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3,65

sur 362 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
"Les mauvais jours finiront
Et gare ! à la revanche
Quand tous les pauvres s'y mettront"

Quel roman !
Une plongée étourdissante au coeur des 10 derniers jours de la Commune, en mai 1871. Dans le chaos total de la semaine sanglante, Hervé le Corre invente une intrigue criminelle, noire, haletante.
Tandis que Paris devient un champ de bataille, que les rues se transforment en charnier, qu'une fin inéluctable semble se dessiner, que certains pensent à sauver leur peau et que d'autres pensent à sauver leurs idéaux, des femmes disparaissent…
Parmi elle, Catherine, fiancée d'un communard. Ensevelie dans une cave, le temps presse pour la retrouver. le compte à rebours commence. le compte à rebours pour la sauver s'entrelace au compte à rebours de la Commune, la violence criminelle et la violence de l'histoire se mélangent.

L'auteur excelle à restituer une époque et à nous transporter dans les rues parisiennes alors que la capitale et l'espoir du peuple s'effondrent. J'ai eu mal aux pieds à force d'arpenter tous les quartiers, j'ai senti l'odeur de la guerre, le bruit de la mitraille, j'ai ressenti « l'espérance fatiguée » de ces hommes et de ces femmes, j'ai eu peur pour eux. Difficile de faire plus documenté, de faire plus sensoriel et plus sensitif.
Polar historique, récit de guerre, roman d'aventure, roman social, roman populaire… voilà un bouquin qui arrive à entrer dans toutes les cases. Pour simplifier les choses disons qu'il entre surtout dans la catégorie des très bons (et je ne vous parle même pas de l'écriture❤️).
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Dans l'ombre du brasier plonge le lecteur directement dans l'enfer de la semaine sanglante, cette semaine atroce qui, du 21 au 28 mai 1871, a tué les espoirs du peuple révolté de Paris.
Cette semaine qui a enterré la Commune sous un amas de décombres et de corps sans vie.
Cette semaine qui a clos définitivement l'espoir d'une vie meilleure, rêvée par les ouvriers de Paris, les artisans de Paris, tout ce peuple qui a soutenu vaillamment le siège imposé par les "Prusskos" de septembre 1870 à janvier 1871 et a refusé de courber le front au moment de la reddition du gouvernement en instaurant la Commune de Paris.
Cette semaine qui a défait l'élan contestataire et libertaire ayant jeté le peuple de la capitale (ou du moins une partie) dans la rue et sur les barricades.

C'est cela que Hervé le Corre nous conte en une narration fiévreuse, habitée d'un souffle puissant, le souffle de la révolte, le cri du peuple en colère acculé au désespoir.
Il en restitue la violence, l'espoir et le chagrin, l'enthousiasme, le courage parfois indomptable, sans omettre d'en pointer les défaillances, l'impréparation de la troupe, l'amateurisme, l'indiscipline, la naïveté.

Il brosse un tableau sans fard de cet échantillon d'humanité, parisiens et versaillais, dont il n'hésite pas à détailler les travers, bêtise, lâcheté, traîtrise, lubricité, parfois ordurerie au cours de ce récit où la trame romanesque n'a pas d'autre fonction que de mettre l'insurrection au premier plan, cette insurrection qui sera écrasée sans pitié au nom du sacro-saint ordre bourgeois. "Faites sans faiblesse votre devoir, dit une religieuse. Pour Dieu et la Sainte Eglise."

