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3,78

sur 288 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Pour tous ceux qui admirent ou ont admiré Gérard Philippe, ce livre est d'une émotion marquante. Pour tous ceux qui aiment le théâtre, où raisonne cette voix extraordinaire dans nos oreilles lorsqu'il est "Le Prince de Hombourg" ou encore bien sûr "Don Rodrigue", ce livre est une douleur, mais d'une présence immense. Trop jeune lorsqu'il était au TNP ou au Festival d'Avignon avec Jean Vilar, je n'ai jamais vu Gérard Philippe au théâtre, aucune vidéo n'existe, mais uniquement quelques enregistrements, mais sa voix m'est tellement familière tant je l'ai écouté.
Qui est plus légitime que Jérôme Garcin pour raconter les derniers jours de ce comédien unique, même si lui aussi ne l'a pas connu, mais en même temps si proche.
Ce livre n'est pas seulement les derniers jours d'un comédien, mais ceux d'un homme engagé, vivant, parti beaucoup trop tôt et trop jeune, en ayant donné déjà tellement.
Comment ne pas se sentir vraiment petit devant un tel monument.
Merci pour ce partage.

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Le dernier hiver du Cid, ou comment Jérôme Garcin réussi à immortaliser une des plus belles étoiles du théâtre français, 60 ans après sa disparition !

Gérard Philippe, aujourd'hui quelque peu oublié, son nom évoquant une époque brillante révolue, un âge d'or du théâtre comme du cinéma, une grandeur certes, mais passée.

Qu'à cela ne tienne ! Pour honorer l'homme comme l'artiste, il fallait lui donner une nouvelle chance d'occuper le devant de la scène. Ne pas laisser tomber dans l'oubli ce destin atypique, cette ardeur au travail peu commune, une excellence dans le jeu, un homme infatigable, ouvert aux autres, et fourmillant d'idées : un personnage inspirant s'il en est ! Une ascension brisée par une fin prématurée, fulgurante et improbable. Un choc difficile à accuser pour ses proches comme pour la France, sous le charme du comédien.

Ce roman commence avec les premières fatigues, incompréhensibles, de l'acteur. Il s'agit des derniers mois de sa vie, mais la rétrospective est riche, et le personnage foisonnant ! L'écriture limpide offre une lecture passionnante, nous galvanise dans une urgence de lire comme une urgence de vivre, décuplée quand on sait le destin funeste qui l'attend. Et lorsque l'inévitable se produit, on ne peut qu'y assister, la gorge serrée et le coeur soudainement vide. Des années ont passé mais l'émoi provoqué par la perte de Gérard Philippe est toujours aussi fort. Se présence redevient nécessaire.

Et c'est toute la magie de l'écriture qui entre alors en scène, en redonnant vie et son éclat inaltérable, le temps d'un livre, au destin de Gérard Philippe. Cela donne un roman flamboyant dans la richesse d'une vie pleine et engagée. Mais c'est également un roman profondément humain qui ouvre la porte sur ce qui se passe en coulisse de sa vie professionnelle. On approche un homme malade, diminué mais gardant sa fierté et toujours avide de projets. On voir les amis inquiets, sa femme, héroïque dans son désir de le protéger, ses proches présents, mettant presque au défi la mort de réussir à passer à travers cette avalanche de petits soins.

Vous aussi, ne passez pas à côté de cette magnifique rencontre, et rendez un dernier hommage à l'inoubliable interprète du Cid. Bonne lecture !
Lien : https://auxpetitespepites.bl..
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J'ai encore dans l'oreille le son de la voix de l'acteur dans le récit audio du Petit Prince que j'écoutais en boucle, enfant.
Et en mémoire, l'image glacée d'un petit livre classique Hatier avec la photo du Cid, incarné par l'acteur, au regard enfantin.
Un acteur disparu dont le nom brille encore en dépit des années.
J'ai donc saisi ce livre et découvert ainsi...ses derniers instants, décrits avec beaucoup de sensibilité et élégance.
Et les évocations de sa vie, riche en spectacles, ses doutes mais aussi son dévouement vis à vis de la profession; son engagement inébranlable dans la création d'un syndicat.
La programmation d'un documentaire sur France 5 très récemment, plutôt fidèle à ce récit, et illustré des photos de famille confiées par la fille de l'acteur a complété cette belle évocation.
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N°1663 - Août 2022

Le dernier hiver du CidJérôme Garcin – Gallimard.

