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Zone géographique en grande partie semi-aride, située dans les états des régions centre et nord-est du Brésil, le «sertão» non seulement se déploie concrètement sur une superficie de près d'un million de kilomètres carrés, mais constitue en même temps un vaste territoire culturel et symbolique dans l'imaginaire collectif brésilien, à l'image du légendaire «far-west» pour les nord-américains, ou de l'immense et immémorial «outback» pour les australiens.
Dans DIADORIM (GRANDE SERTÃO: VEREDAS), les décors naturels correspondent plus particulièrement au sertão dit des «Gerais» (prononcer «Geraïs ») - «terres-générales» de l'état du Minas s'étendant également au-delà des frontières, dans les états voisins de Bahia et Goiás, et, pour l'essentiel, bordant la vallée du grand fleuve São Francisco. Arrière-pays dominé par des «fazendas» où l'on pratique essentiellement l'élevage, très peu urbanisé, zone de non-droit par excellence, les bandes armées de «jagunços» y font plus souvent la loi. Brigands à la solde des grands propriétaires terriens, d'hommes influents de tous bords (voire même par moments associés et financés par des politiciens véreux afin de combattre des factions rivales, sous couvert de «lutte contre le banditisme»), mais pouvant aussi évoluer libres de toute attache, en groupes nomades constitués de plusieurs dizaines d'individus, ceux-ci subsistent notamment grâce à l'hospitalité et à la générosité des «fazendeiros» et d'autres autochtones, ou bien, à défaut, de racket - sorte de «pizzo», argent contre protection -, voire au besoin, de pillage tout court. Commandées par des leaders vénérés et tout-puissants, garants d'un code d'honneur strict à faire respecter, les bandes de jagunços sillonnent interminablement, à pied et à cheval, les «chapadas» - plateaux gréseux limités par des escarpements prononcés –, faisant halte la plupart du temps dans les « veredas » - vallées de terre argileuse où l'eau et une végétation accueillante, constituée essentiellement de «buritis», le grand palmier-bâche brésilien, sont toujours présentes. Voilà en gros pour l'univers dépeint par Guimarães Rosa, situé ici au tournant du vingtième siècle.
Il s'agit là, incontestablement, du chef d'oeuvre majeur de la littérature brésilienne du XXème siècle. GRANDE SERTÃO : VEREDAS (dont le sous-titre original «O diabo na rua, no meio do redemoinho» - «Le diable dans la rue au milieu du tourbillon» - a été supprimé dans son édition française) est, au même titre que l'Ulysse de James Joyce, un roman labyrinthique aux sens multiples, inépuisables: une cathédrale brute plantée en plein milieu du «sertão» brésilien.
Sa publication, en 1956, a provoqué un véritable séisme littéraire dans le pays: l'oeuvre a été dans un premier temps très mal-accueillie, majoritairement incomprise. Un article paru dans une revue littéraire éditée à Rio de Janeiro («Leitura»), co-signé par de nombreux poètes et romanciers renommés de cette époque, s'était vu titré : «Ecrivains qui n'arrivent pas à lire Grande Sertão : Veredas» (!). L'oeuvre non seulement outrepassait complètement, mais pulvérisait littéralement tous les canons du roman régionaliste, genre toujours très en vogue dans la littérature brésilienne à ce moment, inauguré par le classique «Os Sertões», de Euclides da Cunha, publié en 1902. Extrapolant radicalement les codes en vigueur du genre, la culture « sertaneja», orale, rustre et populaire permettait à l'auteur de procéder à des innovations langagières et à un traitement littéraire dignes des expérimentations les plus avant-gardistes du XXème siècle, suscitant d'emblée, comme pour ses prédécesseurs les plus célèbres en la matière, le rejet et l'incompréhension de ses contemporains.