En effet, les héros de son roman ne sont pas Nicolas, Caroline, Adrien, le Rouge ou les autres. Non, c'est la Commune qui tient ici le haut du pavé et Hervé le Corre s'en fait le chantre, un chantre inspiré, dont le talent éclate tout au long de cette fresque habitée par l'aspiration à la liberté, la justice et l'espoir d'une vie meilleure.
Un cri magnifique !
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Séduit par la force de l'homme aux lèvres de saphir je me suis rué sur ce livre présenté comme une quasi suite,au moins temporelle et géographique, à l'ouvrage précité.Le cadre de ce second polar historique reste Paris, quelques mois après le premier récit d'Hervé le Corre pendant l'une des périodes les plus sombres de l'histoire de la Capitale,la Commune ,plus précisément la Semaine Sanglante et les quelques jours qui la précédent.
Mai 1871,la France capitulatrice s'est docilement offerte à l'ennemi prussien,le gouvernement républicain tendance monarchiste de Thiers n'a de défense nationale que le nom,la seule vraie résistance à l'envahisseur reste la poche parisienne que l'armée régulière française repliée à Versailles ne parvient pas à faire céder.
Appuyés par la garde nationale les communards refusent de poser les armes et rêvent de bousculer l'ordre bourgeois établi,de reconstruire une société nouvelle plus juste et équitable, sorte de république sociale des prolétaires dans une ville abandonnée par le pouvoir ,les puissants.
C'est pendant le second siège de Paris, lorsque les versaillais de Mac Mahon décident à grands renforts d'artillerie et dhommes de faire plier définitivement la canaille parisienne en pillonnant la ville et en la reprenant rue après rue qu'Herve le Corre fait courir sa plume exaltante.
On suit l'armée du peuple parisien,les quelques milliers de citoyens courageux qui composent ce corps désorganisé et sans grands moyens d'une Commune acculée. Dans les pas des soldats Adrien,Le Rouge et le sergent Nicolas Bellec,frères d'armes presque résignés et chancelants mais toujours combatifs dans les derniers jours dune lutte totalement desequilibrée, jusque dans la bataille finale par delà les barricades ,lutte de rue au corps à corps, boucherie fratricide et l'agonie désespérée du régime utopiste communard.L'écrasement de la Commune dans la déroute et dans le sang.
Une ville livrée à elle-même dans laquelle déambule un être sombre bien connu des lecteurs de le Corre.Au coeur de l'intrigue criminelle un certain Henri Pujol le monstre sanguinaire de L'homme aux lèvres toujours mu par les forces du mal qui donne desormais dans le kidnapping de jeunes femmes.
Sa quette diabolique doublée d'une fuite en avant sous ce déluge de feu croisera la route de plusieurs proies innocentes notamment Caroline l'amie de Bellec, mais aussi celle du commissaire Antoine Roques à ses trousses, des êtres encore habités d 'un incroyable sens du devoir dans les flammes de cet enfer,dans l'ombre du brasier d'un Paris exsangue livré à lui même, quelques uns des derniers êtres, il en reste quelquesuns dans ces pages , encore mus par l' espoir quand dans la rue tout chancelle et s'embrase.
Des hommes,des femmes qui cherchent à vivre, à s'élever encore plutôt qu'à plonger dans l'abîme et les ténèbres.Car l'espérance, l'amour,la fraternité continent à fleurir , à surgir dans les ruines fumantes de ce décor d'apocalypse et au travers des pages de ce roman prenant au possible.
Voilà un roman fort dans sa restitution détaillée,brulante et haletante d'un des épisodes insurrectionnels les plus sanglants de notre histoire.Le Corre manie avec grandeur l'art d'insérer ses intrigues criminelles ,ses petites histoires bien ficelées et les destins ordinaires dans un cadre historique fort et bluffant de véracité.
C'est avec lHistoire avec un grand H quil compose avec brio et justesse nous entraînant dans un récit épique , à couper le souffle, une nouvelle fresque historique héroïque, bouleversante sans temps morts qui marque les esprits et fait de ce roman un livre fort et fabuleux et de le Corre un auteur incontournable dans le paysage littéraire français.



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Si vous êtes féru de faits historiques, vous serez captivé par la narration de Hervé le Corre qui fait revivre les derniers moments de l'insurrection de la Commune de Paris.

Paris, mai 1871 : depuis deux mois, Communards et Versaillais se livrent une lutte sanglante sans merci. Dans cet immense chaos, dans ces rues mises à feu et à sang, des femmes sont enlevées et disparaissent.

Antoine Roques, relieur de son état, investit des fonctions de délégué à la sureté publique, va se faire un devoir d'essayer de sauver une de ces femmes dont l'enlèvement lui a été signalé.

Ce roman est une fresque historique vivante et bouleversante, richement documenté, dans lequel évoluent des personnages dont on admire le courage et l'élan d'humanité dans ce monde dévasté.

