Dans l'atmosphère ouatée d'un bureau, Camille et Alexandre se découvrent : elle est installée dans l'existence, épouse et mère ; il est le compagnon épisodique d'une jeune fille attirée par l'humanitaire en Afrique. Peu à peu, ils s'apprivoisent, jusqu'à en nourrir des connivences ; professionnelles d'abord, puis plus personnelles. Les yeux parlent avant que les mots viennent. Camille voit en cette idylle naissante une porte derrière laquelle elle ne vieillira pas. le soir, elle va d'une cabine téléphonique à une autre pour appeler "son" Alexandre et prolonger leur complicité fusionnelle. Lui la sanctuarise en griffonnant avec son coeur quantité de billets qu'il lui remet en catimini. Parce qu'il craint de la perdre chaque soir, quand elle retourne dans sa vie "légitime", il signe ses déclarations enflammées d'un Quasimodo, désespérant de convaincre "son" Esméralda de le rejoindre pour toujours dans ce sentiment trop grand pour eux. Ils ont beau succomber fugitivement au désir et aux caresses, au bout d'un chemin caché où sont les buissons, il va falloir faire des choix ; définitifs.
Un bel hymne à ces amours qui résistent à la distance, au temps qui passe, et même à l'absence délibérée.
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Derrière l'évocation des personnages de Hugo, une interrogation support : chaque être connaît-il une destinée unique ou ne sommes-nous que la réédition, partielle ou totale, d'existences passées ?
Des hommes et des femmes sont traversés par des passions et des peurs que le hasard conduit à entremêler au gré de leurs rencontres.
On s'aime sans concession, on se rapproche parce que l'on s'aime, on se quitte aussi parce que l'on s'aime, on craint de vieillir, on se culpabilise et on se sacrifie parce que l'on est heureux quand d'autres ne le sont pas.
Un roman cousu main.
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Cet échange, premier du genre, préluda à un rituel confiant à la nuance de leurs voix la lourde tâche de prolonger leur connivence. Ainsi, plusieurs soirs de semaine, la jeune femme composa ce numéro que ses doigts pianotaient à toute vitesse. Pour parler de tout et de rien. Leurs intonations devinrent si familières qu'ils se devinaient à distance, usant, au gré des sujets, de chuchotements dont ils avaient l'illusion de sentir le souffle dans l'oreille. Pour Camille et Alexandre, ce post-scriptume téléphonique s'était transformé en une friandise.
Le feu était allumé dans leur mémoire et ils se mirent à consommer comme une drogue dure cet amour, toujours blanc après tout ce temps qui s'envolait en les narguant. Les messages de Quasimodo se firent plus abondants, plus enflammés. Les coups de fil d'Esméralda plus longs, chaque soir d'une cabine différente dans l'angoisse d'être aperçue par quelque connaissance susceptible d'informer Rémi de cette étrangeté.