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EAN : 9782818021408
288 pages
P.O.L. (09/10/2014)
3.3/5   10 notes
Résumé :
C’en est trop ! Tout lui revient en cascade : les jeux de l’enfance, la fin du franquisme, la Movida... Quitter Madrid ou finir au caniveau. Mais le passé n’est pas passé, le temps n’est pas mort. Vingt-cinq ans après il doit revenir. Tout est dégradation. Sauve qui peut, sauve qui peut Madrid !
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Drôle, poétique ou poignante, l'auberge espagnole des souvenirs de Kiko Herrero.

Dans ce premier livre d'essence autobiographique écrit en français et publié en 2014 aux éditions POL, Kiko Herrero exhume des souvenirs de sa jeunesse espagnole, une enfance et une adolescence madrilène sous Franco puis son entrée dans l'âge adulte et le monde de la nuit avec tous ses excès, tandis que la société espagnole se transforme après novembre 1975, société corsetée pendant des décennies par la dictature et la religion se lançant à corps perdu dans la fête, la frivolité et le consumérisme.

Composant des variations drôles, heureuses ou tragiques comme les bribes du « Souviens-moi » d'Yves Pagès, une tranche générationnelle qui rappelle « Les années » d'Annie Ernaux, où le moi s'inscrit dans une réalité beaucoup plus vaste, historique, politique et sociale, « ¡ Sauve qui peut Madrid ! » fait se lever une impressionnante galerie de personnages, et tout d'abord le père, ancien capitaine républicain ayant entrepris de retour des camps de concentration franquistes des études de médecine, qui fait de la recherche pour combattre les nuisibles, personnage discret sur lui-même mais conteur extraordinaire.

"Mon père donne un nom à chaque sentier, chaque montagne, chaque arbre. Il raconte des légendes ancestrales teintées de fatalisme et d'absurdité. Il récite des poèmes, invente des chansons. Il a l'art de l'hyperbole et de la disproportion, ses histoires au goût aigre-doux nous plongent dans un sentiment d'incertitude, un sentiment du tragique, celui de l'illusion de la vie."

On croise aussi la mère, coeur du monde dans le grand appartement familial à l'ambiance communautaire et ses cinq enfants, la soeur Sibila dotée d'une imagination singulière et d'une franchise désarmante, une jeune fille au pair française et fantaisiste qui s'émerveille de l'ingéniosité des balais espagnols, une vieille tante traumatisée par sa filiation, une institutrice affublée du nom congruent de Mme Sévère et tant d'autres encore.

L'Espagne de l'enfance de l'auteur, marquée par les traces de la guerre civile espagnole, comme dans le vieil hôpital en ruines de Navacerrada que le narrateur prend le risque d'explorer enfin à dix ans malgré les avertissements des adultes, vit dans l'atmosphère menaçante du totalitarisme franquiste et de ses curés, sous la surveillance étroite des Serenos, veilleurs de quartier devenus les délateurs du régime franquiste.

"« Une heure et demie et tout est serein ! » L'heure est la sérénité de la rue. L'homme horloge, l'homme baromètre, l'homme alarme. Leur présence devrait rassurer, mais au temps de Franco elle devient une menace. C'est un oeil qui voit tout, qui sait tout, qui connaît les horaires et les moeurs de chaque habitant. Il signale tout mouvement suspect, tout événement anormal. Les rues de Madrid sont lugubres et mal éclairées. Après vingt-deux heures, les concierges ferment les portes et les Serenos prennent le relais. C'est un réseau de surveillance simple mais efficace."

Les souvenirs de Kiko Herrero, classés dans un ordre chronologique, débutent par une histoire aux dimensions mythologiques, le transport du cadavre d'une baleine remorqué par des chars à boeufs jusqu'au centre de Madrid : la métamorphose d'un spectacle censément divertissant en une vision d'horreur, comme pour souligner l'absurdité de cette ville bâtie loin de la mer et des fleuves et l'odeur de mort du franquisme.

Une seule ligne est consacrée à la mort de Franco, mais ensuite tout change, et la combinaison de la fête, des excès et du deuil qui frappent le narrateur semblent faire écho à la Movida qui s'empare de l'Espagne, et qui s'accompagne aussi de la triste émergence de la folie de la consommation et de ses nouvelles églises, les grands magasins El Corte Ingles.