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Il y a presque quinze ans, avec L'homme aux lèvres de saphir, Hervé le Corre plongeait le lecteur dans le Paris de 1870 et le crépuscule du Second Empire. C'est quelques mois après l'action de ce roman, et dans un autre crépuscule, celui de la Commune, au coeur de la Semaine sanglante, que prend place l'intrigue de Dans l'ombre du brasier. Et c'est aux basques de l'un des personnages rescapés de L'homme aux lèvres de saphir, que l'on va assez vite s'accrocher. Quoi de plus facile, dans une ville insurgée et en état de siège, que de s'adonner, comme le fait l'inquiétant Pujols, à un petit trafic d'êtres humains, en l'occurrence de jeunes femmes qui servent de modèles à un photographe avant d'être revendues à des proxénètes ? Parmi elles, Caroline, infirmière de la Commune dont le fiancé, Nicolas Bellec est engagé dans les combats contre les troupes versaillaises. de son côté, Antoine Roques, ouvrier du livre et communard a, un peu contre son gré, hérité de la charge pesante de « délégué à la sûreté ». C'est que dans le monde nouveau qu'est la Commune, et quand bien même on a pu honnir jusque là la police, bras armé d'un État oppresseur, il convient encore de maintenir l'ordre et la sécurité des citoyens. Et bien vite, alors que se succèdent les combats, Roques va d'autant plus prendre sa mission à coeur que les troupes versaillaises sont prêtes à reprendre la ville et que le chaos s'installe : il lui faut à tout prix mettre la main sur celui qui enlève des jeunes femmes et, avant qu'il ne soit trop tard, retrouver Caroline, dernière en date de ses victimes.
Plus roman d'aventures que roman noir, Dans l'ombre du brasier est avant tout une course effrénée contre le temps dans une ville en guerre et en proie aussi bien aux combats avec les troupes ennemies qu'aux règlements de comptes entre citoyens communards et soutiens du gouvernement ou entre insurgés, animés parfois par des motivations qui n'ont pas forcément à voir avec le rêve de l'établissement de la République sociale.
Cette complexité de la Commune, des groupes qui l'animent et, partant, de ceux qui combattent pour elle, de ceux qui la combattent ou de ceux qui ne choisissent pas leur camp, Hervé le Corre la rend à travers des personnages qui n'ont rien de monolithique et qui, tout au long de ce récit sont amenés à faire des choix, à changer parfois, à piétiner en partie leurs principes, à abandonner un peu de leurs rêves ou, au contraire, à préférer mourir pour eux que de s'en défaire. En cela, l'intrigue qui donne naissance au roman et qui en restera le fil conducteur – Nicolas et Caroline arriveront-ils à se retrouver ? – est avant tout prétexte à une saisissante course dans un Paris insurgé qui voit venir la fin de son rêve de gouvernement prolétarien mais se refuse à l'abandonner.
À ces personnages, Hervé le Corre offre donc un décor magistralement peint. Il fait sentir la crasse, la fumée, la poussière et les vibrations des bombardements, donne à voir cette guerre menée par des femmes et des hommes qui n'y sont pas formés, souvent inorganisés, mais qui s'accrochent à leur espoir d'un monde meilleur et sont prêt à laisser leur peau pour qu'il ait une infime chance d'aboutir.
Pour cela il s'appuie sur une documentation que l'on suppose considérable – et sur une imagination aiguillonnée sans doute par l'empathie qu'il peut éprouver pour ce peuple en lutte – qui, pourtant, ne devient jamais pesante, mais prend littéralement corps. On y est et on se laisse volontiers prendre dans ces journées de fureur et d'ultimes joies et espoirs. On vit l'attente, les verres partagés dans quelque caboulot, les escarmouches et les combats qui prennent de plus en plus d'ampleur à mesure que l'offensive versaillaise se précise.
Parfaitement rythmée, l'action va crescendo, les personnages se croisent, se trouvent ou se perdent, dans un véritable tourbillon ou naissent des amitiés éternelles, des haines fugaces mais parfois assassines, et où la violence du temps finit toujours par mettre les âmes à nu.
Tout cela donne un roman d'une rare ampleur, vibrant de vie, tragique et beau.

