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Vipère au poing tome 1 sur 3
EAN : 9782253001454
255 pages
Le Livre de Poche (07/03/1972)
3.77/5   9656 notes
Résumé :
"Vipère au poing", c’est le combat impitoyable livré par Jean Rezeau, dit Brasse-Bouillon, et ses frères, à leur mère, une femme odieuse, qu’ils ont surnommée Folcoche.

Cri de haine et de révolte, ce roman, largement autobiographique, le premier d’Hervé Bazin, lui apporta la célébrité et le classa d’emblée parmi les écrivains contemporains les plus lus.
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Critiques, Analyses et Avis (388) Voir plus Ajouter une critique
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sur 9656 notes
Hervé Bazin - Vipère au poing - 1948 : Cette descente au coeur de la haine intime s'accompagnait de la fin crépusculaire d'un monde qui sentait encore l'odeur de la poudre à perruque et des privilèges. On pouvait trouver que le combat qui opposait les enfants Rézeau à leur mère était celui-là même qui opposa à partir de 1789 la jeunesse révolutionnaire à la sclérose nobiliaire issue d'un monde historiquement millénaire. La figure tutélaire de la mère dominait cette famille éreintée par les agissements cruels de cette véritable Médée en jupon. Les jeunes frères et plus particulièrement brasse-bouillon (le surnom du personnage central) s'opposait frontalement à la barbarie d'une femme qui recréait dans son microcosme familial les maux délétères des pires dictatures de l'époque. On suivait avec passion ce combat presque homérique qui sacrifiait sur l'autel de la sévérité excessive une piétaille de précepteurs complices ou pas de la duplicité maternelle. Pauvre hommes en soutane souvent mis au rebus du clergé pour des comportements illicites qui finissaient pour la plupart épuisés par la violence larvée de cet affrontement familial. Hervé Bazin s'inspira en partie de son enfance et de son adolescence pour définir ce personnage de marâtre qui fera tout le sujet de son roman. La plaie visiblement était encore ouverte et c'est à grande poignée que l'écrivain jetait du sel sur le souvenir à vif de ses premières années. le sifflement aigu de la vipère résonnait dans chacune de ces pages qui retentissait comme un hommage à l'esprit mauvais de Paule Rézeau, créature sans limites morales que ses enfants n'appelleront jamais autrement que folcoche (un condensé de folle et de cochonne). Qu'en fut-il ensuite de la vie d'adulte de l'auteur ? réussit-il quand même à s'engager dans une relation sentimentale lui qui n'apprit jamais l'amour ? On imagine assez bien le handicape que du représenter une pareille jeunesse pour aborder sereinement une vie d'adulte. Alors que dans un couple la dureté de l'un était souvent contrebalancé par la bienveillance de l'autre, aucun secours ne vint d'un père pourtant distingué pour son courage dans les tranchées mais qui accepta avec résignation les mauvais traitements subis par ses fils au nom d'une illusoire tranquillité conjugale. "Vipère au poing" reste un classique absolu qu'on lit encore dans bien des écoles pour dénoncer aux yeux des enfants la maltraitance induite par des parents mauvais et indignes... intense
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L'histoire de « Vipère au poing » se trouve dans les recoins sombres de notre mémoire collective, qu'on ait lu ou pas le livre. Son héroïne, Folcoche, marâtre rusée, calculatrice, haineuse, pétrie de mauvaise religion, au corps sec comme une trique, est à ranger au musée des horreurs.
Ce livre, c'est l'histoire d'une France qui n'existe plus, tombée aux oubliettes dans les fracas de la seconde guerre mondiale. C'est la France de cette vieille noblesses mélangée, pour le meilleur et pour le pire, à cette grande bourgeoisie provinciale, les deux se rejoignant dans leur insupportable arrogance, les deux ayant les mêmes doigts crochus quand il s'agit de défendre leurs petits privilèges, les deux recroquevillées dans leurs manoirs branlants sans voir la marche du monde. C'est la France de Charles Maurras, de la « divine surprise » quand la troisième République s'effondre comme un château de cartes face aux légions nazies.
Ce livre, c'est l'histoire d'une famille de fin de race qui sent confusément que les valeurs qu'ils véhiculent vont disparaître, que leur heure est comptée. D'où ce raidissement, peut-être ? Comme un dernier pied de nez au destin.
Un père veule et insignifiant, des percepteurs au rabais qui préfèrent fuir en courant ou regarder distraitement ailleurs… Personne pour empêcher la sorcière Folcoche de régner en Maître absolu sur le domaine de la « Belle Angerie », et d'humilier de la plus épouvantable manière ses propres fils : Chiffe, Cropette, Brasse-bouillon. Coups de fourchettes sur les mains, surveillance continuelle, mentalité de la méfiance érigée en dogme, crânes tondus, déshabillage des consciences… Aucun abaissement, aucune vexation ne leur sera épargné. Et tout cela au nom de la bien-pensance chrétienne.
Le seul à relever le gant face à la dictature de Folcoche sera Brasse-bouillon, notre narrateur. Plus dur que ses deux frères, plus malin, plus endurant, sa jeunesse finira par la vaincre. Avec un certain plaisir cynique, il se rendra compte en même temps qu'il lui ressemble en tout point avec sa haine et son mépris plantés dans le coeur. Son premier acte d'homme sera d'ailleurs de se moquer et de faire pleurer une pauvre fille. Écoeurant, gratuit, et en même temps tellement prévisible.
C'est mon premier Bazin. le style est d'une puissance peu commune et les sarcasmes mouillés d'acide. La haine et le fiel sont à fleur de peau. Magistral.