Livre-monde échappant à toute norme extérieure à son univers propre, GRANDE SERTÃO : VEREDAS forge une syntaxe, un lexique et une grammaire qui lui sont propres, rebelles à toute codification purement rationnelle ou strictement consensuelle. Un chercheur-linguiste ayant travaillé sur le texte du roman aurait déniché non moins de 8 000 mots qui ne figureraient dans aucun dictionnaire! Puisant à la fois dans les racines de la langue portugaise et dans la richesse léguée par la diffusion historique de la lusophonie aux quatre coins du monde, mais surtout et avant tout, directement aux sources vivantes de la langue orale régionale et incarnée du sertão des Gerais, la langue forgée par GRANDE SERTÃO : VEREDAS s'ouvre à des multiples significations : langue-fleuve débordant de morphèmes-poissons (rien que pour le mot «démon», 56 synonymes auraient été dénombrés !!), de références à la nature et à la flore locales, de vocables choisis pour leurs résonnances purement sensibles ou émotionnelles, de phrases segmentées par une ponctuation inaccoutumée, plutôt intuitive que rationnelle, se ramifiant en constructions grammaticales sans fil prédéfini, dans une quête quichottesque assumée de pouvoir réussir à métamorphoser le langage écrit en expérience réelle.
Pour l'avoir lu en version originale, je comprends maintenant pourquoi GRANDE SERTÃO : VEREDAS est classé parmi ces livres considérés en principe intraduisibles. (Déjà en tant que lecteur parfaitement lusophone l'ayant lu en sa version originale, j'ai eu souvent le sentiment de ne pas réussir à «traduire» mentalement ce que j'étais en train de lire, sans en «réduire» considérablement le sens, navigant sans cesse entre une lecture «à la narration» et une lecture «en bloc» et «à la sensation». Par ailleurs, jamais auparavant je n'ai ressenti, en lisant un roman, une sensation aussi aiguë de cette désespérante platitude recherchée sans cesse par notre cerveau..!). Objet de multiples traductions en différentes langues étrangères (dont deux versions, à ce jour, en langue française), ainsi que de nombreuses thèses universitaires, études, articles de spécialistes, linguistes, critiques littéraires et traducteurs, ce roman hors norme a souvent été désigné - entre autres par l'écrivain Mario Vargas Llosa, auteur de la préface à l'édition française - comme «une des oeuvres formellement les plus abouties du siècle».
Attention néanmoins, lecteurs potentiels de DIADORIM, il ne faut surtout pas s'attendre pour autant à une lecture inaccessible au commun des mortels, hermétique, absconse ou destinée à une poignée de happy few, critiques littéraires, universitaires prétentieux ou intellectuels de service…Pour faire court, GRANDE SERTÃO : VEREDAS n'est pas, par exemple, l'ULYSSE de Joyce. (Ô, qu'il n'est pas facile, n'est-ce pas, de ne pas catégoriser, ne pas hiérarchiser ou caricaturier les oeuvres et les êtres..! Bref.)
DIADORIM donc, loin de là, peut tout simplement être lu comme un récit d'aventures et/ou comme un roman d'amour. Riobaldo, personnage-narrateur du livre remémore et narre son passé de jagunço à un interlocuteur-lecteur, dont il imagine et anticipe par moments les réactions à ce qu'il raconte : ses pérégrinations à travers le sertão des Gerais, son amour sublimé et transgressif pour Diadorim, ses moments de gloire et de détresse, ses joies et ses faiblesses, ses combats pour la justice telle qu'il la conçoit, ses rencontres avec le diable, «dans la rue au milieu du tourbillon»...
Constitué à partir de cette matière première violente - dans le sens étymologique du mot : force incontrôlable- de vie et de mort, présente partout dans le monde, cette histoire maintient le lecteur constamment au plus «près du coeur sauvage» (Joyce) qui fait pulser la nature et la condition humaine ; tout le roman étant traversé - selon une formule consacrée par Joseph Conrad , dans «Au coeur des ténèbres»- par un souffle puissant, «earth et unearthly», à la fois terrien et surnaturel, cru et lyrique, épique et dramatique, chevaleresque et faustien, particulier et universel.
Oui ! «Le sertão est partout». «Le sertão est à l'intérieur de nous-même.»