Lien : http://www.encoredunoir.com/..
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Il y a presque quinze ans, avec "L'homme aux lèvres de saphir", Hervé le Corre nous plongeait dans le Paris de 1870 . C'est quelques mois après l'action de ce roman, au coeur de la Semaine sanglante de la Commune, que prend place l'intrigue . Et c'est aux basques de l'un des personnages rescapés de "L'homme aux lèvres de saphir" que l'on va assez vite s'accrocher. Quoi de plus facile en effet, dans une ville insurgée et en état de siège, que de s'adonner, comme le fait l'inquiétant Pujols, à un petit trafic d'êtres humains, en l'occurrence de jeunes femmes qui servent de modèles à un photographe avant d'être revendues à des proxénètes ? Parmi elles, Caroline, infirmière de la Commune dont le fiancé, Nicolas Bellec est engagé dans les combats contre les troupes versaillaises. de son côté, Antoine Roques a, un peu contre son gré, hérité de la charge pesante de « délégué à la sûreté ».
Et bien vite, alors que se succèdent les combats, Roques va d'autant plus prendre sa mission à coeur que les troupes versaillaises sont prêtes à reprendre la ville et que le chaos s'installe : il lui faut à tout prix mettre la main sur celui qui enlève des jeunes femmes et, avant qu'il ne soit trop tard, retrouver Caroline, dernière en date de ses victimes.

Plus roman d'aventures que roman noir, "Dans l'ombre du brasier" est avant tout une course effrénée contre le temps dans une ville en guerre et en proie aussi bien aux combats avec les troupes ennemies qu'aux règlements de comptes entre citoyens communards et soutiens du gouvernement.
L'intrigue qui donne naissance au roman et qui en restera le fil conducteur – Nicolas et Caroline arriveront ils à se retrouver ? – est avant tout prétexte à une saisissante course dans un Paris insurgé qui voit venir la fin de son idéal de gouvernement prolétarien mais se refuse à abdiquer.

À ces personnages, Hervé le Corre offre un décor magistralement peint. Il fait sentir la crasse, la fumée, la poussière et les vibrations des bombardements, donne à voir cette guerre menée par des femmes et des hommes qui n'y sont pas formés, souvent inorganisés, mais qui s'accrochent à leur espoir d'un monde meilleur et sont prêt à laisser leur peau pour qu'il ait une infime chance d'aboutir.
On se laisse volontiers prendre dans ces journées de fureur et d'ultimes joies et espoirs. On vit l'attente, les verres partagés dans quelque caboulot, les escarmouches et les combats qui prennent de plus en plus d'ampleur à mesure que l'offensive versaillaise se précise.

Parfaitement rythmée, l'action va crescendo, les personnages se croisent, se trouvent, se perdent dans un véritable tourbillon ou naissent des amitiés éternelles, des haines fugaces mais parfois assassines.
Tout cela donne un roman d'une rare ampleur, vibrant de vie, tragique et beau. Je recommande ce livre sans hésitation!
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Un grand moment de lecture que ce roman ! Hervé le Corre ne se contente pas de nous raconter une histoire il nous fait vivre les derniers jours de la Commune comme si nous y étions. L'intrigue policière passe à mon avis au second plan tant la description des combattants de la Commune sont poignants. Parfaitement rythmé le récit monte en puissance au fil des pages les personnages se croisent dans un véritable tourbillon où la violence du temps finit toujours par mettre les gens face à eux même. Pas vraiment un polar ni un réel livre d'histoire "Dans l'ombre du brasier" est une porte pour comprendre la Commune et si on sent beaucoup d'empathie de l'auteur envers les communards il n'y a pas de jugement de valeur de sa part et le récit n'est pas manichéen et personne n'est parfait ou ne détiens la vérité fait ainsi qu'au fil des pages on suit des gens ordinaires avec leurs doutes, leurs espoirs et leurs regrets également. Un grand roman qui entremêle étroitement la grande Histoire sérieuse et très bien documentée avec un suspens qui transforment "L'ombre du brasier" en roman noir d'une très grande envergure et en fait une splendide et tragique fresque populaire et sociale.
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Hervé le Corre a choisi de raconter une histoire policière dans le cadre des derniers jours de la Commune, du jeudi 18 mai au dimanche 28 mai 1971. le livre est divisé en 11 parties, un pour chaque jour, avec dans chaque partie, des chapitres où on suit les différents personnages en même temps que les bombardements et les batailles dans les rues.
Nicolas et ses frères d'arme, un grand rouquin surnommé le Rouge et le jeune Adrien défendent Paris contre l'offensive des versaillais. Caroline, la petite amie de Nicolas, s'affaire dans un hôpital improvisé à secourir les blessés. Monsieur Charles est photographe et exploite la situation en enlevant des jeunes filles pour faire des photos pornographiques et revendre ses victimes aux réseaux de prostitution. Il est aidé par le sinistre Pujol et son acolyte Clovis. Antoine Roques a été élu « délégué à la sûreté » à la place des flics qui se sont enfuis à Versailles. Roques décide de mener l'enquête malgré le siège des Prussiens, malgré le brasier de « la Commune ».
« le vieux monde qu'on croyait aboli, son ordre culbuté, ses bourgeois enfuis, s'apprête à revenir dans le fracas du feu et de l'acier, et ce sera impitoyable. Il n'est qu'à lire les journaux de Versailles : leurs appels au meurtre, à l'expiation par le sang et la mort des péchés de ce peuple barbare. »

