Sur la terre condamnée…
Sur la terre condamnée
Cette petite fleur de rien ‒ si bleue
Était leur seul espoir – le ciel
Mais ils ne pouvaient la cueillir
(…)
Les bas adhèrent à la chair cloquée
Un sang inconnu arrive à nos chevilles ulcérées
Bleu maigre épuisé
Le ciel – appelons-le ainsi – nous ressemble
Détenu
Par des nuages gris-vert
Ce doigt bleu à vif
Ces autres bleus ces autres doigts
À qui appartiennent-ils
Maintenant le bleu occupe toutes les mains
Au secours
Même le désespoir appelle au secours
Mais lèvres bleuies ne parlent pas
Cet arbre on dirait un chêne
Cet oiseau
Le rouge-gorge qui sautillait sous la fenêtre de notre cuisine
TEMPS MOISI
Extrait 3
Camp de concentration du Struthof
mai 2011
pain mot moisi d’autrefois
inentamé
douche sans eau
aux pommes de sorcières
et tous ces mots dénaturés
dans quel corps inconnu de lui-même mourut
l’oncle à Dachau
même après sa disparition
il méritait de vieillir
*
sur le chevalet de la bastonnade
on l’embrasse cinquante fois
l’oncle des camps
AVANT D’ÉTEINDRE
Extrait 3
Après le drap
Celui qui terre touchera
Après l’effondrement des planches
Avant la mémoire cireuse
Parmi les ombres ouvrières de la mort
N’oublie pas de sauver la Reine
Celle qui ne t’a pas choisie
Dans son butin comme dépouille.
TEMPS MOISI
Extrait 2
Camp de concentration du Struthof
mai 2011
La lanterne des morts
elle aussi s’est éteinte
après que sa lumière fut
cendrée tirée d’enfer
pauvre utopie stérilisée
sans descendance
un reste d’eau des croûtes
ni debout ni assis
organes inutiles
sous la voûte du corps
*
TEMPS MOISI
Extrait 1
Camp de concentration du Struthof
mai 2011
sur leur terre condamnée
cette petite fleur de rien si bleue
était leur seul espoir de ciel
mais ils ne pouvaient la cueillir
*