre d'Algérie trop longtemps occultée. Cette terrible guerre coloniale pour les uns, d'indépendance pour les autres, n'est esquissée qu'à grands traits à travers le souvenir familial et quelques références peu développées. Peut-il y avoir un récit de cette sale guerre – elles sont toutes sales – ou des récits pluriels, portant des vérités, aidant à réfléchir ?

Pour ma part le tailleur de Relizane vient s'ajouter à quelques livres – curieusement j'ai plus de titres de films en tête – qui m'ont marqué, abordant ces « évènements » selon le terme employé à cette époque. Je pense d'abord à La question de René Alleg, Lettres d'un soldat de vingt ans de Jacques Higelin, Les serpents de Pierre Bourgeade, Des hommes de Laurent Mauvignier...

Et vous qu'avez-vous lu d'important sur le sujet ?
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Complétez cette chronique par une petite visite de mon site clesbibliofeel avec la composition photo à partir de la très belle couverture du livre d'Olivia Elkaim, rubrique roman contemporain. Également sur Facebook, page clesbibliofeel. Merci pour votre lecture !

Lien : https://clesbibliofeel.blog
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Olivia Elkaim, d'une plume précise et élégante nous conte le déracinement de ses grands-parents, de son père et des impacts insidieux, difficile à comprendre que celui-ci aura sur elle.
Je connaissais l'histoire de l'Algérie, des algériens, des colons, des harkis (avec le magnifique roman L'art de perdre d'Alice Zeniter) mais pas celle de ces juifs naturalisés français en 1870 alors qu'ils n'avaient rien demandé.
Considérés français, ils vont être sommés de quitter un pays aimé pour rejoindre un pays qu'ils ne connaissent pas et qui n'a pas envie de les accueillir.
Que cela est triste.
C'est histoire d'un déracinement douloureux comme tout exil.
Il est aussi questions d'identité, de courage, de ceux qui vont profiter de ces malheureux et de ceux qui vont les aider.
Un roman délicat et poignant.
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L'écrivaine, pour tenter de comprendre son présent, revient sur le passé qu'elle avait rejeté jusqu'à présent de ses grands-parents pieds-noirs
En Algérie, ce couple avec deux garçons ont leur travail, leur famille, leur maison, le soleil, la mer, les odeurs. Mais de Gaulle va les trahir et ils se retrouvent dans une cave du centre de la France.
Un bel hommage à ses ascendants et à tous ceux qui ont vécu cette même déchirure.
La littérature permet cela. de mettre en lumière ceux qui, à une période de leur vie, on a jeté dans l'ombre. Sincère et émouvant.
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Ce serait dommage si le tailleur de Relizane passait inaperçu au milieu du déferlement de nouveautés de la Rentrée littéraire. Au nom de tous les siens, ses grands-parents et son père, en particulier, Olivia Elkaim raconte l'histoire qu'elle se refusait jusqu'alors de s'approprier, comme elle l'explique magnifiquement dans son roman, avec des mots sincères, touchants et pudiques. Son grand-père, juif d'Algérie, tailleur de son état, a vécu dans l'angoisse les dernières années de l'Algérie française avant de partir, l'âme contrainte et blessée, de quitter son pays et de rejoindre la France du début des années 60, guère encline à accueillir ces exilés, appelés à découvrir la grisaille hexagonale et la pauvreté après le soleil de la Méditerranée. Si Olivia Elkaim dit toute la complexité de la situation de l'époque, c'est surtout sa capacité à nous plonger dans des vies ballotées, de la manière la plus intime, qui suscite l'adhésion. Pas de grandiloquence dans le style de la romancière mais une langue précise et délicate dans un récit où se meuvent non des salauds ou des héros mais des personnages honnêtes et courageux, entraînés malgré eux dans la grande roue de l'Histoire. le fait qu'Olivia Elkaim intervienne elle-même dans le récit et nous détaille son propre rapport évolutif aux faits n'a rien d'une coquetterie égocentrique d'écrivain, comme c'est souvent le cas. L'hommage aux siens et partant, à cette "marée" de pieds-noirs s'installant en France, est un pan de notre histoire qu'il est rare de voir narré avec une telle humanité, comme si ses protagonistes étaient de notre propre famille.

Un grand merci à NetGalley et aux Éditions Stock
Lien : https://cin-phile-m-----tait..
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Faut-il croire à la loi des séries ?
Après "Un fils obéissant" de Laurent Seksik et avant "Memorial drive" de Natasha Trethewey, me voici en compagnie d'Olivia Elkaim et son "Tailleur de Relizane", lequel n'est autre que son grand-père.

Le livre est très beau, très touchant. L'autrice y évoque le destin singulier de Marcel Elkaïm et de sa famille durant la guerre d'Algérie. de son enlèvement par un commando indépendantiste en octobre 1958 à l'expatriation après les Accords d'Evian.

C'est peut-être la première force de ce roman. L'évocation de cette période de l'indépendance, de l'atmosphère qui régnait en Algérie, avec les espoirs des uns et des autres, sans jugement excessif. La description d'une installation - et non d'un retour, s'agissant d'une famille juive depuis longtemps implantée en Algérie - en métropole, avec la défiance des autorités et des habitants, la difficulté à refaire sa vie, la perte des racines.