Il y avait eu « Le temps d'un soupir » l'émouvant hommage d'Anne à son époux, Gérard Philipe (1922- 1959)
Nous avons tous encore en mémoire le visage de cet homme jeune et engagé aux côtés des comédiens et des plus défavorisés, infatigable acteur à la beauté quasi juvénile, prêtant pour les enfants sa voix envoûtante au merveilleux conte d'Antoine de Saint-Exupéry, enterré dans le costume de Don Rodrigue, le Cid de Corneille, qu'il incarna (« la mort a frappé haut » dira simplement Jean Vilar), comme un dernier pied de nez à la camarde qui ne lui enleva que la vie mais pas l'image gravée sur la pellicule, pas la trace de son passage si bref sur terre de trente six ans qui inspira des poètes et symbolisa cette envie de vivre après les atrocités de la guerre. Gérard Philipe reste dans nos mémoires, surtout celles des gens de ma génération, non comme un simple nom sur une plaque de rue, mais comme la trace indélébile de la jeunesse et de la beauté que la vieillesse avec ses rides, ses déformations et ses douleurs, n'altérera jamais, un visage qu'il est impossible de ne pas reconnaître.
Jérôme Garcin a déjà, avec talent, fait revivre nombre de personnages inconnus du public ou oubliés par le temps, il était donc naturel qu'il rendît hommage, avec la sensibilité qu'on lui connaît, à ce merveilleux acteur mondialement connu dont, bien plus tard, il épousa la fille. C'est un beau témoignage, à la fois émouvant et poétique qui retrace également le parcours personnel d'Anne qui accompagna la carrière de son mari dont il énumère les succès, les écueils, les échecs, les critiques qu'il essuya, les convictions politiques, évoque sa mère et même son père qu'il aimait malgré leurs divergences, parle de son besoin de vie de famille avec ses enfants...
Son parcours est indissociable du Théâtre National Populaire de Jean Vilar où il milita comme simple comédien, choisissant d'oublier sa notoriété, ce qui dit assez non seulement son amour de la scène mais aussi son désir de vulgariser cet art, de le partager avec les plus défavorisés, c'est à dire avec ceux qui, pour un tas de raisons, n'y ont pas naturellement accès. Ce désir de vulgarisation me rappelle, toutes choses égales par ailleurs, l'expérience menée par Frederico Garcia Lorca en Espagne avec sa troupe « La barraca » en 1931. Son action se limitera pas seulement là et il luttera pour reconnaissance du travail des acteurs et des intermittents du spectacle. A son enterrement, pas d'officiels, seulement quelques amis et surtout tous les habitants du village de Ramatuelle qui accompagnaient ainsi un ami, un parent ...
Jérôme Garcin relate avec émotion et pudeur ce qu'ont été les derniers jours de l'acteur , le courage d'Anne, sa décision de taire son état à son mari, celui aussi d'être cette tragique comédienne face à cet immense comédien, souligne l'ironie du destin qui avait sollicité la notoriété de Gérard pour participer à une campagne nationale contre le cancer, ce mal qui pourtant allait l'emporter. Il évoque sa vie désormais entre douleurs, silences, espoirs fous de survie, soulève des hypothèses qui pourraient influer sur le cours des choses et auxquelles malgré tout on voudrait croire, en se gardant bien cependant de faire parler un mort, respectant ainsi sa mémoire. Même si on ne l'a pas connu personnellement ou simplement croisé, comme c'est le cas de beaucoup d'entre nous, il reste dans la mémoire collective comme un mythe qui ne mourra jamais, comme James Dean ou Maryline Monroe qui vécurent intensément parce qu'ils savaient, inconsciemment peut-être, que le temps leur était compté. Non seulement il incarna son époque dans son appétit de vivre, mais aussi il n'a pas heureusement eu le temps de connaître l'usure des choses, les rides qui ravagent le visage, les modes qui changent, les goûts du public qui se modifient, la nouvelle génération qui chasse et conteste l'ancienne, l'oubli qu'un acteur plus qu'un autre être, redoute... Que serait devenue cette image si les choses ordinaires de la vie l'avaient altérée ? Au moment où nos sociétés vieillissent, où les hommes souhaitent durer longtemps pour profiter de cette vie qui est un bien unique, mourir jeune est une injustice, la marque d'un destin cruel, surtout si la mort interrompt une belle carrière comme ce fut son cas. Mourir ainsi c'est aussi et malgré soi, nourrir sa propre légende, pourtant, malgré la révolte et le chagrin, cette disparition l'a consacré, alors qu'il était au sommet de son art et qu'il se projetait dans l'avenir.
Sa mort a été tellement brutale qu'on a fait semblant de croire qu'il était parti pour un temps, qu'il était « passé dans la pièce à coté », qu'il allait surgir à nouveau avec son sourire éternel. Nous avons beau nous répéter que la mort n'est rien que la fin de notre parcours terrestre, nous sommes tous mortels et la grande faucheuse choisit ses victimes avec sa logique illogique qui fait durer des vies au-delà du raisonnable et en supprime d'autres, gourmandes d'avenir. J'ai eu beaucoup de mal à refermer ce livre.

