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Michel-François Demet (Traducteur)Marie Hermann (Traducteur)
EAN : 9782748903256
217 pages
Agone (09/03/2017)
3.62/5   13 notes
Résumé :
Dans l’Allemagne de 1918, une petite fille écrit à l’empereur qu’il ferait mieux d’abdiquer, force son père à lancer une bombe à eau sur une voisine moralisatrice, tente de transmettre la scarlatine à un soldat pour lui éviter le front... et s’offusque qu’en plus d’être bornés et ennuyeux, les petits bourgeois réactionnaires qui l’entourent cherchent encore à la punir. Avec une absence totale de sens de la nuance, cette jeune narratrice sape efficacement les bases i... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Ce roman nous présente l'histoire d'une rebelle de 10 ans, qui, en pleine période de confusion juste avant et tout de suite après la défaite de son pays dans la première boucherie mondiale, a décidé de ne rien prendre pour argent comptant. Nous sommes à Cologne en 1918. Comme l'auteure a toujours prétendue être née en 1908, nous pouvons donc logiquement assumer que la petite héroïne anonyme du roman s'appelle, en fait, .... Irmgard.
"La Keun" comme on l'a parfois surnommée, probablement à cause de son caractère bien trempé et son esprit rebelle, est officiellement née en 1905. Une liberté poétique ou tout simplement féminine qu'on voudra bien lui pardonner. Selon Hiltrud Häntzschel, l'auteure de sa biographie de 2001, toutefois, elle se serait un peu rajeunie pour avoir exactement le même âge que l'héroïne de son tout premier roman "Gilgi, l'une d'entre nous" de 1931. Ou parce que 10 ans était, dans son optique, le niveau moyen des nazis.
Elle avait donc 31 ans ans lorsqu'elle a publié "Quand je serai grande je changerai tout". Une histoire qu'elle a écrit, comme réfugiée politique, sur une terrasse à Ostende, en 1936, en compagnie de son amoureux, maître Joseph Roth.

Depuis que j'ai lu d'elle "Une drôle de petite fille" ("Kind aller Länder" en version originale et superbement traduit en Anglais comme "Child of All Nations" par Michael Hofmann), qui a été mon coup de coeur de 2016, je suis devenu un fan d'Irmgard Keun. Un tantinet bizarre car le roman qui est généralement reconnu par les critiques professionnels comme son chef-d'oeuvre "Après minuit" je l'avais lu il y a 2 décennies. Je crois que j'ai été séduit par les considérations et fantaisies de l'héroïne du roman : également une gamine de 10 ans, mais à une autre époque lorsque ses parents fuyaient le régime nazi. J'étais content d'apprendre que la fille unique de l'auteure, Martina Keun-Geburtig, ait déclaré à la presse, l'année dernière, que c'était aussi son livre favori. de son oeuvre, je tiens juste à mentionner un autre roman "D-Zug dritter Klasse" (Train Diesel, 3e classe), un divertissement avec de belles phrases cyniques de la même période (1938), dans lequel elle relate un voyage à Paris.

Comme je regrette que l'oeuvre d'Irmgard Keun ne soit pas plus connue dans le monde francophone, contrairement à mon habitude, je me permets une citation. Un passage typique pour son style tout à fait particulier, estimant qu'un exemple en dit plus que de longues explications savantes.
Il s'agit du tout premier paragraphe de cet ouvrage :
" Mes parents prennent toujours le parti des institutrices : c'est pourquoi
après l'école, je suis directement allé voir M. Kleinerz, qui habite à côté,
pour tout lui raconter. M. Kleinerz est déjà vieux, il a au moins quarante
ans et ne peut donc plus avoir d'enfants tout seul. "
La femme de son confidant a pris la poudre d'escampette et laissé plein de dettes au voisin compréhensif avant son départ et dans sa logique de gamine, comme les gens disent que c'est son père qui l'a mise au monde, voilà son jugement truculent de son allié, dont le nom traduit en Français donnerait "petit coeur". Un peu plus loin, elle note à propos de son père et de sa naissance "Je ne sais pas comment il a fait mais je crois que c'est très difficile,...et il a beaucoup de mérite. Je me demande juste où j'étais avant".