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Diadorim, ceux qui l'ont lu ne peuvent l'oublier. Quelle claque ! Ami lecteur, quelle claque ! Je l'ai lu dans une version épuisée, la bonne nouvelle c'est qu'il a été réédité en grand format chez Albin Michel et qu'en conséquence, tu n'as aucune excuse. Aucune. Tu vas donc me faire le plaisir d'aller chez ton libraire préféré – qui s'il est bon aura évidemment ce livre en stock – et de l'acheter, fissa ! Grande Sertão : Veredas (son titre original) est souvent considéré, avec cette emphase stupide des quatrièmes de couverture, comme "le roman de la littérature brésilienne". Je laisse à d'autres le soin d'établir de tels classements mais je peux ici affirmer sans mentir que Diadorim est, tout à la fois, un grand roman d'aventures (tendance western), un non moins grand roman d'amour et un roman d'une qualité formelle absolument hallucinante !
Lien : http://lesyeuxrougisdefatigu..
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L'excellente préface de Mario Vargas Llosa aurait pu, une fois pour toutes, en si peu de pages pourtant, enfermer Diadorim dans la catégorie de ces romans qui, bien plus que des chefs-d'oeuvre classiques dont les vertus épurées sont aussi rassurantes que souvent lassantes, nous inquiètent et nous séduisent par leur caractère monstrueux. L'Anneau et le Livre de Robert Browning, Pierre ou les ambiguïtés d'Hermann Melville, Héros et tombes et L'Ange des ténèbres d'Ernesto Sábato, Autodafé d'Elias Canetti, le Tentateur d'Hermann Broch, Les Reconnaissances de William Gaddis, Sous le volcan de Malcolm Lowry ou encore 2666 de Roberto Bolaño, voici quelques exemples de romans monstrueux dont le centre de gravité paraît soustrait à nos regards, hors de portée de toute exégèse qui tenterait d'enserrer dans sa trame, fût-elle du plus fin maillage, l'oeuvre détricotée sans relâche et, comme la ville de Carcassonne pour Lord Dunsany et William Faulkner, toujours à l'horizon, sans qu'il nous soit possible de l'atteindre.
Lien : http://stalker.hautetfort.co..
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Lorsque je furète en bouquinerie, je ne fais pas que chercher les romans se trouvant sur ma wish, je suis attentive aux autres et lorsque je tombe sur des auteurs dont le nom semble être hispanique, je lis le 4ᵉ afin de voir s'il pourrait participer au Mois Espagnol et Sud-Américain. Bingo avec celui-ci !

Un roman culte, qu'ils disaient… L'un des plus grands livres qu'on ait jamais écrits. Diantre, fallait plus en jeter, j'étais déjà conquise à l'avance !

Mon édition 10/18 fait 630 pages et le style de l'auteur m'a déconcerté dès le départ : pas de chapitrage, des dialogues peu nombreux et inclus dans le texte. Heureusement qu'il y avait des paragraphes, sinon, j'aurais sauté des lignes sans même m'en rendre compte.

Je ne peux pas dire que j'ai détesté ce roman, ni que l'écriture était merdique. Que du contraire, le style est riche, très riche, trop riche, peut-être, car on passe d'une langue vulgaire à une poétique (ou l'inverse), c'est bourré de néologismes, ardu, obscur et on a, de temps en temps, l'impression que notre narrateur ne parle pas bien le Brésil.

Anybref, le narrateur est un grand bavard et qu'il a tendance à raconter trop, dans un récit monolithique, ce qui m'a lassé, avant que je n'arrive à la moitié du récit.

De quoi ça cause, ce roman ? C'est l'histoire de Riobaldo et de sa bande armée, des jagunços, qui sont des brigands à la solde des grands propriétaires terriens (les fazendeiros), des gardes du corps, généralement embauchés par les propriétaires de plantations et les « colonels » dans les arrière-pays du Brésil.

