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Souvent les novateurs dérangent parce qu'ils cassent les codes classiques auxquels on est habitué. C'est le cas de Bernard-Marie Koltès au théâtre notamment lorsque son nom est associé à celui de Patrice Chéreau.
Ils ne sont plus là ni l'un ni l'autre mais des pièces comme "Roberto Zucco" continuent à être montées et c'est bien. C'est dans une mise en scène de Rose Noël que je l'ai vu récemment au théâtre de l'épée de bois à la Cartoucherie de Vincennes.
Achevée en 1989, c'est la dernière pièce écrite par Bernard-Marie Koltès. Elle raconte la vie d'un tueur en série italien qui s'est échappé de prison, inspirée par la biographie réelle de Roberto Succo qui a sévit dans les années 80.
Assassin de son père, il retourne chez sa mère qu'il tue également. En cavale, il rencontre une adolescente qu'il va violée. Pourtant, elle tombera amoureuse de ce démon fascinant pour échapper au carcan familial. On se doute que, pris dans la spirale infernale de la violence, ça va mal finir. Mais Koltès sait se placer avec humanité et sans compassion du côté des marginaux et des fous. Parce que même les monstres comme Roberto Zucco peuvent se vouloir ange.
C'est donc une pièce terrifiante qui fait partie des classiques du genre.

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Dernière pièce de théâtre achevée par KOLTÈS en 1988 avant son décès du sida un an plus tard, ce « Roberto Zucco » est bien sûr, vous l'aurez sans doute deviné, une biographie du tueur délirant des 80's Roberto SUCCO.

S'attachant aux dernières heures du meurtrier avant son suicide, cette pièce stylisée fait intervenir pas mal de témoins, des proches aux quidams en passant par les gardiens de prison entre autres, une vingtaine de personnes se succédant ou dialoguant. le ton est brut et poétique à la fois, les situations parfois choquantes (la pièce a fait scandale à sa sortie), une biographie stylisée et sans concession, à l'écriture soigneuse, pointilleuse et exigeante. Oui ce Zucco est fou à lier : assassin de ses parents, d'un flic, interné en hôpital psychiatrique puis évadé, repris et incarcéré, la pièce commence alors qu'il est juché sur le toit de sa prison, c'est le dernier baroud d'honneur de l'italien. On va rapidement en savoir plus sur son parcours par ses proches, par celles et ceux qui l'ont côtoyé d'une manière ou d'une autre, mais aussi par ses propres rencontres avec l'un ou l'autre des protagonistes, assister même au meurtre de sa mère, protectrice et dépassée.

Dans cette pièce, KOLTÈS s'est inspiré du théâtre classique, même si l'on peut çà et là ressentir les influences du théâtre contemporain. Support ambitieux que celui de présenter une biographie par le truchement du théâtre où l'on peut imposer librement un ton, un rythme différents, en version brut de décoffrage, faire parler l'imaginaire sans suivre de fil, moins de deux heures pour résumer une vie qui se clôture en forme de naufrage, une manière bien singulière de redécouvrir ce Roberto complètement azimuté qui a fasciné l'opinion publique à la fin des années 80 (et fait s'interroger pas mal de professionnels de la psychiatrie).

La pièce fut écrite la même année que la mort de SUCCO (1988), donc en quelque sorte le nez dans le guidon. Dans ce livre, des bonus permettent de jouer les prolongations en compagnie de l'auteur : « Tabataba », un dialogue tendu entre une soeur et son frère cadet sur fond de Harley Davidson, « Coco », une esquisse de pièce de théâtre avec Coco CHANEL comme personnage central (que visiblement KOLTÈS ne portait pas dans son coeur), le recueil se terminant par « Un hangar, à l'ouest », interview où KOLTÈS parle de son travail (notamment pour les pièces « Quai ouest » et « Combat de nègres et de chiens »), son approche, sa perception du théâtre, etc. le tout est sorti en 2001 aux Éditions de Minuit, alors que la pièce « Roberto Zucco » fut montée en 1990 à Berlin.
https://deslivresrances.blogspot.fr/
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Du haut de son toit, Roberto maîtrise son art, celui de la flexion.
La réflexion est celle de Koltès: un mot échappe à Jung au sujet de l'atemporalité de la folie et du culte de Mithra et il n'en faut pas plus à l'auteur pour, à partir d'une citation initiale, tracer le destin de Zucco.
Quel est ce destin? Celui d'un personnage de Sade trop cuit à cause du soleil, d'une chanson vénéneuse mais heureuse de Bashung, d'une élégante déroute pasolinienne au milieu des champs de sueur.
Il peut sauter à l'élastique, se rater, recommencer en toute liberté et rire de ses éclats.
Il peut devenir céleste et contagieux car il est l'opium.
Il est attendu Zucco.