Cette entrée en matière est sûrement ce que les auteures de l'excellente introduction de l'ouvrage, Claire de Bertrand de Beuvron et Marie L'aigle, entendent par "l'infinie liberté de ton et d'esprit et l'humour ravageur" de la jeune narratrice.

Je suis absolument persuadé que les trouvailles "keunesques" feront rigoler beaucoup de lectrices et lecteurs et elles sont légion. Entendant les adultes se plaindre du nombre de gens sans emploi et revenus, notre gamine s'offusque car elle est d'avis que "nous autres enfants devons travailler gratuitement". Qu'elle prône la rébellion est inévitable, puisque "les adultes ont toujours tout les droits et les enfants, aucun." Mais elle n'a que 10 ans et en sort des naïves aussi, de son âge, "...fermons bien les yeux pour que personne ne nous voie..."
Je suis tenté de multiplier ses finesses, mais je ne tiens pas à gâcher votre plaisir de découvertes.

Pour l'auteure les occasions de rire étaient devenues rares : en 1933 avec l'avènement d'Hitler ses livres faisaient partie de l'autodafé nazi et son mariage avec l'écrivain Johannes Tralow (1882-1968) commença à battre de l'aile. Comme une des rares, Irmgard Keun a entamé plusieurs procès contre la "Reichsschrifttumskammer" (la Chambre de la littérature du Reich) qui l'avait frappé d'interdiction de publier. Ces messieurs étaient d'avis que son oeuvre dégénérée, désignée comme "Asphaltlitteratur", ne correspondait nullement à l'esprit "idéaliste" des nouveaux temps.

En 1936, elle est partie pour Amsterdam où 2 éditeurs, Alert de Lange et Emanuel Querido, publiaient les livres des auteurs exilés en Allemand. L'été elle passait à Ostende comme Egon Erwin Kisch, Ernst Toller, Heinrich Mann, Joseph Roth et Stefan Zweig. Voir à ce propos mon billet du livre de Volker Weidermann "Ostende 1936 - Un été avec Stefan Zweig" du 21/04/2017. Et même du littoral belge elle continua à contester son interdiction de publication et exigea dommages et intérêts, sans trop y croire pourtant, comme le laisse supposer un de ses arguments : ce n'est pas parce que je couche avec des Juifs et des Nègres que mon oeuvre n'aurait pas de valeur.

En 1940, après l'invasion nazie des Pays-Bas, elle s'est débrouillée avec un officier allemand pour obtenir de faux papiers avec lesquels elle est rentrée à Cologne. Les premières années d'après-guerre furent décevantes pour Irmgard Keun : les contestataires du Reich n'étaient pas très populaires et il aura fallu attendre les années 1970 avant que ses mérites littéraires soient reconnus. Entretemps, ses excès d'alcool lui avaient valu un internement de 6 ans dans un centre psychiatrique à Bonn. Par après elle a écrit des textes pour la radio. Son roman "Ferdinand, l'homme au coeur tendre" de 1950 n'avait eu aucun succès et son projet de livre avec Heinrich Böll n'a pas abouti par manque d'intérêt des éditeurs.
En 1982, elle est décédée d'un cancer des poumons à l'âge de 77 ans.

Personnellement, je me pose la question qu'aurait été l'apport littéraire d'Irmgard Keun si son élan n'avait pas été brutalement brisé en 1940, lorsqu'elle n'eut après tout que 35 ans. Je crois qu'avec son imagination et talent, elle aurait pu nous laisser toute une kyrielle d'oeuvres fascinantes.