Dans cette partie de l'arrière-pays (le sertão), une région semi-aride, on pratique l'élevage et ce sont des zones de non-droit où tous les sales coups sont permis.

Ces brigands, sont souvent associés à des politiciens véreux (pléonasme), ou libres de toutes attaches. Ils pratiquent le racket, bref, ils sont un peu des mafiosi qui vous demandent de les payer pour assurer votre protection.

Notre Riobaldo, ce guérillero au service de riches propriétaires terriens, bossant aussi parfois pour des politiciens, des hommes de guerre, vivant comme un hors-la-loi, nous raconte donc tout et son histoire est un mélange d'histoire de guerre, d'aventures, d'amour, de western. C'est aussi un récit halluciné, comme sous emprise de drogues.

Ce roman n'est pas facile à lire, il est touffu, part dans tous les sens, est inclassable, si ce n'est avec les romans qui divisent les lecteurs : ceux qui ont réussi à le lire et ceux qui se sont paumés dedans. Je me suis paumée, même si je me suis accrochée et finalement, j'ai sauté des paragraphes après avoir peiné dans la première moitié.

Bon, ce texte n'était pas pour moi, trop ardu, trop dense, trop lyrique… Les aventures de Riobaldo et de ses guérilleros étaient semées d'embûches, comme le fut ma lecture, chaotique, de ce pavé qui est devenu indigeste.

Si vous êtes tenté de vous attaquer à ce monument de la littérature, allez-y lentement, picorer un peu tous les jours, faites durer le plaisir, sinon, la nausée arrivera vite et vous serez incapable de terminer ce roman (pourtant, la fin est belle et recèle une belle surprise).

Bon, j'ai tenté le coup, j'ai raté… Pas grave !

Lien : https://thecanniballecteur.w..
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Diadorim est le livre du sertão, region semi-aride du nordeste brésilien, contrée inhospitalière sinon proprement hostile à l'homme disgracié, fourvoyé en cette terre dépeuplée et quasiment inculte, trouvant sa subsistance dans l'élevage de larges troupeaux de bovidés. Le roman prend la forme unique d'une narration hallucinée d'un personnage, Riobaldo, ayant vécu la vie aventureuse des jagunços, hommes de main, guérilleros, au service de riches propriétaires terriens, les fazendeiros, ou à la solde d'hommes de guerre ou de politiciens, voire de francs hors-la-loi. le récit est d'une seule traite, monolithique, titanesque. La langue se fait tour à tour poétique, vulgaire, riche en néologisme; l'expression du narrateur est parfois difficultueuse presque incorrecte. L'action se déroule en marches et contremarches, cavalcades endiablées, coups de main meurtriers, pillages, crimes; parfois le temps est suspendu en de larges descriptions de la nature particulière du terrain traversé, de sa faune et de sa flore; et toujours rôde la présence inquiétante, pour ces croyants valeureux et superstitieux, du malin, du tentateur. Parallèlement à cette arrière fond d'action et d'exaction, se développe l'histoire de l'attraction ambiguë et énigmatique du narrateur pour son compagnon de route, Diadorim. Cet opus est considéré comme le chef-d'oeuvre incontesté des lettres brésiliennes du XXème siècle; le texte riche, foisonnant, parfois aride, souvent obscur, est de ceux qui ne livre pas toutes ses clés et son suc à la première lecture, même des plus attentives. Lu comme un simple roman d'aventure, il risque de lasser par son ampleur et la relative monotonie de l'action. L'emploi audacieux et novateur de la langue, l'interrogation existentielle de la destinée de l'homme, la dimension initiatique, philosophique, allégorique du texte, sont d'autres pistes à étudier pour comprendre et saisir la richesse d'un texte qui fit date. Un livre qui ne se laisse néanmoins et définitivement pas aisément lire.
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Tout simplement fantastique. Je suis resté subjugué par cette merveille ! Que ce soit la puissance incroyable qui se dégage de l'écriture ; la qualité de la narration, de l'intrigue ou des situations évoquées ; les filtres de lectures interchangeables : démonologie, romance, aventure, et autres ; la capacité à nous tenir en haleine.


