Mahy prend toute sa place dans le paysage poétique français, encore faut-il accepter de se laisser aller à parcourir les bois, les forêts avec l'auteur. Car la nature l'inspire, c'est certain, il écrit en suivant le rythme de sa respiration et contemple l'intérieur et l'extérieur de son être. La démarche est lente et posée, aussi bien dans le chemin qui mène à l'écriture que dans son parcours au travers de la nature et des souvenirs, du temps présent de l'action -contemplation. le recueil est à lire et relire, au gré des saisons, les jours de spleen ou de bonheur car, quelque soit l'état du lecteur, Mahy ne laisse pas insensible. Voici une découverte heureuse d'un fragment de poésie contemporaine, inscrit dans une filiation "à la Jacottet".
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Veillées
extrait 3
Peut-être faut-il
un peu de soleil dans les herbes
pour ouvrir le chemin
et pour dire qu’il est temps
de partir au-devant de notre ombre
allongée sur les seuils
mais avant juste avant
il y a ce moment
où rien n’existe
hors un rayon lâché
au travers des nuages
juste pour éclairer
ce qui doit l’être.
Veillées
extrait 1
Avant d’aller plus avant
encore
ici ou ailleurs
peut-être vaut-il mieux
refaire
la route à l’envers
ou laisser le vent
traverser la mémoire et les sous-bois
empreints d’absence
pour finalement
rebrousser chemin
et se mettre
enfin à vivre.
Il faudrait ne compter sur rien d'autre
que la lumière
à claire-voie dans les arbres
et la musique silencieuse des flammes
dans l'âtre du crépuscule
pour en finir
avec les ombres qui cernent
notre regard
et ces mots de trop
qu'un peu de vie et de mort
mettent à la page.
Bruyères et feuillages
nous confortent
dans ce que nous n'osons
nous avouer
car l'inquiétude nous égare
au point de nous faire oublier
que mourir n'est pas mourir
mais juste aller
à jour passant.
Être digne de son enfance
Être digne de son enfance
ne se paie pas de mots
mais de présence
à ce qui meurt en nous
cette part d’inconnu
dont nous ne savons rien
mais qui comme les choses inutiles
aux yeux du monde
nous ramène sans cesse
à bon port.