Il avait ce côté à la fois fragile et aristocrate de l'acteur qui, sur scène donne, par son talent, la vie à des personnages, il avait prêté sa voix au « Petit Prince » je veux retenir ces mots simples d'une chanson qui lui est dédiée et qui lui vont si bien
« Il était un prince en Avignon, sans royaume ni château ni donjon, las-bas au fond de la province, il était un prince... »
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Au travers de ce dernier hiver de Gérard Philippe, Jérôme Garcin retrace (en accéléré) la vie et la carrière de ce beau-père qu'il n'a pu rencontrer. 

Pendant les vacances d'été de 1959, Gérard Philippe se sent un peu patraque, manque d'énergie, mais l'année écoulée fut éreintante entre tournages et théâtre.

Il profite de la chaleur tropézienne, qui cette année le fait un peu souffrir,  il joue avec ses enfants, lit et discute avec Anne, son épouse, se plonge dans les textes qu'il aimerait jouer, notamment certaines pièces des tragédiens grecs antiques ... 

Au retour  à Paris, la fatigue persistant il se résout à consulter un ami. Les premières examens radiologiques ne révèlent rien ... de séjours africains il a été peut être contaminé par des amibes, qui pourraient avoir provoqué un abcès au foie...

Les chirurgiens ouvrent et referment après avoir découvert une tumeur inopérable. Ils annoncent le diagnostic à Anne et tous conviennent de n'en rien dire à l'acteur.

Il décèdera trois semaines plus tard ! 

Une vie brève, mil n'a même pas atteint son trente-septième anniversaire, mais 60 ans après sa mort, il est toujours connu, apprécié et célébré ! 

Un très très beau témoignage sur la vie d'un homme à qui tout a souri ... sauf la vie ! 

Un bel hommage :) 
Lien : http://les-lectures-de-bill-..
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Le dernier hiver du Cid est le récit des derniers jours de Gérard Philippe, les quelques jours avant son opération prévue le 9 novembre 1959, qu'il croit être celle d'un abcès et qui se révèlera être un cancer du foie. Avertie du pronostic des médecins qui ne donnent qu'entre un et six mois de survie à l'acteur, sa femme Anne décide et demande au corps médical qui accepte, de taire le diagnostic à Gérard Philipe. Ce dernier, de retour chez lui, reprend frénétiquement la lecture de pièces qu'il pense répéter une fois sur pied, l'annotation de livres qui lui tiennent à coeur, reçoit de rares visiteurs ignorant la gravité de l'état de santé de l'acteur, alors au sommet de sa carrière. le destin ne laissera qu'une dizaine de jours à l'acteur qui décèdera le 26 novembre d'une embolie foudroyante...