Tout dans cet ouvrage concourt à en faire une réussite stupéfiante. Je me suis retrouvé littéralement happé par l'univers créé par João Guimarães Rosa et je ne peux que lui rendre un modeste hommage pour cette oeuvre au travers de ce petit éloge. Bravo.
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Ma sixième lecture en quatre longues années m'a fait prendre conscience que ma "critique" était bien fade pour l'unique représentant et prosélyte, à ma connaissance, de la guilde roséenne.

Sixième lecture mais toujours ce plaisir immuable à chaque page, un peu comme si chaque matin, ma dulcinée me regardait avec le regard du premier jour.
Ce sentiment est indescriptible, ce que ce roman m'inspire est inénarrable.

Livre inclassable.
C'est la raison pour laquelle on ne peut que l'aimer ou rester totalement indifférent à son pouvoir. Ce que je peux aisément concevoir puisqu'il m'a fallu plusieurs essais avant d'être happé par l'univers roséen.

Une fois aspiré dans le sertão du Minas, cher à l'auteur, on ne peut en sortir. Car c'est bien cela qu'est "Diadorim", une traversée du sertão avec toutes ces embûches, les belles et mauvaises rencontres, ces beaux et moins beaux paysages.

Comme pour une randonnée, il faut prendre son temps pour bien apprécier ce qu'on l'a sous les yeux. Riobaldo le dit si bien : "Ce que mes yeux ne voient pas aujourd'hui, il se peut que je l'endure le surlendemain". Ce n'est pas vraiment ma sixième lecture car je ne l'ai pas encore achevé. J'ai décidé de prendre mon temps pour bien appréhender chaque trésor que recèle ce long monologue. Je le picore comme un religieux picore son Livre Saint ou un poète un recueil de poésie. Je me surprends à méditer pendant de longues heures certains passages que je n'avais pas vu lors de mes précédentes lectures... "Diadorim" n'est pas un livre qui se lit d'une traite finalement.

Certainement un grand passionné de mythologie grecque et de Grèce Antique, que ce soit pour ses sources d'inspiration pour la plupart des scènes qui parsèment cette oeuvre que pour les noms de la plupart de ses personnages, Guimarães Rosa nous entraîne dans une odyssée mineira. Riobaldo étant un Ulysse Brésilien qui vivra bien malgré lui de belles aventures et qui sera obsédé par une grande question : peut-on vendre son âme à... rien ?

Comme le dit Vargas Llosa dans sa préface, chacun appréhende ce livre et l'interprète à sa façon. "Diadorim" est pour moi une grande aventure humaine, comme le sont l'Iliade et l'Odyssée, dont les fresques épiques touchent notre âme immortelle d'enfant rêveur. Fresques constellées de passages d'une profondeur et d'une beauté infinies.

À mon sens, il n'est pas question d'aimer ou de détester "Diadorim", il est juste question de lui laisser une chance de nous toucher au plus profond de notre conscience.

D'ailleurs, j'ai changé mon mantra. Ce n'est plus "Lisez Diadorim" mais "Tentez Diadorim".

