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EAN : 9782379412240
220 pages
L'Arbre vengeur (22/08/2023)
3.72/5   9 notes
Résumé :
Sous le verre transparent d'un vaste pyramide, sous les hauts plafonds d'un palais transformé en musée, s'agite, parfois lentement, tout un peuple de déclassés qui font tourner la mécanique huilée du tourisme de masse, dans un silence qui n'est pas toujours résigné.
Le héros qui raconte son aventure fait l'expérience de la manière dont l'ennui absolu peut être transmuté en révolte, de la façon dont, en s'accrochant aux livres et parfois aux autres, on peut s... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Ici tout sonne vrai !
Un ticket d'entrée pour une visite unique au musée du Louvre.
Vous ne verrez plus jamais la pyramide de verre et de métal comme avant.
Brillant, judicieusement éclairant, sociologique, « La méfiance du gibier » est une délicieuse satire très juste sur le monde du travail.
La poussière qui se cache sous le tapis. La réalité mise à nue, ce livre devient la perle rare du Louvre. le tableau incontournable.
Les sciences humaines en apogée, le regard d'aigle de Stéphane Guyon qui observe, ne lâche rien. Nous sommes dans les arcades où fourmillent les visiteurs, les employés.
Dans le versant nord, le décorum d'un Louvre où d'aucuns ont un poste bien défini.
Le narrateur prend place. le contrat de travail dûment signé, gardien d'un temple, l'idiosyncrasie va oeuvrer.
Chacune des salles n'aura plus aucun secret pour lui. Il devient le collecteur d'un corpus finement sociétal. Il gravite dans Le Louvre, d'une salle à une autre. Les heures affûtées, il tire son épingle du jeu. Il va faire de son ennui, l'idéologie d'un monde à redéfinir.
Il va rassembler l'épars. Celui des travailleurs silencieux, les invisibles et la pyramide devient une cage dorée.
Les petites mains comme des soupirs. L'uniforme comme une cache pour les touristes. Eux les veilleurs et les vulnérables, ils sont soudés dans l'adversité d'une micro société en ébullition.
« Et puis il y a ce détail qui est un privilège absolu : eux ne portent pas l'uniforme, ils sont en civils, on dirait des étudiants, même les plus vieux. Leurs tenues n'autorisent aucun doute sur la nature de ce qui, bien plus que nous différencier, nous oppose. On ne joue pas dans la même catégorie. Nous sommes ternes, statiques. Eux flottent d'un point à un autre du musée, mains dans les poches, bonne humeur aux lèvres. »
Dans cette galère où la hiérarchie est loi. La camaraderie, les diktats d'une culture à étages.
« Je me familiarise avec les rudiments du métier. J'indique les toilettes. Ce matin, j'apprends que les Japonais, qui n'entendent rien à « La Joconde », ne jurent que par « Mona Lisa » .
L'humour au garde à vous, l'intuition comme une toile de maître. le narrateur est un jeune homme vif, intelligent. Comme s'il profitait de ce travail pour faire une thèse sur les disparités sociales. Un lieu où il puise les travers de l'âme humaine et les hypocrisies. Il est stoïque et malin. Il devine un lieu où il s'affronte et cherche ses preuves.
« Je fais ce qu'il faut pour être bien vu. J'aime qu'on se dise : « celui-là au moins il ne fera pas d'histoires, il restera debout, n'ira pas s'asseoir dès qu'on aura le dos tourné ». Je ne compte pas mes efforts. J'aime être selon le goût des autres ».
Il lit des pages arrachées de ses livres, qu'il cache dans les poches de sa veste. Également dans les toilettes et s'arrange avec les heures tristes et mélancoliques, pour en faire une valeur sûre et spéculative.
Il veut étudier à Jussieu, les lettres modernes. On aime l'attitude, l'attrait et cette lecture cachottière, volée à la face des chefs.
Ce livre finement politique est l'envers du décor d'un lieu prodigieux où la culture est souveraine. Il pointe du doigt là où ça fait mal. Ce microcosme est réglé comme une horloge. Mais apprendre à se méfier, comme le disait Prosper Mérimée. « La méfiance du gibier » le regard perçant, lorsque les déclassés s'éveillent et prennent conscience des disparités. La Pyramide du Louvre dans son triptyque le plus lucide, le plus actuel, tiré au cordeau. Construite d'une main de maître, ici, elle prend sens. Elle en devient supérieure. Ce sont les Invisibles, le plus beau tableau.
La pyramide d'une littérature engagée, éminente et clairvoyante.
À noter une couverture illustrée par David Prudhomme qui en dit long sur ce fabuleux roman. Publié par les majeures Éditions de L'Arbre vengeur.


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Un classique hante les rentrées littéraires : celui de dénoncer le recentrage sur une vingtaine de titres au détriment des autres malheureux… tout en ne traitant, en définitive, que des vingt têtes de peloton - comme tout le monde. Alors pour échapper aux sempiternels bouchons des autoroutes créés par le péages (les prix littéraires), prenons donc une sympathique route de campagne, histoire de lire en prenant notre temps, et là, surprise, le lecteur de tomber sur ce nouveau titre des éditions L'Arbre Vengeur : La méfiance du gibier, de Stéphane Guyon. La trame ? le narrateur prend un poste de vigile (plus communément : agent de sécurité) et déclare d'entrée : « J'aime être selon le goût des autres. » Mais quel est ce « goût » lorsqu'il n'y a pas de culture du goût autour de vous alors même que vous vous trouvez dans un musée ?!? Proche de l'effondrement moral, son destin semblant écrit, il s'abandonne à son quotidien mêlé d'ennui, d'interdit, de sorties grossières de ses collègues (l'agent de sécurité est principalement un homme et il se lâche dès qu'il est en meute). Mais voilà qu'à l'instar de Galatée, il trouve son Pygmalion en la personne de l'énigmatique J.-P., qui va s'occuper de sa formation esthétique et, ainsi, réécrire son destin. Notre narrateur, tout en observant le ballet quotidien de cette profession sinon mal connue, souvent ignorée, se met à lire La société du spectacle de Debord, La nuit remue de Michaux, s'inscrit en Lettres, sort de sa torpeur, s'éprend de jazz (Tijuana Moods de Charles Mingus notamment), découvre l'amour aussi - il s'engage dans la vie. C'est un roman intrigant et malin, ironique parfois, qui sonne juste, une fiction de notre temps qui, selon son métier, est un temps qui s'écoule, se déverse, lentement, comme une baignoire trop pleine. L'ennui, ce monstre contemporain, pourtant porteur d'introspection et de voyage en soi, tient ici la place de personnage. Belle découverte.
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Le narrateur est un aspirant étudiant en lettres, qui a trouvé un poste d'agent de sécurité au Louvre, via une société de prestation. C'est ce quotidien qu'il décrit, les interdits, nombreux, les collègues, avec chacun leur vécu, leurs situation, mais tous précaires. C'est l'ennui, surtout, qui est au coeur du récit, ses conséquences sur le mental du protagoniste, et les multiples subterfuges pour le contrer.
La langue est belle, poétique, les dialogues quasiment inexistants. Il y a beaucoup de grâce dans ce court roman, qui redonne leur dignité aux travailleurs invisibles.
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
« On cause moyen de se tirer d’ici. On échafaude des projets autant qu’on en démonte. L’optimisme irrite. Ce sont les plaisanteries graveleuses qui dominent, fusent au moment du dessert. Après, on remonte le couloir de service jusqu’à la machine à café, où nous sirotons notre jus sur des bancs inconfortables, histoire de préparer le retour à nos postes. »
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