- Il était une fois, une petite maison. Ses murs étaient de briques et...
- de briques ? Pas de chair ni de métal ?
- Pas de chair, ni de métal, ni de câble. Juste de la brique.
- Est-ce qu'elle avait des entrailles ?
- Elle n'avait rien d'organique, mais elle était le coeur du monde.''
Ainsi pourrait-on raconter l'histoire de ''Abara'', citée de chair et de métal, fouillis de morts qui s'ignorent, agitation des espoirs en décomposition. Ils ont essayé, ils ne savaient pas que c'était impossible, et ils ont fait pire encore. Avec
Tsutomu Nihei, l'humanité n'a même plus ses yeux pour pleurer. Mais qu'est-ce que l'humanité au juste ?
Si elle est chair, elle sera un Cénobite de
Clive Barker.
Si elle est entrailles, elle sera un cauchemar de Zdzisław Beksiński.
Si elle est horreur, elle sera animée par
Hans Ruedi Giger.
Bienvenue dans la ''Dark City'' revisitée par
Nihei, synthonisons tous, mon frères. Vivons et crevons dans un cycle infernal, parce que l'enfer n'existe que dans notre monde. Tout se mêle et s'entremêle, les dessins ne se comprennent pas, ils se vivent, ils se souffrent, ils coupent le souffle afin que cette ville dantesque asphyxie mieux ses victimes.
Dans le digne sillage de ''BLAME!'' et ''
NOiSE'',
Nihei nous emporte encore une fois dans l'une de ces cités où le métal se décompose main dans la main avec la chair, les colonnes vertébrales soutiennent les murs, les côtes les détruisent. Il y a, dans ces trois oeuvres, une indescriptible poésie de l'horreur et du désespoir, une vision créatrice presque folle, une dernière goulée d'air avant de voir notre tête être enfouie de force en-dessous de... mais en-dessous de quoi ?
Rien ne s'explique, tout se vie et se ressent. C'est là la grande force de
Nihei, que de savoir donner naissance aux citées mortes-vivantes qui n'ont même plus conscience d'elles-mêmes.