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4,33

sur 2285 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Une belle (re)découverte.

Publié en 1972, Malevil est un roman post-apocalyptique réunissant toute les notions abordées généralement dans le genre.

"Le jour de l'événement", Pâques 1977. Nul ne sait pourquoi, un cataclysme nucléaire ravage la terre entière. L'électricité cesse de fonctionner et un fracas, vacarme, roulement de tonnerre, sirènes hurleuses, locomotives folles retentit. S'ensuit une élévation de la température digne des portes de l'enfer. La terre est morte, l'humanité est occise. Non, sur les 412 habitants de Malevil, bourgade de campagne française, que compte les 4 milliard d'habitants de la terre, une poignée a réussi à survivre. Et autour d'Emmanuel Comte et quelques amis, la survie s'organise, avec pour base ce château moyenâgeux dont ils occupaient la cave lors des faits. Et ils auront fort à faire, non pas pour reconstruire, mais déjà pour survivre...

Ce roman est un récit, celui d'Emmanuel, annoté de quelques chapitres de Thomas, le rendant ainsi plus réaliste et crédible. Il aborde tous les thèmes chers à la littérature post-apocalyptique. La survie à court terme, à long terme, le partage du reste des ressources, la défense contre les "autres" la politique la religion... On aura une vision particulièrement machiste de la condition féminine, les femmes étant soit vieilles et destinées aux corvées ménagères soit aguicheuses et "dévouées" à tout le monde, soit souffreteuses.
Le roman est moins complexe et moins "difficile" à lire que je ne le redoutais, sans doute influencé par les diverses critiques lues ça et là. Il est bien écrit, mais fait très "Français", voire campagnard (à grand renfort de "La menou" "La falvine" et "La noiraude"). D'un autre côté nous y sommes à la campagne, profonde, caricaturale, avec du consanguin (une certaine vision en 1972 ?). On est loin des romans post-apocalyptiques américains avec des survivalistes armés jusqu'aux dents qui feraient fuir une bande de zombies clopin-clopant.
Il y a des longueurs, et notamment une très longue introduction, qui permet certes, d'éclairer la psychologie du personnage principal (son rapport à la religion notamment), mais qui retarde beaucoup trop l'entrée dans le vif du sujet. Parfois trop de détails peuvent nuire à la fluidité du récit.
Cette religion, notamment, dont on verra la force et la puissance manipulatrice notamment grâce au machiavélique Fulbert.
Une vision très locale, on ne sait rien du reste du monde, avec des problèmes logistiques et des combats très locaux eux-aussi.

Bref, sans être un chef d'oeuvre ou un précurseur du genre, Malevil reste un roman post-apocalyptique franco-français agréable à lire et qui mérite d'être (re)découvert.
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D'abord je voudrais dire que ce roman est aussi un film éponyme qui est une des plus grandes réussites du cinéma de science-fiction français et qui est aussi un incontournable absolu pour les amateurs du genre .

C'est un texte aussi puissant que Ravage de Barjavel , le style est excellent et la caractérisation est très soignée .
Un château , un terroir bien représentatif de cette délicieuse et évanouie France rurale qui vit au gré des saisons .
Lors d'une dégustation de vin, dans la cave , un éclair indescriptible se produit .
Les personnages émergent de cette cave pour arpenter un monde définitivement ravagé ..
La survie s'organise autour de ce terroir et la nature humaine se déchaîne dans ce qu'elle a de pire et de meilleur .

C'est le thème de ce roman soigné ,découvrir ce qui permet à l'homme de triompher de ses mauvais penchants pour parvenir à vivre , à construire et à créer en société mutuellement profitable .
Dans ce roman c'est avec déchirement que la civilisation fait un fameux bon en arrière et c'est avec un volontarisme raisonné que la survie s'organise autour de réalités très pragmatiques , alors que L Histoire ( avec un grand H ) recommence et continue , laborieusement et de façons éternelles .

Un must
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Ah la la... J'aimerais tellement n'avoir à dire que du bien d'un roman de Robert Merle. Son écriture, son érudition, sa précision dans la narration, le charme qui se dégage de sa plume, le confort de lecture qu'il offre à ses lecteurs, tout concoure à faire de lui l'un de mes auteurs favoris. Il m'a fait rêver avec son « Idole », il m'a subjuguée avec sa « Fortune de France » et il m'a tétanisée avec son mémorable « la Mort est mon métier »...