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Un classique à lire et à relire et je ne m'en lasse pas...
Malheureusement ayant vu l'excellent film avec dans le rôle de Folcoche, Catherine Frot, ma lecture a été un peu gâché car il n'y avait plus beaucoup de surprise étant donné que le film est assez fidèle au roman.
L'écriture d'Hervé Bazin m'a beaucoup plu et m'a rappelé la narration des films la gloire de mon père et le château de ma mère que je regardais quand j'étais enfant. (je serais sans doute la seule a faire cette comparaison mais c'est parfois agréable de se remémorer des souvenirs d'enfance à travers d'un livre).
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“Elle avait de jolis yeux, vous savez, cette vipère, (...) des yeux de topaze brûlée, piqués noirs au centre et tout pétillants d'une lumière que je saurais plus tard s'appeler la haine et que je retrouverais dans les prunelles de Folcoche, je veux dire de ma mère.”

Avec ce roman, nous pénétrons dans l'effroyable intimité d'une famille de la grande bourgeoisie de province, bien pensante et catholique fervente des années vingt chez qui, derrière les murs clos de la propriété, à l'abri des regards, se joue chaque jour et à huis clos la tragédie de la maltraitance ordinaire poussée à son paroxysme par une mère monstrueuse, une folle, une cochonne : Folcoche.

Le froid, la faim, les privations, les corvées, les sévices, sous les yeux d'un père secrètement compatissant mais d'une absolue lâcheté, une torture psychologique de tous les instants, une destruction systématique, jouissive, du bonheur et de l'innocence, un saccage méthodique de l'enfance… Comment survivre face à une mère qui est l'incarnation du sadisme, de la démence froide et de la haine ? Comment préserver ce qui peut l'être encore et réussir, un peu, à se construire ?

L'école se fait à la maison, sous la houlette d'un vieil abbé aigri, malveillant et vermoulu, les domestiques un peu sensibles ont été renvoyés, il n'y a, pour ces enfants, aucune aide extérieure possible. Pour Chife, Cropette et Brasse-Bouillon, le narrateur et le meneur de la résistance, il n'y aura de solution possible que dans l'affrontement, la révolte, la rage, la vengeance et la haine…

Avec "Vipère au poing", Hervé Bazin signait en 1948 son premier roman, largement autobiographique, qui le rendit aussitôt célèbre, et l'une des dénonciations les plus violentes de l'enfance maltraitée qui, encore aujourd'hui, fait toujours froid dans le dos. Un roman effroyable et très bien écrit qui est devenu un incontournable de la littérature française au point de figurer, soixante-dix ans plus tard, au programme des collèges.