L'auberge espagnole des souvenirs de Kiko Herrero est fascinante, elle donne forme et chair à toute une époque de l'histoire de l'Espagne.

Retrouvez cette note de lecture et beaucoup d'autres sur le blog Charybde 27 ici :
https://charybde2.wordpress.com/2018/07/30/note-de-lecture-sauve-qui-peut-madrid-kiko-herrero/
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"Sauve qui peut Madrid !" ( écrit à l'espagnole ...mais je n'arrive pas à trouver un point d'exclamation à l'envers!) débute par une anecdote qui résume bien le livre. Une baleine morte, tirée par des boeufs et des hommes, traverse l'Espagne d'Ouest en Est pour être exposée dans un terrain vague à Madrid. Des gradins sont montés très vite mais la puanteur de la bête fera fuir les spectateurs, l'exposition tournant au désastre. Toute l'histoire récente de l'Espagne est dans ce souvenir d'enfance. Toute l'amertume de l'auteur envers sa ville natale aussi.
Grâce à cette entrée en matière toute métaphorique, le lecteur est tout de suite emporté dans l'enfance de l'auteur. Nous sommes dans les années 60, sous la dictature franquiste et, merveille de cet âge insouciant, malgré la pesanteur de cette société sous chape de plomb, il fut heureux. Père communiste et médecin, mère fantasque, soeurs originales furent la source d'une vie au terreau romanesque indéniable. En tirant le fil des souvenirs, Kiko Herrero ranime une Espagne qui, malgré l'ombre planante de Franco, conservait cet appétit de vivre dans le bruit, l'excès et les traditions bon enfant. Les nombreux interdits d'une éducation ultra stricte ne ternissent pas le tableau, le rendant, avec le recul, savoureux.
Composé de petits chapitres à l'apparence disparate, le livre pourtant ne laisse rien au hasard. Chaque détail, chaque anecdote apporte un élément dans cette fresque qui se révèle au final un magnifique portrait d'une Espagne et d'un Madrid aujourd'hui presque disparus. Bien sûr, l'ode à la serpillière espagnole est toujours d'actualité. Pas certain par contre que la madrilène d'aujourd'hui arbore le jour des rois mages sa plus belle "bata" (robe de chambre) pour déambuler dans le voisinage et boire du champagne. Mais ceci ne sont que de petites anecdotes façon carte postale humoristiques alors qu'au fil des pages en apparaissent d'autres, tout aussi significatives, de celles qui imprègnent durablement les esprits. Une visite sur le lieu de travail du père, chercheur en dératisation, avec ces chiens aux cordes vocales sectionnées et ce gorille en rut au fin fond des caves du laboratoire, est l'unique occasion de parler de ce régime franquiste, avec sa population réduite au silence et le sexe caché, claquemuré, honni. Une excursion interdite dans un sanatorium abandonné préfigure déjà le destin de l'auteur, cet enfermement dans un Madrid de débauche qui a failli le perdre.
Kiko Herrero est né en 1962 et a donc connu cette effervescence qui succéda à la mort de Franco. Il vécut la Movida à l'âge de tous les dangers et ne les évita pas. Drogue, sexe, alcool furent son quotidien. le roman n'en rajoute pas sur ce thème, se contentant, là aussi, de nous offrir de magnifiques chapitres à la symbolique frappante comme cette description d' " El Obelisco", jardin public pour mères et enfants le jour et lieu de drague la nuit, dont le symbole phallique planté en son milieu ne pouvait qu'exacerber les désirs longtemps refoulés des hommes. Dans un élan salutaire, il fuira cette capitale de tous les plaisirs et de toutes les folies pour vivre à Paris.
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L'auteur nous abreuve de petites chroniques de sa vie quotidienne. Des petits éléments de vie qui ressurgissent, qui ont marqué son futur et sa personne. Des personnes composant sa famille au bar du coin en passant par les promenades au Parque del Oeste le dimanche. Un seul leitmotiv : la présentation cadencée de ce Madrid franquiste et post-franquiste.

