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EAN : 9782825143186
111 pages
L'Age d'Homme (03/10/2013)
3.81/5   24 notes
Résumé :
« Le village, comme une teigne, avec ses maisons basses que mangent les vents, avec ses granges vides où l’on se pend, avec ses bêtes maigres, avec l’odeur du moisi qui rampe le long des ruelles, avec son auberge où l’on boit sa rage, sa haine, avec son clocher qui griffe la croûte grasse du ciel, et son cimetière, rectangle jaune et gris où reposent les os, avec ses chemins de poussière, ses sentiers de misère où poussent la ronce et l’ortie, et plus loin, l’usine,... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
L'histoire se passe dans un village,
« le village, comme une teigne, avec ses maisons basses que mangent les vents, avec ses granges vides où l'on se pend, avec ses bêtes maigres, avec l'odeur du moisi qui rampe le long des ruelles, avec son auberge où l'on boit sa rage, sa haine, avec son clocher qui griffe la croûte grasse du ciel, et son cimetière, rectangle jaune et gris où reposent les os, avec ses chemins de poussière, ses sentiers de misère où poussent la ronce et l'ortie, et plus loin, l'usine, de briques, de fer, de sueur, avec la peur de l'autre, l'étranger à qui l'on entrouvre la porte, une lame cachée dans le dos, et le diable qui rôde, la nuit, sur les toits, et les chapelets qui s'égrènent, au coin des poêles, on prie la Sainte Vierge car dehors, les ombres guettent, avec ses gens, usés, râpés, cassés, la figure creuse, la douleur muette, traînant derrière eux un siècle d'âmes vaines, et encore plus loin, tout autour, la plaine, à l'infini, comme les restes d'une promesse. »

Le village et l'usine où
« les hommes, verseurs de sueur, de larmes, de sang, errent comme des fantômes dans des brouillards jaunes, baissant la tête, courbant l'échine, ils toussent, ils crachent, ils étouffent, et pour paye : leur lente agonie. Et quand vient le soir, il s'en retournent au village, marée de têtes blêmes, traînant leur carcasse, et seul l'alcool bu à l'auberge donne la force sur les lèvres de crier la rage et de maudire le sort. »

Dans ce village, on va à l'église,
« on s'agenouille. Les yeux bouffis de ferveur, on prie Dieu, comme on passe commande, chez le marchand, on se relève, les genoux craquent, on s'assoit, on écoute le curé qui dira de bien belles choses, et puis on se relève à nouveau, on s'avance à petits pas, l'un derrière l'autre, les vieilles, avec leurs jambes maigres, avec leurs figures de poussière, suintant le drame jusque dans leur canne, tirent des langues blanchâtres à celui qui, miracle ! déjà pardonne la grimace, alors on s'en retourne chez soi, gavé de génuflexions, ivres de signes de croix, l'âme lisse et légère, délestée de la petite cloque du péché. »

Et quand vient l'étranger,
« il voit les femmes qui braillent devant les maisons, qui comme des chattes furieuses rassemblent autour de leurs robes rêches des essaims d'enfants sales, traîne-misère, filles et fils de la brume, qui de la vie ne connaissent que l'odeur de la crasse qui colle aux os et le goût du sang dans la bouche quand les gifles ivrognes tombent lourdes et font se fendre les lèvres. »

Dans ce village vivent Pierre, l'ouvrier, sa femme Césarine et la vieille, la mère de Pierre. Depuis quelques temps Pierre rentre tard ou découche. La faute à la garce. Après six ans de mariage, Pierre est allé voir ailleurs. La garce et son ventre « lisse comme un galet que le soleil aurait sucé ». « Pierre la boit : son odeur, son souffle, et lorsque de plaisir elle se cambre, ses soupirs ». Césarine sait mais se tait. La vieille sait aussi, forcément, comme tout le village d'ailleurs. Autour d'eux quatre, le drame va se nouer, inéluctable...

J'ai adoré ce texte âpre, sensuel, tout en poésie et en lyrisme contenu. On est chez « Ces gens-là » chantés par Brel, des petites gens taciturnes et miséreux, abrutis d'alcool et de travaux de forçats, méchants comme des teignes. Aucune lumière, point de ravissement naturaliste, seule la tragédie peut nouer des destins comme ceux-là. Et malgré sa noirceur, j'ai trouvé ce très court roman d'une beauté crépusculaire sidérante...
Lien : http://litterature-a-blog.bl..
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Au rythme des saisons, nous sommes les témoins de la vie d'un village et surtout d'une famille. Pierre et Césarine sont mari et femme. Ils vivent avec la "Vieille", la mère de Pierre. Rien ne va plus entre les deux époux depuis un drame. Pierre sort après le dîner pour aller retrouver "La Garce". La Vieille reproche à sa bru le fait de n'avoir rien fait pour le retenir et la rend responsable du drame qui a tout changé.