Le Corre, dans ce roman, adopte une écriture particulière qui nous transporte au coeur du brasier. Il y a l'ombre de Victor Hugo, de Jules Vallès, de Louise Michel ou, plus proche de nous, de la gouaille d'Alphonse Boudard. Des mots, des tournures sont empruntés au langage populaire : le caboulot, le rade, l'eustache, un gommeux, un loquedu, le capiston... Oui, on trouve ça dans les dicos !
« Tous ces lignards qui ont détalé devant les Prusscos, et qui maintenant se sentent du courage pour venir fusiller le populo, c'est tous fils de garces et soulards comme leurs papas. Ce monde est bien aux mains des brutes... La Sociale ça sera pas pour ce coup-ci. »
« Dans la colonne des prisonniers, La Marseillaise explose brusquement à la gueule des gardiens comme une bombe. »

On est clairement dans un roman policier historique, avec une très large place accordée aux suites de la guerre contre la Prusse, à la guerre civile entre communards et versaillais. Mais l'histoire nous est racontée, vue par la rue, par le peuple, à travers les rumeurs, au jour le jour, d'où cette impression d'être immergé dans les évènements... C'est totalement effrayant de réalisme et de violence !
J'ai eu un peu de mal à me mettre dans le contexte de l'époque du fait de cette immersion, du manque d'éléments sur cette période terrible. Hervé le Corre semble nous dire : « voilà ce que les parisiens ont vécus du 18 au 28 mai 1871, si vous voulez en savoir plus sur les raisons d'une telle situation, si vous voulez comprendre pourquoi une armée aux ordres d'un gouvernement élu sous occupation prussienne bombarde, anéanti sa propre population parisienne, alors revoyez l'histoire de France de la Révolution française jusqu'à cette année 1871.»
« C'est le 14 juillet, c'est juin 48, c'est le 18 mars... C'est l'imprévu. Pourquoi ces jours-là et non plus tôt, ou plus tard ? La commune, c'est une idée. C'est par cette idée qu'on peut, justement, s'élever. Rêver plus haut... » le 18 mars 71, c'est le jour où Thiers a décidé de retirer les armes des parisiens, utilisées pour résister au siège prussien et à les utiliser pour mater l'insurrection...

L'histoire me passionne, surtout l'histoire de France, mais je n'ai pas le souvenir d'avoir jamais abordé au collège ou au lycée cette période. Pourtant ce n'est pas rien : une 2ème république de 1848 à 1852, date du rétablissement de l'Empire par Napoléon III par un coup d'Etat, une guerre où la France va capituler et céder l'Alsace et la Lorraine... Un retour à une 3ème république en 1870 suite à la capitulation de Sedan. L'action du roman se déroule en mai de l'année suivante.