Roséennement.
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Le Sertao est un territoire d'une rudesse sans nom. Il y fait chaud, et humide, et la terre n'appartient qu'aux grands propriétaires terriens qui, pour se défendre, engagent des mercenaires redoutables, les jagunços, qui se louent au plus offrant. La nature, comme dans toute la littérature sud-américaine, y occupe une place à part entière, devenant un personnage dans lequel les hommes se fondent, qu'ils bénissent autant qu'ils la damnent.
Long monologue, sans chapitres et presque sans dialogues, Diadorim est un effort de lecture, une longue traversée de mots et de sensations qui laisse sur la peau et dans l'âme une étrange torpeur. le lecteur y suit le parcours de Riobaldo, devenu un fazendeiro riche mais vieux. Il narre ses années de jeunesse où il fut un jagunço, où il poursuivit avec les siens le vil Hermogenes, assassin du charismatique Joca Ramiro. Au-delà de cette histoire d'hommes, où l'honneur et la violence sont des fondements essentiels de la vie en communauté, il y a la relation étrange qu'entretient Riobaldo avec Reinaldo, surnommé Diadorim (qui donne son nom au roman en français, tandis qu'en portugais, il s'intitule Grande Veredas : Sertao, célébrant davantage la nature que l'homme), relation qui oscille entre l'amitié et l'amour, mais ce sentiment est refoulé par Riobaldo. Il y a, enfin, une aura spirituelle qui entoure le récit, entretenue par le père Quelémém et le diable en personne, que Riobaldo attend toute une nuit à la croisée des chemins.
Diadorim est d'une puissance peu commune dans la littérature mondiale. Sa densité et sa richesse lexicale en font une épreuve pour le lecteur, qui en ressortira pourtant grandi. Un roman-monstre qui accable autant qu'il réjouit, et qui donne à voir de ce Brésil naissant du début du XXème siècle, à travers les fleuves puissants et des personnages aussi nombreux que différents.
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Livre monologue de 900 pages que j'ai lu très lentement en 1 mois, chose inhabituelle pour moi.

Suivant le lecteur, on y trouvera un roman d'aventure dans le Brésil du début du 20ème siècle (dans l'arrière pays sauvage ou sertao), un roman initiatique avec aussi une allégorie religieuse du mal (le démon), ou encore un labyrinthe inextricable dans ce langage parlé mêlant de nombreux mots empruntés à différentes langues (l'auteur était polyglotte) , avec de nombreux mots locaux pour désigner notamment la faune et la flore.

Ce roman est encore un roman d'amours homosexuelles platoniques, avec un petit tour de passe passe dans le final que je ne spoilerai pas.

Pour être honnête, je ne sais pas pourquoi cette lecture a été aussi lente pour moi. Peut être le peu d'action et le mode d'écriture m'ont il poussé à m'endormir inexorablement après une trentaine de pages lues dans mon lit le soir... Vers la moitié du livre, je me suis même posé la question de savoir si j'allais poursuivre ma lecture ou pas, faisant du sur place avec Riobaldo. Mais au final, je suis extrêmement heureux d'avoir terminé ce livre qui m'a marqué énormément.

Une critique lue par ailleurs (ZeBebelo ici) résume très bien ce livre : "car c'est bien cela qu'est Diadorim, une traversée du sertão avec toutes ces embûches, les belles et mauvaises rencontres, ces beaux et moins beaux paysages." Ou encore : "ne lisez pas Diadorim... tentez Diadorim!".

On peut s'arrêter à chaque phrase tant la poésie transparaît dans la prose. Plus prosaïquement, il m'a fallu relire plusieurs passages plusieurs fois pour m'y retrouver dans cette narration parfois discontinue. Et souvent, même en relisant, je n'ai pas toujours tout bien compris!

Bref, je n'oublierai pas Diadorim et je ne peux que vous encourager à tenter le voyage...








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Lire Diadorim c'est commencer un récit sans fin, s'embarquer dans une grande odyssée dans le sertão brésilien, c'est se laisser emporter par le fleuve puissant du monologue ininterrompu de Riobaldo, Tatarana, jagunço malgré lui en quête d'amour, de justice et de paix. Riobaldo, qui tel Ulysse n'aspire qu'à la quiétude d'un foyer et l'amour d'une femme, mène sa barque ballottée au gré des tentations et des batailles dans l'immensité du sertão.Un roman fleuve à l'ambiance toute particulière, à découvrir absolument.
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