Un livre vraiment extraordinaire...
Je n'ai pas trop les mots car il était vraiment bien écrit avec des mots juste.
Il se déroule au Maroc et raconte l'histoire d'amour presque impossible entre, Osmane et Farah. Deux carrières difficilement coordonnées.
Le titre du roman est inspiré d'une chanson de Fayruz, très grande chanteuse du monde arabe.
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Il n’y a plus “un soleil”, comme vous pourriez le croire, mais plusieurs. Chacun le sien, qui le suit, l’attend à chaque coin de rue, à chaque détour du chemin. Je me dis, moi qui n’aime pas du tout les jours ensoleillés, et même les exècre et les ai en horreur, que ce mois d’octobre commence de la pire des façons. Car je ne vous parle pas d’un soleil chaud, pur et sain comme celui du désert, par exemple. Non, celui-là est pâle et rabougri, au point que c’en est à se demander ce qu’un soleil pareil vient fabriquer au-dessus de vous à cette période de l’année, pas chaud pour deux ronds et parfaitement inutile mais armé de rayons pointus comme des aiguilles qui vous rentrent jusque dans la moelle des os et vous tapent droit sur le crâne. Un soleil pervers, qui darde ses rayons mortels sur le point le plus sensible de votre front et le transperce à un endroit bien précis, toujours le même, comme s’appliquant à le miner avec son pic invisible. Vous avez beau louvoyer, vous contorsionner dans tous les sens, il louvoie et se tortille avec vous en vous suivant dans vos tours et vos détours, au point qu’il ne nous reste plus qu’à le maudire et à jeter l’éponge.
Dans son rêve, toujours, couché dans l’exacte position de la morte étendue sous lui, il entend déjà, angoissé, l’esprit tendu, le vacarme qui va monter d’ici peu du dehors et il voudrait que le jour ne se lève pas pour qu’on ne découvre pas le corps. Il se demande aussi s’il n’a pas déjà vu la morte quelque part. Il n’ose pas aller voir de près son visage pour savoir s’il a déjà eu affaire à elle. Et elle s’appelle Farah, pour le cas où vous en douteriez encore ! Mais d’où viennent ces brûlures qui lui couvrent le visage et les bras ? Y a-t-il un couteau, un hachoir auprès d’elle, une arme quelconque qui le relierait à la victime ? Il n’ose regarder ni dessous ni autour de lui pour ne pas voir le sang ou les profondes blessures laissées par l’acide. Dans le rêve, toujours, il ouvre les yeux et, voyant qu’un pan de son cauchemar s’accroche encore à lui, il les referme aussitôt. C’est qu’il n’est pas bien sûr d’être réveillé. Mais maintenant qu’il est assis devant la porte et qu’il la tient enfin, son histoire, il repense au juge qui les affectionne particulièrement. Et celle-là, elle mérite d’être racontée. Elle va bien l’amuser.
Il ne dort pas. C’est pour ça qu’il n’est pas sujet aux cauchemars. Seuls, de temps en temps, viennent troubler le silence le battement d’ailes d’un oiseau réveillé avant l’heure, pas à cause d’un bon ou d’un mauvais rêve, mais parce que c’est le propre des oiseaux, ou le “floc” d’une goutte de rosée tombée délicatement sur le sol.
Mais ce cauchemar qui a dérangé son sommeil, il ferait mieux de l’oublier et de penser aux menus soucis que le jour risque de lui apporter. Car le jour, il va bientôt se lever et il n’aura pas d’histoire à raconter au juge quand il va arriver.
Ils se retrouvaient puis se séparaient, dans une sorte de jeu dont le sens leur échappait. Elle arrivait au moment où il ne s’y attendait pas pour disparaître le lendemain, ou quelques jours, quelques semaines plus tard, à l’image du chaos qui régnait alors dans sa tête. Il essayait de rassembler les morceaux d’une vie qui n’avait pas duré bien longtemps. Farah aimait le bleu, la couleur de la robe dans laquelle elle lui était apparue la première fois. Et le chant aussi.
L’oiseau vient là pour lui chanter une chanson, exprès pour lui, et lui, fasciné par ce privilège, il attend un moment, qu’il prolonge ou abrège en fonction de son humeur et des dispositions de la pie pour lui répondre par la même note filée : prrriiii… Ou quelque chose dans ce goût-là !