Mon père alcoolique et moi est le genre de titre que je ne suis pas surprise de trouver chez un éditeur militant comme Akata. Malgré la difficulté du sujet et les dessins pas forcément racoleurs pour les fans de manga, ce titre est définitivement à lire tant l'autrice parle bien de l'alcoolisme et des ravages que ça peut faire dans une famille. Côtoyant moi-même des enfants qui pourraient être l'autrice dans quelques années, je me suis d'emblée sentie touchée.
Ici,
Mariko Kikuchi nous livre crument l'autobiographie de ce qu'elle a vécu de sa petite enfance jusqu'à l'âge adulte avec son père alcoolique. C'est dur, c'est sans concession, mais c'est le but. du coup, les dessins sont très simples et ne sont pas forcément ce qu'on retiendra de l'oeuvre. Je le regrette parce que j'aime beaucoup quand il y a un vrai travail graphique. C'est pour ça que je lis des mangas. Mais ici, j'ai su en faire abstraction parce que c'est le texte qui compte vraiment, ça aurait aussi bien pu être un roman, je pense.
Nous suivons donc la mangaka depuis ses plus jeunes années auprès de son père alcoolique. Les émotions qu'elle ressent à son contact et au début à celui de mère également, sont très bien retranscrites. Personnellement, sans avoir vécu cela, j'ai parfaitement retrouvé certaines émotions que j'ai aussi pu ressentir au contact de mes parents que ce soit la honte, la colère, la négation, l'acception, puis la culpabilité, le déni, etc. C'est fort, ça prend vraiment à la gorge et on plaint cette enfant de vivre cela. On est en colère face aux adultes de lui faire vivre cela. le panel des émotions que nous ressentons nous lecteurs est assez incroyable pour ce genre de titre pourtant très sobre dans sa forme et sa narration.
L'autrice nous brosse un portrait assez sombre de la société. Cette société où des adultes osent reprocher à une enfant de ne pas accepter son père alcoolique et tout ce que ça implique avec le sourire. Cette société qui oblige à cacher son mal être. Cette société qui nous force à nier ce que l'on est, ce que l'on ressent, pour entrer dans un moule qu'elle a conçu : le respect des parents, le soutient des parents, le mariage, les enfants, etc. Ça m'a donné une sensation d'étouffement et de colère écrasante !
J'ai vraiment ressentie du coup beaucoup d'empathie pour le personnage, c'est-à-dire la mangaka. Elle passe d'une relation toxique à une autre et a une image tellement dévalorisée d'elle-même. du coup, les toutes toutes dernières pages sont une vraie bouffée d'oxygène et d'espoir pour elle.
Je regrette juste qu'elle ait passé si vite sur son enfance, mais j'en comprends les raisons, elle se rappelle mieux de ce qui s'est passé une fois qu'elle était adulte. Je regrette aussi qu'elle se soit tant appesantie sur elle et que sa soeur soit restée autant en marge, mais là aussi, ça doit tenir de leur relation. On ne peut pas inventer ce qu'on ne connait pas dans des récits comme celui-ci.
Ce titre est vraiment à mettre entre toutes les mains. Il fait réfléchir sur notre société, sur les relations entre adultes et enfants, entre parents et enfants, mais aussi sur les attentes qu'on place/impose à chacun, en plus bien sûr du thème central de l'alcoolisme et des relations toxiques. C'est un titre fort auquel certes, on ne prend pas forcément un plaisir de lecture incroyable, mais qui est nécessaire.
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