AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782264057433
456 pages
10-18 (17/01/2013)
3.97/5   331 notes
Résumé :

Avec mordant et poigne, Exley décrit les profonds échecs de sa vie professionnelle, sociale et sexuelle. Ses tentatives pour trouver sa place dans un monde inflexible le mènent aux quatre coins du pays, mais surtout à l'hôpital psychiatrique d'Avalon Valley. Au gré des bars, des boulots et des rencontres improbables, l'obsession d'Exley pour la gloire, les New York Giants et leur joueur star, Frank Gifford, grandit. Dans ses ... >Voir plus
Que lire après Le dernier stade de la soifVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (51) Voir plus Ajouter une critique
3,97

sur 331 notes
5
20 avis
4
17 avis
3
11 avis
2
2 avis
1
0 avis
Esprit de Bukowski sort de ce corps !
Premier roman de Frederick Exley, « le dernier stade de la soif » est une autobiographie fictive. Appuyé sur la trame des grandes lignes de sa vie, l'auteur raconte en arrangeant certains détails et en changeant certains noms, sa propre maladie, l'addiction à l'alcool, ses différents passages en hôpital psychiatrique, sa dévotion pour le joueur Gifford et l'équipe des Giants, ses rencontres amoureuses avec les différentes femmes qui ont croisé son chemin, son absence d'empathie envers ses contemporains, sa vénalité. C'est l'histoire d'une longue descente dans les enfers de l'alcoolisme dont l'explication lui sera donné par l'un de ses personnages, Paddy the Duke qu'il croise lors d'un de ses séjours en asile : c'est un remède contre la tristesse (je confirme). Car derrière ce qui semble n'être que farce et bamboche estudiantine, plane l'ombre tragique d'une profonde dépression. Tout l'intérêt est de trouver à travers les brumes éthyliques dans lesquelles l'auteur se vautre, l'origine de cette mélancolie qui le mine et le fait retourner inexorablement vers la bouteille.
Il minimise l'impact dramatique qu'à l'alcool sur sa vie, il fanfaronne, mais il ne dupe personne et l'on devine les ravages qu'a le divin poison sur sa sante physique ou mentale et sur ses relations avec les gens qu'il fréquente.
Il élabore la propre dichotomie de sa personnalité, d'un état à jeun ou d'ébriété, dépressif ou euphorique, d'apathie ou de suractivité. Il cultive le paradoxe de l'homme libre qui fait ce que bon lui semble mais qui paye cher le prix de sa liberté.
Le roman à sa sortie en 1968 ne remporte pas un franc succès auprès des lecteurs mais est salué par la critique. Il fera de Exley l'auteur d'un seul roman mal grès ses autres publications tout comme J.D. Salinger avec « L'attrape coeur ».
On retrouve l'esprit et la verve de Charles Bukowski, mais avec une écriture soignée et sans trivialité ni grivoiserie. Frederick Exley a la plume de l'homme de lettre, pas celle d'un postier débauché.
C'est un très beau texte que la traduction honore et un très bel objet que les éditions Monsieur Toussaint Louverture nous proposent. Tout dans cette publication fait l'objet d'une bienveillance particulière, le choix du papier des pages et de la couverture, la police des caractères etc… Tous les détails techniques du travail d'éditeur sont indiqués à la fin du livre, témoignage d'une conscience professionnelle trop rare dans le vaste monde de la publication, trop rare pour qu'elle soit soulignée pour la présente oeuvre. La commande direct à la maison d'édition est l'occasion de profiter d'inattendues attentions de la part de celle-ci. Faites l'expérience…
Traduction de Philippe Aronson et Jérôme Schmidt.
Préface de Nick Hornby.
La merveilleuse maison d'éditions Monsieur Toussaint Louverture.
Commenter  J’apprécie          608
Je suis étonnée, que Fanté et Exley ne se soient visiblement jamais rencontrés. Parce qu'ils ont en commun la Californie, la soif, avoir la conviction de devenir un écrivain de renom, squatter, être proche du cinéma, et bien sûr honnête avec eux-mêmes, ce que le lecteur ressent bien. Ici, s'ajoute le foot, la psychiatrie. Mon personnage préféré est Mister Blue, adepte des pompes au milieu de la rue et attiré par le cunnilingus qu'il n'arrive pas à pratiquer. Difficile de boire ce livre cul-sec de plus de 400 pages. Une belle immersion dans l'Amérique des années 50 pour un auteur amer ne pas être à la hauteur du rêve américain.
Commenter  J’apprécie          461
Il est des époques comme la nôtre où être un écrivain raté peut devenir le plus grand atout pour accéder au succès. Pour un peu de reconnaissance littéraire tardive, il aura fallu que Frederick Exley mène une vie laborieuse, à la fois supporter des Giants, professeur clairvoyant de français, aliéné à Avalon Valley, époux décevant, père simulateur et alcoolique invétéré -comme si ces épreuves incessantes n'auraient pu avoir d'autre conclusion (sublimation ?) que cette épopée biographique qui n'est pas sans rappeler la Crucifixion en rose d'Henry Miller. Menteurs, volages, illuminés, Frederick Exley et son confrère auraient pu s'entendre à merveille… mais peut-être se seraient-ils entredévorés pour deviner qui, de l'un ou de l'autre, pouvait prétendre décrocher le plus légitimement la palme du perdant.