Je pense que cette méconnaissance des évènements de la Commune est répandue. Est-ce parce que les évènements sont complexes avec une guerre contre la Prusse et une guerre civile comme un retour de l'esprit de la révolution de 89, une levée en nombre du peuple qui n'en peut plus de la misère et de l'incurie des gouvernants ? Est-ce parce que la classe possédante a eu tellement peur que mieux vaut mettre tout cela sous l'éteignoir afin de ne pas donner des idées de justice sociale aux nouvelles générations ?

L'histoire s'écrit en fonction de connaissances qui évoluent en permanence, fruit de recherches de plus en plus poussées. Elle évolue, et c'est plus sournois, en fonction des rapports de force, avec des faits mis en lumière, d'autre mis dans l'ombre et parfois falsifiés à des fins tactiques. le romancier contribue à sa manière au travail historique. En apportant la puissance romanesque du récit, il permet au lecteur une identification... Et il peut donner envie au lecteur d'effectuer des recherches complémentaires, à partir de sources sérieuses, afin d'alimenter sa propre réflexion sur la période historique.

J'ai découvert qu'une association de Professeurs d'Histoire avait dénoncé, lors de l'instauration des nouveaux programmes en 2014, l'absence de la Commune de Paris dans les programmes. Volonté de soumettre les élèves et de brider l'esprit critique ? Qu'en est-il actuellement ? Si un lecteur de ce blog peut me renseigner je suis preneur...

A voir les lois qui ont été votées dans la foulée de ces évènements, il est permis de penser que la Commune, et ses milliers de victimes, n'y est pas pour rien. Des personnages tels que Victor Hugo, Jules Ferry et d'autres, ont réussi à peser sur le cours de l'histoire : loi sur le travail des enfants en 1874, gratuité de l'enseignement primaire dans les écoles publiques en 1881, loi sur les syndicats professionnels en 1884, loi sur la séparation de l'Eglise et de l'Etat en 1905... D'autres pays, aux peuples plus dociles, n'ont pas connu ces avancées majeures.

Je me suis attardé sur le contexte historique, très présent, mais l'intrigue policière est plutôt bien menée et on est vite entrainé dans l'action, à la suite des personnages. le tout en fait un roman policier singulier qu'on ne lâche pas jusqu'à la dernière page.

Pour en savoir plus sur la commune, comprendre ces évènements, on peut retrouver sur internet les conférences, images et son restaurés, données par Henri Guillemin en 1971. Un coffret de 3 DVD est aussi disponible : https://www.rts.ch/archives/dossiers/henri-guillemin/3477764-la-commune-de-paris.html. Notamment l'exposé sur les journées sanglantes dont il est question dans le roman de Hervé le Corre : https://www.rts.ch/archives/tv/culture/dossiers-de-l-histoire/10320030-le-moment-de-verite.html

Lire également le petit livre paru aux éditions de l'Herne, en 2016, "L'insurrection parisienne" de Victor Hugo.

J'ai aussi lu, coïncidence bienvenue, "Jojo, le Gilet Jaune" de Danielle Sallenave, membre de l'Académie française, brochure parue chez Tracts Gallimard en avril 2019. J'ai retrouvé, magnifiquement dénoncée ici, une certaine rage des milieux dirigeants face aux sans grades, à ceux qui ne sont rien, semblant traverser les siècles...

Notes avis Bibliofeel octobre 2019, Hervé le Corre, Dans l'ombre du brasier
Voir autres articles de mes livres "essentiels" sur le site "Bibliofeel" ou "clesbibliofeel" !


