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Critiques filtrées sur 2 étoiles  
Frain Irène – "La fille à histoires" – Seuil / Points, 2017 (ISBN 978-2-7578-7148-5)

Suite à la lecture de son dernier ouvrage récemment paru, intitulé "Un crime sans importance" (cf recension), qui m'avait enthousiasmé, force me fut de constater que – si le nom de cet écrivain m'était vaguement connu – je n'avais pour autant jamais lu le moindre ouvrage issu de sa plume. Ma petite librairie habituelle en avait deux en rayon, je les acquis sans hésiter, afin de me faire une opinion.

Je dois avouer que celui-ci m'a fortement déçu. Irène Frain y narre, rétrospectivement, ce qu'elle croit avoir été sa relation unilatérale avec sa mère.
Comme l'annonce la quatrième de couverture :
"Mon histoire avec ma mère est une histoire d'amour. Un amour à sens unique, le mien pour elle. Dès ma naissance elle m'avait rejetée."
Tout est dit de la posture adoptée, qui ne dépasse guère ce constat tout au long des pages...

Sauf que ce constat de l'auteur est, pour le moins, démenti par des faits bien solides : Irène Frain le répète elle-même, ses parents – dont sa mère – étaient des gens très pauvres. Vivant dans un milieu défavorisé, avec des moyens financiers limités à la seule rémunération d'ouvrier de son père, ces parents trouvèrent le moyen de financer des études supérieures à leurs enfants (cinq !), l'auteur elle-même terminant ses études par une agrégation de lettres classiques, ce qui est loin de constituer la norme dans de telles conditions sociales !
En ces temps-là, ces gens respectaient les instituteurs et institutrices, comme en témoigne le texte magnifique d'Albert Camus "Le premier homme" (à lire absolument).

Autre démenti, l'auteur reconnaît que sa mère lui donna le goût de "raconter des histoires" et lui fournit l'occasion de découvrir la lecture : les plus belles pages de ce mince récit rendent hommage aux
"livres de bibliothèque : tes soeurs ont une carte, toi aussi tu en auras une quand tu seras grande;"(p.104-105),
à cette instit qui vient convaincre la mère qu'il faut "pousser" sa fille dans les études (p. 105),
à la découverte poignante de la lecture, vigoureusement soutenue par son père (p. 107).

Dans la génération née dans cet "après-guerre" des années mille neuf cent cinquante, nous fûmes certainement des millions à être dotés de mères que l'on pourrait aujourd'hui juger "froides" et "distantes", des mères qui ont subi de plein fouet les horreurs de la Seconde Guerre Mondiale : pendant l'Évacuation (1940), ma mère – treize ans à l'époque – a vu, de ses yeux vu, un jeune soldat se faire hacher par un mitraillage d'avion, et mourir juste à côté d'elle dans des râles affreux, et ce n'est que l'une des horreurs qu'elle vécut – comment lui en vouloir si elle eut des relations un peu compliquées avec ses enfants ?
Comment peut-on – une fois parvenue à l'âge adulte et bénéficiant du statut d'écrivain relativement connu – exposer ainsi l'intimité de sa propre mère à la vindicte publique ???

D'autres écrivains ont relaté leur jeunesse : les deux modèles absolument in-con-tour-na-bles restent d'une part "Les ritals" de Cavanna (si vous ne l'avez pas lu, ruez-vous dessus, ne vous privez pas de cette magnifique narration !) ainsi que "Le premier homme" de Camus, déjà cité ci-dessus. Ces auteurs ont su exposer leurs difficultés avec leur mère, tout en la respectant profondément : Irène Frain fait figure de privilégiée à côté d'eux.

D'autres écrivains prirent soin de se dissimuler derrière une fiction aussi peu "fictionnelle" que possible : Irène Frain a reçu le prix Hervé Bazin pour cet opuscule, il convient donc de rappeler "Vipère au poing", un récit qui a une toute autre ampleur.

Car ce témoignage d'Irène Frain se limite très étroitement à sa relation avec sa mère, on se croirait dans l'une de ces revues dites "féminines" pour salon de coiffure, qui adorent se vautrer dans les histoires mère-fille.
Pour ma part, je trouve de surcroît regrettable qu'un écrivain comme Irène Frain se livre à l'un de ces déballages intimes mettant en cause des membres de sa famille encore de ce monde.
Cette mode va en s'accentuant : ces derniers temps, le quotidien "Le Monde" se vautre littéralement dans les glauques histoires de son propre milieu, la gauche caviar germanopratine, en consacrant de pleines double pages à des affaires concernant cet Olivier Duhamel (cf "Le Monde" des 4et 9 janvier 2021) ou ce Claude Lévêque (vs Laurent Foulon, "Le Monde" du 12 janvier 2021, pp. 12-13), deux personnalités que ce même milieu porta au pinacle en connaissant fort bien leurs travers pédophiles et en faisant aujourd'hui semblant de les découvrir avec une tartufferie d'une hypocrisie sans fond. de tels déballages, en dehors de toute procédure judiciaire, restent à mes yeux fort problématiques, quels que soient les crimes épouvantables commis par ces immondes individus.

Certes, comme le constate Irène Frain dans un "meurtre sans importance", nos magistrat-e-s sont trop occupé-e-s à éreinter et détruire les hommes politiques (de droite, par le plus grand des "hasards", Fillon "bénéficiant" d'un traitement extra-ordinaire, à une vitesse supersonique) pour traiter des affaires de moeurs de la gauche caviar (dans lesquelles elles et ils finissent, après des années d'atermoiement, par innocenter les copines et copains, tel Strauss-Kahn/Dodo la Saumure ou ce Duhamel), il n'en reste pas moins qu'il est navrant de voir journaleuses et pisse-copie – fussent-ils membres du "Monde" – s'ériger en Saint-Just et Fouquier-Tinville des moeurs qu'elles et ils cautionnèrent il n'y a pas si longtemps (cf leur attitude envers Matzneff lors de l'émission "Apostrophe").

Je regrette profondément qu'un auteur comme Irène Frain participe à cette curée nauséabonde, d'autant plus que ses parents ne l'ont vraiment pas "mérité". Bon, je m'en vais tout de même lire un autre livre, un roman cette fois, mais je ne recommande pas celui-ci.

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