Jérôme Garcin, époux d'Anne-Marie, la fille de Gérard Philippe - qui n'a que cinq au décès de son père - relate les derniers jours du Cid, le rôle emblématique de Gérard Philippe, dans le costume duquel il sera inhumé, en retraçant la fulgurante carrière d'un comédien, d'abord cantonné à des rôles de jeune premier dans des pièces de boulevard mais qui, poussé par son professeur Georges le Roy, par Jean Vilar qui crée le TNP, Théâtre national populaire et sous l'influence de sa femme Anne qui lui insuffle la confiance en lui, vers des rôles exigeants qui lui faisaient peur mais qui vont le propulser dans l'art dramatique. Tant au théâtre avec le Cid, le Prince de Hombourg, Lorenzaccio, Richard II qu'au cinéma, avec Fanfan la Tulipe, Julien Sorel, il joue sous la direction des plus grands Jean Vilar, Max Ophuls, Claude Autant-Lara, Yves Allegret, René Clair. Adulé en tant qu'acteur, il redevient simple en famille et avec ses amis, s'engageant dans des combats politiques notamment et s'impliquant dans le Syndicat Français des Acteurs, où il défend les intermittents.
Avec le dernier hiver du Cid, Jérôme Garcin réussit à évoquer à la fois la carrière de l'acteur mais également l'homme, sa vie aussi fulgurante que sa mort.
Un bel hommage à un acteur qui incarnait la grâce et le talent, une étoile filante.
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*** 25 novembre1959 : le Cid en pourpoint bleu horizon, recouvert d'une cuirasse " bleu nuit" à parements dorés avec sa cape rouge et ses cuissardes vient de tirer sa dernière révérence !
Jerôme Garcin, raconte avec pudeur, délicatesse et émotion les derniers mois puis les derniers jours de son beau père, tandis qu'Anne Marie en audio lit la vie de son papa : cet acteur au port aristocratique, à la beauté séraphine, ce jeune fauve élégant et génial que fut Gérard Philipe !
Ce père qui s'amusait avec ses enfants pendant les vacances à Ramatuelle, les amenait se baigner à la plage de Pampelone," retapait" la Rouillière , cette maison de campagne héritée de sa femme. Là, à l'abri des photographes, des journalistes, des importuns, Anne et lui vivaient heureux le temps d'un été.
Il avait, certes des douleurs abdominales, un peu plus de fatigue que les autres années mais c'était un homme stoïque, et il se raisonnait. Il rêvait de rôles nouveaux avec son mentor Jean Vilar et le TNP, il attendait la visite de son ami de toujours : Georges Perros qui déclinât son invitation à cause de ses dettes et du climat méditerranéen trop chaud pour lui.
C'est déja la rentrée des classes, avec Anne Marie et Olivier : il faut aller faire un petit séjour à Cergy, s'amuser encore un peu au bord de l'Oise ou dans le grand parc. Gérard profite pour aller voir Laurence Olivier à Stratford dans Hamlet, et il rêve de le jouer, mais aussi d'être Dantès dans le Comte de Monte Cristo !
Retour définitif à Paris, rue de Tournon près du Luxembourg, il a maigri, il est fatigué et les calmants ne suffisent plus..c'est son ami le Professeur d'Allaines qui le conseille d'aller consulter à la clinique Violet : une opération s'impose car il y a une suspicion d'amibe du foie, il entrera sous un faux nom pour éviter les fuites, et là avec stupéfaction : les chirurgiens découvrent un cancer foudroyant ! Anne est bouleversée mais va surmonter sa peine en décidant de ne point lui en parler et, courageuse elle va jusqu'à la fin lui jouer la comédie, vivre comme si tout était redevenu normal !
A partir de ce moment, de retour à l'appartement : les jours seront comptés, les amis rares mais Minou la mère de Gérard a des soupçons, Marcel le père vit en Espagne car il est interdit de territoire suite à sa condamnation d'il y a 14 ans pour intelligence avec l'ennemi ( faciste et nazi), Gérard s'occupe de la SFA qu'il avait fondé, envisage ses prochains rôles, les scènes théâtrales ou il a joué avec passion et fougue ( Chaillot/Avignon...),les pays qui l'ont acclamé et, dans des moments de repos imposés par sa " convalescence " il se remémore son mariage en 1951 avec Anne qui s'appelait Nicole Fourcade, les enfants, son passé dans les FFI, la libération de Paris en 44, sa visite chez Fidel Castro, ses prises de positions militantes et son enfance à Cannes avec son frère !
Mais, le 25 novembre alors qu'Anne a amené les enfants chez le Père Castor, il est terrassé par une embolie....
Dés l'annonce de sa mort, la foule, les amis, les journalistes, les photographes, les " fans " vont graviter rue de Tournon, et, même quand il sera enterré à Ramatuelle, les villageois se bousculeront pour voir le cercueil du Prince de Hombourg, De Valmont, de Lorenzaccio, de Julien Sorel, de Fanfan la tulipe et.... du Cid qui a éclairé nos classiques ! Adieu, l'artiste : cela fait plus de 60 ans que tu es parti rejoindre les étoiles !
