Je remercie Babelio et les Éditions
De La Martinière pour la réception de ce polar dans le cadre de la Masse Critique.
A quelques mois de son départ en retraite Hulda Hermannsdóttir, soixante-quatre ans, est convoquée par son patron qui lui a déjà trouvé un jeune remplaçant. Elle s'attendait à tout sauf à se faire quasiment virer du commissariat le jour-même.
Elle décide tout de même de rester le temps que la nouvelle recrue arrive et ne prenne son bureau. Ses affaires en cours ayant été dispatchées entre ses collégues, le patron lui conseille de s'occuper d'une affaire qui n'a jamais été résolue.
Hulda choisit celle d Elena, une jeune demandeuse d'asile russe dont le corps avait été retrouvé dans une crique rocheuse. L'aboutissement de l'enquête avait conclu au suicide mais au fil de ses investigations l'inspectrice de police s'aperçoit que son collègue avait bâclé l'affaire et qu'il s'agit plus probablement d'un meurtre.
Dans "
La dame de Reykjavik " nous retrouvons l'ambiance des polars de la série " Dark Iceland " et les enquêtes de Ari Thór qui ont contribué au succès de
Ragnar Jónasson.
Ici, avec Hulda, nous quittons Siglufjördur " la ville où il ne se passe jamais rien " pour partir à Reykjavik, toujours imprégnés en rêve des paysages sauvages, désolés et grandioses de l'Islande qui semblent avoir été découpés au couteau.
Hulda Hermannsdóttir va évoluer au coeur de ces montagnes imposantes et ses formations volcaniques rocheuses. Son enquête lui laisse deux semaines qui seront tel un sursis avant l'inéluctable retraite, un départ qu'elle redoute plus que tout parce que son métier lui permettait de faire le vide et de ne plus penser aux périodes tragiques de son passé.
Il faut dire que la vie n'a pas épargné Hulda. Son enfance n'a pas été heureuse, elle a vécu un drame dans sa vie privée, et au sein du commissariat les relations avec ses collégues n'ont jamais été au beau fixe. Elle est donc habituée à faire plus ou moins cavalier seul.
Dans sa vie privée elle fréquente un médecin à la retraite rencontré dans un club de randonnée avec qui elle n'a pas dépassé la relation platonique. Hulda ne croit plus en l'amour mais sa peur de vieillir seule étant la plus forte elle envisage de plus en plus un avenir avec Pétur, leurs passions communes les rapprochant.
Ragnar Jónasson a fait de Hulda un personnage complexe et tourmenté. Si elle a l'air forte en apparence cette femme a été blessée, fragilisée par des événements traumatisants de son passé qui reviennent la hanter. Sinon c'est une excellente enquêtrice qu'on peut qualifier de coriace et tenace, autant que l'est Ari Thór dans le cadre de ses investigations.
Malgré ses compétences Hulda commet de grosses erreurs. Son manque de concentration, de discernement, de prudence, et le fait de travailler seule sans rendre compte des avancées de l'enquête à quiconque risquent de lui jouer de très mauvais tours.
On retrouve dans ce livre des thèmes chers à l'auteur, les éternels non-dits, les secrets cachés depuis des années, les relations familiales et sociales compliquées.
Un très bon polar beaucoup plus noir qu'il n'y paraît dégénérant en huis-clos mortifère dérangeant qui provoque un certain malaise chez le lecteur. Bravo à l'auteur qui a su apporter un final inédit, plutôt inattendu mais dans la logique des choses.