Bien qu'intéressant, cet ouvrage présente aussi des théories très caricaturales sur le rôle, les attentes et les besoins des hommes et des femmes.
J'ai appris beaucoup de choses sur la valeur de la peau, sur la nécessité de la traiter avec respect et bienveillance, sur le besoin de chaleur humaine (qui est plus primordial que le sexe) et sur certaines techniques propres à faire tourner la tête aux partenaires ; mais les chiffres, les études et les références étaient trop peu crédibles. L'auteur affirme tout, mais ne justifie rien : les femmes sont plus en demande de tendresse, elles ont une masturbation élaborée qui concerne l'entièreté du corps (contrairement à la pratique mécanique masculine), leurs mamelons sont beaucoup plus sensibles et érogènes que ceux des hommes. Je ne me suis pas du tout reconnue dans ces affirmations, et j'ai donc éprouvé beaucoup de méfiance sur tout le propos du livre.
Les études, venons-en ! On nous en cite beaucoup sans les nommer, on en donne les chiffres sans détailler le nombre de participant.es, le lieu ou l'année, on en tire des conclusions sans en livrer au lecteur tous les tenants et aboutissants… Les conclusions sont étayées par de nombreux témoignages, placés très stratégiquement, mais aucune mention n'est faite du contexte, du lieu, du sujet ou même de la personne. Les arguments n'ont donc aucune solidité selon moi.
Et que dire de ce flou qui confine au mensonge ? Je retiens notamment cette citation affligeante : « Dans l'Antiquité, le phallus fut un objet de vénération ; les Anciens adoraient des dieux ithyphalliques, c'est-à-dire, muni d'un colossal pénis en érection. » Quels Anciens ? Quels dieux ? L'adjectif « ithyphallique » me fait immanquablement penser à la Grèce antique, qui avait effectivement dans son Panthéon certains Pan, Priape et autres références héroïques bien membrées. Mais au lieu d'être vénérés à cause de ces charnelles propriétés, ils en étaient moqués. Un pénis imposant n'était pas signe de virilité, mais d'animalité. La Grèce valorisait plutôt les hommes peu équipés, considérés comme étant plus réfléchis et plus élevés.
Donc à quels Anciens
Gérard Leleu fait référence ?
Je dois cependant admettre que l'auteur sait parler de son sujet avec poésie, maniant habilement les métaphores, évoquant des images fortes, amusantes ou coquines (voire citations). Les descriptions des différentes caresses sont bien faites, assez évocatrices. C'est plutôt bien joué, d'autant que c'est un sujet qui peut facilement sembler vulgaire (l'auteur décrit très en détail différentes scènes de coït).
Par ailleurs, il encourage une sexualité tendre, non tendue vers l'orgasme. Les caresses et le plaisir non sexuel ne sont pas un simple moyen d'accéder au coït, mais déjà un plaisir en soit qui est trop peu valorisé. C'est un message qui gagnerait à être plus largement diffusé.
En bref, contrairement à ce que j'attendais de cette lecture, c'est un texte très peu scientifique et beaucoup plus intuitif qui s'adresse exclusivement aux couples hétéronormés (ce livre a été publié dans les années 90). C'était sympathique à lire, mais le manque de rigueur m'a profondément agacée.