Malevil est un roman post-apocalyptique dont Robert Merle situe l'action en France. Nous sommes dans les années 70, à cette période complexe où le monde connaît des difficultés économiques et politiques avec le premier choc pétrolier et la Guerre Froide, entre autres, et où, en France, s'essoufflent les Trente Glorieuses ; à cette période où le Mur est encore solidement debout et où l'on craint à chaque instant que Russes et Américains ne pressent le bouton rouge... Au fil des 630 pages de la collection Folio, Robert Merle m'a déroutée, m'a fascinée mais m'a également irritée. Question d'honnêteté intellectuelle, je dois bien l'admettre, je n'ai pas été totalement séduite par un roman dont j'attendais beaucoup, peut-être trop.

Je ne révélerai rien de la trame du roman en disant qu'une bombe atomique a rayé de la surface de la Terre tout ce qui vivait, humains, animaux et végétaux, c'est écrit en 4ème de couverture. Qui, des Russes ou des Américains a pressé le bouton rouge ? Bien malin celui qui désormais peut le savoir, plus personne ne vit pour en témoigner. Plus personne ? Un groupe d'irréductibles périgourdins, occupés à mettre en bouteille le vin en fût dans une cave médiévale, a pourtant survécu... Situation qui engendre autant d'optimisme que de pessimisme car, dans un monde où plus rien ne subsiste et où la seule femelle survivante compte 75 printemps, comment envisager de transformer la survie en existence ?

***ALERT SPOILER***

Le roman est très dense, vraiment très dense et, globalement, sa lecture m'a plutôt satisfaite.

L'histoire est bien construite, l'auteur nous plonge dans le quotidien et les intérêts personnels des protagonistes, des gens qui vivent à la campagne, dans une bourgade rurale du Périgord où chacun se connaît, s'apprécie ou se déteste selon ses liens avec ses voisins, concitoyens, parents, etc. A proximité de ce village se dresse la fière silhouette pleine de noblesse de Malevil, un château fort en ruines qu'Emmanuel, le héros, va acheter et restaurer. La vie est paisible, dans l'ensemble, pour la petite communauté villageoise, entre élections municipales qui se préparent, élevage des chevaux, artisans au travail, accidents de la vie courante, etc. Evidemment, aucun des habitants ne se doute qu'il vit ses derniers instants et que d'ici peu, la folie humaine va déclencher un cataclysme nucléaire et anéantir toute trace de vie dans ce joli coin de Dordogne.

L'histoire a vraiment de quoi séduire. Nous sommes très en amont de romans de type « La Route » de Cormac McCarthy et pourtant le thème est similaire. Fermez les yeux et imaginez une seconde que vous vous retrouviez seul survivant sur une terre qui ne compte plus un brin d'herbe, avec au-dessus de la tête un ciel où pas un seul oiseau ne vole et sous les pieds un sol stérile qui ne vous offre aucune chance de survie. C'est une pensée terrifiante, pas de nourriture, pas d'espoir, pas d'avenir, aucun sens à donner à votre existence, vous avez tout perdu.

J'étais vraiment très attirée par ce thème et j'ai vraiment apprécié le traitement qu'en fait Robert Merle, mettant au coeur des préoccupations de la poignée de survivants ayant échappé à la mort, avec Emmanuel à leur tête, le pouvoir, la sécurité et la spiritualité. La subsistance n'est pas tout, une fois les réserves de nourriture recensées, il faut penser à s'organiser, se structurer pour tenir sur le long terme. L'organisation sociale des survivants de Malevil devient pour le lecteur le fil ténu qui les lie à la civilisation et chaque fibre de son attention vibre au gré de leurs aventures, découvertes et déconvenues... On s'attache à chacun des personnages, ils deviennent familiers, ils sont précieux, ils sont les derniers êtres humains !

Ce que j'ai moins aimé et ce qui, par conséquent, mitige mon opinion finale, ce sont tout d'abord les longueurs, bien réelles, de la narration. Vraiment, l'auteur s'est fait plaisir, il a dû beaucoup travailler autour de la psychologie de ses personnages et de ce fait, il n'épargne à son lecteur aucun cheminement, aucune justification, aucune explication avant de poser les actes de ses protagonistes ; cela alourdit l'action qu'on aurait imaginée plus fulgurante, plus chirurgicale voire plus violente.