Dans la préface du Dernier Stade de la soif, Nick Hornby s'extasie devant Frederick Exley comme le seul auteur de sa génération capable d'avoir déversé sans pudeur et sans fierté le contenu putride de son existence au vu et au su de tous ses lecteurs potentiels. Ce serait là réduire un peu trop drastiquement le champ des auteurs de la seconde moitié du vingtième siècle, et faire confondre l'engouement à l'ignorance. Dans son principe, le Dernier Stade de la soif n'a rien de révolutionnaire : ce roman est un canal qui permet à Frederick Exley de déverser toute sa bile anti-américaine et de dégobiller toutes les valeurs moisies du rêve américain dans la tronche de ses compatriotes. En appui de ses convictions, il évoque les évènements marquants de son existence et ressasse ses déceptions, convaincu qu'en appuyant sur le caractère désespérant de son parcours, il fera ressortir de manière triomphante la crasse, l'hypocrisie et le malheur que dissimulent les sourires resplendissants des modèles publicitaires. Rien d'original, donc. Rien d'original, dans le principe. Sauf à considérer que se plonger dans la biographie d'un homme aussi sincère, aussi lucide et aussi clairvoyant que Frederick Exley constitue forcément une expérience originale en soi. C'est le cas.


Pendant tout le début de son existence, Frederick Exley, rivalisant avec son père décédé, aura tenté de devenir aussi glorieux que lui. Comprenant très vite qu'il s'agissait en fait, principalement, de faire preuve de prostitution intellectuelle pour correspondre aux modèles vantés par la société américaine, le jeune homme jette les armes, sans délaisser son rêve pour autant. La route vers la déchéance commence… comment rester fidèle à ses convictions et à ses valeurs tout en essayant d'atteindre un but qui leur est opposé ? Entre envie d'inclusion totale et rejet de la société, Frederick Exley virevolte d'une ambivalence à l'autre, se détruisant davantage qu'il ne parvient à faire changer le monde qui l'entoure. Et c'est lorsqu'il cesse enfin de vouloir paraître autre qu'il n'est –lorsqu'il écrit ses mémoires sans oublier aucun passage humiliant, grotesque ou rabaissant de son existence, volant allègrement à contre-courant des marqueurs de la réussite en vigueur dans le Nouveau Monde- que Frederick Exley parvient à nous convaincre de son prodigieux talent par l'usage de sa verve rancunière.


Mais… on sent toutefois que les procédés de séduction traditionnels ne sont pas loin. Même s'il a choisi d'orienter le Dernier stade de la soif sur l'affirmation de sa personnalité réelle au détriment des exigences revendiquées par la société, son livre n'est authentique que partiellement et s'il peut convaincre son lecteur, ce n'est qu'au prix d'une manipulation discrète –qui semble même faire un peu honte à Frederick Exley. Après avoir vivement insulté et moqué ses congénères, l'auteur semble obligé de se moquer de lui à son tour et sur le même ton, avec une tolérance un peu trop marquée pour qu'elle soit vraiment cohérente avec les valeurs et les images de vengeance persistantes qui martèlent d'autre part son esprit. Il est aussi question de femmes, d'enfants et de cunnilingus –prouvant que Frederick Exley, à la manière d'Henry Miller, n'était pas si rejeté du monde qu'il ne voulait bien l'écrire- mais ceci passe encore : chacun a bien le droit de se mettre en scène dans un film écrit à son honneur, afin de revendiquer ses propres gloires. le plus dérangeant survient dans les dernières pages du livre lorsqu'on se rend compte que progressivement, dans l'échec, Frederick Exley est parvenu à fusionner avec les images de son pire cauchemar : celui du rêve américain. Comme s'il ne pouvait pas se séparer de la conclusion hollywoodienne en « Happy End » des oeuvres les plus sirupeuses du septième art, Frederick Exley se croit obligé d'apporter une touche de semi-réconfort à l'écriture de sa biographie romancée. Oui, lecteur ! même dans l'échec, tu peux tirer parti de ta déveine pour pondre un livre… rester productif… te divertir… te rengorger socialement…


