Hasard de mes lectures du moment, je viens de lire deux textes sur les grands parents d'écrivaines, qui ont vécu en Tunisie.
"
Fille de Tunis" d'
Olivia Elkaim et "
La famille de Pantin" de
Michèle Fitoussi nous parlent des grands parents, parents des auteures, qui ont quitté la Tunisie lors de son indépendance et la fin du protectorat français.
Ces deux textes m'ont permis de découvrir des épisodes de l'histoire de la Tunisie, la relation entre ce pays et la France, l'Italie.
Les deux auteures nous parlent de l'histoire avec un grand H mais aussi des histoires personnelles des leurs.
Elles se questionnent aussi sur les racines familiales, sur les histoires familiales, sur les non dits dans les familles.
Le texte d'
Olivia Elkaim est un peu différent que celui de
Michèle Fitoussi, deux générations différentes (
Olivia Elkaim est plus jeune que
Michèle Fitoussi) et de milieu (un milieu universitaire pour
Michèle Fitoussi et un milieu plus populaire pour
Olivia Elkaim, Paris et Marseille aussi.
Tunis, années 1940. Les parents d'Arlette ne savent plus comment faire : indomptable, leur fille s'enfuit toutes les nuits et n'obéit à personne. A la mort de son père, un oncle décrète qu'il faut la marier. Arlette rencontre Sauveur, beau canonnier d'origine sicilienne. Avec lui, elle pense trouver la liberté. Mais ses grossesses ruinent ses espoirs et la fin du Protectorat français signe son départ pour Marseille.
Exilée, reléguée socialement, elle lutte pour reconstruire sa vie, loin de la dolce Vita tunisoise et de son mari, resté là-bas. Prise dans une spirale de jeu et d'alcool, elle veut s'affranchir de ses rôles d'épouse et de mère. C'est la descente aux enfers. Après sa mort, en 2010, ses filles renoncent à la succession et jettent tous leurs souvenirs.
La petite fille nous livre un beau et touchant portrait de sa grand mère. Arlette qui a 12 ans en 1945 et qui est un vrai garçon manqué, son père Albert, est maréchal ferrant dans une caserne française et apprécie le Week end d'aller faire le joker sur les champs de course. Orpheline, elle va faire deux mariages, donner naissances à deux filles (dont la mère de la narratrice). La petite fille va essayer de connaître sa grand mère, une grand mère qui lui envoie toujours la même carte postale, avec Sainte Rita, la sainte de l'impossible avec ce message "cesse de t'inquiéter pour tout et pense à faire la fête". Elle va parler avec délicatesse de la vie de cette grand-mère avec ses problèmes d'alcoolisme et d'addiction aux jeux. Joli moment quand sa mère lui indique de lire "
le joueur" de
Dostoïevski ("c'est ce qui m'a permis de comprendre la folie du jeu de ma mère, ça va peut être t'aider dans ton travail." La narratrice et sa mère vont aussi beaucoup parler sur ce projet de texte. "Il faut se réinventer Olivia, ne jamais regarder derrière soi." "Pourquoi préférer le face à face avec les morts plutôt que celui avec les vivants". Olivia essaie de comprendre les relations de sa mère et de sa tante avec cette grand mère, si moderne. qui a vécu avec deux hommes et ce joli mot qu'elle emploie "trouple" (On peut aussi dire trouple, groupe de trois personnes qui entretient une vie commune avec ou sans relations sexuelles, lis je sur internet, "trouple" soit le trouble, à une lettre prés."
Elle a aussi du mal à comprendre la vie de sa mère ("Ma mère est l'inverse d'une figure d'émancipation du moment où, collectivement les femmes tentent de s'affranchir du joug du patriarcat. Elle vit à rebours des luttes féministes. Après son mariage, elle devient mère au foyer, s'enorgueillit d'être reine de la tarte Tatin, experte en produits ménagers, tout ce que dès l'adolescence, comme ma grand mère j'abhorre."
Et sa tante, soeur de sa mère, qui lui dit : "j'aime ma mère, même si elle m'a mal aimée, me dit elle. Ecris çà dans ton roman, juste çà.". Une tante qui a séjournée dans un sanatorium, qui donne des noms de poètes à ses chiens (
Ronsard, Lamartine, Mallarmé
Un beau texte de recherche des racines de sa famille, de beaux portraits touchants de femmes. Et j'ai aimé la description de la Tunisie, au moment de son indépendance et la vie à Marseille de sa grand mère. Et de belles pages sur les dialogues entre générations, avec des paroles mais aussi des silences.
"Il me prescrit des antibiotiques, mais, en vérité, seule l'écriture sauve - l'écriture, cette amarre lancée vers mes ancêtres.
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FilledeTunis #NetGalleyFrance