C'est Emmanuel qui raconte les évènements et son récit est à peine entrecoupé des notes de Thomas, un autre survivant, qui, tels des points d'orgue, viennent apporter une justification supplémentaire à ses actes. Emmanuel, propriétaire de Malevil et doté d'un ego plutôt solide, va assez naturellement prendre les rênes du pouvoir et occuper au fil des chapitres toutes les fonctions : exécutive et spirituelle. Cet état des choses ne m'a pas toujours semblé aller de soi. le pompon est atteint avec le pouvoir de séduction d'Emmanuel qui ira jusqu'au culte de la personnalité, voire la déification. Too much.

Les survivants de Malevil sont bien des survivants mais ils ne sont pas si démunis que cela. Avec une logique souvent dissonante, l'auteur a veillé à ce qu'ils ne manquent pas complètement du nécessaire et disons que les murs de Malevil renferment un kit complet et quasi prêt à l'emploi de tout ce qu'il faut pour faire renaître de ses cendres une civilisation en péril. Des bougies (qui n'ont pas fondu malgré la brusque nappe de chaleur de l'explosion qui a tout détruit sur son passage), au foin heureusement remisé avec quelques animaux dans une cavité du roc, en passant par le papier qui permet à Emmanuel d'écrire son récit, au final, les fournitures dont ils disposent sont légion et là encore, méchante fille que je suis, j'aurais préféré les imaginer dans un dénuement véritablement apocalyptique...

Enfin, (et je m'arrêterai là car je ne voudrais pas vous détourner de ce roman qui reste une bonne dystopie à découvrir pour les amateurs du genre et également pour les adeptes de l'auteur) il faut quand même que je dise un mot sur la place des femmes dans le récit. Vous pourrez difficilement trouver moins féministe que moi et pourtant, j'ai tiqué à la lecture de Malevil sur les rôles dévolus à ses héroïnes. Soit vieilles et bonnes à faire la vaisselle, s'assujettissant d'elles-mêmes dans une dévotion muette et résignée envers la gent mâle. Soit jeunes et ayant difficilement droit à la parole pour exprimer idées et opinions. Aucune ne m'a paru bien crédible dans son comportement et dans ses choix.

Robert Merle a donc choisi de faire de Malevil un roman viril, il l'est sans conteste mais, en pareilles circonstances, on ne saurait nier que la femme est plus que jamais l'avenir de l'Homme. Cela méritait, à mon sens, un peu plus de considération.
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Roman écrit en 1972, mais l scénario pourrait être d'actualité.
Destruction de notre monde. Quelques survivants, reconstruction d'une communauté, des liens sociaux, etc...
Sauf qu'aujourd'hui, si une telle catastrophe se produisait, je suis persuadée que les survivants s'en sortiraient beaucoup moins bien que les protagonistes du livre de Robert Merle. L'homme actuel est tellement dépendant des technologies et si peu autonome que sa disparition serait certaineemnt accélérée.
Ici, Robert Merle expose l'homme comme un survivant qui tente de reconstituer à tout prix une communauté solide, avec pour objectif la reproduction de l'espère humaine. L'homme en lui-même, malgré la catastrophe, reste avec ses besoins de liens sociaux, amis aussi avec toutes ses caractéristiques de maîtriser les autres, de corrompre, de tirer la couverture à lui. Une belle critique de l'humanité d'hier et d'aujourd'hui.
Je pense que ce roman écrit aujourd'hui aurait été moins positif, plus dur envers l'espère humaine.
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Malevil, un château-fort du XIIIe siècle construit à flanc de falaise que le jeune Emmanuel et ses amis du Cercle connaissent bien, un terrain de jeu immense pour ces enfants de Malejac.
Et quelques années plus tard, le même Emmanuel devient propriétaire des lieux, le restaure et y installe l'élevage de chevaux hérité de son oncle. Toujours aussi proche de ses amis d'enfance, ils envisagent même de présenter une liste commune aux prochaines élections municipales de leur village. Ils se retrouvent donc tous dans la cave du château pour mettre le vin en bouteilles tout en discutant de leur projet...quand tout d'un coup, la fraîcheur des lieux devient d'une chaleur étouffante, leurs corps brûlants et lourds, leurs esprits brouillés et confus… L'apocalypse a tout dévasté.
Tout a disparu ou presque. Leur village, leurs cultures, leurs élevages, leurs maisons, leurs proches. Malgré leurs peines et leurs désespoirs, il leur faut survivre, coûte que coûte.