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C'est toujours déroutant de lire une pièce de théâtre.

Plus encore quand les personnages et les faits ne semblent obéir à aucune logique. A aucune rationalité. Ils se contentent d'être là, sur scène, et de se succéder dans la seule évidence de leur présence et de la chronologie.

Mais la pièce, à une lettre près, porte le nom d'un serial killer célèbre, Roberto Succo, dont le personnage - dans la pièce, Roberto Zucco- , reproduit fidèlement la trajectoire criminelle: il ne s'agit pas d'une fable.

Encore moins d'une tentative d'explication psychologique, d'un plaidoyer ou d'un "thriller" théâtral destiné à frapper de terreur l'imagination du spectateur.

Roberto "ne se connaît pas d'avance", comme disait Peter Handke. Ses meurtres adviennent presque sans qu'il y ait part.

Lui qui rêve d'être invisible, et refuse avec horreur d'être un héros dont les vêtements couverts de sang le rendraient par trop remarquable, revient pourtant sur ses scènes de crime, pour tuer encore, s'en prend avec la même violence aux policiers qui le poursuivent et aux enfants sans défense.

On l'aime, pourtant: la gamine qu'il a violée, la femme dont il vient de tuer l'enfant, sa mère qu'il a rendue veuve..

C'est qu'il y a, dans ce personnage aveugle à lui-même, meurtrier dans ses actes, une sorte de fraternité poétique avec le genre humain. Ses coups , étrangement, délivrent : l'une, de l'oppression familiale, l'autre, des servitudes maternelles, la troisième, du chagrin et de l'amour déçu.

Roberto Zucco est fascinant, transgressif et libératoire- et beau comme l'ange de la mort.

On pense au personnage étrange de Théorème, interprété par Terence Stamp, dans le film de Pasolini.

Dans Roberto Zucco, on est dans un univers symbolique, poétique, au-delà du bien et du mal. Quand l'existence humaine est d'une vue si courte qu'on serait bien en peine de lui donner un sens, comment en chercher un au destin? Et juger de son équité, de sa moralité ?

Tout le trouble, tout le scandale de la pièce vient de là. Et même la seule lecture -bien moins sans doute que la représentation- provoque malaise et interrogation.

A découvrir!




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J'ai bien aimé ces trois courtes pièces de théâtre dans leur ensemble. J'ai eu la chance d'avoir pu étudier en profondeur Roberto Zucco mais si cela n'avait pas été le cas, mon avis aurait été tout autre. En effet, je pense que je l'aurais nettement moins appréciée pour l'unique et bonne raison que je n'aurais pas compris toute sa symbolique.

Roberto Zucco est l'oeuvre testament de Bernard-Marie Koltès. Les thèmes de la liberté, de la mort et de la violence y sont abordés dans une grande mixité et avec des aspects très personnels de l'auteur.

le personnage de Zucco est très complexe et le dramaturge nous le donne à voir selon deux points de vue; l'un plus négatif que l'autre. À nous de choisir lequel adopter. L'expression "la fin justifie les moyens" est ce qui le qualifierait le mieux selon moi.

de même, la fin est très libre dans son interprétation et je l'ai trouvée particulièrement intéressante.