[Challenge MULTI-DÉFIS 2019]
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Vipère au poing appartient à notre mémoire collective, la mémoire de l'école. Il m'a ramené à l'élève que je fus. Je me souviens d'avoir lu en classe de cinquième Vipère au poing. C'est ainsi que j'ai découvert en même temps que ce livre son auteur Hervé Bazin. Je ne suis pas sûr qu'aujourd'hui ce livre continue d'être étudié à l'école... Je serais curieux de le savoir...
En le relisant et en abordant les premières pages, je craignais de revenir à un récit qui me paraissait devenu un peu daté. Quelque chose qui sent la naphtaline, l'encaustique sur des meubles anciens et vermoulus.
Le narrateur est Jean, alias Brasse-Bouillon, ce n'est pas un surnom donné par ses camarades d'école, - d'ailleurs il ne va pas à l'école, mais tout simplement par sa mère. Cela vous donne le ton. M'est avis que le narrateur ressemble comme deux gouttes d'eau à l'auteur qui raconte ici quelque chose qui ressemble de près à un pan de sa jeunesse... Bon, ce n'est pas un secret, ce récit est quasiment une autobiographie de l'enfance de l'auteur.
Nous sommes dans les années vingt, en terre rurale, craonnaise précisément. Années vingt, entendez par là 1920 bien sûr... Jean et Ferdinand Rezeau, deux frères, sont élevés par leur grand-mère paternelle dans le manoir familial de la Belle Angerie, tandis que leurs parents séjournent en Indochine avec le plus jeune des trois enfants, Marcel. À la mort de leur aïeule, la mère des enfants, de retour d'Asie, reprend ses droits. Jugeant l'éducation de leur grand-mère trop laxiste, elle entend bien remettre ses fils dans le droit chemin. Rapidement, elle leur inflige des souffrances et des humiliations de toutes sortes. C'est ainsi qu'elle héritera à son insu du nom, du beau nom de Folcoche...
Ici cette famille fait partie de la vieille France traditionnaliste, un mélange d'aristocratie et de bourgeoisie, qui côté aristocratique tente de tenir son rang et qui côté bourgeois ne parvient malheureusement pas à s'enrichir. Pire elle s'appauvrit de jour en jour.
Le rang, c'est celui d'une vieille famille française ultra catholique devenue pauvre à force de ne pas travailler, malgré les terres qu'elle possède. Elle est si pauvre que cela lui coûte moins cher d'engager un précepteur, - un ecclésiastique bien sûr, que d'envoyer les enfants en pension...
Ils ont aussi cette horrible valeur chère au catholicisme, la charité, dégoulinante de belles intentions, mais toujours assortie d'une condescendance, d'un mépris, pour la classe des plus humbles, des plus démunis.
Le narrateur s'en délecte pour égratigner ces valeurs familiales, et moi aussi.
La violence de la mère, la lâcheté du père qui, sous prétexte de chercher la paix familiale, le moins de vague possible, ferme ses yeux veules, détourne son visage vers sa faiblesse et sa médiocrité. Tout d'un coup mes mains tremblent, non ce livre hélas ne sent pas le rance ni l'encaustique... Tant de familles fonctionnent encore comme cela... ! L'un se tait, tandis que l'autre donne les coups.
Le père, parlons en... Il était enseignant jusqu'à ce qu'il revienne d'Indochine. C'est un scientifique, spécialisé dans la diptérologie. Désormais, il passe ses journées à chercher, observer, capturer des mouches rares. À les gober aussi auprès de sa dominante et colérique épouse.
La vocation de certains écrivains s'est-elle forgée sur cette haine sourde ou bruyante, ce terreau familial insupportable, destructeur, ils sont légion à défiler sur les plateaux télés, notamment à La Grande Librairie, et nous autres qui avons connu une enfance heureuse, nous sommes parfois ébahis, sidérés, gênés presque de les voir convier le bruit assourdissant et douloureux des souvenirs de leur enfance, à la façon d'un règlement de comptes.
J'imagine que l'écriture est dans ces cas-là un expiatoire, une thérapie, une manière de se sauver, sauver sa peau...
Certains mettront sur le visage de Folcoche un visage cinématographique marquant, celui des actrices qui ont interprété ce rôle phare, peut-être celui récent de Catherine Frot qui n'a rien à voir avec celui qu'elle tenait dans Un air de famille, d'autres se souviendront de celui d'Alice Sapritch, qui n'a rien à voir non plus avec son interprétation dans La folie des grandeurs, quoique... Dans le grotesque et le ridicule, Folcoche sait aussi y faire...
Moi, j'y ai mis celui du visage des mots, ces mots qui dessinent mon imaginaire, mes représentations quand je lis. Mon imaginaire aime dessiner les visages des personnages que je rencontre dans les romans. Ici Hervé Bazin a réjoui mon attente.