Superbe roman post-apocalyptique, écrit sous la forme d'un journal, il est l'occasion d'aborder pour Robert Merle les thèmes concomitants de la destruction et de la reconstruction, ou comment recréer une communauté, aussi modeste soit-elle, en tenant mémoire du passé ?
En effet, une fois les nécessités de premier niveau assurées, une fois aptes à se nourrir et à se loger, comment s'organiser pour le vivre-ensemble au quotidien ? Il faut alors instaurer de nouvelles règles, tout en respectant les besoins de chacun ; et ils sont pléthores : politique, religieux, affectif, familiaux... Il faut enfin se protéger des attaques extérieures, s'organiser, se discipliner, car l'homme reste un loup pour l'homme, surtout dans les moments de crise.

Même s'il reste marqué par les préoccupations des années 70 au cours desquelles le livre a été écrit, ce roman n'en reste pas moins d'une grande universalité et d'un oeil particulièrement critique d'un point de vue sociétal, psychologique, voire politique. Une vraie réflexion y est menée sur les méfaits de la société de consommation et du progrès, impactant notamment les rapports humains, problématique on ne peut plus contemporaine et d'actualité. Dans un enchaînement logique se pose la question du temps et de sa gestion, de l' ancrage contraint dans le moment présent qui rabat les cartes du relationnel avec autrui mais aussi avec soi.

Si l'amitié est au coeur du roman et le moteur de ce groupe de rescapés pour la survie, d'autres relations s'instaurent : de domination, de lutte, d'amour aussi. Quelle est d'ailleurs la place des femmes dans cette nouvelle société ? C'est pour moi là le seul bémol de cette lecture : le pouvoir demeure aux mains des hommes et ne restent aux femmes que les tâches ménagères. Pire encore, elles deviennent les mères potentielles pour assurer la survie de l'espèce ; dans leur grandeur d'âme, ces messieurs les absolvent de toute velléité de monogamie pour promouvoir la polygamie sous prétexte de rendre les femmes libres de leur corps...

Malevil est une très belle oeuvre romanesque, à l'écriture fine et élégante, qui tient son lecteur en haleine jusqu'aux dernières lignes du final. Avec des personnages forts, charismatiques, tel Emmanuel le maître des lieux, sans pour autant être de supers héros ou héroïnes, Robert Merle nous emporte dans une intrigue prenante, au rythme savamment dosé.
Pour les fans du genre, un incontournable.
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Je suis heureuse d'avoir découvert Robert Merle avec ce gros livre époustouflant qui joue avec le thème de la bombe atomique.

Le Jour de l'événement, un groupe d'amis ont eu la chance de se trouver réunis dans la cave du château de Malevil, pour mettre en bouteille le vin d'Emmanuel, le châtelain. Les grosses pierres du château les ont ainsi protégés des rayons, et aujourd'hui, ils ont la vie sauve. Ce sont les derniers survivants d'un monde exterminé.

Depuis ce jour, la communauté de Malevil a un peu changé. On ne connaîtra jamais les raisons de la bombe, mais ce n'est pas ça qui est le plus important dans ce livre. le plus important, c'est d'observer la façon dont subsiste ce groupe d'amis dans un monde appauvri, asséché, vidé de tout son fonctionnement, et de toute société. Avec juste quelques chevaux, vaches, cochons, et du blé. Sous l'impulsion de son chef Emmanuel, la petite communauté de Malevil oeuvre à sa propre survie.

J'ai aimé l'art du suspense assez présent, et les rebondissements qui nous étonnent, même dans ce petit monde que l'on sentait voué à peu de surprises.

La façon dont Emmanuel gère le groupe est sans cesse basée sur la continuation de l'espèce, et celle-ci ne tient pas toujours compte de l'avis des femmes en tant que sujet. Si j'avais pu éviter les passages concernant l'art de la guerre, je l'aurais fait, mais heureusement, ils restaient lisibles et ne parlaient que d'embuscades, ou des choses de ce genre.