L.C thématique de décembre 2021 : l'hiver.
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le roman nous livre les derniers mois de la vie de Gérard Philipe depuis le mois d'août 1959 jusqu'au 25 novembre de la même année, jour de sa mort.
Le récit commence en plein été à Ramatuelle. le comédien passe des vacances très actives à retaper sa maison, à jouer avec ses enfants, à vivre un peu avec sa femme, Anne loin de la vie parisienne.
Pour la première fois, il souffre de la chaleur, ressent des douleurs dans le bas-ventre mais la vie continue. Mille projets se dessinent devant lui dont le film de Montecristo, une pièce de Hamlet sur la scène du théâtre Jean Vilar et bien d'autres.
Rentré à Paris, il doit se faire opérer d'un abcès au foie . Un abcès que les médecins déclarent ne pas être grave mais c'est en ouvrant pour l'opérer qu'ils découvriront les dégâts causés par une tumeur inguérissable au foie.
Gérard Philipe décèdera quelques semaines plus tard, le 25 novembre persuadé que sa convalescence va être longue. Il est serein et relit les tragédies grecques. C'est aussi un grand amateur de Corneille et c'est dans son costume du Cid qu'il sera enseveli. Il l'a joué 150 fois.
En mourant, il laisse sa femme, Anne Philipe qui nous a livré "Le temps d'un soupir" que j'ai lu au lycée. Il laisse aussi deux très jeunes enfants : Anne-Marie et Olivier.
Son gendre, le bien connu Jérôme Garcin que j'avais lu dans "Le voyant" ,raconte ces derniers mois ainsi que les origines de l'acteur.
Il nous livre un récit excessivement bien écrit, je me suis surprise à relire des passages deux fois. C'est étonnamment vivant alors qu'il nous parle des derniers mois d'un homme, le père de sa femme.
Il rend hommage à ce jeune homme emporté par la maladie à 37 ans sans exagérer sur ses qualités ni sur ses défauts.
J'ai trouvé qu'il faisait là un beau cadeau à sa femme Anne-Marie.
En tant que personne de plus de soixante ans, j'ai connu la voix de Gérard Philipe me racontant "Le petit Prince" dans une version simplifiée. C'était merveilleux. Quelle ne fut pas ma déception à mon entrée au collège, à 12 ans, quand j'ai dû lire le livre en version intégrale. Je me suis réconciliée
avec le récit depuis.
Et puis, j'avais regardé "Fanfan la Tulipe" avec mes parents.
En vacances chaque année à Grimaud, mes parents et leurs amis avaient absolument voulu aller sur sa tombe à Ramatuelle. J'étais toute petite et j'avais été très impressionnée. J'avais l'impression qu'on voyait sous les pierres à peines posées. J'avais 4 ans en été 1960. J'ai gardé l'image flash de cette visite et ressenti l'émotion de mes parents qui avaient eu l'occasion de le voir jouer dans la pièce "Les caprices de Marianne" d'Alfred de Musset.
Un très beau témoignage de Jérôme Garcin que j'ai tardé à lire alors qu'il était dans ma PAL depuis sa sortie.
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Repartons à la fin des années 50, dans la vie de Gérard Philippe, grand comédien français, très aimé du public, des médias et de sa famille. Il se fait opérer du foie, mais son mal est plus grand que prévu. Il ne lui reste plus quelques jours à vivre. Son épouse et ses amis décident de lui cacher sa maladie pour lui permettre de continuer à garder son moral et se projeter dans l'avenir.
Jérôme Garcin a ce talent de pudeur pour permettre de faire revivre la dernière semaine d'un des plus grand comédien de l'époque. A travers de petites touches de sentiments, une bonne dose de respect et un oeil aguerri sur une situation irréversible, le dernier hiver du Cid est un roman bouleversant. Une écriture envoutante, un récit tenu à la laisse où chaque mot est à sa place, l'auteur démontre un savoir-faire et un savoir-vivre d'une humanité sans pareille. On se plonge avec délectation dans cette vie de scène, de caméras, entre détails de l'industrie du spectacle de l'époque, et moments familiaux amoureux. A chaque référence, on ne souhaite qu'une chose : (re)découvrir Gérard Philippe, son jeu d'acteur et son talent pour aider les moins lotis. Une très belle oeuvre courte qui sa savoure d'autant plus.
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« Vous aviez raison, il se pourrait que je joue prochainement « le Menteur et Hamlet ». C'était le 23 octobre 1959, c'était il y a un mois. Il n'aura pas pu dire : « Etre ou ne pas être, telle est la question » parce qu'il n'est plus. »