C'est un conte cruel d'une enfance malheureuse, qui forge un enfant à construire son existence sur le combat contre sa mère. C'est terrible.
Comment une mère peut-elle accueillir en son coeur, en son sein, le vertige digne des guerres, nourrir de cette ivresse affreuse les combats impitoyables et machiavéliques contre ses enfants ? Quel est ce coeur indigne capable de cela ?
Ce texte laisse entendre la voix, la tyrannie, la haine d'une mère odieuse obsédée par la rigueur et des règles qu'elle croit souveraines pour protéger le rang familial, cette mère dont le narrateur a peur au début, puis c'est une mère qu'il va détester progressivement, haïr, la désirer en même temps pour le plaisir insolent et ambigu de lui donner rendez-vous et ferrailler avec elle...
C'est un enfant dans l'éveil de l'adolescence, c'est un texte contre les préjugés bourgeois, catholiques.
Et puis, l'écriture d'Hervé Bazin est vive, le ton sarcastique, décochant des répliques qui font mouche, même si le décor social est un peu daté.
Non, finalement ce récit n'a pas pris une ride.
J'ai aimé revenir à ce texte.
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Citations et extraits (286) Voir plus Ajouter une citation
Cette vipère, ma vipère, dûment étranglée, mais surtout renaissante, je la brandis encore et je la brandirai toujours, quel que soit le nom qu'il te plaise de lui donner : haine, politique du pire, désespoir ou goût du malheur ! Cette vipère, ta vipère, je la brandis, je la secoue, je m'avance dans la vie avec ce trophée, effarouchant mon public, faisant le vide autour de moi. Merci ma mère ! Je suis celui qui marche, une vipère au poing.
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J'entre à peine dans la vie et, grâce à toi, je ne crois plus à rien, ni à personne. [...]Celui qui n'a pas cru en sa mère, celui-là n'entrera pas dans le royaume de la terre. Toute foi me semble une duperie, toute autorité un fléau, toute tendresse un calcul. Les plus sincères amitiés, les bonnes volontés, les tendresses à venir, je les soupçonnerai, je les découragerai, je les renierai. L'homme doit vivre seul. Aimer, c'est s'abdiquer. Haïr, c'est s'affirmer. Je suis, je vis, j'attaque, je détruis.
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Des prés bas, rongés de carex, des chemins creux qui exigent le chariot à roues géantes, d'innombrables haies vives qui font de la campagne un épineux damier, des pommiers à cidre encombrés de gui, quelques landes à genêts et, surtout, mille et une mares, asiles de légendes mouillées, de couleuvres d'eau et d'incessantes grenouilles. Un paradis terrestre pour la bécassine, le lapin et la chouette.
Mais pas pour les hommes. De race chétive, très "Gaulois dégénérés", cagneux, souvent tuberculeux, décimés par le cancer, les indigènes conservent la moustache tombante, la coiffe à ruban bleu, le goût des soupes épaisses comme un mortier, une grande soumission envers la cure et le château, une méfiance de corbeaux, une ténacité de chiendent, quelque faiblesse pour l'eau-de-vie de prunelle et surtout pour le poiré. Presque tous sont métayers, sur la même terre, de père en fils. Serfs dans l'âme, ils envoient à la Chambre une demi-douzaine de vicomtes républicains et, aux écoles chrétiennes, cette autre demi-douzaine d'enfants, qui deviennent, en grandissant, des "bicards" et des valets qui ne se paient point.
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Nous partageons tout, hormis le privilège de la virilité, que le ciel lui a refusé par inadvertance et qu'elle usurpe allègrement. Il n'est aucun sentiment, aucun trait de mon caractère ou de mon visage que je ne puisse retrouver en elle. Mes trop grandes oreilles, mes cheveux secs, ma galoche de menton, le mépris des faibles, la méfiance envers la bonté, l'horreur du mièvre, l'esprit de contradiction, le goût de la bagarre, de la viande, des fruits et des phrases acides, l'opiniâtreté, l'avarice, le culte de ma force et la force de mon culte… Salut, Folcoche ! Je suis bien ton fils si je ne suis pas ton enfant.
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Nous n'avions, en effet, jamais vu la mer, bien que La Baule ne se trouve qu'à cent kilomètres de la Belle Angerie. La famille estimait inutiles et même immorales les trempettes mondaines en eau salée, toute viande dehors. L'horreur du nu et tenace en Craonnais. La peur de l'eau également, tant qu'elle n'est pas bénite. L'éducation en vase clos - en ciboire, dira Frédie - ne permettait aucune fréquentation dangereuse. Chacun sait que sur les plages, on est obligé de se commettre plus ou moins avec les boutiquiers enrichis et la canaille des congés payés. Et puis, enfin, ça coûte cher.
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