Les personnages avaient une présence et une vie inouïe, car ils étaient contrastés. Lumière et ombre. C'est un livre qui se lit passionnément et qui ne se lâche pas, une belle aventure humaine qui m'a accompagnée pendant plusieurs semaines avec bonheur. Je lirai d'autres romans de Robert Merle pour son bel art de conteur et la tendresse et l'humour qui sont bien présents chez lui.
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Une bombe explose et ravage presque tout sur son passage. Parmi les survivants, Emmanuel, propriétaire du château restauré de Malevil, et quelques-uns de ses amis, Colin, Peyssou, Meysonnier, La Menou, Momo et Thomas. Protégés par l'épaisseur des murs de la cave où ils tiraient du vin, ils pensent pendant longtemps être les seuls rescapés du feu dévastateur et s'organisent sans trop savoir pourquoi. « La marche en avant des siècles s'est interrompue. Nous ne savons plus où nous en sommes et s'il y a encore un avenir. » (p. 4) L'habitude et la volonté de survivre prennent le dessus et la petite communauté s'accroche à chaque signe : le retour d'un oiseau, la pluie et le soleil après des mois de ciel gris, la découverte d'un cheval. « Si on est vivant, c'est pour continuer. La vie, c'est comme le travail. Mieux vaut aller jusqu'au bout que non, pas le laisser en plan quand ça devient difficile. » (p. 85) Nourrissant pendant un temps l'espoir que d'autres personnes aient survécu, la communauté de Malevil en vient à le redouter quand le château fait l'objet d'attaques. « Malevil a été conçu comme une place forte inexpugnable où une poignée d'hommes en armes pouvait tenir en respect un grand pays. Rien de courbe, rien d'élégant. Tout est utile. » (p. 31)

Ce roman post-apocalyptique aux allures très nettes de robinsonnade a plutôt bien enduré le passage du temps, si ce n'est la langue qui accuse un sérieux coup de vieux par moment, avec des régionalismes et des tournures de phrases très désuètes. Je retiens surtout la réflexion qui entoure le mariage et la monogamie : ces institutions sont forcément remises en cause quand le nombre de femmes est inférieur à celui des hommes et que l'avenir de l'espèce est menacé. « L'homme est la seule espèce qui puisse concevoir l'idée de sa disparition et la seule que cette idée désespère. Quelle race étrange : si acharnée à se détruire et si acharnée à se conserver. [...] Comme quoi [...], ça suffit pas de survivre. Pour que ça t'intéresse, il faut aussi que ça continue après toi. » (p. 113) Et tout au long de son texte, l'auteur propose une critique assez subtile de la religion et de ses dérives : face à un cataclysme, d'aucuns sont propices à se tourner vers une puissance supérieure et à se laisser abuser par de faux prêcheurs prêts à tout pour asseoir leur domination. Mais qui dit fin d'un monde dit naissance d'un nouveau, et il est justement possible de tout réinventer en se débarrassant des chaînes du passé.

Je vais chercher l'adaptation cinématographique de ce roman, en espérant qu'elle soit aussi plaisante que le texte.
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Bienvenue en Périgord - son terroir savoureux, ses petits villages pleins de charme... et ses châteaux. Malevil n'est pas le plus typique d'entre eux, construit il y a bien des siècles par des Anglais résolus à rester établis dans le pays, mais il est aussi solide qu'un roc, bien à l'abri de sa falaise, un abri parfait pour défier le passage du temps et des guerres.
Un petit groupe de compagnons est en train de mettre du vin en bouteille dans l'antique cave voûtée du domaine lorsque le cataclysme s'abat. Guerre atomique totale, imprévue, dont on ignore l'origine mais qui en quelques secondes anéantit toute vie à la surface du monde.
Une fois passés les premiers moments de stupeur et de désolation, il faut s'organiser pour survivre. Après tout, l'essentiel est à portée de main : un refuge sûr, des réserves de nourriture, de grain et de matériaux de première nécessité, quelques bêtes et un chef résolu à faire surmonter à ses amis le deuil de leurs familles. Mais survivre pour quoi, si l'unique femme qui reste est trop vieille pour se reproduire ? Si la première pluie peut être radioactive, et apporter la mort plus sûrement que la vie ? Si personne d'autre n'a survécu ?

