Le destin d'Anjali

« Anjali était assise par terre dans sa chambre. Elle n'avait pas immédiatement compris ce qui allait lui arriver, mais une fois confrontée à la réalité, elle avait pleuré et crié, s'était débattue comme une tigresse tandis que les femmes l'empoignaient pour lui enfiler de force sa tenue de cérémonie. Elle se déchaîna. Hurla. »

On l'a gifla, et on promit de la battre, si elle ne se laissait pas faire.

« Ensuite, elle s'était adossée contre le mur, mais, ses jambes refusant de la soutenir, elle avait glissé jusqu'au sol et s'était laissée tomber avec un bruit sourd, poupée de chiffon froissée, affublée du sari et des bijoux qu'elle avait portés le jour lointain de ses noces, alors qu'elle n'était qu'une enfant. Elle essayait de réprimer la terreur qu'elle éprouvait, mais c'était plus fort qu'elle. Une nouvelle éruption de peur panique lui donna le vertige et des hauts-le coeur. »

Mariée à dix ans à un homme de quarante ans, à bientôt seize ans, elle est la deuxième épouse, inféconde, son mari décédé, elle doit être brûlée vive, pendant la crémation de son époux et l'accompagnait dans son dernier voyage. Ainsi l'exigent les cruelles coutumes encore en vigueur en Inde à l'orée des années 1920.

In extremis, elle fut sauvée par son père, qui l'aimait énormément. Dissimulée par une burqa, Il l'a confia à Saleem, un ami d'enfance, qu'elle n'avait pas revu depuis de nombreuses années.

Obligés de se séparer, durant deux jours, ils devaient se retrouver à Kalipet Junction. Un sentiment de panique l'accompagnait en permanence, ne sachant de quoi serait fait son avenir. Elle avait raison.

Saleem, qui avait rendu visite à sa soeur, se retrouva malgré lui, pris dans une immense manifestation.
« le général de brigade Dyer a donné l'ordre d'interdire toute manifestation et d'empêcher tout rassemblement de ceux qui luttent pour la liberté et s'expriment contre la loi Rowlatt. »

Emporté, par une foule, estimée à une vingtaine de milliers de personnes, il se retrouva pris au piège, le général anglais Dyer et ses soldats firent un immense massacre.

« Nous refusons de punir et nous ne désirons pas nous venger. Nos seules armes sont la vérité et la non-violence. C'est ainsi que nous entendons changer le système qui engendre la brutalité. » Les mots du Mahatma Gandhi résonnaient dans sa tête.

Bien sûr, ce fut un rendez-vous manqué pour les deux amis, se retrouvant seule, crédule et ne sachant quoi faire, Elle fit confiance à une femme qui devait lui apprendre à danser, malheureusement, elle se retrouva, dans les griffes d'une dangereuse entremetteuse, qui veut la vendre au zamindar, chef du village, à qui on ne peut rien refuser.

Dans un pays sous contrôle britannique, maltraités, les indiens commençaient à se rebeller, de violents soubresauts, dus aux indépendantistes, compliquèrent les choses.

Nous suivrons Anjali, dans sa fuite en avant, elle recherche toujours Saleem, nous croiserons d'autres femmes et leur triste histoire, elles se battent pour avoir un tout petit peu d'indépendance. Les femmes doivent restées enfermées, pour le plaisir de leur mari et enfanter. Quand elles sont veuves, c'est pire que tout.

« Naître femme était-il une punition pour ce qu'on avait fait dans une autre vie ? Est-ce que c'était avéré ? Est-ce que ça signifiait qu'aucun homme n'avait commis de péché dans sa vie antérieure ? Est-ce pour cela que les hommes se montraient si machistes ? C'était bien pratique pour eux d'oublier que sans femme, sans mère, ils n'existeraient pas, n'est-ce pas ? »