Lien : https://clesbibliofeel.blog/
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La Commune tragique.
Chronique d'une défaite annoncée, le roman noir d'Hervé le Corre reprend l'éphéméride englobant la Semaine sanglante, du jeudi 18 mai 1871 au dimanche 28 mai 1871, déroulant l'engrenage mortel des Communards face aux Versaillais, du pot de terre de la misère contre le pot de fer des nantis. Les fédérés tiennent le siège mais les lignards, en surnombre, vindicatifs et revanchards, gagnent du terrain. Les obus, la mitraille et les baïonnettes éclatent, déchiquettent et pourfendent des civils non aguerris. Alors que chacun pressent le carnage à venir, les idéaux semblent vissés à l'âme et nombreux espèrent encore un avenir moins misérable, une vie peut-être à enchanter.
Dans ce contexte explosif et chaotique, Nicolas Bellec, le Rouge et Adrien, un trio de vaillants fédérés, luttent farouchement pour retarder l'hallali d'une Commune aux abois. Caroline, jeune et belle infirmière dévouée, fiancée de Nicolas, est enlevée et molestée par Henri Pujols, tueur vicelard surfant sur la vague de chaos et de terreur en mouvement. Roques, commissaire communard, alerté par des disparitions de jeunes femmes, s'acharne à retrouver Caroline mais les Versaillais investissent Paris, violant, exécutant, bastonnant, emprisonnant tout habitant de la capitale sans autre forme de procès. « Trois questions, une balle » tel est le credo de la soldatesque ivre et déchaînée. Roques va devoir composer avec l'ennemi, donnant ainsi à voir de l'autre côté de la barricade un ennemi craint, honni et fantasmé. Pourtant, le communard n'est pas au bout de ses peines. Des personnes valeureuses s'effondrent. Caroline se meurt. Pujols s'esquive. La justice n'est plus de ce monde en furie.
Hervé le Corre aime écrire et le lecteur s'en aperçoit immédiatement. Les phrases sont travaillées. le rythme est soutenu. La documentation bien assimilée consolide les soubassements du récit. Faisant suite à « L'homme aux lèvres de saphir » (2004) qui couvrait la chute du Second Empire en 1870, annonçant la Commune, le roman permet de s'immerger au plus près des hommes, souffrant, espérant, d'éprouver de l'empathie pour tous les laissés-pour-compte de l'histoire, nos frères aussi. Hervé le Corre a choisi son camp auquel on ne peut qu'adhérer sans réserve.
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On peut bien évidemment consulter les livres d'histoire pour connaître les événements qui ont jalonné la période de la Commune et plus particulièrement, ceux qui ont émaillé cette fameuse Semaine sanglante durant laquelle communards et versaillais s'affrontèrent dans les rues de Paris. Mais pour s'imprégner de l'ambiance, pour prendre la pleine mesure de cette époque insurrectionnelle, rien ne saurait suppléer quelques romans de genre comme le Cri du Peuple de Jean Vautrin qui prend pour titre le quotidien éponyme créé par Jules Vallès et Pierre Denis. Et tant qu'à faire on ne saurait trop recommander la version BD, mise en image par Jaques Tardi et dont l'album intégral (Casterman 2005) contient également un CD reprenant quelques chansons populaires de la Commune. S'inscrivant dans la même veine, avec un récit oscillant entre le roman noir et le roman d'aventure prenant pour cadre cette tragique trame historique, Hervé le Corre met en scène Dans L'Ombre du Brasier l'inquiétant Henri Pujols que l'on avait déjà croisé dans L'Homme Aux Lèvres de Saphir (Rivages/noir 2004) et qui se livre désormais à un odieux trafic de femmes.

Au mois de mai 1871, le peuple dresse des barricades dans les rues de Paris pour faire face aux versaillais qui s'apprêtent à investir la capitale afin de mettre un terme à cette parenthèse insurrectionnelle de la Commune. Une période trouble, extrêmement propice pour se livrer à toutes sortes de sévices comme la disparition de ces jeunes filles enlevées par un individu plutôt inquiétant qui a mis en place un terrible trafic d'êtres humains. Parmi ces jeunes femmes disparues, il y a Caroline qui a eu le malheur de croiser le chemin de ce ravisseur repoussant. Apprenant sa disparition, Nicolas Bellec, sergent au sein de la Garde Nationale, va se lancer à la recherche de sa bien-aimée tout comme Antoine Roques, récemment promu « commissaire » par la Commune, et qui veut faire la lumière sur cette série d'enlèvements. Chacun de leur côté, les deux hommes vont tenter de retrouver Caroline en bravant les bombardements, les incendies, les fusillades et les exécutions sommaires tandis que la jeune femme tente de survivre dans une cave ensevelie sous les décombres d'un immeuble effondré. Une lutte contre le temps s'engage alors que la Commune vit ses derniers instants dans un déluge de feu et de sang.