Ce court roman très noir nous parle de misère, de ces gens de peu qui triment jusqu'à la mort pour pouvoir subsister, qui n'ont que peu de plaisir, si ce n'est un verre au bistrot le soir en rentrant de l'usine ou des champs. Une misère qui s'insinue dans tous les aspects de la vie quelle soit professionnelle ou familiale . Une vie de labeur et de désespoir. Un désespoir si palpable qu'il est un personnage du roman.


"Avec sa voix de dément, ses muscles de fonte et de feu, avec ses cheminées comme des potences où viennent se pendre des ciels de suie, accrochée à la terre, l'oeil rouge, la gueule fumante, c'est l'usine comme une tombe où l'on s'exerce à l'enfer.

Les hommes, verseurs de sueur, de larmes, de sang errent comme des fantômes dans des brouillards jaunes, baissant la tête, courbant l'échine, ils toussent, ils crachent, ils étouffent, et pour paye, leur lente agonie."


Damien Murith nous livre avec La lune assassinée un roman très noir, désespéré, servi par une plume poétique trempée dans le sang de ces malheureux qu'il nous décrit! Une plume qui a la violence du désespoir. Un roman de toute beauté, envoûtant à lire absolument!!!
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Roman sec et sombre, tragédie taiseuse, malheur d'une crasse banale, destins brisés qui se frôlent mais ne se comprennent pas, La Lune assassinée tranche dans le vif. On est ici, dans un de nos villages, il n'y a pas si longtemps. Les hommes bossent, esclaves. Les femmes bossent encore plus, esclaves d'esclaves. L'amour pourrait libérer. Il enferme encore plus, quand surviennent les coups de poignard du destin. Il éloigne Césarine de Pierre, Roméo et Juliette divorcés et siamois. Il éveille le désir pour la Garce, personnage défouloir, corps d'après la brisure initiale et corps d'avant l'ultime brisure. En plus, il y a la Vieille, sordide parce que brisée elle aussi, présence qui enfonce le malheur dans une nuit plus profonde encore, sans lune, sans espoir d'une aube qui changerait tout. Et surtout, il y a eu l'enfant.
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Le premier roman de ce jeune auteur suisse romand.
Peu de mots par page, le lecteur doit donc composer avec les blancs du textes et de l'histoire et s'en faire sa propre interprétation...
Un monde dur sur fond de campagne, d'adultère et de deuil ...
Vite lu mais corsé!
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Je vais faire une chronique sur l'ensemble du triptyque, à savoir La Lune assassinée, Les Mille veuves et le Cri du diable.

Chaque livre peuvent se lire indépendamment et dans le désordre.
Chaque livre raconte la noirceur de l'esprit.
Chaque livre a une écriture minimaliste, où chaque mot n'est pas là par hasard, où chaque phrase est lourde de sens, où chaque page est un court chapitre.
Dans chaque livre le vide est très important, que ce soit graphiquement avec des pages qui semblent être vides de mots mais pas de caractère ; tant que dans le coeur des personnages, un vide à remplir ou un coeur vidé, de sentiments, d'émotions, de sens ou de sang.
Dans chaque livre, la poésie se fait histoire et l'histoire est poétique.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Devant le miroir, Césarine coiffe ses cheveux, hésite, puis ose : met du pourpre sur ses lèvres.
Elle regarde son reflet, elle voit sa peau blanche, ses lèvres maintenant rouges, et son visage, comme un hiver blessé.
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Elles sont assises à la table.
Leurs yeux sont pleins de silence.
Dehors, les arbres sont blancs de givre, et le ciel les suce.
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La nuit déroule un ciel d’étoiles. Arrive la lune, elle est blanche, elle est ronde, et sa courbe est celle d’un sein.
Pierre dit : « je sors »
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Tout à l'heure, il se lèvera et dira : "Je sors", et s'en ira.

La canicule est une pieuvre; ses tentacules immenses ont mis la plaine en cage.

… et si leurs se voûtent, ce n'est que pour voir de plus près la terre qui délivre.

Césarine prie, mais Dieu n'existe pas.
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La nuit est sans lune.
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