Ce fut une lecture très enrichissante d'un point de vue narratif qui nécessite toutefois selon moi une analyse approfondie pour en comprendre toute sa signification et sa teneur.
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Tout d'abord, j'ai appris a posteriori que Roberto Zucco était inspiré de faits réels. L'écriture de cette pièce est bonne, les didascalies sont utiles (j'ai par contre du mal à voir comment ces différentes scènes peuvent s'enchaîner sur scène). Toutes ces scènes, qui finissent par constituer une trajectoire, sont intéressantes. Le contexte, les liens entre les personnages ne sont pas expliqués et j'ai trouvé que cela manquait peut-être un peu pour gagner en ampleur et mieux comprendre le personnage de la gamine notamment ou l'univers du Petit Chicago.

À la suite de ce texte, on trouve deux fragments : Tabataba et Coco, l'écriture est bonne mais ces textes sont beaucoup trop courts ou parcellaires pour que je sois emporté ou intéressé.
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J'ai vu la pièce... et je n'ai pas accroché. Alors j'ai lu le livre... et ça m'est passé au dessus ! Mais je sens que c'est peut-être moi le problème. Trop de choses m'échappent: le choix du sujet, le personnage, le traitement des dialogues, les personnages annexes... Probablement un thème trop intellectualisé.
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J'avais entendu parler de cette pièce sulfureuse qui avait fait grand bruit, au moment de sa création. Quoique je ne sois pas féru de théâtre, j'avais eu vaguement envie de la voir, mais je ne l'avais pas fait. Je viens enfin de la lire.
En fait, Roberto Succo (et non Zucco) n'est pas une invention de Koltès. Entre 1981 et 1988, ce tueur en série a réellement sévi en Italie, en France et en Suisse. Les premières personnes qu'il a tuées sont ses parents: déclaré « schizophrène », il fut interné en hôpital psychiatrique dont il s'enfuit en 1986. Il a ensuite commis de nombreux vols, viols et meurtres, avant d'être arrêté. Il s'est finalement suicidé en prison.
Il fallait avoir de l'audace pour choisir un tel homme comme "héros" d'une pièce. Le parcours que Koltès décrit est presque conforme aux faits réels. Indiscutablement l'homme est fou, d'une certaine manière, et en même temps il a des côtés attachants. Il commet ses crimes comme à l'improviste, incité par une obscure pulsion: le lecteur, quoique prévenu, se trouve surpris. A part ses actes répréhensibles, il nous apparait compliqué et obstiné certes, mais presque comme sympathique. Une scène tragi-comique le montre prenant en otage, au hasard, un jeune garçon (qu'il tuera) et sa mère; les témoins du drame se comportent involontairement de manière très comique. A noter aussi un personnage secondaire important, qu'on appelle la Gamine, violée par Zucco (auquel elle restera attachée). Comme il se doit, la pièce se termine par la mort du "héros".
Il est clair que la création du personnage de Zucco est une réussite. Mais, décidément, je crois que je n'apprécierai jamais le théâtre à sa juste valeur. Dans cette pièce pourtant courte, de longs passages m'ont semblé verbeux. En outre, je n'arrive pas à admettre certaines conventions usuelles, propres au théâtre. J'aurais sûrement bien mieux apprécié de lire un roman sur ce même sujet et avec le même personnage.
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Comment j'ai fais la rencontre de Roberto Zucco et de Bernard-Marie Koltès ? En jouant cette même pièce au théâtre. Et ce fut l'amour fou.
Extrêmement difficile, noir, sombre, suivant un héros ayant toutes les caractéristiques de l'anti-héros, cette pièce (inspirée de faits réels), peut être difficile au premier abord, effrayante presque de cruauté. Mais elle est marquante par la beauté du texte, la psychologie complexe des personnages, la constante manipulation de Roberto Zucco et le débordement des désirs frustrés de chacun.
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Une magnifique pièce inspirée d'un fait réel, qui dénote tout l'art de Bernard-Marie Koltès. Il y a une justesse dans chacun de ses mots et ses personnages sont fascinants dans leur solitude : Roberto Zucco, tueur perpétuellement en fuite. La Gamine, amoureuse de cet homme qui l'a dépucelée, et qui est prête à tout pour le retrouver. Prête à précipiter sa propre perte et celle de Roberto Zucco s'il le faut.
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