A ce roman, les esprits chagrins pourraient reprocher une certaine facilité : un peu trop miraculeusement, tout est réuni dans ce vaisseau de pierre pour que la vie y reprenne. Ressources et compétences, puisque les survivants sont paysans, artisans, avec un scientifique en prime - et non un ramassis de citadins manchots qui passerait bien vite l'arme à gauche faute de savoir se débrouiller.
Toutefois, l'intention de l'auteur est moins le réalisme de la situation de base - encore qu'il sache la rendre tout à fait crédible - que ses implications, ses conséquences : comment la vie va pouvoir reprendre à partir de ce petit concentré d'humanité, dans un monde où la destruction implique aussi le renouveau.
Adaptation sociale, adaptation psychologique et même affective à ce nouvel état de survie : cette histoire est pleine de questions intéressantes - mais aussi de rebondissements, de suspense et d'émotion, avec de beaux personnages et un amour de la vie qui affleure à chaque page. Tout ceci forme un très beau roman, qui se dévore d'un bout à l'autre avec autant de plaisir que de curiosité.
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Dans Malevil, Emmanuel nous narre son épopée. Celle d'un groupe d'amis d'enfance (et de quelques "pièces rapportées") ayant miraculeusement survécu à ce qui semble être une apocalypse nucléaire. Confinés lors de la catastrophe dans les caves d'un château périgourdin, la petite bande va devoir survivre dans un paysage dévasté où rien ne semble avoir survécu pas même un brin d'herbe.

Emmanuel, leader naturel, prend les rênes et à travers ses yeux nous serons plongés dans les dilemmes qu'exige une telle situation, mais également dans une réflexion sur nos sociétés actuelles et ce qu'elles vampirisent en nous. Si le narrateur possède une assurance et une autorité naturelle doublées d'un excès de confiance manifeste et d'un fort penchant pour la manipulation qui peuvent être irritants, il compense par une volonté profonde d'oeuvrer pour le bien commun et de respecter les bases de la démocratie.

Son récit est épisodiquement entrecoupé de notes de Thomas, l'un de ses compagnons. Il apporte une vraie valeur ajoutée à la narration, d'une part en rétablissant certaines vérités et comblant certaines omissions, mais aussi en étoffant par cela le personnage d'Emmanuel qui perd un peu de la magnificence teintée de fausse modestie qu'il aime arborer si coquettement.

S'il se porte en partie sur la gestion des ressources et des maintes péripéties qui parsèment ce livre, Malevil est surtout et avant tout une réflexion fine sur l'humanité, son instinct grégaire et ses conséquences, les diverses formes de pouvoirs, la constitution d'une société, son évolution et son rapport aux autres, sa morale, sa violence et leurs garde-fous. Si la catastrophe est un "reset" de l'humanité, cette dernière peut-elle survivre tout en tirant leçon de son Histoire et éviter de reproduire les mêmes erreurs?

J'ai trouvé ce roman passionnant et captivant, et je pense qu'il est incontestablement une pierre angulaire du genre. Cependant, je regrette quelques facilités scénaristiques, le manque désopilant de personnages féminins forts (il y a bien Judith, certes, mais si peu traitée), et cette fascination divinisée et à peine contrebalancée du personnage d'Emmanuel est quand même, je dois le dire, un peu déroutante.
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Je connaissais déjà bien cet auteur pour sa série de romans historiques. Ici, rien à voir. Nous sommes à la campagne et nous rencontrons Emmanuel Comte. Celui-ci va hériter du domaine de Malevil avant une catastrophe apocalyptique.

Le roman a une longue phase d'exposition qui permet de bien poser le cadre et l'ambiance, mais aussi les futurs membres de la communauté qui va se former.

Une fois le drame arrivé, nous assistons avec eux à la mise en place d'une vie communautaire. C'est intéressant de lire ce récit à une époque où le courant survivaliste a pris un peu d'essor et de découvrir leurs techniques pour vivre en autarcie.
Politique intérieure, et extérieure, amours, subsistance alimentaire et hygiénique, guerre: la vie menée est l'occasion d'aborder beaucoup de sujets.

J'ai eu plusieurs fois l'impression d'être dans une robinsonnade: une île dans laquelle des survivants s'organisent pour vivre et créer leur propre mode de fonctionnement.

J'ai vraiment beaucoup aimé, malgré quatre écueils à mon sens:
- la place des femmes
- le tout-pouvoir du maître des lieux qui devient un peu l'aristocrate de Malevil.
- la fin qui donne peu de perspectives. Je m'attendais à un épilogue peut-être plus loin dans le futur.
- le manque de curiosité des membres qui restent en vie sur la catastrophe en elle-même et la recherche d'autres survivants
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