C'est avec beaucoup d'émotions que je viens de refermer le livre de Jérôme Garcin. Je regarde la photo de Gérard Philipe qui ne quitte pas mon bureau depuis très longtemps. Ce n'est pas sa meilleure photo ! du plus loin que je me souvienne, il a toujours été mon idole, je ne saurais dire pourquoi. D'aucuns vous diront qu'il a créé sa propre légende en mourant en pleine gloire si jeune. Mais j'étais beaucoup trop petite pour me rappeler.

Peut-on envisager qu'une petite fille puisse se sentir envoûtée par la voix harmonieuse de l'aviateur du Petit Prince, cette voix à nulle autre pareille, aux intonations masculines mais toute de douceur, fluide, à la plasticité toute féminine, faisant surgir de l'imagination de cette petite fille, des images de désert et d'un aviateur penché sous sa carlingue auprès duquel apparaît ce magnifique petit bonhomme. Sont-ce mes professeurs de français qui m'ont inoculé ce virus au temps où nous apprenions les répliques de nos classiques afin de pouvoir, lors du gala de fin d'année scolaire, monter sur les planches et déclamer ces citations, donner la réplique à nos camarades, tout ceci dans un état d'excitation que seules des élèves pouvaient ressentir à l'idée de jouer devant les parents. Peut-être aussi, les couvertures de nos classiques Larousse où Gérard, magnifique dans son costume du Cid, captait notre attention, lui dont la seule pensée nous éclairait lors de nos répétitions. (Il y avait aussi Thierry la fronde qui animait nos cours de récréation:-))) !