Je présume que parmi celles et ceux qui liront cette chronique, certains penseront que j'ai un peu perdu les pédales dans mon enthousiasme dithyrambique pour Irmgard Keun, mais croyez-moi la lecture et la critique de ce petit livre m'ont procuré une satisfaction rarissime. Quant à savoir si oui ou non j'ai exagéré, je dirais simplement...lisez-le et n'hésitez pas à me passer votre jugement, même sévère !
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Une petite fille nous raconte son quotidien en Allemagne à la fin de la première guerre mondiale. On ne connait ni son nom ni son prénom, tout juste son âge. Sans doute pour rendre son personnage plus universel, l'auteur nous dispense de certaines informations qui l'auraient rendue plus attachante. Même si les péripéties et les bêtises décrites sont souvent drôles, cocasses et révélatrices des travers des adultes, j'ai souvent eu du mal à m'intéresser réellement à la vie de la petite fille.

A travers ses yeux, le lecteur d'aujourd'hui découvre une page de l'Histoire, la guerre depuis l'arrière et son quotidien fait de privation et de situations absurdes. La dénonciation des travers des sociétés modernes grâce à la voix d'un enfant est tout à fait actuelle : l'auteur parvient à mettre à jour les compromissions, les mensonges, les méchancetés et la lâcheté du quotidien. Mais cette suite d'histoires reste avant tout attachée à ses contemporains, et durant ma lecture, je me suis souvent sentie exclue, non initiée, complètement extérieure à l'histoire.

Les histoires qui composent ce recueil sont finalement assez répétitives avec une situation de départ qui va dégénérer, la logique enfantine qui a conduit à la bêtise du moment, quelques digressions, quelques vérités bien senties et finalement la punition.

La lecture était finalement agréable et je comprends tout à fait l'intérêt de diffuser le message de l'auteur mais je n'ai pas pu m'attacher à ce récit et ses personnages. Dommage.
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Une petite fille vivant en Allemagne vers la fin de la première guerre mondiale, nous raconte son quotidien de petite fille. Ne croyez pas que son quotidien est sombre, non pas du tout, c'est une histoire toute en couleur que cette petite fille nous raconte. Il faut dire que cette petite fille est assez ingénieuse, toujours une idée pour s'occuper avec ses amis. Des idées qui vont lui causer des ennuis auprès des adultes, qui ne comprennent pas cette petite fille.

Cette fille ingénieuse est incomprise et ne comprend pas non plus les adultes. Il faut dire qu'en tant qu'adulte, il est vrai que nous sommes pleins de contradiction pour les enfants. Nous leurs apprenons qu'il y a certaines choses qu'il ne faut pas faire, comme mentir, pourtant nous sommes les champions pour faire ce qu'il ne faudrait pas faire. Comment faire comprendre alors aux enfants ? Avec ce roman, je me dis que les adultes ne passent pas assez de temps pour comprendre ce que nous voyons comme une bêtise. Pour les enfants il s'agit qu'une chose extraordinaire qu'ils sont contents d'avoir fait, sans en avoir vu le mal. Et c'est le cas avec beaucoup de choses que fait cette petite fille.

Je trouve la façon dont l'autrice raconte l'histoire très intéressante, elle utilise la première personne, c'est donc la petite fille qui nous raconte son histoire. Nous sommes ainsi très vite projetée dans ce petit personnage qui ne peut pas vous laissez insensible. Pourtant, cette petite fille n'a pas de nom, à aucun moment il n'en est fait mention.

D'un autre côté, je me demande si je ne suis pas passée à côté de quelque chose avec ce roman. Nous avons une introduction avant de lire le roman, et cette introduction raconte l'histoire de l'autrice, mais aussi celui de ses ouvrages et en particulier celui-ci. Si j'en crois cette introduction et aussi la quatrième de couverture, j'étais censé retrouvé une petite fille qui « sape efficacement les bases idéologiques de l'Allemagne nazie et présente l'humanisme comme une conviction relevant d'un bon sens élémentaire ». Autant dire que j'étais loin de tout ça…