Lui dont la famille est communiste, lui qui veut se rebeller, se revolter, faire entendre sa voix parmi tous ces cris. de sa plus jeune enfance au collège français de Madrid à sa vie de jeune adulte dépravé par les nuits madrilènes, tout est passé au crible de l'auteur sans concession, sans censure aucune. Un régal !

Des propos brutes et sans tabou, l'évolution de Madrid se révèle sous les yeux d'un petit garçon qui essaie de trouver sa place.

Parfois légérement trop "cru", ce livre reste une intéressante approche pour appréhender la culture et l'histoire espagnol de l'intérieur.
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J'ai été très déçue par ce récit d'anecdotes plus ou moins décousues, cherchant souvent à être cocasses ou à émouvoir. Je n'en ai pas compris l'intérêt. Ce récit demeure pourtant une lecture rapide et assez agréable.
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¡Sauve qui peut Madrid! est le premier roman, paru à l'automne 2014 aux éditions P.O.L, du madrilène exilé à Paris depuis trente ans Kiko Herrero. Ce roman d'autofiction est un voyage dans le passé récent de l'Espagne, des années noires de la dictature à la gueule de bois post-Movida.
35 ans d'histoire espagnole vue à travers le prisme de l'intime.

Lien : https://avislivres.wordpress..
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critiques presse (2)
Liberation
01 décembre 2014
Il n’est pas sûr qu’il publiera d’autres livres et c’est sans importance. Celui-ci est suffisant.
C’est un recueil de souvenirs d’enfance et de jeunesse, réels ou travaillés par l’imaginaire, dans la Madrid franquiste et postfranquiste, dans un village castillan de la Sierra de Guadarrama où l’auteur passait l’été.
Lire la critique sur le site : Liberation
Lexpress
17 novembre 2014
Les souvenirs ont reflué. Drôles, impertinents, audacieux, instructifs, ils s'égrènent ici au fil de saynètes menées tambour battant.
Lire la critique sur le site : Lexpress
Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Mon père donne un nom à chaque sentier, chaque montagne, chaque arbre. Il raconte des légendes ancestrales teintées de fatalisme et d’absurdité. Il récite des poèmes, invente des chansons. Il a l’art de l’hyperbole et de la disproportion, ses histoires au goût aigre-doux nous plongent dans un sentiment d’incertitude, un sentiment du tragique, celui de l’illusion de la vie.
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Videos de Kiko Herrero (7) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Kiko Herrero
"Bienvenue aux éditions P.O.L", un film de Valérie Mréjen. Pour les 40 ans des éditions P.O.L, quelques un(e)s des auteurs et des autrices publié(e)s aux éditions P.O.L écrivent une carte postale et laissent un message aux éditions P.O.L. Avec par ordre d'apparition de la carte postale: Violaine Schwartz, Jean-Paul Hirsch, Lucie Rico, Emmanuel Lascoux, Jacques jouet, Philippe Michard, François Matton, Frédéric Boyer, Catherine Henri, Suzanne Doppelt, Lamia Zadié, Marianne Alphant, Suzanne Duval, Laure Gouraige, Emmanuel Carrère, Jean Rolin, Elisabeth Filhol, Célia Houdart, Nicolas Fargues, Nicolas Bouyssi, Louise Chennevière, Frédérique Berthet, Marie Darrieussecq, Jocelyne Desverchère, Jean Frémon, Kiko Herrero, Julie Wolkenstein, Emmanuelle Bayamack-Tam, Liliane Giraudon, Frédéric Forte, Pierric Bailly, Valère Novarina, Hélène Zimmer, Nicolas Combet, Christian Prigent, Patrice Robin,, Emmanuelle Salasc, Alice Roland, Shane Haddad, Mathieu Bermann, Arthur Dreyfus, legor Gran, Charles Pennequin, Atiq Rahimi, Anne Portugal, Patrick Lapeyre, Caroline Dubois, Ryad Girod, Valérie Mréjen / Dominique Fourcade, Marielle Hubert, Robert Bober, Pierre Patrolin, Olivier Bouillère, Martin Winckler, Jean-Luc Bayard, Anne Parian, Nathalie Azoulai, Julie Douard, Théo Casciani, Paul Fournel, Raymond Bellour, Christine Montalbetti, Francis Tabouret, Ryoko Sekiguchi,
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