L'autre force est de convoquer, d'évoquer, avec justesse et tendresse, les ancêtres, le passé d'une terre à laquelle on s'est attaché, en mêlant habilement les temps de la narration : la jeunesse du grand-père, la guerre d'Algérie, le destin contrarié en France de cette famille de Pieds-Noirs, et sa propre histoire. Elle qui a longtemps nié cette part de son passé avant de l'assumer enfin et de se reconstruire.

Une réussite.
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Olivia Elkaim mêle la petite histoire à la grande en nous relatant la vie de ses grands-parents, juifs qui se croyaient algériens et dont les familles se voient assigner la nationalité française en 1871, par le décret Crémieux.
Le roman débute par une nuit de 1958 quand Marcel est emmené par les rebelles algériens. Il rentrera trois jours plus tard, vivant. L'auteure raconte la détérioration de la vie de cette famille, la mise à l'écart par les voisins, les déchirures à l'intérieur même de la famille jusqu'au départ en France. Les premières années seront dures, ils ne sont pas bien accueillis, ces pieds-noirs qui ressemblent tant aux algériens qu'ils ont fui. Ils n'étaient pas tous non plus des exploiteurs.
L'intérêt de ce roman est de nous faire vivre cette histoire de l'intérieur au travers des trois générations, celle de son grand-père qui a toujours cru que l'Algérie était son pays, son père très marqué par les évènements de son enfance et qui en a conservé les témoignages dans une valise, et la sienne, elle qui a occulté cette part d'elle-même pendant si longtemps.
C'est un témoignage émouvant, sincère, intime qui s'attache à la vie quotidienne, loin de la grande histoire, mais qui nous touche d'autant plus. Elle raconte la douleur de ses personnages, leur incompréhension devant ce qui leur arrive, la difficulté de recommencer ailleurs.
Je connaissais l'Histoire, les « évènements » comme on a dit si longtemps. Olivia Elkaim me les a fait ressentir.
Je remercie chaleureusement les éditions Stock pour le partage de ce beau roman #LetailleurdeRelizane #NetGalleyFrance
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A une période charnière de son existence, Olivia Elkaim ressent le besoin de renouer avec ses origines, avec le passé difficile de ses grands-parents, juifs algériens naturalisés français suite à la colonisation, dans l'obligation de fuir le pays pendant la guerre qui mènera à son indépendance pour venir habiter en France, qui ne les accueillera pas du tout avec humanité.

Ainsi, de recherches en recherches, de discussions familiales en discussions familiales, sans les principaux concernés, Marcel et Viviane, décédés depuis, la journaliste retrouve leur chemin, leur histoire, l'imagine parfois, par manque d'informations, entre Relizane, où Marcel était un tailleur réputé, et la France, les raisons qui les ont mené à faire ce chemin, pas du tout évident lorsque l'on est profondément algérien bien que naturalisé français par obligation, et les conséquences de ce chemin sur les enfants, dont Pierre, le père d'Olivia, pour qui les recherches vont aussi réveiller en lui un besoin de retour aux origines.

Un roman-témoignage touchant, qui décrit le parcours d'un pan de la population algérienne pas souvent évoqué, celui des Juifs Séfarades, pris, comme tout le reste de la population, entre deux feux, celui de ses origines, et ce que l'on a voulu lui imposer, tout en ne acceptant pas, ensuite, malgré les conséquences de ce que l'on lui a imposé, son exil forcé - ou les ravages de la colonisation, indéniablement.
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Que s'est-il passé pendant ces 3 jours où Marcel , en 1958, en pleine guerre d'Algérie, a été enlevé à Relizane, petite bourgade algérienne ? Marcel, c'est le grand-père d'Olivia Elkaim. Et avec sa femme et leurs 2 enfants, ils vont vivre et subir la guerre d'Algérie, l'exil en France et les conditions qui les attendent à leur arrivée.

Dans le tailleur de Relizane, Olivia Elkaim nous invite à vivre les conditions des pieds noirs qui ont dû fuir leur propre pays pour leur sécurité. Mais aussi, les conditions dans lesquelles ces pauvres immigrés ont été accueillis dans notre pays. En parallèle, l'auteure nous explique comment elle en arrive à retrouver ses racines.
Le texte est magnifique, poétique. J'ai aimé passer du temps avec Marcel et sa famille.

Merci Olivia Elkaim pour ce magnifique texte qui est une véritable ode à l'amour familial.
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L'auteure nous raconte l'histoire de ses grands parents Marcel et Viviane vivant en Algérie à Relizane dans les années 1950-1960. Juifs et Français, ils se trouvent dans cette période historique délicate où l'appartenance à une communauté, quelle qu'elle soit peut représenter un danger vital. La renommée du tailleur Marcel déclenche une situation ambiguë où être embarqué par le FLN et revenir vivant dans sa famille interroge. Au travers de cette histoire personnelle, c'est l'histoire de tous les pieds noirs très mal accueillis en France qui nous est contée. Bien incarnés sur quatre générations par une plume alerte, les personnages nous font vivre avec beaucoup d'émotion cette période difficile.
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