En bref, j'ai quand même aimé ma lecture et découvrir les prouesses de cette petite fille, même si je pense avoir loupé quelque chose avec ce roman, puisque j'attendais autre chose.
Lien : https://leslecturesdecristy...
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La lecture de ce roman est agréable et plutôt légère. Cette petite fille (ai-je déjà oublié son nom ou ne nous l'a-t-on pas donné ?) est attachante. Elle est libre et pleine de vie. Ces réactions spontanées et souvent inattendues sont sans concessions et entrainent des situations drôles et cocasses. Cependant je déplore qu'il manque un réel fil conducteur au récit. On y rencontre plus une accumulation de faits et d'anecdotes qu'une réelle narration. En outre je me suis souvent sentie perdue parmi tous les personnages, ne sachant plus qui ils étaient.
En ce qui concerne l'objet livre en lui même, j'ai beaucoup apprécié la couverture que je trouve sobre et élégante. Sa matière est douce au touché et très agréable en main. Les pages épaisses et la typographie aérée facilitent la lecture.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Je suis si triste que c'est comme si j'étais morte. Je cours au cimetière, il est déjà tard dans la soirée, je suis calme et angoissée et l'air est comme un voile de brouillard chaud.
Je voulais retrouver la tombe de ma grand-mère, car au moment de disparaître ma grand-mère m'aimait, et maintenant qu'elle est morte et enterrée, elle continue de m'aimer. M. Kleinerz a dit qu'on ne pouvait faire confiance qu'aux morts.
(...)
Je ne veux pas pleurer. Les adultes rient quand je pleure. Et quand je ris, ça ne leur plaît pas non plus, parce que j'ai fait quelque chose qui ne leur convient pas. Il paraît que je dois apprendre à saisir le sérieux de la vie. Qu'est-ce que ça peut bien être ?
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Parfois, je me dis vraiment qu'en ce monde il n'y a pas de joies pour les adultes. Quand je serai adulte, aucun jouet ne me fera plus plaisir et je n'aurais plus envie de patins à roulettes, de toupie, de cerceaux, de poupées, ni de rien. Comment vivrai-je alors, quand rien ne me fera plus plaisir ? Parfois, j'ai envie de pleurer parce que je vais devenir une adulte et parfois j'aimerais que ça arrive tout de suite.
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L'été, à l'heure de la sieste, ma mère, Tante Millie et d'autres femmes ont régulièrement poussé de grands cris apeurés et agité les mains dans tous les sens quand les guêpes bourdonnaient au-dessus des tartes aux prunes, avec leurs longs corps annelés et dangereux. Elles trouvaient les abeilles encore plus dangereuses. Et mille fois plus dangereux encore les bourdons, qui ressemblent à de gros coussins confortables et ronfleurs. Alors, une fois, je suis allée voir un arbre de la forêt municipale dans la discrétion la plus totale, j'ai pris une abeille sur une feuille et je l'ai gardée dans ma main jusqu'à ce qu'elle me pique. Ca n'a pas trop mal tourné pour moi, mais pour l'abeille, si. Elle avait perdu son aiguillon, sans aucun moyen de le remplacer. Ma main a un peu gonflé mais il ne s'est rien passé d'autre. Moi qui pensais qu'avec une simple piqûre d'abeille, le monde ne serait plus jamais le même.
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Je suis en général très fatiguée le matin, je mets du temps à m'habiller et je fais couler l'eau très fort dans la salle de bains pour faire croire que je me lave. Je m'assieds sur le rebord de la baignoire pour dormir encore un peu. C'est pour ça que j'arrive souvent en retard à l'école. Hans Lachs dit aussi qu'il est injuste d'atteler les enfants à la roue folle du temps, ce qu'il sait pour l'avoir lu dans de vrais livres d'adultes.
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Quand j'aurai à nouveau le droit de courir autant que je veux, je sais déjà ce que je ferai de magnifique. Je vais coller du papier doré sur mon corset orthopédique et je le portrait par-dessus mes robes comme une armure. Je jouerai à la légende de saint Georges avec Hans Lachs, Otto Weber et Mathias Ziskorn. C'est moi qui serai saint Georges.
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Video de Irmgard Keun (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Irmgard Keun
Interview with Martina Keun-Geburtig, daughter of late Weimar author Irmgard Keun. Produced in 2011 by the German Book Office New York.
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