Malgré cette conclusion un peu contradictoire qui nous indique que Frederick Exley n'est pas totalement guéri de l'american dream, il serait dommage de cracher sur son plaisir… l'auteur a tout de même de quoi être fier de lui. Son talent pour rendre vivantes les scènes de son existence est immense et son humour parvient à transcender le désespoir pourtant bien tenace qui a dû le cheviller à de nombreuses reprises. Et puis, surtout, Frederick Exley parvient à nous séduire en nous montrant qu'il n'est pas mieux que nous, et que nous ne sommes pas meilleurs que lui… après tout, nous sommes tous aussi corrompus que lui, modulant nos humeurs en fonction de nos besoins entre reconnaissance et indépendance, et on comprend qu'à défaut d'avoir pu accomplir le rêve américain, Frederick Exley ait voulu tout du moins se façonner sa propre petite gloriole –attachante parce que personnelle, à défaut d'être rentable.
Lien : http://colimasson.over-blog...
Commenter  J’apprécie          318
Effet inversé du confinement ? Alors que la période permet de faire exploser les ventes d'e-book (tant mieux ou tant pis, là n'est pas mon sujet…), elle me ramène pour ma part davantage vers les livres objets, ceux que je suis heureux de posséder pour mieux les conserver, qui me rassurent, allez savoir pourquoi. Ils témoignent de ce qu'est un travail éditorial, celui qui soigne le fond autant que la forme, la préface autant que la postface, la police autant que les césures, la main d'un papier autant que le grammage d'une surcouverture… Et bien souvent, en dehors de toute cohérence économique : éditeur indépendant, la dernière grande folie du XXIe siècle…

Le dernier stade de la soif de Frederick Exley – traduit par Philippe Aronson et Jérôme Schmidt - est de ceux-là. du Rives tradition ivoire clair ça te parle ? le mélange de Sabon avec une dose de Garamond aussi ? Et si j'ajoute l'intérieur en Holmen Book 52 grammes avec une main de 1,6, tu y es ? Emballe avec une préface de Busnel et une postface de Hornby et tu comprendras pourquoi j'ai adoré ces trois jours de lecture.

Parce que pour être honnête et à contre-courant des éloges habituels, je n'ai que moyennement apprécié ces « mémoires fictifs » à défaut d'être fictives, ce livre expiatoire d'un inapte à la vie mais surdoué de la boisson, chroniquant sa vie pour rien dans un monde s'étendant de son canapé au bar le plus proche. Je n'ai pas détesté non plus, loin de là, trouvant chez Exley l'indispensable complément des grands maîtres que sont pour moi Fante, Bukowski et Thompson.

Mais malgré cela, la qualité de l'écriture déstructurée de l'auteur, la réussite manifeste de la traduction et le soin quasi-amoureux apporté au travail éditorial de mise en scène du texte m'ont confirmé que je tenais-là un grand livre qui, apprécié ou pas, se doivent d'avoir été lus par qui se targue de vouloir connaître les grands textes américains. Et pour tout ce remarquable travail et ce plaisir de lecture, bravo et merci Monsieur Toussaint Louverture !
Commenter  J’apprécie          336
Moi, ce que j'aime c'est... Monsieur Toussaint Louverture pour les magnifiques livres qu'il publie.

Pourtant, j'avais dédaigné LE DERNIER STADE DE LA SOIF lorsque MTL l'avait dépoussiéré et édité en grand format. J'avais dans l'idée que ce livre ne me plairait pas... mais, comme il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis et que j'adore Les Grands Animaux (la sublime version poche de MTL), j'ai heureusement fini par craquer.

C'est à l'occasion d'une lecture commune avec Béa O'Nougat pour le groupe #alassautdespaves que je l'ai sorti de ma PAL...