Chassé-croisé dans les rues dévastées de Paris, le lecteur ne manquera pas d'être subjugué par un texte d'une rare intensité prenant la forme d'une fresque historique bouleversante évoquant cette épopée héroïque d'un peuple oppressé en quête de liberté qui tente, dans un ultime sursaut, de faire face au choc des troupes versaillaises bien décidées à éradiquer jusqu'au dernier de ces insurgés. Un déferlement de sensations et d'impressions émane donc de ce récit qui nous rappelle les tableaux de ces grands maîtres impressionnistes auxquels l'auteur rend d'ailleurs hommage avec cette toile de Pissarro que l'un des protagonistes découvre sur la paroi d'un salon dans lequel il a trouvé refuge. Tout comme ces peintres de l'époque, Hervé le Corre restitue, par petites touches subtiles, avec toute la richesse d'une palette chargée de mots, ce décor dantesque d'une guerre qui n'a rien de civile. On perçoit ainsi les remugles de la misère, l'odeur du sang et de la poudre, ces effluves de charognes balayées soudainement par la violence des combats et la fumée des incendies. Et puis il y a toute la gamme de sentiments et d'émotions qui habillent l'ensemble de personnages intenses, ballotés dans la fureur des événements qui s'enchainent en les contraignant parfois à renoncer à leurs idéaux ou à mourir pour eux dans un déchaînement de fureur et de violence.

Sur fond de cavalcades effrénées, Dans L'Ombre du Brasier s'articule principalement autour de l'enjeu des retrouvailles entre Caroline, officiant comme infirmière dans un des dispensaires de fortune de la Commune, et Nicolas Bellec qui s'est engagé dans les troupes de la Garde Nationale, tandis que le décompte de cette Semaine sanglante devient de plus en plus oppressant à mesure de l'avancée des versaillais progressant dans les rues de Paris en balayant les barricades qui se dressent devant eux. Au-delà des sentiments qu'ils éprouvent l'un pour l'autre, c'est surtout cette soif de justice et de liberté qui plane sur l'ensemble de l'entourage venant à l'aide de ces deux jeunes gens traqués de toute part, quitte à y laisser leur vie. le sacrifice de ce petit peuple de Paris qui voit peut-être une lueur d'espoir au détour de cet amour balbutiant tandis que les idéaux de la Commune vacille dans le tonnerre des canonnades et le crépitement des balles des lignards. Beaucoup plus ambivalents, on appréciera également des individus tels qu'Antoine Roques, communard convaincu, qui doit endosser presque à contrecoeur la fonction de commissaire en s'efforçant d'exercer son nouveau métier du mieux qu'il le peut en appliquant les principes d'équité de ce gouvernement révolutionnaire. Plus énigmatique encore, on découvre Victor, ce mystérieux cocher, en quête de rédemption, après avoir été le complice d'un odieux ravisseur, en s'efforçant de venir en aide aux insurgés et en prenant fait et cause aux idéaux de la Commune. Toute une galerie de portraits nuancés évoluant dans la tourmente d'une époque aussi trouble que complexe que l'auteur parvient à saisir au détour d'un travail de documentation dont on devine l'importance et qu'il restitue au gré d'un récit ample et généreux qui se dispense d'explications pesantes et rébarbatives.

Évoluant dans le méandre des rues de Paris, de la porte de Saint-Cloud jusqu'au cimetière de Belleville en passant par le Luxembourg où l'on fusille les insurgés et le Panthéon, théâtre du massacre de bon nombre de communards, qu'Hervé le Corre dépeint avec la puissance évocatrice de ses mots au service d'une intrigue prenante, Dans L'Ombre du Brasier est avant tout un portrait social mettant en lumière cette révolte d'un peuple valeureux en quête de liberté, d'égalité et de fraternité. Un roman intense et bouleversant qui vous laissera sans voix.


Hervé le Corre : Dans L'Ombre du Brasier. Editions Rivages/Noir 2019.


A lire en écoutant : Nocturnes, Les Nuages de Debussy. Album : Les Siècles François-Xavier Roth. 2018 Les Siècles.
Lien : http://monromannoiretbienser..
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