Ce grand adolescent, au visage d'ange noble et romantique, nous a quittés le 25 novembre 1959. Il a rejoint les étoiles à quelques jours de ses 37 ans. C'est dans le costume du Cid qu'avait dessiné le peintre Léon Gishia, dans un pourpoint bleu horizon recouvert d'une cuirasse matelassée bleu nuit à passements dorés et sa cape rouge vermillon que ces cuissardes l'ont transporté pour son ultime représentation, lui l'incarnation du talent et de la grâce.

Il fut avec Jean Vilar, les grandes heures du TNP. Quel dommage que Jean Vilar n'ai jamais souhaité que soient filmées les pièces de théâtre interprétées au festival d'Avignon ! Ce sont ces grands instants où Gérard Philipe donnait toute sa force, toute son incandescente beauté, toute sa capacité à incarner aussi bien la Tragédie que la Récréation. Il fut, pour moi, le Cid, Lorenzaccio, Ruy Blas, Fanfan La Tulipe, et le film qui m'a marquée, Les Orgueilleux avec Michèle Morgan.

Revenons au livre écrit par son gendre posthume si je peux m'exprimer ainsi.

L'auteur est l'époux d'Anne-Marie Philipe, fille de Gérard Philipe et de son épouse Anne. Anne-Marie avait cinq ans au décès de son père, et son frère Olivier, trois ans. Il semble évident que le mythe a rejailli sur l'ensemble de la famille. Difficile pour l'auteur de ne pas rendre hommage à ce sublime acteur.

Jérôme Garcin, relate, avec pudeur, sans rajouter du mélo au drame, à la manière d'un journal intime, les trois derniers mois de la tragédie qui va se jouer sous nos yeux, des vacances aoutiennes de Ramatuelle jusqu'à ce fatidique 25 novembre 1959.

A la suite de douleurs abdominales violentes, Gérard consulte le professeur François Gaudart d'Allaines. le diagnostic envisage un abcès amibien du foie. Une intervention est envisagée à la clinique Violet. Seulement voilà, le couperet tombe, on ouvre et on referme, cancer du foie foudroyant. L'équipe de médecins demande à voir Anne toute seule et c'est toute seule qu'Anne affrontera la nouvelle. Anéantie, elle cachera la vérité à Gérard.

Jérôme Garcin sait parfaitement décrire les émotions, les sentiments auxquels Anne doit faire face. Son désespoir, sa colère, son chagrin, devant la cruauté du destin, et toutes les pensées qui viennent l'assaillir. Ses deux jeunes enfants ne grandiront pas dans les yeux de leur père. le mythe est avant tout un père et un fils ! Et l'on assiste, les larmes aux yeux, mois après mois, semaine après semaine, au courage d'Anne qui fait face à son mensonge, à sa conscience mais Anne reste avant tout le pilier de son artiste de mari. Gérard ainsi protégé peut se consacrer aux projets qui le stimulent, aux textes qu'ils se préparent à interpréter comme Edmond Dantès ou Hamlet.

L'auteur aborde avec beaucoup d'humanité ces derniers jours. Il évoque aussi l'artiste engagé et l'homme qui malgré le succès, est toujours resté d'une grande humilité.

J'ai eu aussi plaisir à lire tous les passages évoqués sur les grandes tragédies grecques, que de souvenirs ! J'imagine que pour nombre de jeunes lectrices et lecteurs, l'histoire de Gérard Philipe est terriblement abstraite et fait partie de la préhistoire !!! Mais pour moi, ce fut un afflux de souvenirs, de tendresse, de poésie et de larmes !

C'est une plume extrêmement sensible que celle de Jérôme Garcin et j'ai bien l'intention de m'intéresser à sa bibliographie.

Je termine par la tirade de Perdican dans « On ne badine pas avec l'amourDe Musset » et je vais vous faire une confidence, j'ai toujours souhaité que cette tirade soit mon épitaphe :

« J'ai souffert souvent, je me suis trompé quelquefois, mais j'ai aimé. C'est moi qui ai vécu et non pas un être factice créé par mon orgueil et mon ennui ».


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