... Et quelle idiote je suis de ne pas l'avoir pris et lu lors de sa sortie en grand format car je l'ai ADORÉ ! C'est un véritable chef-d'oeuvre de la littérature Nord-américaine, si chère à Léa et à son #PicaboRiverBookClub.

Dans LE DERNIER STADE DE LA SOIF, Frederick Exley nous livre le récit de sa propre vie mais de façon fictive où, comme il nous en averti dans sa note au lecteur, "l'essentiel des personnages et des situations est le seul fruit de mon imagination... leur ressemblance avec des êtres et des événements réels sont à mettre sur le compte de la simple coïncidence".

"La simple coïncidence" ? Ben voyons ! Voilà qui me fait bien rigoler...

Attention, c'est un livre exigeant qui demande de la concentration à son lectorat et qui pourra en rebuter plus d'un... mais, si ça passe, quel kiff ! C'est drôle et d'une lucidité cynique sur l'Amérique. Si je ne vous ai pas convaincu, peut-être que François Busnel le fera dans sa belle préface ou Nick Hornby qui enfonce le clou avec la postface.

Et comme il faut soutenir nos librairies et nos maisons d'édition préférées, je vais m'empresser d'acheter les deux autres titres de Frederick Exley disponibles chez Monsieur Toussaint Louverture : À L'ÉPREUVE DE LA FAIM et À LA MERCI DU DÉSIR !


LE DERNIER STADE DE LA SOIF de Frederick Exley
Traduit par Philippe Aronson et Jérôme Schmidt
Editions Monsieur Toussaint Louverture
Commenter  J’apprécie          306


