En Arrée

Je fais confiance au vieux Jim Harrison : "le monde naturel peut vous débarrasser de vos poisons (...) Pendant des heures d'affilée, le monde immédiat efface toute conscience de soi. Vous êtes plus intensément le mammifère sous l'habit de la culture, derrière la civilisation." Au fil des pas, les dominantes vertes s'éclaircissent et cèdent devant l'ocre et le jaune paille. Le réel ondule. Les frontières flottent. Les contes, les légendes, les mythes, les rumeurs patrouillent dans l'air saturé d'humidité. Ce sont les douaniers du Yeun. Ils nous passent les menottes de l'angoisse. Nous titillent les nerfs. Nous ramènent au temps et à l'histoire pour nous plonger dans le bouillon des au-delàs. C'est un lieu d'ombres et de faux-semblants où les anges, le diable, l'Ankou s'astiquent les cotes et combattent de façon implacable. Je perçois le cliquetis des règlements de compte et la rumeur des batailles, j'entends les palpitations d'une nature qui peine à trouver la paix, la ronde bruyante des tourments et des remords, le dernier sursaut des âmes chagrines.