Le destin d'Anjali est un très beau roman dédié à la destinée d'une femme courageuse et résiliente. 
Anjali a été mariée très jeune à un homme d'une quarantaine d'années, ayant déjà une femme. Elle est heureusement tombée sur un homme bon qui aime sa première épouse et n'en souhaitait pas une seconde, c'est sa famille qui le contraint à cette decision. Malheureusement sa vie prend un tournant dramatique le jour où son mari décède, les membres de sa famille mettent alors en place une cérémonie traditionnelle : la deuxième femme doit accompagner son mari sur le bûcher funéraire. Son père parvient à la faire s'échapper en pleine nuit juste avant le drame. À partir de ce moment, Anjali se retrouve à vivre de multiples aventures, l'emmenant dans différentes villes, différentes cultures, auprès de personnes malveillantes, mais lui faisant rencontrer aussi de très belles personnes. Toutes ces péripéties feront d'Anjali une femme indépendante, forte et maîtresse de son destin. 
.
J'ai bien aimé ce roman qui se lit d'une traite tant on veut connaître ce qu'il va arriver à Anjali. J'ai trouvé que tout se goupillait un peu trop facilement parfois, que le roman avait des passages un peu fleur bleue et que les personnages étaient un peu lisses. Mais cela change des romans dramatiques et tristes que j'ai tendance à lire. On apprend aussi plein de choses sur l'Inde colonisée et notamment les mouvements de protestations qui ont eu lieu pour l'indépendance, les différents types de rébellions, comment étaient les relations entre les princes des États et les membres du gouvernement britannique. Et surtout on découvre différents portraits de femmes peu importe leur caste et leur religion.

Ce roman est un hommage aux femmes et aux hommes indiens mais aussi quelques britanniques qui ont su se battre pour donner une autre alternative à la vie des femmes indiennes qui ont pour beaucoup été mariées, alors qu'elles ne sont que de petites filles, à des hommes beaucoup plus âgés . Si, par malheur, elles deviennent veuves, et ce quelque soit leur âge elles peuvent être immolées lors de la crémation du corps de leur époux, ce bien que ce rite soit officiellement interdit par le gouvernement britannique. En effet, si leur époux décède c'est parce que dans une vie antérieure elles auraient commis de mauvaises actions. Ou alors, elles sont rasées et doivent faire abstinence en tout et mener une vie recluse. Elles peuvent aussi devenir des proies sexuelles et objet de commerce.
L'action se passe au début du 20ème siècle, dans une petite ville d'Inde. Des soulèvements contre l'oppresseur britannique deviennent de plus en plus fréquents. La parole de Gandhi est porteuse d'espoir mais il faudra attendre 1947 pour que l'Inde retrouve son indépendance. Des affrontements violents et meurtriers ont lieu. Les paysans croulent sous les impôts exigés par les Britanniques et collectés par des potentats qui, eux-mêmes, en prélèvent aussi. S'ajoute à toute cette misère du petit peuple le poids de la religion hindoue et musulmane.
Un roman qui permet de découvrir des pans de l'histoire de l'Inde et amène à se pencher sur le parcours de Gandhi.

Une histoire de mariage forcée en Inde dans les années 1920. Anjali quitte sa famille à 10 ans, devient la deuxième épouse. On la retrouve 5 années plus tard, condamnée à brûler vive pour accompagner la dépouille de son mari. Une pratique interdite déjà à cette époque, mais les traditions ont la vie dure. On suit le 'destin d'Anjali', sa fuite, ses rencontres et aussi la force, la sororité. Seul bémol de ce livre : l'écriture ou la traduction qui manque de fluidité.

“Le Destin d'Anjali” d'Hema Macherla est une oeuvre captivante et critique, explorant les réalités sombres de la société indienne à travers le parcours tumultueux de son héroïne. Mariée enfant puis rapidement veuve, Anjali survit à la tradition barbare de la sati, illustrant la brutalité des pratiques religieuses et la précarité de la condition féminine en Inde. La séparation d'avec son ami d'enfance, suite à une manifestation violente, marque une période de solitude et d'épreuves intensifiant son combat pour la liberté et la dignité.

Le roman se distingue par sa dénonciation franche des inégalités de castes et de l'oppression des femmes, tout en mettant en scène une quête d'autonomie et de bonheur. Bien que se concluant sur une note d'espoir avec une fin heureuse pour Anjali et d'autres personnages, le dénouement peut sembler simpliste face à la complexité des thèmes traités. En somme, “Le Destin d'Anjali” est à la fois un récit de résilience face à l'adversité et une critique pertinente des aspects répressifs de la culture indienne.