critiques presse (2)
Telerama
16 janvier 2013
Tragique et drôle, cette confession d'un enfant du xxe siècle se lit le coude sur le bar, [...] avide de mieux connaître cet écrivain qui se rêvait en champion et ne connut que les gradins.
Lire la critique sur le site : Telerama
Bibliobs
03 août 2011
Un classique de la littérature américaine publié outre Atlantique en 1968. Il aura donc attendu 43 ans avant de traverser l'Atlantique. [..] le livre de l'été. Il ne vous distraira pas de vous-même. A lire d'une traite. Cul sec.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
Citations et extraits (85) Voir plus Ajouter une citation
Quelques années plus tard, en ouvrant le journal, j’appris que Robert R. Young, après avoir avalé œufs et jambon au petit-déjeuner, était remonté dans son bureau, avait calé le canon d’un fusil à pompe dans sa bouche et s’était fait exploser la cervelle. Cela me fit sourire. Il n’y avait rien de vindicatif dans ce sourire : je n’avais jamais considéré Young comme un homme de chair et de sang. Pour moi, ce n’était qu’un petit être guilleret que je voyais sautiller en haut de Grand Central, entouré d’une escouade d’encravatés. Je n’avais jamais cru en sa réalité. Je souris car tous ceux que je connaissais à New-York Central […] pensaient que Young était un homme décidé, un homme qui allait sauver l’industrie tout entière de quelques prises de décisions bien senties, de transport intermodal, de trains ultralégers et de prestations sur tout le territoire, oui monsieur ! Et mon sourire se fit triste, puis éploré : Young, avec ce seul beau geste, était devenu vivant pour moi, était devenu un homme. Car le suicide est le plus éloquent cri du cœur de ceux qui cherchent en vain leur chemin.
Commenter  J’apprécie          140
A la lecture de nombreux livres sur « l’art du roman », je m’étais persuadé que, telle Athéna, déesse de la sagesse qui avait surgi toute formée de la tête de Zeus, l’univers majestueux de mon roman déferlerait dès que j’aurais « vu » ma première phrase –telles les chutes du Niagara à travers une tête d’épingle. J’écrivis « Je vis à Scarsdale », ajoutait un point, et passai les semaines qui suivirent à fixer ces mots d’un regard morose. Ils me rendaient triste. Neuf mois plus tard, après de nombreuses réécritures et fioritures, je me retrouvai avec « Seul, je vis à Scarsdale, Westchester County, New York, à vingt, vingt-cinq minutes de la gare Grand Central, sur la ligne de chemin de fer de New-York. » Le livre était désormais prêt à jaillir de moi, mais comme je n’avais pas écrit un seul autre mot, j’étais toujours triste.
Commenter  J’apprécie          120
J’ai également compris que la plupart des médecins –en tout cas, ceux avec qui j’étais en contact- n’étaient pas particulièrement compétents, et acceptaient en bloc les définitions de la normalité que la société leur avait imposées. Pour la plupart, ils ne considéraient pas de leur ressort de creuser les réalités étranges, angoissées et perverses que nous nous étions fabriquées. Surtout sans doute par manque de temps et dans l’ignorance de leurs propres faiblesses, ils trouvaient plus simple de rayer nos réalités pour les remplacer par celles de la société.
Commenter  J’apprécie          170
A ces remarques, mère, fille et fils s’exclamaient en chœur : « Vraiment ! » J’étais censé, comme je le découvris rapidement et à ma plus grande horreur, rendre également hommage à l’érudition paternelle, afin de les remercier de l’honneur qu’ils me faisaient de me laisser m’asseoir à leurs côtés. Chaque fois que j’entendais le « Vraiment ! », j’apercevais des mèches de cheveux auburn s’agiter derrière l’épaule du père, et levant le regard, je découvrais dans mon champ de vision une constellation étincelante de nez retroussés, de taches de rousseur et de dents éclatantes, formant une invitation, une supplication à me prosterner devant le Génie. Je repoussai ce moment le plus longtemps possible, mais lorsque les regards passèrent de la supplication au léger reproche, je rendis les armes et rejoignis le chœur des Vraiment ! Au début, j’étais soit en avance soit en retard, et nous semblions crier en écho : Vraiment ! Vraiment ! Même si cette ineptie rythmique m’irritait au plus haut point, la famille y répondit par des regards plein de sympathie et de compréhension. A la fin du premier quart temps, je réussis à m’accorder à leur tempo et fus prêt à passer l’après-midi le plus désagréable de ma vie.
Commenter  J’apprécie          70
Au bout d'un moment, je trouvai un nouvel exutoire pour ma colère grandissante, et c'est grâce à lui que j'évitais de sombrer dans un état auquel on colle volontiers l'étiquette de psychotique. Tous les matins, je cherchais dans le Times l'offre d'emploi la plus absurde, et j'y répondais. Je répondais également à d'autres annonces, mais il fallait que je m'occupe de la première avant de pouvoir me consacrer à celles qui pouvaient raisonnablement constituer un réel espoir d'embauche. Ces offres, les plus idiotes, étaient généralement encadrées, et se trouvaient indifféremment dans la rubrique Emploi, Sports ou Economie :
"Officine cherche jeune homme intelligent et ambitieux voulant devenir rédacteur publicitaire - quelqu'un qui ne s'écroulera pas comme une fleur fanée à la moindre objection, ou à une attaque plus violente, quelqu'un qui ne craint pas les camouflets, bref, quelqu'un capable d'encaisser et de rendre les coups. Adressez votre candidature à ________."
Il m'arrivait parfois de consacrer une ou deux heures à la rédaction de mes réponses, afin qu'elles soient parfaites. Avant de pouvoir postuler aux annonces plus raisonnables, je devais apposer un point final à mon premier courrier, le mettre dans une enveloppe et le cacheter.
"Des coups ? J'ai eu un patron qui me tapait sur la tête par simple plaisir. Cela dit, c'était un sombre crétin. Il ne m'a rien appris, sinon que travailler pour un sombre crétin ne présente aucun avantage - c'est humiliant, détestable et profondément démoralisant. Mais avec vous - il est évident à la lecture de votre annonce que vous êtes un type d'une toute autre envergure -, ce sera différent. Lorsque vous m'enverrez dans les cordes assurez-vous juste que je sache pourquoi. D'accord ? Puis, le temps aidant, je serai aussi omniscient et cynique que vous, et il va sans dire que nous vivrons ensuite dans votre - officine, c'est ça ? - comme deux pauvres cons unis pour la vie
Commenter  J’apprécie          30

Video de Frederick Exley (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Frederick Exley
Le choix des libraires. Direction la Normandie ! À la rencontre de Gillaume Girard, propriétaire de la librairie « Metropolis ». Avec lui partagez ses coups de c?ur : « le Dernier stade de la soif » de Frederick Exley, la saga « Lonesome Dove » de Larry McMurtry, ou encore « La Horde du Contrevent » d'Alain Damasio.
autres livres classés : alcoolismeVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus


Lecteurs (882) Voir plus



Quiz Voir plus

Dead or Alive ?

Harlan Coben

Alive (vivant)
Dead (mort)

20 questions
1821 lecteurs ont répondu
Thèmes : auteur américain , littérature américaine , états-unisCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..